Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 juin 2022, 20-22.160, Publié au bulletin

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Aux termes de l’article L. 511-5 du code monétaire et financier, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013, il est interdit à toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer des opérations de banque à titre habituel. Le seul fait qu’une opération de crédit ait été conclue en méconnaissance de cette interdiction n’est pas de nature à en entraîner l’annulation

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Jérôme Lasserre-capdeville · Lexbase · 1er février 2023
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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 15 juin 2022, n° 20-22.160, Publié au bulletin
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 20-22160
Importance : Publié au bulletin
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 15 novembre 2020, N° 19/12359
Précédents jurisprudentiels : Com. 7 juin 2005, pourvoi n° 04-13.303, Bull. 2005, IV, n° 125 (cassation partielle).
Com. 7 juin 2005, pourvoi n° 04-13.303, Bull. 2005, IV, n° 125 (cassation partielle).
Textes appliqués :
Article L. 511-5 du code monétaire et financier, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013.
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 15 juin 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000045940026
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2022:CO00399
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

COMM.

DB

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 15 juin 2022

Cassation

M. MOLLARD, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 399 F-B

Pourvoi n° A 20-22.160

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 15 JUIN 2022

La société Fuchs lubrifiant France, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 20-22.160 contre l’arrêt rendu le 16 novembre 2020 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige l’opposant :

1°/ à M. [O] [M], domicilié [Adresse 3],

2°/ à Mme [K] [Y], épouse [M], domiciliée [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Blanc, conseiller référendaire, les observations de la SARL Le Prado – Gilbert, avocat de la société Fuchs lubrifiant France, après débats en l’audience publique du 20 avril 2022 où étaient présents M. Mollard, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Blanc, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 16 novembre 2020), aux termes d’un contrat conclu 19 novembre 2012 avec la société Fuchs lubrifiant France (la société Fuchs), la société Back to Bike s’est engagée à acheter chaque année, pendant cinq ans, une certaine quantité de lubrifiants lui ouvrant droit à des remises, la société Fuchs lui consentant une avance sur celles-ci d’un montant de 30 000 euros, amortissable en cinq annuités de 6 833 euros chacune.

2. Le même jour, M. et Mme [M] se sont rendus cautions solidaires des engagements de la société Back to Bike envers la société Fuchs.

3. La société Back to Bike ayant été mise en liquidation judiciaire le 11 septembre 2017, la société Fuchs a assigné les cautions en paiement de la somme restant due au titre de l’avance sur remises .

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La société Fuchs fait grief à l’arrêt d’annuler le volet relatif au prêt du contrat passé le 19 novembre 2012 avec la société Back to Bike et de rejeter l’ensemble de ses demandes, alors « que s’il est interdit à toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer des opérations de banque à titre habituel, cette interdiction ne fait pas obstacle à ce qu’une entreprise, quelle que soit sa nature, puisse dans l’exercice de son activité professionnelle consentir à ses contractants des délais ou avances de paiement, et réalise une opération de crédit dès lors que celle-ci n’est pas une opération purement financière mais constitue le complément indissociable d’un contrat d’approvisionnement exclusif entrant dans le champ de son activité habituelle ; qu’en prononçant la nullité du volet relatif au prêt du contrat passé le 19 novembre 2012 avec la société Back to Bike, et en déboutant la société Fuchs de l’ensemble de ses demandes dirigées contre les cautions, tout en constatant que le prêt de 30 000 euros était consenti dans le cadre d’un contrat de fourniture de lubrifiants, avec un objectif annuel, prévoyant une remise de 50 % sur le chiffre d’affaires, et stipulant une « avance sur remises » de 30 000 euros, amortissable par la société Back to Bike en cinq annuités de 6 833 euros, la cour d’appel a violé les articles L. 511-5, du code monétaire et financier, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013, et L. 511-7, I, 1, du même code. »

Réponse de la Cour

5. L’arrêt retient d’abord qu’aux termes du contrat du 19 novembre 2012, la société Fuchs a consenti à la société Back to Bike un prêt d’un montant de 30 000 euros remboursable en cinq annuités comprenant des intérêts. Il retient ensuite que cette opération de crédit, au sens de l’article L. 311-1 du code monétaire et financier, ne correspond pas aux exceptions prévues par l’article L. 511-7, I, 1, du même code, dès lors qu’elle ne consiste ni en l’octroi de délais de paiement ni en la perception d’avances de paiement. Il retient enfin que la société Fuchs a précisé pratiquer habituellement ce type de prêts auprès de sa clientèle.

