Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 7 octobre 2016, 395082, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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Conclusions du rapporteur public · 7 octobre 2016

N° 395082 M. G… 7ème et 2ème chambres réunies Séance du 19 septembre 2016 Lecture du 7 octobre 2016 CONCLUSIONS M. Olivier HENRARD, rapporteur public 1. M. G…, aujourd'hui âgé de 70 ans, occupait les fonctions de directeur départemental de la jeunesse et des sports de l'Essonne lorsqu'il a été victime le 9 novembre 2001 d'un accident vasculaire cérébral en pleine réunion de travail. A l'issue d'une période de congé pour longue maladie, il a été radié des cadres par anticipation le 1er mai 2007, en application de l'article L. 27 du code des pensions civiles et …

 
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Sur la décision

Référence :
CE, 7e - 2e ch. réunies, 7 oct. 2016, n° 395082
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 395082
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Contentieux des pensions
Décision précédente : Tribunal administratif de Nantes, 6 octobre 2015, N° 1205171
Identifiant Légifrance : CETATEXT000033222582
Identifiant européen : ECLI:FR:CECHR:2016:395082.20161007

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

M. A… B… a demandé au tribunal administratif de Nantes, en premier lieu, d’annuler le titre de pension du 19 mars 2012 et la décision implicite de rejet de sa demande du 11 avril 2012, en deuxième lieu, d’enjoindre au ministre de lui délivrer un duplicata du titre de pension référencé N 12 0016181 B, établi le 13 février 2012, dans un délai d’un mois à compter de la communication de la requête, en troisième lieu, d’enjoindre au ministre de prendre un nouvel arrêté de pension dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et, en dernier lieu, de condamner l’Etat à lui verser la somme de 541 624,16 euros avec intérêts de droit.

Par un jugement n° 1205171 du 7 octobre 2015, le tribunal administratif de Nantes a condamné l’Etat à verser à M. B… la somme de 1 000 euros et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 7 décembre 2015, 3 mars et 21 avril 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. B… demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler ce jugement ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

 – le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

 – la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011, notamment son article 163 ;

 – le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Thomas Odinot, auditeur,

— les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de M. B…;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 21 septembre 2016, présentée par M. B… ;

1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B…, alors directeur départemental de la jeunesse et des sports de l’Essonne, a été victime d’un accident qui a été déclaré imputable au service et a été radié des cadres pour invalidité à compter du 1er mai 2007 ; qu’à la suite de la décision n° 2010-83 QPC du 13 janvier 2011 du Conseil constitutionnel qui a déclaré la première phrase du cinquième alinéa de l’article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraites contraire à la Constitution, l’article 163 de la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 a modifié les dispositions applicables au cumul des pensions de retraite et des rentes d’invalidité servies aux fonctionnaires ; que, par une décision du 13 juin 2012, le Conseil d’Etat statuant au contentieux a annulé le titre de pension de M. B… du 3 décembre 2007 en tant qu’il appliquait les dispositions législatives ainsi censurées et a enjoint au ministre de l’économie, des finances et du commerce extérieur de procéder à la liquidation de la pension de retraite, de la rente viagère d’invalidité et de la majoration pour charges de famille de M. B… sur le fondement des nouvelles dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite issues de la loi du 28 décembre 2011 ; que par un arrêté du 19 mars 2012, l’administration a délivré à M. B… un nouveau titre de pension ; que M. B… a demandé au tribunal administratif de Nantes d’annuler celui-ci et de condamner l’Etat à lui verser une somme de 541 624,16 euros ; qu’il se pourvoit en cassation contre le jugement du 7 octobre 2015 en tant que le tribunal, après avoir condamné l’Etat à lui verser la somme de 1 000 euros, a rejeté le surplus de ses conclusions ;

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction issue du I de l’article 163 de la loi du 28 décembre 2011 : « Sans préjudice du plafond fixé au V de l’article L. 18, le montant total des prestations accordées au fonctionnaire invalide, à l’exclusion des majorations prévues aux articles L. 18 et L. 30 bis, ne peut excéder le montant du traitement mentionné à l’article L. 15 et revalorisé dans les conditions prévues à l’article L. 341-6 du code de la sécurité sociale. En cas de dépassement, le montant de chaque prestation est réduit à due proportion » ; qu’en vertu du III de l’article 163 de la même loi : « Le présent article est applicable aux instances en cours à la date du 13 janvier 2011, la révision des pensions prenant effet à compter de la date de réception par l’administration de la demande qui est à l’origine de ces instances » ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant que, si le requérant a mentionné l’article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans ses écritures devant le tribunal administratif, il ne peut pour autant être regardé comme ayant soulevé un moyen tiré de la violation de ces stipulations ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait omis de répondre à un moyen ne peut qu’être écarté ;

Sur le moyen tiré de l’inapplicabilité au litige des dispositions de l’article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite :

