CJCE, n° C-338/00, Arrêt de la Cour, Volkswagen AG contre Commission des Communautés européennes, 18 septembre 2003

  • Système de distribution sélective de véhicules automobiles·
  • Absence d'identification de l'erreur de droit invoquée·
  • Mise en œuvre des règles de concurrence·
  • Cee/ce - concurrence * concurrence·
  • Cee/ce - contentieux * contentieux·
  • Irrecevabilité ) 2. concurrence·
  • Réalisation de propos délibéré·
  • Accords entre entreprises·
  • Interdiction des ententes·
  • Exemption par catégories

Chronologie de l’affaire

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Le Journal du Droit Administratif · 6 juillet 2016

par M. le pr. Eric CARPANO, Professeur de droit public à l'Université de Lyon 3 Jean Moulin Art. 74. Le droit de l'Union impose une obligation générale de motivation des actes unilatéraux adoptés par les institutions de l'Union ou par les autorités nationales en exécution de ceux-ci. Consacrée par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'UE, elle s'étend à tous les « actes juridiques » en vertu de l'article 296 TFUE. Sous ce double point de vue, elle apparaît comme une obligation constitutionnelle européenne que la Cour de justice module dans une perspective fonctionnelle …

 

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par M. le pr. Eric CARPANO, Professeur de droit public à l'Université de Lyon 3 Jean Moulin Art. 74. Le droit de l'Union impose une obligation générale de motivation des actes unilatéraux adoptés par les institutions de l'Union ou par les autorités nationales en exécution de ceux-ci. Consacrée par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'UE, elle s'étend à tous les « actes juridiques » en vertu de l'article 296 TFUE. Sous ce double point de vue, elle apparaît comme une obligation constitutionnelle européenne que la Cour de justice module dans une perspective fonctionnelle …

 
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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 18 sept. 2003, Volkswagen / Commission, C-338/00
Numéro(s) : C-338/00
Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 18 septembre 2003. # Volkswagen AG contre Commission des Communautés européennes. # Pourvoi - Concurrence - Distribution de véhicules automobiles - Cloisonnement - Article 85 du traité CE (devenu article 81 CE) - Règlement (CEE) nº 123/85 - Imputabilité de l'infraction à l'entreprise concernée - Droit d'être entendu - Obligation de motivation - Conséquences juridiques d'une divulgation à la presse - Impact de la régularité de la notification sur le calcul de l'amende - Pourvoi incident. # Affaire C-338/00 P.
Date de dépôt : 14 septembre 2000
Précédents jurisprudentiels : 16 novembre 2000, Sarrió/Commission ( C-291/98
18 septembre 2003. - Volkswagen AG contre Commission des Communautés européennes. - Pourvoi - Concurrence - Distribution de véhicules automobiles - Cloisonnement - Article 85
26 octobre 2000, Bayer/Commission ( T-41/96
arrêt du 16 mai 2002, France/Commission, C-482/99
arrêt du 6 avril 1995, BPB Industries et British Gypsum/Commission, C-310/93
Bayerische Motorenwerke AG, à savoir l' arrêt du 12 juillet 1979, BMW Belgium e.a./Commission ( 32/78 et 36/78 à 82/78
Communautés européennes ( quatrième chambre ) du 6 juillet 2000, Volkswagen/Commission ( T-62/98, Rec. p. II-2707
Cour du 10 décembre 1985, Stichting Sigarettenindustrie e.a./Commission, 240/82
Cour du 10 juillet 1980, Distillers Company/Commission, 30/78
Cour du 15 décembre 1994, Finsider/Commission, C-320/92
Cour du 15 mai 1997, Siemens/Commission, C-278/95
Cour du 16 décembre 1975, Suiker Unie e.a./Commission, 40/73
Cour ] du 17 juillet 1997, Ferriere Nord/Commission, [ C-219/95
Cour du 17 septembre 1985, Ford/Commission, 25/84 et 26/84
Cour du 24 octobre 1995, Bayerische Motorenwerke, C-70/93
Cour du 9 novembre 1983, Michelin/Commission, 322/81
Deutsche Bahn/Commission, [ T-229/94
Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C-238/99 P, C-244/99 P, C-245/99 P, C-247/99 P, C-250/99 P à C-252/99 P et C-254/99
Tribunal de première instance du 6 juillet 2000, Volkswagen/Commission ( T-62/98
Tribunal du 10 mars 1992, Solvay/Commission, T-12/89
Tribunal du 11 mars 1999, Preussag Stahl/Commission, T-148/94
Tribunal du 11 mars 1999, Thyssen Stahl/Commission, T-141/94
Tribunal du 21 février 1995, ] SPO e.a./Commission, [ T-29/92
Tribunal du 2 juillet 1992, Dansk Pelsdyravlerforening/Commission, T-61/89
Tribunal du 6 avril 1995, Martinelli/Commission, T-150/89
Tribunal du 7 juillet 1994, ] Dunlop Slazenger/Commission, [ T-43/92
Solution : Pourvoi : rejet sur le fond, Recours en annulation
Identifiant CELEX : 62000CJ0338
Identifiant européen : ECLI:EU:C:2003:473
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Sur les parties

Texte intégral

Avis juridique important

|

62000J0338

Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 18 septembre 2003. – Volkswagen AG contre Commission des Communautés européennes. – Pourvoi – Concurrence – Distribution de véhicules automobiles – Cloisonnement – Article 85 du traité CE (devenu article 81 CE) – Règlement (CEE) nº 123/85 – Imputabilité de l’infraction à l’entreprise concernée – Droit d’être entendu – Obligation de motivation – Conséquences juridiques d’une divulgation à la presse – Impact de la régularité de la notification sur le calcul de l’amende – Pourvoi incident. – Affaire C-338/00 P.


Recueil de jurisprudence 2003 page I-09189


Sommaire

Parties

Motifs de l’arrêt

Décisions sur les dépenses

Dispositif

Mots clés


1. Pourvoi – Moyens – Simple répétition des moyens et arguments présentés devant le Tribunal – Absence d’identification de l’erreur de droit invoquée – Irrecevabilité

(Statut de la Cour de justice, art. 58; règlement de procédure de la Cour, art. 112, § 1, al. 1, c))

2. Concurrence – Ententes – Interdiction – Exemption par catégories – Règlement n° 123/85 – Portée – Mesure adoptée par un constructeur de véhicules automobiles tendant au cloisonnement du marché – Exclusion

(Traité CE, art. 85, § 1 et 3 (devenu art. 81, § 1 et 3, CE); règlement de la Commission n° 123/85)

3. Concurrence – Ententes – Accords entre entreprises – Système de distribution sélective de véhicules automobiles – Invitation du constructeur à ses revendeurs s’insérant dans un ensemble de relations commerciales – Limitation des livraisons aux concessionnaires prévue par le contrat de concession

(Traité CE, art. 85, § 1 (devenu art. 81, § 1, CE))

4. Concurrence – Amendes – Interdiction d’infliger des amendes pour des agissements rentrant dans le cadre d’un accord notifié – Portée

(Règlement du Conseil n° 17, art. 15, § 5, a))

5. Concurrence – Règles communautaires – Infractions – Réalisation de propos délibéré – Établissement du caractère délibéré

(Règlement du Conseil n° 17, art. 15, § 2)

6. Actes des institutions – Motivation – Obligation – Portée – Décision d’application des règles de concurrence

(Traité CE, art. 190 (devenu art. 253 CE))

7. Pourvoi – Compétence de la Cour – Remise en cause, pour des motifs d’équité, de l’appréciation portée par le Tribunal sur le montant des amendes infligées aux entreprises – Exclusion

(Traité CE, art. 85, § 1 (devenu art. 81, § 1, CE))

Sommaire


1. Ne répond pas aux exigences de motivation résultant de l’article 58 du statut de la Cour de justice et de l’article 112, paragraphe 1, premier alinéa, sous c), du règlement de procédure de cette dernière un pourvoi qui, sans même comporter une argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont serait entaché l’arrêt attaqué, se limite à répéter ou à reproduire textuellement les moyens et les arguments qui ont été présentés devant le Tribunal. En effet, un tel pourvoi constitue en réalité une demande visant à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal, ce qui, aux termes de l’article 56 dudit statut, échappe à la compétence de la Cour.

( voir point 47 )

2. Une mesure tendant au cloisonnement du marché entre États membres ne saurait relever des dispositions du règlement n° 123/85 relatives aux obligations que peut légitimement assumer le distributeur dans le cadre d’un contrat de concession. En effet, bien que ce règlement offre aux constructeurs de véhicules automobiles d’importants moyens de protection de leurs réseaux, il ne les autorise pas à prendre des mesures qui contribuent à un cloisonnement des marchés.

( voir point 49 )

3. Une invitation adressée par un constructeur automobile à ses distributeurs sous contrat constitue non pas un acte unilatéral qui échapperait au champ d’application de l’article 85, paragraphe 1, du traité (devenu article 81, paragraphe 1, CE), mais un accord au sens de cette disposition, lorsqu’elle s’insère dans un ensemble de relations commerciales continues régies par un accord général préétabli.

La mise en oeuvre, par le constructeur automobile, d’une politique de contingentement de l’approvisionnement des concessionnaires dans le but de restreindre les réexportations ne constitue pas une mesure unilatérale, mais un accord au sens de ladite disposition, lorsque le constructeur automobile, pour imposer cette politique, utilise les clauses du contrat de concession, dont celle prévoyant la possibilité de limiter les livraisons aux concessionnaires, et que, ce faisant, il influence le comportement commercial de ces derniers.

( voir points 60, 63-65, 67 )

4. Conformément à l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n° 17, les amendes ne peuvent pas être infligées pour des agissements postérieurs à la notification à la Commission et antérieurs à la décision par laquelle celle-ci accorde ou refuse l’application de l’article 85, paragraphe 3, du traité (devenu article 81, paragraphe 3, CE) «pour autant qu’ils restent dans les limites de l’activité décrite dans la notification».

Il ressort de cette disposition que, a contrario, lorsque les agissements sortent des limites de l’activité notifiée, l’exemption d’amende ne saurait trouver à s’appliquer pour aucun de ces agissements, l’activité concernée ne correspondant plus à celle décrite dans la notification. Cette constatation est corroborée par la considération que, dans les cas où le comportement incriminé est constitué d’un faisceau de mesures poursuivant la même finalité, il serait artificiel de subdiviser ledit comportement aux fins d’appliquer l’exemption d’amende à certaines seulement des mesures qui le constituent.

( voir points 83-84, 178-179 )

5. En droit communautaire de la concurrence, la caractérisation d’une infraction comme ayant été commise de propos délibéré ou par négligence au sens de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 n’exige pas l’identification des personnes qui auraient agi fautivement au sein de l’entreprise sanctionnée ou qui auraient dû être tenues pour responsables de l’organisation éventuellement défaillante de celle-ci.

( voir points 96, 98 )

6. La motivation exigée par l’article 190 du traité (devenu article 253 CE) doit faire apparaître, d’une façon claire et non équivoque, le raisonnement de l’autorité communautaire, auteur de l’acte incriminé, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et au juge communautaire d’exercer son contrôle. Toutefois, si, en vertu de l’article 190 précité, la Commission est tenue de mentionner les éléments de fait et de droit dont dépend la justification d’une décision infligeant une amende à une entreprise pour une infraction au droit communautaire de la concurrence et les considérations juridiques qui l’ont amenée à prendre celle-ci, cette disposition n’exige pas que la Commission discute tous les points de fait et de droit qui auraient été traités au cours de la procédure administrative.

( voir points 124, 127 )

7. Il n’appartient pas à la Cour, lorsqu’elle se prononce sur des questions de droit dans le cadre d’un pourvoi, de substituer, pour des motifs d’équité, son appréciation à celle du Tribunal statuant, dans l’exercice de sa pleine juridiction, sur le montant des amendes infligées à des entreprises en raison de la violation, par celles-ci, du droit communautaire. Dès lors, la Cour ne saurait, au stade du pourvoi, examiner si le montant de l’amende fixé par le Tribunal dans le cadre de sa compétence de pleine juridiction a un caractère proportionné par rapport à la gravité et à la durée de l’infraction telles que constatées par le Tribunal au terme de l’appréciation des faits effectuée par ce dernier.

( voir point 151 )

Parties


Dans l’affaire C-338/00 P,

Volkswagen AG, établie à Wolfsburg (Allemagne), représentée par Me R. Bechtold, Rechtsanwalt, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes (quatrième chambre) du 6 juillet 2000, Volkswagen/Commission (T-62/98, Rec. p. II-2707), et tendant à l’annulation partielle de cet arrêt,

l’autre partie à la procédure étant:Commission des Communautés européennes, représentée par M. K. Wiedner, en qualité d’agent, assisté de Me H.-J. Freund, avocat,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (sixième chambre)

composée de M. J.-P. Puissochet, président de chambre, MM. C. Gulmann et V. Skouris (rapporteur), Mmes F. Macken et N. Colneric, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,

greffier: Mme M.-F. Contet, administrateur principal,

vu le rapport d’audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l’audience du 27 juin 2002,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 17 octobre 2002,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l’arrêt


I. Par requête déposée au greffe de la Cour le 14 septembre 2000, Volkswagen AG a, en vertu de l’article 49 du statut CE de la Cour de justice, formé un pourvoi contre l’arrêt du Tribunal de première instance du 6 juillet 2000, Volkswagen/Commission (T-62/98, Rec. p. II-2707, ci-après l'«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a partiellement rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision 98/273/CE de la Commission, du 28 janvier 1998, relative à une procédure d’application de l’article 85 du traité CE (IV/35.733 – VW) (JO L 124, p. 60, ci-après la «décision» ou la «décision attaquée»).