6. De ces constatations et appréciations, la cour d’appel a exactement déduit que, ce faisant, la société Fuchs a conclu avec la société Back to Bike une opération de crédit, au sens de l’article L. 313-1 du code monétaire et financier, en méconnaissance de l’interdiction édictée par l’article L. 511-5 de ce code, peu important que cette opération ait constitué, dans l’esprit des parties, un complément indissociable de l’engagement d’approvisionnement exclusif souscrit par la société Back to Bike envers la société Fuchs.

7. Le moyen n’est donc pas fondé.

Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

8. La société Fuchs fait le même grief à l’arrêt, alors « que la caution qui conteste la validité de l’obligation principale en se prévalant d’une exception inhérente à la dette, doit mettre en cause le débiteur principal ou son liquidateur ; qu’en prononçant la nullité du volet relatif au prêt du contrat passé le 19 novembre 2012 avec la société Back to Bike et en déboutant la société Fuchs de l’ensemble de ses demandes dirigées contre les cautions, par une décision rendue entre ces seules parties, en l’absence de mise en cause du liquidateur de la société Back to Bike, la cour d’appel a violé l’article 14 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 14 du code de procédure civile :

9. Aux termes de ce texte, nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée.

10. L’arrêt prononce l’annulation du volet relatif au prêt du contrat conclu le 19 novembre 2012 entre la société Back to Bike et la société Fuchs et, en conséquence, rejette l’ensemble des demandes de cette dernière.

11. En statuant ainsi, sans qu’ait été appelé à l’instance le liquidateur de la société Back to Bike, la cour d’appel a violé le texte susvisé.

Et sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

12. La société Fuchs fait le même grief à l’arrêt, alors « que, sanctionnée pénalement et sur le plan disciplinaire, la seule méconnaissance des dispositions de l’article L. 511-5 du code monétaire financier n’est pas de nature à entraîner la nullité des contrats conclus ; qu’en se fondant, pour prononcer la nullité du volet relatif au prêt du contrat passé le 19 novembre 2012 avec la société Back to Bike et débouter la société Fuchs de l’ensemble de ses demandes dirigées contre les cautions, sur l’interdiction pour toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer des opérations de banque à titre habituel, la cour d’appel a violé l’article L. 511-5 du code monétaire et financier. »

Réponse de la Cour

Vu l’article L. 511-5 du code monétaire et financier, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013 :

13. Aux termes de ce texte, il est interdit à toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer des opérations de banque à titre habituel. Le seul fait qu’une opération de crédit ait été conclue en méconnaissance de cette interdiction n’est pas de nature à en entraîner l’annulation.

14. Pour prononcer l’annulation du volet relatif au prêt du contrat du 19 novembre 2012, l’arrêt retient que ces stipulations constituent une opération de crédit et que la société Fuchs a précisé pratiquer habituellement ce type d’opérations auprès de sa clientèle, cependant qu’en application de l’article L. 511-5 du code monétaire et financier, seuls les établissements de crédit sont autorisés à effectuer de telles opérations à titre habituel.

15. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 16 novembre 2020, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. et Mme [M] aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Fuchs lubrifiant France ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SARL Le Prado – Gilbert, avocat aux Conseils, pour la société Fuchs lubrifiant France.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué :

D’AVOIR prononcé la nullité du volet relatif au prêt du contrat passé le 19 novembre 2012 avec la société Back to Bike, et D’AVOIR débouté la société Fuchs Lubrifiants France de l’ensemble de ses demandes,

ALORS QUE la caution qui a laissé l’admission de la créance à l’encontre du débiteur principal en liquidation judiciaire devenir irrévocable ne peut invoquer de cause de nullité antérieure à cette décision d’admission ; qu’en prononçant la nullité du volet relatif au prêt du contrat passé le 19 novembre 2012 avec la société Back to Bike, et en déboutant la société Fuchs Lubrifiants France de l’ensemble de ses demandes dirigées contre les cautions, tout en constatant que la créance d’un montant de 16 203,60 euros de la société Fuchs avait été régulièrement produite à titre chirographaire le 14 septembre 2017 et inscrite au passif de la société Back to Bike, et sans s’expliquer sur l’absence de toute contestation de la créance dans le cadre de la procédure collective, pourtant invoquée par la société Fuchs Lubrifiants France, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 624-3-1 et R. 624-8 du code de commerce ;