4. Considérant que le montant de la créance dont est titulaire un fonctionnaire admis à la retraite pour invalidité s’apprécie à la date à laquelle il est mis fin, pour ce motif, à ses fonctions, au regard des dispositions légalement applicables à cette date ; qu’il résulte des dispositions précitées du III de l’article 163 de la loi du 28 décembre 2011 que celles de l’article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite insérées par la même loi étaient applicables à l’instance par laquelle M. B… a contesté la décision du ministre de l’économie et des finances du 3 décembre 2007 lui attribuant une pension à la suite de sa radiation des cadres pour invalidité à compter du 1er mai 2007 ; qu’elles le sont également au présent litige qui constitue la poursuite de la même instance, ainsi que cela résulte de ce qui a été dit au point 1 ; qu’ainsi, en jugeant que les dispositions légalement applicables à la pension de retraite à la rente viagère d’invalidité de M. B… étaient celles de l’article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite, le tribunal administratif n’a pas commis d’erreur de droit, ni entaché son jugement d’une contradiction de motifs ;

Sur les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :

5. Considérant, en premier lieu, que si une pension de retraite et une rente viagère d’invalidité peuvent être regardées comme des biens, au sens des stipulations de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le montant de la créance dont est titulaire un fonctionnaire admis à la retraite pour invalidité s’apprécie à la date à laquelle il est mis fin, pour ce motif, à ses fonctions, au regard des dispositions légalement applicables à cette date ; qu’en relevant que, la pension de retraite et la rente viagère d’invalidité étant liquidées en même temps, le montant dont est titulaire un fonctionnaire admis à la retraite pour invalidité ne saurait être supérieur à celui qui résulte du plafonnement prévu par les nouvelles dispositions de l’article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite, pour estimer que ces dispositions ne portaient pas atteinte aux biens de M. B… et à son droit de propriété tel que protégé par l’article 1er du premier protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le tribunal administratif, qui a suffisamment motivé son jugement sur ce point, n’a pas commis d’erreur de droit ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que pour être compatible avec les stipulations de l’article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, l’intervention rétroactive du législateur en vue de modifier les règles applicables à des procès en cours doit reposer sur d’impérieux motifs d’intérêt général ; qu’en l’espèce, c’est pour se conformer à la décision du Conseil constitutionnel du 13 janvier 2011, que le législateur a modifié, par l’article 163 de la loi du 28 décembre 2011 cité au point 2, les règles applicables aux instances en cours à la date de cette décision dans un sens favorable au pensionné ; que, par suite, en jugeant que le législateur n’avait pas méconnu les stipulations de l’article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le tribunal administratif n’a pas, en tout état de cause, commis d’erreur de droit ;

7. Considérant, en troisième lieu, que pour écarter le moyen tiré de ce que les dispositions de l’article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite institueraient une discrimination entre fonctionnaires valides et invalides et seraient, par suite, incompatibles avec les stipulations de l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales combinées avec celles de l’article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, le tribunal administratif de Nantes a relevé que les fonctionnaires valides et invalides ne sont pas placés dans des situations analogues, de sorte que la distinction opérée entre eux n’institue aucun traitement discriminatoire ; qu’en statuant ainsi, le tribunal administratif de Nantes, qui a suffisamment motivé son jugement sur ce point, n’a pas commis d’erreur de droit ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu’aux termes du I de l’article L. 15 du code des pensions civiles et militaires de retraite : « Aux fins de liquidation de la pension, le montant de celle-ci est calculé en multipliant le pourcentage de liquidation (…) par le traitement ou la solde soumis à retenue afférents à l’indice correspondant à l’emploi, grade, classe et échelon effectivement détenus depuis six mois au moins par le fonctionnaire ou militaire au moment de la cessation des services valables pour la retraite (…) » ; que le tribunal administratif a relevé que la fixation, par les dispositions de l’article L. 30 ter du même code, d’un plafond de cumul de la pension de retraite et de la rente viagère d’invalidité, égal au traitement défini par les dispositions précitées de l’article L. 15, identique quels que soient la durée de services et le taux d’invalidité, n’institue pas de traitement discriminatoire entre les fonctionnaires en fonction de leur taux d’invalidité ou de la durée de leurs services antérieurs à la liquidation de leur pension, dès lors que la rente viagère d’invalidité tend seulement à assurer l’indemnisation des préjudices ayant un caractère patrimonial ; qu’en écartant pour ce motif le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales combiné avec l’article 1er du premier protocole additionnel à cette même convention, le tribunal administratif n’a pas non plus commis d’erreur de droit ;

Sur les autres moyens :

9. Considérant qu’en retenant que le requérant n’a pas établi la date à laquelle l’administration a réceptionné sa demande à l’origine de l’instance en cours et a lui-même sollicité l’application des dispositions de l’article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite, le tribunal administratif, qui n’a pas commis d’erreur de droit, s’est livré à une appréciation souveraine des pièces du dossier, qui n’est pas entachée de dénaturation ;

10. Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu, il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le tribunal administratif aurait dénaturé celles-ci en relevant que l’administration avait établi cinq titres de pension au lieu de six ;

11. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. B… n’est pas fondé à demander l’annulation du jugement attaqué ; que ses conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu’être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. B… est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A… B…, au ministre de l’économie et des finances et à la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

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