Le cadre juridique

II. Les contrats de concession en matière de distribution de véhicules automobiles sont, sous certaines conditions, exemptés de l’application de l’article 85, paragraphe 1, du traité CE (devenu article 81, paragraphe 1, CE) par le règlement (CEE) n? 123/85 de la Commission, du 12 décembre 1984, concernant l’application de l’article 85 paragraphe 3 du traité CEE à des catégories d’accords de distribution et de service de vente et d’après-vente de véhicules automobiles (JO 1985, L 15, p. 16)

III. Lesdits accords sont définis dans le premier considérant du règlement n 123/85 comme étant «[…] des accords de durée déterminée ou indéterminée par lesquels le cocontractant fournisseur charge le cocontractant revendeur de promouvoir dans un territoire déterminé la distribution et le service de vente et d’après-vente de produits déterminés du secteur des véhicules automobiles et par lesquels le fournisseur s’engage envers le distributeur à ne livrer dans le territoire convenu des produits contractuels en vue de la revente qu’au distributeur ou, outre le distributeur, qu’à un nombre limité d’entreprises du réseau de distribution».

IV. Selon le neuvième considérant du même règlement, «[l]es restrictions imposées aux activités du distributeur en dehors du territoire convenu l’amènent à mieux assurer la distribution et le service dans un territoire convenu et contrôlable, à connaître le marché d’une manière plus proche de l’optique de l’utilisateur et à orienter son offre en fonction des besoins (article 3 points 8 et 9) [¼ ]».

V. L’article 1er du règlement n? 123/85 dispose:

«Conformément à l’article 85 paragraphe 3 du traité CEE, l’article 85 paragraphe 1 [du traité] est déclaré inapplicable, dans les conditions fixées par le présent règlement, aux accords auxquels ne participent que deux entreprises, et dans lesquels une partie à l’accord s’engage vis-à-vis de l’autre à ne livrer, à l’intérieur d’une partie définie du marché commun:

1) que, à celle-ci,

ou

2) que, à celle-ci et à un nombre déterminé d’entreprises du réseau de distribution,

dans le but de la revente, des véhicules automobiles déterminés à trois roues ou plus destinés à être utilisés sur la voie publique […]»

VI. Il est précisé, à l’article 2 du règlement n? 123/85, que l’exemption accordée au titre de l’article 85, paragraphe 3, du traité s’applique également «lorsque l’engagement décrit à l’article 1er est lié à l’engagement du fournisseur de ne pas vendre des produits contractuels à des utilisateurs finals dans le territoire convenu [¼ ]».

VII. L’article 3 du règlement n? 123/85 prévoit:

«L’exemption […] s’applique également lorsque [l’accord de distribution sélective] est lié à l’engagement du distributeur:

[…]

8) de ne pas, en dehors du territoire convenu:

a) entretenir des succursales ou dépôts pour la distribution de produits contractuels et de produits correspondants;

b) prospecter la clientèle pour des produits contractuels et des produits correspondants;

9) de ne pas confier à des tiers la distribution ou le service de vente et d’après-vente de produits contractuels et de produits correspondants en dehors du territoire convenu;

10) de ne livrer à un revendeur:

a) des produits contractuels et des produits correspondants que si ce revendeur est une entreprise du réseau de distribution,

[…]

11) de ne vendre les véhicules automobiles […] à des utilisateurs finals utilisant les services d’un intermédiaire que si ces utilisateurs ont auparavant mandaté par écrit l’intermédiaire pour acheter et, en cas d’enlèvement par celui-ci, pour prendre livraison d’un véhicule automobile déterminé.»

VIII. L’article 4, paragraphe 1, du même règlement énonce:

«Ne fait pas obstacle à l’application des articles 1er, 2 et 3 l’engagement par lequel le distributeur s’oblige:

[…]

3) à s’efforcer d’écouler dans une période déterminée à l’intérieur du territoire convenu un nombre minimal de produits contractuels, que le fournisseur fixe à partir d’estimations prévisionnelles des ventes du distributeur, si les parties ne se mettent pas d’accord à ce sujet;

[…]

8) à informer les utilisateurs finals de manière générale dès lors qu’il utilise également des pièces de rechange de tiers pour réparer ou entretenir des produits contractuels ou des produits correspondants;

[…]»

IX. Le règlement n 123/85 a été remplacé, à partir du 1er octobre 1995, par le règlement (CE) n 1475/95 de la Commission, du 28 juin 1995, concernant l’application de l’article 85 paragraphe 3 du traité à des catégories d’accords de distribution et de service de vente et d’après-vente de véhicules automobiles (JO L 145, p. 25).

X. Le libellé des articles 1er, 2 et 3 du règlement n° 1475/95 est à peu près identique à celui des dispositions correspondantes du règlement n° 123/85. L’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1475/95 prévoit:

«L’exemption ne s’applique pas dès lors:

[…]

3) que […] les parties conviennent de restrictions de concurrence qui ne sont pas expressément exemptées par le présent règlement

[…]

7) que le constructeur, le fournisseur ou une autre entreprise du réseau restreint directement ou indirectement la liberté des utilisateurs finals, des intermédiaires mandatés ou des distributeurs de s’approvisionner auprès d’une entreprise du réseau de leur choix à l’intérieur du marché commun en produits contractuels ou en produits correspondants […] ou la liberté des utilisateurs finals de revendre des produits contractuels ou des produits correspondants, pourvu que la vente ne soit pas réalisée à des fins commerciales,

ou

8) que le fournisseur, sans raison objectivement justifiée, octroie aux distributeurs des rémunérations calculées en fonction du lieu de destination des véhicules automobiles revendus ou du domicile de l’acheteur,

[…]»

Faits à l’origine du litige et procédure devant le Tribunal

XI. Les faits qui sont à l’origine du litige sont exposés dans l’arrêt attaqué dans les termes suivants:

«1 La requérante est la société holding du groupe Volkswagen. Les activités commerciales du groupe comprennent la construction de véhicules des marques Volkswagen, Audi, Seat et Skoda, ainsi que la fabrication de composants et de pièces. […]

2 Les véhicules automobiles des marques Volkswagen et Audi sont vendus dans la Communauté par l’intermédiaire de réseaux de distribution sélective. L’importation en Italie de ces véhicules, ainsi que de leurs pièces détachées et de leurs accessoires, est assurée en exclusivité par la société de droit italien Autogerma SpA (ci-après Autogerma'), établie à Vérone (Italie), qui est une filiale à 100 % de la requérante et qui, de ce fait, constitue avec cette dernière et Audi une unité économique. La distribution en Italie a lieu par l’intermédiaire de concessionnaires juridiquement et économiquement indépendants mais contractuellement liés à Autogerma.

[…]

8 À partir de septembre 1992 et en 1993, la lire italienne a baissé fortement par rapport au mark allemand. Toutefois, la requérante n’a pas augmenté en proportion ses prix de vente en Italie. Les écarts de prix qui résultaient de cette situation ont créé un intérêt économique à la réexportation, à partir de l’Italie, de véhicules des marques Volkswagen et Audi.

9 Au cours des années 1994 et 1995, la Commission a reçu des lettres de consommateurs allemands et autrichiens se plaignant d’obstacles à l’achat de véhicules neufs des marques susvisées en Italie, en vue de leur réexportation immédiate vers l’Allemagne ou l’Autriche.

10 Par lettre du 24 février 1995, la Commission a fait savoir à la requérante que, sur la base de plaintes émanant de consommateurs allemands, elle avait constaté que cette dernière ou Autogerma avait imposé aux concessionnaires italiens des marques Volkswagen et Audi, en les menaçant de résilier leur contrat de concession, de vendre des véhicules uniquement à des clients italiens. Par la même lettre, la Commission a mis la requérante en demeure d’arrêter cette entrave à la réexportation et de lui communiquer, dans un délai de trois semaines à compter de la date de réception de ce courrier, les mesures prises à cet égard.

[…]

13 Le 17 octobre 1995, la Commission a adopté une décision ordonnant des vérifications conformément à l’article 14, paragraphe 3, du règlement n 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962, 13, p. 204). Les vérifications ont eu lieu les 23 et 24 octobre 1995 […]

14 Sur la base des documents trouvés lors de ces vérifications, la Commission a estimé que la requérante, Audi et Autogerma avaient mis sur pied avec leurs concessionnaires italiens une politique de cloisonnement du marché. Le 25 octobre 1996, la Commission a notifié une communication des griefs en ce sens à la requérante et à Audi.

15 Par lettre du 18 novembre 1996, la requérante et Audi ont demandé à avoir accès au dossier. Elles en ont pris connaissance le 5 décembre 1996.

16 Le 19 décembre 1996, Autogerma a, sur la demande expresse de la requérante, adressé une circulaire aux concessionnaires italiens, précisant que les exportations à destination d’utilisateurs finals (le cas échéant, par le biais d’intermédiaires) ainsi que de concessionnaires appartenant au réseau de distribution étaient licites et ne seraient donc pas sanctionnées. Cette circulaire indiquait également que la remise accordée aux concessionnaires sur le prix de vente des véhicules commandés, appelée marge, et le paiement de leur prime étaient entièrement indépendants de la question de savoir si les véhicules avaient été vendus à l’intérieur ou hors de leur territoire contractuel.

[…]

20 Le 28 janvier 1998, la Commission a adopté la décision [attaquée]. La requérante y est désignée comme étant le seul destinataire. À cet égard, la Commission expose que la requérante est responsable de l’infraction constatée, au motif qu’Audi et Autogerma sont ses filiales et qu’elle connaissait leurs activités. Quant aux concessionnaires italiens, la Commission indique que ceux-ci n’ont pas participé activement aux entraves à la réexportation, mais qu’ils ont dû, en tant que victimes de la politique restrictive mise en place par les constructeurs et Autogerma, approuver cette politique sous la contrainte.

[…]

22 En ce qui concerne les mesures prises par la requérante et Audi, la Commission cite l’instauration, par la requérante, d’un système de marge fractionnée’ […]. La Commission mentionne également la réduction par la requérante et Audi des stocks des concessionnaires. Cette mesure, accompagnée d’une politique d’approvisionnement restreint, aurait causé un allongement considérable des délais de livraison et amené certains clients à annuler leur commande. Elle aurait, en outre, permis à Autogerma de refuser les demandes de livraison de concessionnaires allemands (livraisons croisées à l’intérieur du réseau de distribution de Volkswagen). La Commission invoque aussi les conditions fixées par Audi et Autogerma pour le calcul de la prime trimestrielle de 3 %, payée aux concessionnaires sur la base du nombre de véhicules qu’ils ont vendus.

23 Parmi les sanctions infligées par Autogerma aux concessionnaires, la Commission mentionne la résiliation de certains contrats de concession et la suppression de la prime trimestrielle de 3 % pour les ventes hors du territoire contractuel.

[…]

26 La Commission conclut que ces mesures, qui s’inscrivent toutes dans le cadre de la relation contractuelle entre les constructeurs, par l’intermédiaire d’Autogerma, et les concessionnaires italiens de leur réseau de distribution sélective, procèdent d’un accord ou d’une pratique concertée et constituent une infraction à l’article 85, paragraphe 1, du traité, étant donné qu’elles traduisent la mise en oeuvre d’une politique de cloisonnement du marché. Elle précise que ces mesures ne sont pas couvertes par les règlements n 123/85 et n 1475/95, étant donné qu’aucune disposition de ces règlements ne permet d’exempter un accord destiné à empêcher des exportations parallèles par des consommateurs finals, par des intermédiaires mandatés par ces derniers ou par d’autres concessionnaires du réseau de distribution. Elle précise également que l’octroi d’une exemption individuelle est exclu en l’espèce, étant donné que la requérante, Audi et Autogerma n’ont notifié aucun élément de leur accord avec les concessionnaires et que, en tout état de cause, les entraves à la réexportation constituent une atteinte à l’objectif de protection des consommateurs figurant à l’article 85, paragraphe 3, du traité.

[…]

28 À l’article 1er de la décision, la Commission constate que la requérante a, conjointement avec ses filiales Audi et Autogerma, commis des infractions à l’article 85, paragraphe 1, du traité en convenant, avec les concessionnaires italiens de son réseau de distribution, d’accords visant à interdire ou à restreindre toute vente à des utilisateurs finals d’autres États membres, que ceux-ci passent commande personnellement ou utilisent les services d’un intermédiaire mandaté ainsi qu’à d’autres concessionnaires du réseau dans un autre État membre'. À l’article 2 de la décision, elle ordonne à la requérante de mettre fin à ces infractions et, à cet effet, lui enjoint de prendre, entre autres mesures, celles qu’elle énumère.