ALORS QUE la caution qui conteste la validité de l’obligation principale en se prévalant d’une exception inhérente à la dette, doit mettre en cause le débiteur principal ou son liquidateur ; qu’en prononçant la nullité du volet relatif au prêt du contrat passé le 19 novembre 2012 avec la société Back to Bike, et en déboutant la société Fuchs Lubrifiants France de l’ensemble de ses demandes dirigées contre les cautions, par une décision rendue entre ces seules parties, en l’absence de mise en cause du liquidateur de la société Back to bike, la cour d’appel a violé l’article 14 du code de procédure civile.

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué :

D’AVOIR prononcé la nullité du volet relatif au prêt du contrat passé le 19 novembre 2012 avec la société Back to Bike, et D’AVOIR débouté la société Fuchs Lubrifiants France de l’ensemble de ses demandes,

ALORS QUE s’il est interdit à toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer des opérations de banque à titre habituel, cette interdiction ne fait pas obstacle à ce qu’une entreprise, quelle que soit sa nature, puisse dans l’exercice de son activité professionnelle consentir à ses contractants des délais ou avances de paiement, et réalise une opération de crédit dès lors que celle-ci n’est pas une opération purement financière mais constitue le complément indissociable d’un contrat d’approvisionnement exclusif entrant dans le champ de son activité habituelle ; qu’en prononçant la nullité du volet relatif au prêt du contrat passé le 19 novembre 2012 avec la société Back to Bike, et en déboutant la société Fuchs Lubrifiants France de l’ensemble de ses demandes dirigées contre les cautions, tout en constatant que le prêt de 30 000 euros était consenti dans le cadre d’un contrat de fourniture de lubrifiants, avec un objectif annuel, prévoyant une remise de 50 % sur le chiffre d’affaires, et stipulant une « avance sur remises » de 30 000 euros, amortissable par la société Back to Bike en cinq annuités de 6 833 euros, la cour d’appel a violé les articles L.511-5, du code monétaire et financier, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013, et L. 511-7, I, 1° du même code ;

ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE sanctionnée pénalement et sur le plan disciplinaire, la seule méconnaissance des dispositions de l’article L. 511-5 du code monétaire financier n’est pas de nature à entraîner la nullité des contrats conclus ; qu’en se fondant, pour prononcer la nullité du volet relatif au prêt du contrat passé le 19 novembre 2012 avec la société Back to Bike, débouter la société Fuchs Lubrifiants France de l’ensemble de ses demandes dirigées contre les cautions, sur l’interdiction pour toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer des opérations de banque à titre habituel, la cour d’appel a violé en toute hypothèse l’article L. 511-5 du code monétaire et financier ;

ALORS, ENCORE PLUS SUBSIDIAIREMENT, QUE les dispositions interdisant à toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer à titre habituel des opérations de banque à titre habituel, définies comme tout acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la disposition d’une autre personne ou prend, dans l’intérêt de celle-ci, un engagement par signature tel qu’un aval, un cautionnement, ou une garantie, si elles interdisent la stipulation d’intérêts, ne font pas obstacle à la demande de remboursement du capital prêté ; qu’en se fondant sur ces dispositions pour prononcer la nullité du volet relatif au prêt du contrat passé le 19 novembre 2012 avec la société Back to Bike, débouter la société Fuchs Lubrifiants France de l’ensemble de ses demandes dirigées contre les cautions, la cour d’appel a, quoi qu’il en soit, violé les articles L. 313-1 et L. 511-5 du code monétaire et financier.

TROISIÈME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué :

D’AVOIR débouté la société Fuchs Lubrifiants France de l’ensemble de ses demandes,

ALORS QUE l’annulation d’un acte entraîne de plein droit la remise des parties en l’état où elles se trouvaient antérieurement à sa conclusion ; qu’en déboutant la société Fuchs Lubrifiants France de l’ensemble de ses demandes, après avoir prononcé la nullité du volet relatif au prêt du contrat passé le 19 novembre 2012 avec la société Back to Bike, bien que l’annulation entraîne l’obligation de restituer le capital prêté, la cour d’appel a violé l’article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016.

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