29 À l’article 3 de la décision, la Commission inflige une amende de 102 000 000 écus à la requérante en raison de la gravité de l’infraction constatée. Sur ce point, la Commission considère que le fait d’entraver les exportations parallèles de véhicules par les consommateurs finals et les livraisons croisées au sein du réseau de concessionnaires est un obstacle à l’objectif de création d’un marché commun, qui est l’un des principes fondamentaux de la Communauté européenne, de sorte que l’infraction constatée est particulièrement grave. À cela s’ajoute le fait que les règles applicables en la matière sont déjà fixées depuis de nombreuses années et la circonstance que le groupe Volkswagen a, de tous les constructeurs de véhicules à moteur dans la Communauté, la part de marché la plus élevée. La Commission cite également des documents afin de prouver que la requérante avait pleinement conscience que son comportement constituait une infraction à l’article 85 du traité. Elle souligne aussi que l’infraction a duré plus de dix ans. Enfin, la Commission a pris en compte, en tant que circonstances aggravantes, le fait que la requérante, d’une part, n’a pas mis fin aux mesures incriminées, bien qu’elle lui ait envoyé deux lettres en 1995, lui signalant que le comportement consistant à empêcher ou à restreindre les exportations parallèles à partir de l’Italie constituait une infraction aux règles de la concurrence, et, d’autre part, a profité de la situation de dépendance existant entre un constructeur de véhicules automobiles et ses concessionnaires, à l’origine, en l’espèce, pour plusieurs distributeurs, de pertes de chiffre d’affaires substantielles. À cet égard, il est expliqué dans la décision que la requérante, Audi et Autogerma ont menacé plus de cinquante concessionnaires de résilier leur contrat dans le cas où ceux-ci continueraient à vendre des véhicules à des clients étrangers et que douze contrats de concession ont effectivement été résiliés, mettant en danger l’existence des entreprises concernées.

30 La décision a été notifiée par lettre adressée à la requérante le 5 février 1998 et reçue par celle-ci le lendemain.

[…]»

XII. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 avril 1998, la requérante a introduit un recours contre cette décision.

XIII. À l’appui de son recours, la requérante a invoqué en substance cinq moyens d’annulation. Les premier et deuxième moyens étaient tirés, respectivement, d’erreurs de fait et d’erreurs de droit dans l’application de l’article 85 du traité. Les trois derniers moyens étaient tirés d’une violation du principe de bonne administration, de l’obligation de motivation et du droit d’être entendu.

XIV. En outre, la requérante a soulevé, à titre subsidiaire, un moyen visant à la réduction de l’amende infligée par la décision attaquée, tiré du caractère excessif de cette amende.

XV. En particulier, à l’appui de ses premier et deuxième moyens, la requérante a notamment soutenu que:

— en ce qui concerne l’entrave résultant du système de prime et la prétendue méconnaissance du règlement n 123/85, la prime de 3 % avait été octroyée, logiquement, en fonction de la bonne exécution de l’obligation du concessionnaire qui consiste à concentrer son activité sur son territoire contractuel; dès lors, la règle des 15 %, selon laquelle, pour le calcul de la prime, toutes les ventes devraient être prises en compte, mais celles réalisées en dehors du territoire contractuel le seraient uniquement à concurrence d’un maximum de 15 % de la totalité des ventes effectuées par le concessionnaire (ci-après la «règle des 15 %»), était parfaitement justifiée par les termes mêmes du règlement n 123/85 (premier et neuvième considérants et article 4, paragraphe 1, point 3, de celui-ci);

— contrairement à ce que la Commission prétend, un système de marge fractionnée n’a jamais été introduit;

— c’est de manière erronée que la Commission a constaté que le comportement commercial des constructeurs et de leur réseau de distribution en Italie vis-à-vis des consommateurs d’autres États membres constituait une entrave aux réexportations;

— toutes les résiliations de contrats de concession sur lesquelles se fonde la Commission concernaient des concessionnaires qui avaient vendu à plusieurs reprises des véhicules à des revendeurs non agréés et qui avaient, parfois, également commis d’autres violations graves de leurs obligations contractuelles;

— les comportements reprochés n’ont pas continué après le mois d’octobre 1995; les documents saisis par la Commission ne se rapportaient qu’aux années 1993 à 1995, et

— une restriction de l’approvisionnement sur le marché italien ne saurait être qualifiée d’accord au sens de l’article 85, paragraphe 1, du traité.

XVI. Dans le cadre de son troisième moyen, tiré d’une violation du principe de bonne administration, la requérante reprochait à la Commission d’avoir donné, avant l’adoption de la décision attaquée, une publicité à ses appréciations et à ses intentions en matière d’amende.

XVII. Par son quatrième moyen, tiré d’une insuffisance de motivation de la décision attaquée, la requérante soutenait que les objections soulevées par elle-même et par Audi au cours de la procédure administrative avaient été insuffisamment examinées. Ainsi, la Commission aurait omis de prendre en considération, dans ladite décision, l’analyse de documents présentée en réponse à la communication des griefs.

XVIII. Enfin, à l’appui de son moyen subsidiaire, tiré du caractère excessif de l’amende qui lui a été infligée, la requérante soutenait qu’elle n’avait jamais eu l’intention de commettre des infractions et que les documents mentionnés dans la décision attaquée pour démontrer le contraire (point 214 des motifs de celle-ci) avaient été interprétés de manière complètement erronée par la Commission. Elle faisait également valoir que la règle des 15 % avait été explicitement stipulée dans la «convenzione B» (convention jointe en annexe au contrat de concession), laquelle avait été notifiée à la Commission en 1988; dès lors, conformément à l’article 15, paragraphe 5, du règlement n 17, aucune amende ne pouvait lui être infligée en raison du fait qu’elle avait appliqué cette règle.

L’arrêt attaqué

Sur l’entrave résultant du système de prime et la prétendue méconnaissance du règlement n 123/85

XIX. Le Tribunal a notamment jugé ce qui suit:

«49 Force est de constater que cette règle [des 15 %] était de nature à inciter les concessionnaires italiens à vendre au moins 85 % des véhicules disponibles à l’intérieur de leur territoire contractuel. Elle restreignait les possibilités pour les utilisateurs finals et les concessionnaires d’autres États membres d’acquérir des véhicules en Italie, et cela, notamment, dans des périodes où, d’une part, de tels achats présentaient un grand intérêt pour eux et, d’autre part, le nombre de véhicules disponibles à la vente dans cet État était limité [¼ ]. Il s’ensuit que la Commission a pu conclure à juste titre, notamment au considérant 181 de la décision, que la règle des 15 % sortait du cadre de l’exemption accordée par le règlement n 123/85. En effet, bien que le règlement n 123/85 offre aux constructeurs d’importants moyens de protection de leurs réseaux, il ne les autorise pas à prendre des mesures qui contribuent à un cloisonnement des marchés (arrêt de la Cour du 24 octobre 1995, Bayerische Motorenwerke, C-70/93, Rec. p. I-3439, point 37).

[…]

189 [¼ ] il convient d’observer qu’il ressort clairement du fait que la règle des 15 % a été en vigueur de façon ininterrompue entre le 1er janvier 1988 et le 30 septembre 1996 [¼ ] que la requérante a été en infraction avec les règles communautaires de la concurrence durant toute cette période (voir ci-dessus point 49). […]»

Sur l’introduction d’un système de marge fractionnée

XX. Le Tribunal a jugé, au point 72 de l’arrêt attaqué, que la Commission n’a pas établi d’une manière suffisamment précise et concordante la mise en place, sous forme d’accord ou de pratique concertée, d’un système de marge fractionnée et que la décision attaquée comporte, par conséquent, une erreur d’appréciation sur ce point.

Sur l’entrave résultant du comportement commercial vis-à-vis des consommateurs

XXI. Le Tribunal a notamment jugé ce qui suit:

«105 Il convient de constater que l’argumentation de la requérante est manifestement contredite par un nombre considérable de plaintes qui ont été envoyées, notamment au cours de l’année 1995, par des consommateurs d’États membres autres que l’Italie et, pour la plupart, de nationalité allemande ou autrichienne, soit à la requérante, à Audi ou à Autogerma, soit à la Commission. Sur la demande du Tribunal de lui communiquer l’ensemble des lettres de consommateurs reçues ou saisies par elle, la Commission a produit plus de 60 courriers ou télécopies qui ont comme objet commun la dénonciation des obstacles rencontrés par ces consommateurs pour acquérir un véhicule de marque Volkswagen ou Audi en Italie. Il suffit de reprendre, ci-après, certaines des correspondances analysées par la Commission dans la décision attaquée.»

XXII. Après avoir reproduit, aux points 106 à 114 de l’arrêt attaqué, certaines de ces correspondances, le Tribunal a constaté:

«115 Il résulte d’une façon suffisamment représentative de ces documents que, pendant la période concernée, un client potentiel domicilié hors d’Italie se heurtait aux plus grandes difficultés pour trouver un concessionnaire italien des marques Volkswagen et Audi disposé à lui vendre un véhicule. Par conséquent, la Commission a pu conclure à juste titre que le comportement commercial des constructeurs et de leur réseau de distribution en Italie vis-à-vis des consommateurs d’autres États membres constituait également une entrave aux réexportations.»

Sur les sanctions dont les concessionnaires auraient fait l’objet

XXIII. Le Tribunal a relevé, au point 169 de l’arrêt attaqué, que les éléments de preuve fournis par la Commission en ce qui concerne les résiliations des contrats de concession ne permettent pas d’exclure que seuls les concessionnaires qui ont, entre autres manquements à leurs obligations contractuelles, vendu des véhicules à des revendeurs non agréés ont effectivement été sanctionnés et que, dès lors, la Commission a commis une erreur d’appréciation en considérant comme établi que les résiliations des contrats de concession en cause constituaient une mesure illégale.

Sur la durée des entraves à la réexportation

XXIV. Au point 192 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que la Commission n’a pas établi à suffisance de droit que la requérante se trouvait toujours en infraction entre le 1er octobre 1996 et le mois de janvier 1998.

Sur la question de savoir si une restriction de l’approvisionnement sur le marché italien constitue un accord au sens de l’article 85, paragraphe 1, du traité

XXV. Le Tribunal a notamment jugé ce qui suit:

«236 Selon une jurisprudence constante, une invitation adressée par un constructeur automobile à ses revendeurs sous contrat constitue non pas un acte unilatéral qui échapperait au champ d’application de l’article 85, paragraphe 1, du traité, mais un accord au sens de cette disposition, lorsqu’elle s’insère dans un ensemble de relations commerciales continues régies par un accord général préétabli (arrêts de la Cour du 17 septembre 1985, Ford/Commission, 25/84 et 26/84, Rec. p. 2725, point 21, et Bayerische Motorenwerke, précité, points 15 et 16). Cette jurisprudence s’applique en l’espèce. En effet, comme il ressort de l’examen du premier moyen (voir ci-dessus, en particulier, points 49, 58, 89 à 92 et 162 à 165), la règle des 15 %, le contingentement de l’approvisionnement, les contrôles et les avertissements visaient tous à influencer les concessionnaires italiens dans l’exécution de leur contrat avec Autogerma.»

Sur la violation du principe de bonne administration du fait des divulgations à la presse

XXVI. Le Tribunal a constaté, aux points 280 à 282 de l’arrêt attaqué, que, avant l’adoption de la décision attaquée, un élément essentiel du projet de celle-ci soumis au comité consultatif puis, pour approbation définitive, au collège des commissaires a fait l’objet de plusieurs divulgations à la presse; que ces divulgations ne se limitaient pas à exprimer le point de vue personnel du membre de la Commission en charge des questions de concurrence sur la compatibilité des mesures examinées avec le droit communautaire, mais informaient également le public, avec un haut degré de précision, du montant envisagé de l’amende. Il a considéré que, en procédant de la sorte, la Commission a porté atteinte à la dignité de l’entreprise incriminée et aux intérêts d’une bonne administration communautaire.

XXVII. Le Tribunal a poursuivi son raisonnement dans les termes suivants:

«283 Selon une jurisprudence constante, une irrégularité du genre de celle constatée ci-dessus peut entraîner l’annulation de la décision en cause s’il est établi que, en l’absence de cette irrégularité, ladite décision aurait eu un contenu différent (arrêt de la Cour du 16 décembre 1975, Suiker Unie e.a./Commission, 40/73 à 48/73, 50/73, 54/73 à 56/73, 111/73, 113/73 et 114/73, Rec. p. 1663, point 91; arrêt [du Tribunal du 7 juillet 1994,] Dunlop Slazenger/Commission, [T-43/92, Rec. p. II-441,] point 29). Or, en l’espèce, la requérante n’a pas apporté une telle preuve. En effet, rien ne laisse supposer que, si les informations litigieuses n’avaient pas été divulguées, le comité consultatif ou le collège des commissaires aurait modifié le montant de l’amende ou le contenu de la décision proposés.

284 Par conséquent, cette branche du troisième moyen doit également être écartée. […]»

Sur l’insuffisance de motivation de la décision attaquée

XXVIII. Le Tribunal a notamment jugé ce qui suit:

«297 La motivation de la décision attaquée a, conformément aux exigences de l’article 190 du traité CE (devenu article 253 CE), fait apparaître d’une façon claire et non équivoque le raisonnement de la Commission et ainsi permis, d’une part, à la requérante de connaître les motifs de ladite décision, afin de défendre ses droits, et, d’autre part, au Tribunal d’exercer son contrôle sur le bien-fondé de celle-ci (voir arrêt de la Cour du 15 mai 1997, Siemens/Commission, C-278/95 P, Rec. p. I-2507, point 17, et arrêts du Tribunal du 6 avril 1995, Martinelli/Commission, T-150/89, Rec. p. II-1165, point 65, et [du 21 octobre 1997,] Deutsche Bahn/Commission, [T-229/94, Rec. p. II-1689,] point 96).

298 En effet, il est expliqué clairement dans la décision attaquée, et cela pour les divers comportements incriminés, le motif pour lequel la Commission a estimé que la requérante avait enfreint l’article 85, paragraphe 1, du traité. Les analyses opérées par la Commission ont permis au Tribunal d’exercer son contrôle de légalité. De même, tant dans sa requête que pendant la suite de la procédure, la requérante a répondu aux raisonnements développés par la Commission dans la décision quant à la constatation d’une infraction, ce qui démontre que la décision lui a fourni les indications nécessaires lui permettant de défendre ses droits.

299 Par ailleurs, dans la décision et, plus précisément, aux considérants 194 à 201 de celle-ci, la Commission a, comme il est exposé au point 27 ci-dessus, expressément répondu à certaines des observations présentées par la requérante et Audi en réponse à la communication des griefs. Il convient d’ajouter, à cet égard, qu’il n’incombait pas à la Commission de répondre aux objections détaillées de la requérante, comme celles avancées quant à sa politique en matière de marge. Il suffisait que la Commission explique clairement et sans équivoque, comme elle l’a fait aux considérants 62 à 66 de la décision, pourquoi elle estimait qu’un système de marge fractionnée avait été mis en oeuvre (voir arrêt Siemens/Commission, précité, points 17 et 18). De même, la Commission a dûment motivé ses analyses des documents saisis en expliquant amplement pour quels motifs elle estimait que ces documents étaient de nature à démontrer l’existence de l’infraction alléguée, sans répondre point par point aux interprétations différentes de ceux-ci défendues par la requérante dans la réponse à la communication des griefs. […]»

Sur le caractère excessif de l’amende infligée

XXIX. En ce qui concerne, tout d’abord, le caractère délibéré de l’infraction, le Tribunal a jugé ce qui suit:

«334 Pour ce qui concerne la première question, il est constant que, en l’espèce, la Commission a retenu le caractère délibéré de l’infraction et non la simple négligence (considérant 214 de la décision). Cette appréciation s’avère entièrement justifiée. En effet, comme il a été constaté ci-dessus dans le cadre du premier moyen, la requérante a pris des mesures ayant pour objet le cloisonnement du marché italien et donc d’entraver le jeu de la concurrence [¼ ]. Par ailleurs, pour qu’une infraction aux règles de la concurrence du traité puisse être considérée comme ayant été commise de propos délibéré, il n’est pas nécessaire que l’entreprise ait eu conscience d’enfreindre ces règles; il suffit qu’elle n’ait pu ignorer que sa conduite avait pour objet de restreindre la concurrence (voir arrêts du Tribunal du 2 juillet 1992, Dansk Pelsdyravlerforening/Commission, T-61/89, Rec. p. II-1931, point 157, et du 6 avril 1995, Ferriere Nord/Commission, T-143/89, Rec. p. II-917, point 41). Or, compte tenu de l’existence d’une jurisprudence bien établie selon laquelle des comportements de cloisonnement de marchés sont incompatibles avec les règles communautaires de la concurrence [¼ ], la requérante ne pouvait pas ignorer que sa conduite entravait le jeu de la concurrence.»

XXX. En ce qui concerne, ensuite, la question de savoir si la règle des 15 % a été notifiée à la Commission et les conséquences qui en découlent pour la détermination de l’amende dans la décision attaquée, le Tribunal a jugé ce qui suit:

«342 Quant à l’argumentation selon laquelle la convenzione B avait été notifiée en 1988 et, par conséquent, la Commission ne pouvait pas sanctionner la requérante pour la règle des 15 % convenue dans ledit accord, il convient de rappeler, tout d’abord, que l’interdiction imposée par l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n 17 d’infliger des amendes pour des agissements postérieurs à la notification à la Commission et antérieurs à la décision par laquelle elle accorde ou refuse l’application de l’article 85, paragraphe 3, du traité, pour autant qu’ils restent dans les limites de l’activité décrite dans la notification, ne joue que pour des accords effectivement notifiés selon les formalités requises (arrêt de la Cour du 10 décembre 1985, Stichting Sigarettenindustrie e.a./Commission, 240/82 à 242/82, 261/82, 262/82, 268/82 et 269/82, Rec. p. 3831, point 77; arrêt [du Tribunal du 21 février 1995,] SPO e.a./Commission, [T-29/92, Rec. p. II-289,] point 342; voir également arrêt de la Cour du 10 juillet 1980, Distillers Company/Commission, 30/78, Rec. p. 2229, points 23 et 24). Il convient d’observer, ensuite, que par une lettre datant du 25 novembre 1988 (annexe 3 au mémoire en défense) la Commission a fait savoir à Autogerma que la communication par celle-ci de la convenzione B ne constituait pas une notification au sens du règlement n 17 […]

343 Indépendamment de la question de savoir si la communication de la convenzione B constituait ou non une notification au sens du règlement n 17, le fait même que cette convention ait été communiquée à la Commission déjà en 1988 aurait dû conduire celle-ci à ne pas considérer que ladite convention constituait, à elle seule, un élément justifiant la majoration du montant fixé pour la gravité de l’infraction (considérant 217 de la décision). Par conséquent, la période de 1988 à 1992, pendant laquelle la règle des 15 % stipulée dans la convenzione B constitue le seul acte incriminé (voir considérant 202 de la décision), ne doit pas être prise en compte pour la fixation de l’amende, même si ladite règle a, à juste titre, été qualifiée d’incompatible avec le traité (voir, sur ce dernier point, ci-dessus points 49 et 189).

344 En revanche, la règle des 15 % pouvait être prise en compte, en vue de la fixation de l’amende, pour la période de 1993 à 1996. En effet, comme il a été constaté ci-dessus [¼ ], pendant ladite période, le plafond prévu par la règle des 15 % a été combiné et ainsi renforcé, en vue d’entraver les réexportations, avec d’autres mesures. […] Par conséquent, même s’il était établi que la convenzione B a été notifiée, il conviendrait toujours de constater que, depuis 1993, l’application de la règle des 15 % est sortie des limites de l’activité telle que décrite dans le texte de la convention communiquée à la Commission, de sorte que, en vertu du libellé clair de l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n 17, l’exemption d’amende ne jouerait plus. Il s’ensuit qu’il aurait été approprié de retenir comme date de départ de la période à prendre en compte pour la fixation de l’amende le 1er septembre 1993 [¼ ]»

XXXI. Enfin, au point 346 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que, la durée de l’infraction à prendre en compte pour la fixation de l’amende étant réduite à une période de l’ordre de trois ans et la description de l’infraction telle que faite par la Commission pour mesurer la gravité de l’infraction n’étant pas intégralement exacte, il y avait lieu de procéder, dans le cadre de son pouvoir de pleine juridiction, à la réformation de la décision attaquée et à la réduction du montant de l’amende infligée à la requérante.

XXXII. À cet égard, le Tribunal a jugé ce qui suit:

«347 Toutefois, la réduction de l’amende ne doit pas nécessairement être proportionnelle à la réduction de la durée que la Commission avait prise en compte ni correspondre à la somme des pourcentages de majoration calculés par la Commission au titre de la période allant de 1988 à août 1993, du dernier trimestre de l’année 1996 et de l’année 1997 (voir, par analogie, arrêt Dunlop Slazenger/Commission, précité, point 178). En effet, il appartient au Tribunal, dans le cadre de sa compétence en la matière, d’apprécier lui-même les circonstances de l’espèce afin de déterminer le montant de l’amende (arrêt de la Cour du 9 novembre 1983, Michelin/Commission, 322/81, Rec. p. 3461, point 111; arrêt du Tribunal du 11 mars 1999, Preussag Stahl/Commission, T-148/94, Rec. p. II-613, point 728). En l’espèce, l’importante gravité intrinsèque de l’infraction commise, telle que mise en évidence ci-dessus au point 336, d’une part, et la façon intensive avec laquelle les mesures illicites ont été mises en oeuvre, comme le démontre la correspondance abondante discutée ci-dessus dans le cadre du premier moyen, d’autre part, nécessitent une amende réellement dissuasive (voir arrêt du Tribunal du 10 mars 1992, Solvay/Commission, T-12/89, Rec. p. II-907, point 309, et arrêt [de la Cour] du 17 juillet 1997, Ferriere Nord/Commission, [C-219/95 P, Rec. p. I-4411,] point 33). À la lumière de ces considérations, l’amende infligée de 102 000 000 écus, qui correspondait approximativement, comme la requérante l’a confirmé en réponse à une question écrite du Tribunal, à 0,5 % du chiffre d’affaires réalisé en 1997 par le groupe Volkswagen dans les trois États Italie, Allemagne et Autriche et à 0,25 % de celui qu’il a réalisé dans l’Union européenne la même année, ne présente pas un caractère anormalement élevé. Enfin, le fait que les conclusions de la Commission en ce qui concerne le système de marge fractionnée et la résiliation de certains contrats de concession ont été jugées non suffisamment démontrées, ne diminue pas la gravité importante de l’infraction en cause, dûment établie par la preuve des autres comportements incriminés [¼ ].

348 Au vu de l’ensemble des circonstances et considérations susmentionnées, le Tribunal, statuant dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction au sens des articles 172 du traité CE (devenu article 229 CE) et 17 du règlement n 17 (voir arrêts de la Cour du 15 décembre 1994, Finsider/Commission, C-320/92 P, Rec. p. I-5697, point 46, et du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission, C-185/95 P, Rec. p. I-8417, point 129), estime justifié de ramener le montant de l’amende, […], à 90 000 000 euros.»

XXXIII. Le dispositif de l’arrêt attaqué est libellé comme suit:

«1) La décision 98/273/CE de la Commission, du 28 janvier 1998, relative à une procédure d’application de l’article 85 du traité CE (IV/35.733 VW), est annulée en ce qu’elle constate:

a) qu’un système de marge fractionnée et la résiliation de certains contrats de concession à titre de sanction constituaient des mesures prises afin d’entraver les réexportations de véhicules des marques Volkswagen et Audi à partir de l’Italie par des consommateurs finals et des concessionnaires desdites marques d’autres États membres;

b) que l’infraction n’était pas complètement terminée dans la période allant du 1er octobre 1996 jusqu’à l’adoption de la décision.

2) Le montant de l’amende infligée à la requérante par l’article 3 de la décision attaquée est ramené à 90 000 000 euros.

3) Le recours est rejeté pour le surplus.

4) La requérante supportera ses propres dépens et 90 % des dépens exposés par la Commission.

5) La Commission supportera 10 % de ses propres dépens.»

Le pourvoi

XXXIV. Par son pourvoi, la requérante conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

— annuler l’arrêt attaqué et prononcer l’annulation de la décision attaquée;

— condamner la Commission aux dépens de la procédure devant le Tribunal et devant la Cour.

XXXV. Dans son mémoire en réplique, la requérante précise que ses conclusions doivent être comprises et interprétées à la lumière de la motivation du pourvoi, dont il résulte qu’elle ne demande pas l’annulation de l’arrêt attaqué dans son intégralité, mais seulement dans la mesure où il lui fait grief.

XXXVI. La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

— rejeter le pourvoi;

— annuler l’arrêt attaqué et renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue, dans la mesure où il a réduit à 90 000 000 euros le montant de l’amende infligée à la requérante sans prendre en compte, dans la fixation de cette amende, la règle des 15 % stipulée dans la «convenzione B» du contrat de concession conclu en 1988 pour la période de 1988 à 1992;

— condamner la requérante aux dépens de la procédure devant la Cour et réserver au Tribunal la décision relative aux dépens dans le pourvoi incident.

Sur le pourvoi principal

XXXVII. À l’appui de son pourvoi la requérante invoque neuf moyens qui sont formulés comme suit:

— contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal, la réduction de 3 % de la prime des concessionnaires italiens qui ont effectué plus de 15 % de leurs ventes en dehors de leur territoire contractuel ne viole pas l’article 85, paragraphe 1, du traité et, en tout état de cause, elle est couverte par le règlement n 123/85 (premier moyen);

— «l’approvisionnement restrictif» du marché italien sur lequel le Tribunal se fonde ne relève pas, en tant que mesure unilatérale, de l’interdiction des ententes prévue audit article 85, paragraphe 1 (deuxième moyen);

— la prise en considération du régime des primes (voir premier moyen) dans le calcul de l’amende viole l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n 17 (troisième moyen);

— les constatations du Tribunal au sujet du caractère intentionnel de l’infraction ne remplissent pas les exigences de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n 17 (quatrième moyen);

— le Tribunal a fondé l’arrêt attaqué sur des faits différents de ceux sur lesquels repose la décision attaquée (cinquième moyen);

— le Tribunal a méconnu le droit d’être entendu (en tant que droit de la défense) en exploitant, au détriment de la requérante, des plaintes de consommateurs au sujet desquels cette dernière n’a pas pu présenter son point de vue au cours de la procédure administrative (sixième moyen);

— contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal, la décision attaquée n’est pas suffisamment motivée et elle est, de ce fait, illégale (septième moyen);

— le Tribunal n’a pas respecté son obligation de motivation au regard de l’amende qu’il a fixée (huitième moyen), et

— l’annonce anticipée du projet de décision par le commissaire chargé des affaires de concurrence entraîne, en tout état de cause, l’illégalité de la décision attaquée (neuvième moyen).

Sur le premier moyen

Argumentation des parties

XXXVIII. Par son premier moyen, la requérante conteste l’appréciation juridique du Tribunal selon laquelle la règle des 15 %, même prise isolément, n’est pas compatible avec l’article 85, paragraphe 1, du traité ou n’était, en tout état de cause, pas couverte par le règlement n 123/85 en vigueur à l’époque (point 49 de l’arrêt attaqué; voir également point 189, lu en combinaison avec le point 343 de l’arrêt attaqué).

XXXIX. Pour ce qui concerne l’interprétation de l’article 85, paragraphe 1, du traité, elle fait valoir que, dans sa requête devant le Tribunal, elle a soutenu le raisonnement suivant qui, sur le fond, n’a pas été contesté. Un concessionnaire qui vend un véhicule dans une zone qui ne relève pas de son territoire contractuel supporterait généralement beaucoup moins de frais, tant en ce qui concerne l’opération de vente que le service postérieur à celle-ci, qu’en cas de vente à l’intérieur de son territoire contractuel. Dès lors, la perte de la prime serait compensée par un avantage économique correspondant. Par conséquent, le système des primes n’aurait été restrictif de concurrence ni dans son objet ni dans ses effets. Il ne violerait donc pas l’article 85, paragraphe 1, du traité.

XL. Contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal, la règle des 15 % serait en tout état de cause couverte par l’exemption accordée en vertu du règlement n 123/85. Le but recherché aurait été que le concessionnaire s’occupe en priorité des clients de son territoire. À cet égard, il résulterait des premier et neuvième considérants ainsi que de l’article 4, paragraphe 1, points 3 et 8, du règlement n 123/85 que celui-ci reconnaît la responsabilité particulière que doit supporter le concessionnaire en ce qui concerne son territoire contractuel.

XLI. En particulier, si, conformément à l’article 4, paragraphe 1, point 3, du règlement n° 123/85, le constructeur ou l’importateur peuvent obliger le concessionnaire à s’efforcer d’écouler à l’intérieur de son territoire contractuel un nombre minimal de véhicules, le fournisseur serait également en droit d’accorder des primes si l’activité de ce concessionnaire est exercée avec succès à l’intérieur dudit territoire contractuel. Il en serait à tout le moins ainsi lorsqu’il s’agit de pourcentages relativement réduits par rapport à la rémunération totale (jusqu’à 3 %) et si, pour la plupart des ventes (jusqu’à 15 %), même celles effectuées au profit de clients d’autres territoires contractuels sont récompensées.

XLII. La Commission soutient que ce moyen est manifestement irrecevable. La requérante ne ferait que répéter ce qu’elle avait déjà invoqué en première instance sans remettre en cause le raisonnement du Tribunal figurant aux points 49 et 189 de l’arrêt attaqué.

XLIII. À titre subsidiaire, le moyen serait dénué de fondement. La règle de la prime aurait restreint les possibilités pour les utilisateurs finals et les concessionnaires d’autres États membres d’acquérir des véhicules en Italie et aurait donc entraîné une discrimination directe en ce qui concerne les exportations. Constituant ainsi une mesure qui a contribué au cloisonnement des marchés et que la requérante a précisément mise en oeuvre à cette fin, la règle des 15 % ne pourrait d’emblée bénéficier d’une exemption.

Appréciation de la Cour

XLIV. Il ressort des points 49 et 189 de l’arrêt attaqué, lus en combinaison avec le point 343 de celui-ci, que la règle des 15 % doit, selon le Tribunal, être qualifiée d’incompatible avec l’article 85, paragraphe 1, du traité, parce qu’elle était de nature à inciter les concessionnaires italiens à vendre au moins 85 % des véhicules disponibles à l’intérieur de leur territoire contractuel, que, partant, elle restreignait les possibilités pour les utilisateurs finals et les concessionnaires d’autres États membres d’acquérir des véhicules en Italie et qu’elle avait donc pour objet d’assurer une certaine protection territoriale et, dans cette mesure, le cloisonnement du marché. Le Tribunal a en outre constaté, audit point 49, que la Commission a pu conclure à juste titre que ladite règle sortait du cadre de l’exemption accordée par le règlement n° 123/85, parce que, si ce dernier offre aux constructeurs d’importants moyens de protection de leurs réseaux, il ne les autorise pas à prendre des mesures qui contribuent à un cloisonnement des marchés.

XLV. Or, pour contester la constatation du Tribunal relative à la violation de l’article 85, paragraphe 1, du traité, la requérante se borne à reproduire les arguments qu’elle a invoqués à cet égard dans sa requête devant le Tribunal, sans mettre en cause le raisonnement sur le fondement duquel ce dernier a conclu que la règle des 15 % constituait une mesure de cloisonnement du marché ni la constatation selon laquelle une telle règle doit être qualifiée de mesure incompatible avec l’article 85, paragraphe 1, du traité.

XLVI. Dès lors, cette première branche du moyen doit être rejetée comme irrecevable.

XLVII. En effet, conformément à une jurisprudence constante, ne répond pas aux exigences de motivation résultant de l’article 58 du statut de la Cour de justice et de l’article 112, paragraphe 1, premier alinéa, sous c), du règlement de procédure de cette dernière un pourvoi qui, sans même comporter une argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont serait entaché l’arrêt attaqué, se limite à répéter ou à reproduire textuellement les moyens et les arguments qui ont été présentés devant le Tribunal. En effet, un tel pourvoi constitue en réalité une demande visant à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal, ce qui, aux termes de l’article 56 dudit statut, échappe à la compétence de celle-ci (voir arrêts du 4 juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C-352/98 P, Rec. p. I-5291, point 35; du 13 juillet 2000, Salzgitter/Commission, C-210/98 P, Rec. p. I-5843, point 42, et du 16 mai 2002, ARAP e.a/Commission, C-321/99 P, Rec. p. I-4287, point 48).

XLVIII. La requérante soutient également que, en constatant que la règle des 15 % n’était pas couverte par le règlement n° 123/85, le Tribunal a interprété et appliqué de manière erronée ce règlement, en ce qu’il a méconnu la responsabilité particulière qui est reconnue au concessionnaire à l’égard de son territoire contractuel par l’article 4, paragraphe 1, points 3 et 8, de ce règlement, lu à la lumière de ses premier et neuvième considérants.

XLIX. Il suffit de constater à cet égard qu’une mesure tendant au cloisonnement du marché entre États membres ne saurait relever des dispositions du règlement n° 123/85 relatives aux obligations que peut légitimement assumer le distributeur dans le cadre d’un contrat de concession. En effet, ainsi que l’a jugé à bon droit le Tribunal au point 49 de l’arrêt attaqué, bien que ce règlement offre aux constructeurs d’importants moyens de protection de leurs réseaux, il ne les autorise pas à prendre des mesures qui contribuent à un cloisonnement des marchés (arrêt Bayerische Motorenwerke, précité, point 37).

L. Par conséquent, cette seconde branche du moyen n’est pas fondée.

LI. Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté dans son ensemble.

Sur le deuxième moyen

Argumentation des parties

LII. Par son deuxième moyen, la requérante conteste l’appréciation du Tribunal, figurant au point 236 de l’arrêt attaqué, selon laquelle les mesures d’approvisionnement restrictif du marché italien constituent des accords au sens de l’article 85, paragraphe 1, du traité, au motif qu’elles s’insèrent dans un ensemble de relations commerciales continues régies par un accord général préétabli.

LIII. Selon la requérante, les faits de la présente affaire diffèrent considérablement de ceux des affaires ayant donné lieu aux arrêts précités Ford/Commission et Bayerische Motorenwerke, mentionnés par le Tribunal. Au point 21 de cet arrêt Ford/Commission, la Cour aurait considéré que les concessionnaires avaient donné leur accord à la décision du fabricant. De même, au point 17 dudit arrêt Bayerische Motorenwerke, la Cour aurait tenu compte du fait que la circulaire dont il s’agissait entrait dans le cadre des relations contractuelles entre Bayerische Motorenwerke AG et ses distributeurs et qu’elle renvoyait d’ailleurs expressément à maintes reprises au contrat de concession.

LIV. En outre, dans son arrêt du 26 octobre 2000, Bayer/Commission (T-41/96, Rec. p. II-3383, point 169), le Tribunal aurait expressément souligné que l’élément subjectif que constitue la concordance de volontés est une condition sine qua non d’application de l’article 85, paragraphe 1, du traité. Il ne suffirait donc pas de renvoyer au contrat de concession pour établir l’approbation par les concessionnaires d’une politique d’approvisionnement prétendument restrictive.

LV. Dans la présente affaire, même si le contrat de concession prévoyait la possibilité d’approvisionner les concessionnaires au-dessous des besoins qu’ils déclaraient, toutefois, le motif de cet approvisionnement inférieur aux besoins déclarés, tel que constaté par le Tribunal, à savoir l’entrave aux exportations, n’était pas couvert par le contrat de concession. En effet, conformément à celui-ci, les concessionnaires auraient été libres de vendre les véhicules livrés par la requérante à des utilisateurs finals étrangers et à d’autres concessionnaires. Les restrictions constatées par le Tribunal n’auraient pas été voulues par ces derniers puisqu’ils ont refusé les réductions de livraisons et elles auraient présenté, dans la mesure où elles ont existé, le caractère d’une mesure unilatérale échappant aux prévisions de l’article 85, paragraphe 1, du traité. L’arrêt attaqué méconnaîtrait le texte de cette disposition et ferait disparaître la frontière qui sépare celle-ci de l’article 86 du traité CE (devenu article 82 CE).

LVI. La Commission soutient que ce moyen est dénué de fondement. La requérante confirmerait elle-même que la restriction de l’approvisionnement en tant que telle était possible en vertu du contrat. En conséquence, les concessionnaires auraient approuvé la possibilité d’une telle restriction de l’approvisionnement en concluant le contrat. Lorsque la requérante a fait usage de cette possibilité, elle l’aurait fait dans le cadre de relations commerciales continues régies par un accord général préétabli, à savoir le contrat de concession (point 236 de l’arrêt attaqué).

LVII. Le Tribunal aurait correctement appliqué la jurisprudence de la Cour qu’il a lui-même citée. Les arrêts précités Ford/Commission et Bayerische Motorenwerke ne confirmeraient nullement la thèse de la requérante selon laquelle il conviendrait de différencier la solution à retenir en fonction des objectifs qu’elle poursuivait en faisant usage de la possibilité d’une restriction d’approvisionnement prévue par le contrat. En effet, dans les contrats de concession des sociétés en cause dans les affaires ayant donné lieu auxdits arrêts, il n’aurait nullement été prévu que le concessionnaire ne devait pas effectuer d’exportations ou que le fabricant ne devait pas faire usage des possibilités que lui accordaient ces contrats afin d’entraver les exportations.

LVIII. Enfin, au point 169 de l’arrêt Bayer/Commission, précité, invoqué par la requérante, le Tribunal aurait interprété un autre arrêt de la Cour concernant également Bayerische Motorenwerke AG, à savoir l’arrêt du 12 juillet 1979, BMW Belgium e.a./Commission (32/78 et 36/78 à 82/78, Rec. p. 2435). La comparaison entre cet arrêt et l’arrêt Bayerische Motorenwerke, précité, montrerait seulement qu’un acte apparemment unilatéral (comme l’invitation adressée par un constructeur automobile à ses concessionnaires ou l’approvisionnement unilatéral de ceux-ci par le fabricant) constitue en réalité un accord lorsqu’il s’insère dans un ensemble de relations commerciales continues régies par un accord général préétabli (voir arrêts précités Ford/Commission et Bayerische Motorenwerke, mentionnés au point 236 de l’arrêt attaqué) ou lorsque les concessionnaires ont exprimé leur accord en adoptant un certain comportement en réaction à l’acte en question (voir arrêt BMW Belgium e.a./Commission, précité).

LIX. La thèse de la requérante selon laquelle un accord ne pourrait être considéré comme conclu que si les destinataires ou «victimes» d’un acte apparemment unilatéral ont exprimé leur accord par leur comportement et non si l’acte unilatéral s’insère dans un ensemble de relations commerciales continues régies par un accord général préétabli ne serait pas compatible avec les arrêts précités Ford/Commission et Bayerische Motorenwerke et devrait donc être rejetée.

Appréciation de la Cour

LX. Selon une jurisprudence constante, une invitation adressée par un constructeur automobile à ses distributeurs sous contrat constitue non pas un acte unilatéral qui échapperait au champ d’application de l’article 85, paragraphe 1, du traité, mais un accord au sens de cette disposition, lorsqu’elle s’insère dans un ensemble de relations commerciales continues régies par un accord général préétabli (arrêts précités Ford/Commission, point 21, et Bayerische Motorenwerke, points 15 et 16).

LXI. Au point 236 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que cette jurisprudence s’appliquait en l’espèce, parce que les mesures prises par la requérante, parmi lesquelles figuraient la règle des 15 % et le contingentement de l’approvisionnement, visaient toutes à influencer les concessionnaires italiens dans l’exécution de leur contrat avec Autogerma.

LXII. La requérante reproche au Tribunal d’avoir conclu à tort que ladite jurisprudence est applicable en l’espèce. Elle fait valoir que, dans les arrêts précités Ford/Commission et Bayerische Motorenwerke, les restrictions constatées trouvaient leur origine dans le contrat de concession. En revanche, dans la présente affaire, même si le contrat de concession prévoyait la possibilité d’une limitation des livraisons aux concessionnaires italiens, le motif de cet approvisionnement restreint tel que constaté par le Tribunal, à savoir l’entrave aux réexportations à partir de l’Italie des véhicules livrés à ces derniers, ne serait pas couvert par le contrat de concession, lesdits concessionnaires étant libres de vendre ces véhicules à des utilisateurs finals et à des distributeurs étrangers. À défaut pour les concessionnaires d’avoir eux-mêmes exprimé leur accord avec les restrictions constatées, celles-ci constitueraient, dans la mesure où elles ont existé, une mesure unilatérale échappant à l’article 85, paragraphe 1, du traité.

LXIII. À cet égard, il ressort des points 79 à 90 de l’arrêt attaqué que la requérante a mis en oeuvre une politique de contingentement de l’approvisionnement des concessionnaires italiens dans le but explicite d’entraver les réexportations à partir de l’Italie et donc de cloisonner le marché italien. Il ressort également du point 236 dudit arrêt que cette politique a pu être imposée en vertu du contrat de concession.

LXIV. La requérante ne conteste ni que le contrat de concession prévoyait la possibilité de limiter les livraisons aux concessionnaires italiens ni la constatation du Tribunal selon laquelle cette limitation a été mise en oeuvre dans le but explicite d’entraver les réexportations à partir de l’Italie des véhicules livrés auxdits concessionnaires.

LXV. Il s’ensuit que, en acceptant le contrat de concession, les concessionnaires italiens ont consenti à une mesure qui a été utilisée par la suite pour entraver des réexportations à partir de l’Italie et donc pour restreindre la concurrence intracommunautaire.

LXVI. Quant à l’allégation de la requérante selon laquelle l’entrave aux réexportations des véhicules livrés aux concessionnaires italiens n’était pas voulue par ces derniers, il convient de prendre en considération les points 90 et 91 de l’arrêt attaqué, auxquels renvoie le point 236 de celui-ci. Dans ces points, le Tribunal, après avoir rejeté les arguments de la requérante selon lesquels les concessionnaires italiens auraient décidé de leur propre gré qu’il n’était pas intéressant pour eux de vendre des véhicules hors de leur territoire contractuel, a constaté que lesdits concessionnaires, confrontés simultanément à un approvisionnement restreint et à la règle des 15 % – également convenue dans le cadre du contrat de concession (voir points 44, 48 et 342 de l’arrêt attaqué) – et sachant que les réexportations étaient très mal perçues par Autogerma et les constructeurs, avaient manifestement tout intérêt à vendre le nombre limité de véhicules disponibles uniquement ou quasi uniquement à des acheteurs résidant en Italie et que, par conséquent, leur comportement commercial a été influencé par les constructeurs et Autogerma.

LXVII. Il découle de ce qui précède que, contrairement à ce que prétend la requérante, le Tribunal a constaté que la limitation des réexportations, qui était l’objectif poursuivi par cette dernière, résultait également du comportement commercial des concessionnaires italiens et que ce comportement a été influencé par la requérante, étant de surcroît constant que les moyens mis en oeuvre à cet effet, notamment l’approvisionnement restreint en véhicules, résultaient des clauses du contrat de concession et avaient donc recueilli l’accord des concessionnaires.

LXVIII. En présence de ces éléments, c’est à bon droit que le Tribunal a fait application en l’espèce de la jurisprudence citée au point 236 de l’arrêt attaqué.

LXIX. Le deuxième moyen doit donc être rejeté.

Sur le troisième moyen

Argumentation des parties

LXX. Par son troisième moyen, la requérante fait valoir en premier lieu que l’appréciation du Tribunal, figurant au point 342 de l’arrêt attaqué, selon laquelle la «convenzione B», et donc la règle des 15 % qui y était stipulée, n’avait pas été notifiée selon les formalités requises, est erronée.

LXXI. Elle expose qu’il résulte du droit communautaire en vigueur à l’époque des faits [règlement n° 27 de la Commission, du 3 mai 1962, premier règlement d’application du règlement n° 17 (Forme, teneur et autres modalités des demandes et notifications) (JO 1962, 35, p. 1118), dans sa version résultant du règlement (CEE) n° 2526/85 de la Commission, du 5 août 1985 (JO L 240, p. 1, ci-après le «règlement n° 27»), et notamment la partie VI, premier alinéa, de la «note complémentaire» qui figure dans l’annexe de ce dernier règlement; voir également, à partir de 1993, le règlement (CE) n° 3666/93 de la Commission, du 15 décembre 1993, modifiant les règlements n° 27 et (CEE) n° 1629/69, (CEE) n° 4260/88, (CEE) n° 4261/88 et (CEE) n° 2367/90 en vue de la mise en oeuvre des règles de concurrence établies dans l’accord sur l’Espace économique européen (JO L 336, p. 1), et notamment la «note complémentaire» figurant en annexe de ce règlement] que, s’agissant des modifications ultérieures d’accords notifiés, leur communication informelle à la Commission doit, sous l’angle de sa validité juridique, être appréciée de la même manière qu’une notification.

LXXII. Ensuite, en jugeant au point 344 de l’arrêt attaqué que, depuis 1993, l’application de la règle des 15 % est sortie des limites de l’activité telle que décrite dans la convention communiquée à la Commission, de sorte que l’exemption d’amende ne jouerait plus, le Tribunal aurait interprété l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n° 17 contre le libellé de cette disposition. En effet, celle-ci utilise l’expression «pour autant […]» et non pas la conjonction «si […]», ce qui signifierait que, pour ce qui a été notifié, l’exemption d’amende continue à jouer, mais qu’en revanche elle ne saurait jouer seulement pour ce qui sort du cadre de ladite notification. Il en résulterait que la prise en considération de la règle des 15 % dans le calcul de l’amende, à partir de 1993, viole l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n° 17.

LXXIII. La Commission fait valoir que l’interdiction d’infliger des amendes figurant à l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n° 17 ne s’applique expressément que dans le cas d’accords effectivement notifiés. La simple communication d’un accord ne serait pas une notification. Le respect des formalités prescrites à l’article 4 du règlement n° 27 ne serait pas une fin en soi, mais devrait permettre d’examiner l’accord notifié du point de vue du droit de la concurrence. En se contentant de communiquer un accord, les entreprises ne sauraient satisfaire à l’obligation d’exposition des motifs de la demande et de preuve requise pour pouvoir bénéficier d’une exemption au titre de l’article 85, paragraphe 3, du traité (voir arrêt du Tribunal SPO e.a/Commission, précité, point 262).

LXXIV. Ce serait à tort que la requérante invoque la partie VI de la note complémentaire du règlement n° 27. Il y serait précisé qu’il importe d’informer la Commission de toute modification substantielle apportée à l’entente après la demande ou la notification. Or, la «convenzione B» n’aurait pas seulement modifié le contrat de concession notifié en 1963. En raison de la règle des 15 %, cette convention contiendrait au contraire un nouvel accord ayant pour objet et comme conséquence de limiter la concurrence, ce qui n’était nullement le cas dans le contrat de concession notifié.

LXXV. La critique formulée par la requérante à l’encontre du point 344 de l’arrêt attaqué ne serait pas fondée. En effet, la règle des 15 % ainsi que les autres mesures avec lesquelles elle était combinée, et qui l’ont renforcée depuis 1993 en vue d’entraver les réexportations, constitueraient une infraction unique ayant pour seul objectif économique de cloisonner le marché italien. Il serait donc artificiel de subdiviser strictement cette conduite caractérisée par une seule finalité (voir point 234 de l’arrêt attaqué).

Appréciation de la Cour

LXXVI. Par la première branche de ce moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir constaté à tort, au point 342 de l’arrêt attaqué, que la «convenzione B», et donc la règle des 15 % qui y était stipulée, n’a pas été notifiée à la Commission selon les formalités requises.

LXXVII. Toutefois, audit point 342 le Tribunal, après avoir relevé que l’interdiction imposée par l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n° 17 d’infliger des amendes ne joue que pour des accords effectivement notifiés selon les formalités requises, s’est limité à prendre acte du fait que, selon la Commission, la communication de la «convenzione B» ne constituait pas une notification au sens du règlement n° 17, sans toutefois se prononcer lui-même sur cette question.

LXXVIII. L’absence de prise de position du Tribunal à cet égard ressort d’ailleurs clairement du point 343 de l’arrêt attaqué, dans lequel le Tribunal poursuit son raisonnement «indépendamment de la question de savoir si la communication de la convenzione B constituait ou non une notification au sens du règlement n° 17».

LXXIX. Il découle de ce qui précède que la première branche du troisième moyen de la requérante repose sur une lecture erronée du point 342 de l’arrêt attaqué.

LXXX. Dès lors, cette première branche doit être rejetée.

LXXXI. Par la seconde branche de son troisième moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir mal interprété l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n° 17 en constatant, au point 344 de l’arrêt attaqué, que, depuis 1993, l’application de la règle des 15 % était sortie des limites de l’activité telle que décrite dans la «convenzione B», de sorte que, même s’il était établi que cette dernière avait été notifiée dans les formes requises, l’exemption d’amende ne jouerait plus et, par conséquent, la règle des 15 % aurait dû être prise en compte pour la fixation de l’amende à partir du 1er septembre 1993.

LXXXII. Selon la requérante, il ressortirait du libellé de l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n° 17 que l’exemption continue à s’appliquer pour ce qui a été notifié et que, en revanche, elle ne saurait être applicable pour ce qui sort du cadre de ladite notification.

LXXXIII. Il convient de rappeler à cet égard que, conformément à l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n° 17, les amendes ne peuvent pas être infligées pour des agissements postérieurs à la notification à la Commission et antérieurs à la décision par laquelle celle-ci accorde ou refuse l’application de l’article 85, paragraphe 3, du traité «pour autant qu’ils restent dans les limites de l’activité décrite dans la notification».

LXXXIV. Il ressort de cette disposition que, a contrario, lorsque les agissements dont il s’agit sortent des limites de l’activité notifiée, l’exemption d’amende ne saurait trouver à s’appliquer pour aucun de ces agissements, l’activité concernée ne correspondant plus à celle décrite dans la notification. Cette constatation est corroborée par la considération que, dans un cas tel que celui de la présente espèce où le comportement incriminé est constitué d’un faisceau de mesures poursuivant la même finalité, il serait artificiel de subdiviser ledit comportement aux fins d’appliquer l’exemption d’amende à certaines seulement des mesures qui le constituent.

LXXXV. Il en découle que l’interprétation de l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n° 17, telle qu’elle ressort du point 344 de l’arrêt attaqué, n’est entachée d’aucune erreur de droit.

LXXXVI. Dès lors, la seconde branche du troisième moyen doit être rejetée.

LXXXVII. Dès lors, le troisième moyen doit être rejeté dans son ensemble.

Sur le quatrième moyen

Argumentation des parties

LXXXVIII. Par son quatrième moyen, la requérante conteste l’appréciation du Tribunal, au point 334 de l’arrêt attaqué, selon laquelle l’infraction qui lui est reprochée présente un caractère délibéré. Elle soutient à cet égard que le «principe de la faute», qui doit être respecté dans le cadre du droit communautaire de la concurrence, implique que, pour infliger une sanction, il est nécessaire que la personne concernée ait eu un comportement objectivement illégal et que ce comportement puisse lui être subjectivement reproché. Cela resterait valable même lorsqu’il s’agit d’une entreprise, une personne morale ne pouvant se manifester qu’à travers les actions de personnes physiques qui lui sont imputables.

LXXXIX. Or, en l’espèce, la Commission et le Tribunal déduiraient le caractère intentionnel de l’infraction de déclarations de personnes différentes, à tout le moins en partie, des acteurs, sans avoir constaté si ces personnes ont, elles-mêmes, également commis de quelconques infractions objectives. La simple constatation d’agissements objectivement illégaux de certains collaborateurs de la requérante, liée à l’affirmation, concernant d’autres collaborateurs, selon laquelle cette dernière a, dans cette mesure, agi de propos délibéré, ne satisferait pas aux exigences du «principe de la faute». Cela ne signifierait pas que tous les éléments objectifs et subjectifs de l’infraction résultant de chaque comportement devraient être concentrés dans une seule et même personne. Il devrait cependant être prouvé, pour chaque action, qu’elle avait le caractère délibéré qui importe aux fins de l’amende, ce qui n’a pas été fait en l’espèce.

XC. Même en supposant qu’une entreprise est responsable du comportement de toutes les personnes qui agissent dans le cadre de sa sphère d’influence ou de responsabilité (voir, en ce sens, arrêt du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission, 100/80 à 103/80, Rec. p. 1825, point 97), il faudrait, à tout le moins, qu’il puisse être constaté que ces personnes en particulier, à savoir celles qui ont commis l’acte reproché, ont agi fautivement.

XCI. Dans certaines décisions plus anciennes, la Commission et la Cour seraient parties d’une notion normative de la faute, en retenant une faute propre à l’entreprise au lieu de lui imputer simplement la faute de personnes physiques [voir décision 82/203/CEE de la Commission, du 27 novembre 1981, relative à une procédure d’application de l’article 85 du traité CEE [IV/30.188 – Moët et Chandon (London) Ltd] (JO 1982, L 94, p. 7, 10), et décision 82/267/CEE de la Commission, du 6 janvier 1982, relative à une procédure au titre de l’article 85 du traité CEE (IV/28.748 – AEG-Telefunken) (JO L 117, p. 15, 27)]. Le fait de se référer à une culpabilité propre de l’entreprise ne constituerait toutefois que la reconnaissance d’une faute d’organisation pour laquelle ne seraient pas pris en considération les différents agissements objectivement illégaux commis par des collaborateurs. Or, en l’espèce, ni la décision ni l’arrêt attaqués, celui-ci confirmant celle-là, ne permettraient de savoir en quoi pourrait consister cette faute reprochée à la requérante. La Commission et le Tribunal auraient dû, à tout le moins, démontrer que la requérante pouvait se voir reprocher des défaillances dans son organisation ou des violations de son devoir de surveillance [voir, à ce propos, le point 17 de la décision 83/667/CEE de la Commission, du 5 décembre 1983, relative à une procédure d’application de l’article 85 du traité CEE (Affaire n° IV/30.671 – IPTC Belgium) (JO L 376, p. 7), et le point 21 de la décision 85/79/CEE de la Commission, du 14 décembre 1984, relative à une procédure d’application de l’article 85 du traité CEE (IV/30.809 – John Deere) (JO 1985, L 35, p. 58)].

XCII. La Commission considère que la conception de la requérante selon laquelle ne pourraient être imputés à une entreprise les actes d’un collaborateur que si celui-ci réunit en sa personne tous les éléments objectifs et subjectifs d’une infraction n’est pas compatible avec le caractère du droit de la concurrence en tant que droit des entreprises ni avec la division du travail dans l’organisation de celles-ci.

XCIII. Aussi, tous les actes des personnes qui sont autorisées à agir pour le compte des entreprises seraient-ils imputés à ces dernières (voir arrêt Musique Diffusion française e.a./Commission, précité, point 97). Ce serait ce qui ressort clairement du point 234 de l’arrêt attaqué, dans lequel le Tribunal a confirmé la qualification des comportements de la requérante retenue par la Commission qui avait conclu à l’infraction unique.

Appréciation de la Cour

XCIV. Au point 334 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que la requérante avait pris des mesures ayant pour objet le cloisonnement du marché italien et que, compte tenu de l’existence d’une jurisprudence bien établie selon laquelle des comportements de cloisonnement de marchés sont incompatibles avec les règles communautaires de la concurrence, elle ne pouvait pas ignorer que sa conduite entravait le jeu de la concurrence.

XCV. Lors de l’audience, le conseil de la requérante, invité par la Cour à donner quelques précisions sur le quatrième moyen du pourvoi, a indiqué que, afin d’établir le caractère délibéré de l’infraction, la Commission et le Tribunal auraient dû identifier les personnes qui avaient agi fautivement et devaient donc être considérées comme responsables de l’infraction commise ou, à tout le moins, la personne qui aurait dû être tenue pour responsable de l’organisation défaillante de la requérante, en sorte qu’une telle infraction ait pu avoir lieu.

XCVI. Il convient de relever à cet égard que la thèse soutenue par la requérante ne saurait trouver application en droit communautaire de la concurrence, dans lequel les infractions commises donnent lieu à des amendes qui, aux termes de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, sont infligées aux entreprises qui ont participé à l’infraction de propos délibéré ou par négligence. Le paragraphe 4 de la même disposition précise d’ailleurs que les décisions infligeant une telle amende n’ont pas un caractère pénal.

XCVII. Il y a lieu d’ajouter que, si la thèse de la requérante était accueillie, l’efficacité du droit communautaire de la concurrence serait sérieusement affectée.

XCVIII. Il en résulte que le Tribunal n’a, contrairement à ce que prétend la requérante, commis aucune erreur de droit en considérant comme établi le caractère délibéré de l’infraction sans exiger l’identification des personnes qui avaient agi fautivement au sein de l’entreprise ou qui auraient dû être tenues pour responsables de l’organisation éventuellement défaillante de celle-ci.

XCIX. Le quatrième moyen du pourvoi doit donc être rejeté.

Sur le cinquième moyen

Argumentation des parties

C. Par son cinquième moyen, la requérante fait valoir que l’arrêt attaqué est fondé sur des faits différents de ceux sur lesquels repose la décision attaquée. Elle soutient, à cet égard, que la Commission a, dans cette décision, motivé la violation de l’article 85, paragraphe 1, du traité par un faisceau de mesures qu’elle a regardées comme constituant une infraction unique. Or, le Tribunal n’aurait pas confirmé les analyses faites par la Commission aux points 62 à 72 des motifs de la décision attaquée, concernant la politique de marge, et aux points 93 à 97 desdits motifs, relatifs à la résiliation des contrats de concession (voir, respectivement, points 65 à 72 et 166 à 169 de l’arrêt attaqué), ni, par conséquent, la stratégie générale unique de la requérante, qui était composée, selon la Commission, de sept ensembles d’éléments.

CI. Même si, selon le Tribunal, les autres mesures, considérées isolément, étaient contraires à l’article 85, paragraphe 1, du traité, cette juridiction n’aurait pas pu remplacer les faits sur lesquels repose la décision attaquée par d’autres faits et présumer que la Commission aurait adopté la même décision dans une telle hypothèse. Si les faits qui constituent le fondement de cette décision ne sont pas confirmés lors du contrôle exercé par le Tribunal, ce dernier serait tenu d’annuler ladite décision.

CII. La Commission soutient en revanche qu’elle-même et le Tribunal ont apprécié les mêmes faits. La circonstance que le Tribunal a estimé que les preuves présentées par la Commission à propos des deux questions mentionnées au point 100 du présent arrêt étaient insuffisantes serait sans incidence sur le bien-fondé de son appréciation. La Commission ajoute que, si l’on ne peut apporter des preuves suffisantes que pour certains des actes anticoncurrentiels globalement reprochés à l’entreprise concernée, le regroupement de ces actes en une infraction unique n’empêche pas le Tribunal de confirmer la décision en cause pour ce qui est des actes prouvés. Si ces derniers, envisagés isolément, doivent être considérés comme une infraction unique en raison de leur objectif économique unique, le Tribunal ne serait pas non plus empêché de le constater. Selon la Commission, tel était le cas en l’espèce (voir point 234 de l’arrêt attaqué).

Appréciation de la Cour

CIII. Il convient de constater à cet égard que le fait que, dans la décision attaquée, la Commission a estimé que l’infraction reprochée à la requérante était constituée d’un faisceau de mesures n’était pas de nature à empêcher le Tribunal de procéder à l’annulation partielle de cette décision, dès lors qu’il a considéré que certaines des mesures composant l’infraction reprochée n’étaient pas prouvées, ni de confirmer que les mesures dont le caractère anticoncurrentiel était établi constituaient, eu égard à leur finalité commune, une infraction unique.

CIV. En particulier, contrairement à ce que soutient la requérante, le fait que le Tribunal a confirmé le caractère unitaire de l’infraction commise sur le fondement d’une partie seulement des mesures incriminées dans la décision attaquée n’implique aucunement qu’il a fondé son appréciation sur des faits différents de ceux sur lesquels reposait ladite décision.

CV. Dès lors, ce moyen doit également être rejeté.

Sur le sixième moyen

Argumentation des parties

CVI. Par son sixième moyen, la requérante fait valoir que, aux points 105 à 115 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a méconnu son droit d’être entendu en exploitant, à son détriment, des plaintes de consommateurs produites par la Commission en cours d’instance, au sujet desquelles elle n’a pas pu présenter son point de vue au cours de la procédure administrative.

CVII. La Commission n’aurait identifié et pris en compte, à charge de la requérante, que 15 plaintes de consommateurs, révélées à celle-ci durant la procédure administrative dans le cadre de son accès au dossier. La requérante n’aurait eu accès aux autres plaintes qu’après que la Commission, sur injonction du Tribunal du 12 juillet 1999, lui eut communiqué toutes les plaintes par lettre du 10 août 1999. Elle n’aurait pas eu l’occasion de s’exprimer par écrit au sujet de ces plaintes. Elle n’aurait pas davantage été en mesure de présenter des observations détaillées au sujet de celles-ci ni d’expliciter les différents cas particuliers lors de l’audience du 7 octobre 1999, parce que le temps de parole de son conseil a été limité à 30 minutes.

CVIII. Au point 105 de l’arrêt attaqué, le Tribunal utiliserait tous les courriers et télécopies auxquels il se réfère contre la requérante. La même conclusion se dégagerait du point 115 dudit arrêt, dans lequel le Tribunal constate que les documents énumérés aux points 106 à 114 du même arrêt, et qui ont été examinés dans la décision attaquée, révèlent de façon suffisamment représentative les entraves à l’exportation. Le Tribunal considérerait manifestement ces plaintes comme représentatives des autres plaintes qui n’ont pas été transmises à la requérante.

CIX. Selon une jurisprudence constante de la Cour, le droit d’être entendu, en tant que droit de la défense, exigerait que l’entreprise concernée soit mise en mesure, dès le stade de la procédure administrative, de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits, griefs et circonstances allégués par la Commission (voir point 311 de l’arrêt attaqué et jurisprudence y citée). S’il est exclu que la Commission justifie a posteriori sa décision en invoquant des moyens de preuve qui n’ont pas été communiqués à l’entreprise concernée au cours de la procédure administrative, le Tribunal ne devrait pas non plus pouvoir les utiliser contre ladite entreprise.

CX. La Commission rappelle que la requérante s’est exprimée lors de l’audience devant le Tribunal sur le contenu des plaintes de consommateurs qu’elle a versées à la procédure par lettre du 20 août 1999. Elle ajoute que la requérante n’a pas fait valoir que la Commission lui avait totalement ou partiellement refusé l’accès à ces plaintes lors de la procédure administrative et que, en conséquence, le Tribunal ne pouvait les utiliser sans violer le droit d’être entendu.

CXI. En outre, la Commission fait valoir que la requérante contredit la lettre de son représentant du 10 décembre 1996, lue en combinaison avec la déclaration de confirmation du 5 décembre 1996, dans laquelle Mme Pretzell, collaboratrice du représentant de la requérante, affirme qu’elle a pleinement eu accès au dossier de la Commission le 5 décembre 1996.

CXII. En outre, il ressortirait du point 115 de l’arrêt attaqué que le Tribunal se serait uniquement fondé sur les lettres citées aux points 106 à 114 du même arrêt et qui ont été examinées par la Commission dans la décision attaquée. C’est la raison pour laquelle il serait inexact de prétendre, ainsi que le fait la requérante, que le Tribunal aurait utilisé la totalité des plaintes déposées à son encontre comme éléments de preuve.

Appréciation de la Cour

CXIII. Ce moyen repose sur la prémisse selon laquelle la requérante a, pour la première fois, pris connaissance lors de la procédure devant le Tribunal des plaintes de consommateurs produites par la Commission en cours d’instance.

CXIV. Or, cette prémisse s’avère erronée.

CXV. En effet, ainsi que la Commission le soutient dans son mémoire en défense, sans être contredite par la requérante sur ce point, cette dernière a eu, lors de la procédure administrative, pleinement accès au dossier de la Commission, y compris auxdites plaintes.

CXVI. Dans ces conditions, à supposer que, aux points 105 et 115 de l’arrêt attaqué, le Tribunal ait, comme le prétend la requérante, utilisé non seulement les documents analysés par la Commission dans la décision attaquée, mais également la totalité des plaintes déposées à son encontre, la requérante n’est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que le Tribunal a méconnu le droit d’être entendu de cette dernière.

CXVII. Par conséquent, le sixième moyen doit être rejeté.

Sur le septième moyen

Argumentation des parties

CXVIII. Par son septième moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a méconnu l’essence de l’obligation de motivation prévue à l’article 190 du traité en constatant, au point 299 de l’arrêt attaqué, qu’il suffisait que la Commission réponde, dans la décision attaquée, à certaines des objections soulevées par la requérante à la suite de la communication des griefs. Une motivation dans laquelle la Commission, sans méthode identifiable, se contente d’examiner certaines des objections de l’entreprise concernée, en ignorant purement et simplement les autres, ne pourrait ni aider la Commission à se contrôler elle-même ni convaincre cette entreprise du bien-fondé de la décision adoptée, et elle ne permettrait pas d’informer convenablement le public des considérations qui ont conduit la Commission à adopter sa décision, fonctions que doit également remplir la motivation. La conception juridique qui sous-tend le point 297 de l’arrêt attaqué remettrait en question le sens même de la procédure administrative.

CXIX. Il serait significatif à cet égard que, dans la décision attaquée, la Commission n’a pas ou n’a pratiquement pas examiné les objections soulevées par la requérante dans sa réponse à la communication des griefs, objections relatives au système de marge fractionnée et à la durée de l’infraction, deux points sur lesquels le Tribunal aurait annulé ladite décision.

CXX. La Commission soutient que ce moyen est partiellement irrecevable et qu’il est au demeurant dénué de fondement.

CXXI. Étant donné que le Tribunal a annulé la décision attaquée sur les deux points mentionnés par la requérante, la Cour ne pourrait pas annuler ceux-ci de nouveau, même si ces points sont entachés d’un défaut de motivation, ce que le Tribunal a d’ailleurs expressément examiné et rejeté aux points 299 et 300 de l’arrêt attaqué. La requérante n’indiquerait pas les autres points sur lesquels elle estime que ladite décision est affectée d’un défaut de motivation qui aurait pu entraîner son annulation et elle ne soutiendrait pas non plus que le Tribunal aurait dû annuler la décision dans son intégralité en raison d’un prétendu défaut de motivation concernant les deux points susmentionnés.

CXXII. La requérante dénaturerait les considérations énoncées au point 299 de l’arrêt attaqué, dans lequel le Tribunal souligne que la Commission, qui, en tout état de cause, avait déjà satisfait à son obligation de motivation (points 297 et 298), a par ailleurs expressément répondu à certaines des observations présentées par la requérante et Audi à la suite de la communication des griefs. Il ne saurait être inféré de ces considérations que la Commission n’aurait pas eu besoin de répondre aux autres objections soulevées à la suite de cette communication et qu’elle aurait pu tout simplement les ignorer. Le Tribunal ne ferait que constater que la Commission a dûment motivé son appréciation des documents saisis, en explicitant le motif pour lequel cette dernière considérait que ces documents étaient de nature à prouver l’existence de l’infraction alléguée. En outre, il ne ressortirait nullement de la jurisprudence de la Cour que la Commission dût répondre point par point aux différentes interprétations que la requérante avait données de ces documents dans sa réponse à la communication des griefs.

Appréciation de la Cour

CXXIII. Ce moyen comporte deux branches. Par la première branche de celui-ci, la requérante reproche en substance au Tribunal d’avoir défini de manière erronée, au point 297 de l’arrêt attaqué, les exigences auxquelles doit répondre la motivation d’une décision de la Commission telle que celle attaquée. Par la seconde branche du même moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir apprécié également de manière erronée la portée de l’obligation de motivation qui incombe à la Commission en vertu de l’article 190 du traité, en constatant, au point 299 de l’arrêt attaqué, qu’il suffisait que cette dernière réponde à certaines seulement des objections soulevées par la requérante à la suite de la communication des griefs.

CXXIV. Quant à la première branche du moyen, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 190 du trait doit faire apparaître, d’une façon claire et non équivoque, le raisonnement de l’autorité communautaire, auteur de l’acte incriminé, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et au juge communautaire d’exercer son contrôle (voir, notamment, arrêt du 16 mai 2002, France/Commission, C-482/99, Rec. p. I-4397, point 41).

CXXV. Or, c’est précisément sur le fondement de ces critères que le Tribunal a, au point 297 de l’arrêt attaqué, apprécié la motivation de la décision attaquée. Il ne saurait, par conséquent, lui être reproché d’avoir commis une erreur de droit à cet égard.

CXXVI. La première branche du septième moyen doit donc être rejetée.

CXXVII. Quant à la seconde branche dudit moyen, il y a lieu de relever que, si, en vertu de l’article 190 du traité, la Commission est tenue de mentionner les éléments de fait et de droit dont dépend la justification de la décision et les considérations juridiques qui l’ont amenée à prendre celle-ci, cette disposition n’exige pas que la Commission discute tous les points de fait et de droit qui auraient été traités au cours de la procédure administrative (arrêts du 17 janvier 1984, VBVB et VBBB/Commission, 43/82 et 63/82, Rec. p. 19, point 22, et du 11 juillet 1989, Belasco e.a./Commission, 246/86, Rec. p. 2117, point 55).

CXXVIII. En l’espèce, le Tribunal a, aux points 298 à 302 de l’arrêt attaqué, exposé les raisons pour lesquelles il a considéré que la décision attaquée est suffisamment motivée, en soulignant par ailleurs, au point 299, que la Commission avait expressément répondu à certaines des observations présentées par la requérante et Audi à la suite de la communication des griefs.

CXXIX. Dans ces conditions, la constatation audit point 299, selon laquelle il n’incombait pas à la Commission de répondre à toutes les objections détaillées de la requérante, n’est, en elle-même, entachée d’aucune erreur de droit.

CXXX. La requérante soutient toutefois que le Tribunal aurait dû exiger que, dans la décision attaquée, la Commission réponde, à tout le moins, aux objections qu’elle avait formulées à la suite de la communication des griefs, objections qui concernaient le système de marge fractionnée et la durée de l’infraction, deux points sur lesquels le Tribunal a annulé, pour d’autres motifs, ladite décision.

CXXXI. Indépendamment de la question de savoir si la requérante est recevable à reprocher au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit par rapport à une partie de la décision attaquée qui a été annulée pour d’autres motifs, il y a lieu de relever à cet égard que, aux points 299 et 300 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a expliqué les raisons pour lesquelles il a considéré que la décision de la Commission est suffisamment motivée pour ce qui concerne la mise en oeuvre du système de marge fractionnée et la durée de l’infraction.

CXXXII. En procédant de la sorte, le Tribunal a, conformément à la jurisprudence citée au point 127 du présent arrêt, correctement apprécié la portée de l’obligation de motivation prévue à l’article 190 du traité.

CXXXIII. Par suite, la seconde branche du septième moyen doit également être rejetée.

CXXXIV. Eu égard aux considérations qui précèdent, le septième moyen doit être rejeté dans son ensemble.

Sur le huitième moyen

Argumentation des parties

CXXXV. Par son huitième moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal n’a pas satisfait à l’obligation de motivation qui lui incombait conformément aux dispositions combinées des articles 46 et 33 du statut CE de la Cour de justice, parce qu’il n’a pas suffisamment exposé, aux points 347 et 348 de l’arrêt attaqué, les raisons pour lesquelles il estimait qu’une amende d’un montant de 90 000 000 euros était justifiée.

CXXXVI. Une motivation plus détaillée s’imposerait en l’espèce, et ce d’autant plus que la Commission a, quant à elle, motivé d’une manière très circonstanciée l’amende de 102 000 000 euros qu’elle a infligée à la requérante. Compte tenu des constatations figurant aux points 72 (système de marge fractionnée), 169 (résiliations des contrats de concession), 344 et 346 (durée de l’infraction à prendre en compte pour la fixation de l’amende) de l’arrêt attaqué, si le Tribunal avait appliqué les critères dégagés par la Commission, l’amende aurait été considérablement moins importante (environ 50 000 000 euros).

CXXXVII. La dernière phrase du point 347 de l’arrêt attaqué serait symptomatique du type de motivation utilisé par le Tribunal. En effet, la formulation imprécise de cette phrase ne permettrait pas de vérifier quel est le degré de gravité qui a été attribué par le Tribunal aux différents comportements. Littéralement, la formule utilisée signifierait que le fait que deux griefs cruciaux ne sont pas établis n’a aucune incidence sur la gravité de la prétendue infraction. En outre, la constatation relative à la durée de l’infraction, figurant au point 346 de l’arrêt attaqué, n’aurait pratiquement pas été répercutée sur le montant de l’amende.

CXXXVIII. Au point 347 de l’arrêt attaqué, le Tribunal n’aurait pas dû tenir compte de la relation entre l’amende et le chiffre d’affaires du groupe Volkswagen, étant donné que cet élément n’avait été mentionné que lors de la procédure devant le Tribunal et non pas dans la décision attaquée (voir arrêt du Tribunal du 11 mars 1999, Thyssen Stahl/Commission, T-141/94, Rec. p. II-347, point 623). En outre, conformément à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, le chiffre d’affaires ne serait pertinent qu’au regard du plafond de l’amende et non en tant que critère de calcul du montant de celle-ci.

CXXXIX. Certes, selon la jurisprudence, il n’appartiendrait pas à la Cour, lorsqu’elle se prononce sur des questions de droit dans le cadre d’un pourvoi, de substituer, pour des motifs d’équité, son appréciation à celle du Tribunal statuant, dans l’exercice de sa pleine juridiction, sur le montant des amendes infligées à des entreprises en raison de la violation par celles-ci du droit communautaire (arrêt du 6 avril 1995, BPB Industries et British Gypsum/Commission, C-310/93 P, Rec. p. I-865, point 34). Néanmoins, la Cour devrait, à tout le moins, être en mesure de vérifier que le Tribunal, en fixant le montant de l’amende, n’a pas outrepassé les limites de ses pouvoirs de contrôle. La Cour ne serait pas en mesure de le faire lorsque le Tribunal ne motive pas clairement les raisons pour lesquelles il s’écarte des critères appliqués par la Commission, qui sont indiqués dans sa communication relative aux lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 15 paragraphe 2 du règlement n° 17 et de l’article 65 paragraphe 5 du traité CECA (JO 1998, C 9, p. 3) et qui ont pour objet de garantir l’égalité de traitement des entreprises, et qu’il estime qu’une amende de 90 000 000 euros est justifiée. Tel serait l’enseignement de l’arrêt du 16 novembre 2000, Sarrió/Commission (C-291/98 P, Rec. p. I-9991, point 98).

CXL. La Commission considère que ce moyen est manifestement dénué de fondement. Le Tribunal disposerait d’une compétence de pleine juridiction lorsqu’il statue sur le montant des amendes infligées aux entreprises. Il n’aurait donc pas été lié par les critères de la Commission relatifs à l’évaluation de l’amende infligée à la requérante. En appréciant le cas d’espèce aux fins de la détermination du montant de l’amende, le Tribunal n’aurait pas davantage été empêché, dans le cadre de sa compétence de pleine juridiction, de tenir compte de la relation entre le montant de l’amende infligée et le chiffre d’affaires du groupe Volkswagen.

CXLI. En tout état de cause, la motivation en vertu de laquelle, dans le cadre de sa compétence de pleine juridiction, le Tribunal a ramené le montant de l’amende à la somme de 90 000 000 euros serait suffisante à tous égards.

CXLII. L’arrêt Sarrió/Commission, précité, constaterait seulement que le Tribunal n’est pas lié par la méthode de calcul utilisée par la Commission et qu’il n’est pas en droit, dans une procédure où plusieurs entreprises ont pris part à une même infraction, d’opérer une distinction entre ces entreprises sans fournir d’explication appropriée. L’arrêt attaqué aurait cependant été rendu dans une procédure qui ne concernait que la requérante.

Appréciation de la Cour

CXLIII. Il y a lieu de relever à cet égard que, au point 347 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a tout d’abord indiqué que la réduction de l’amende ne devait pas nécessairement être proportionnelle à la réduction de la durée de l’infraction que la Commission avait prise en compte ni correspondre à la méthode de calcul utilisée par celle-ci, puisqu’il lui appartient, dans le cadre de sa compétence de pleine juridiction, d’apprécier lui-même les circonstances de l’espèce afin de déterminer le montant de l’amende. Après avoir souligné ensuite que l’importante gravité intrinsèque de l’infraction commise, telle que constatée au point 336 de l’arrêt attaqué, à savoir le cloisonnement du marché italien, nécessitait une amende réellement dissuasive, le Tribunal a constaté que le montant de l’amende infligée par la Commission à la requérante ne présente pas un caractère anormalement élevé compte tenu du chiffre d’affaires réalisé par le groupe Volkswagen en 1997 dans les trois États concernés par l’infraction, à savoir l’Italie, l’Allemagne et l’Autriche, ainsi que dans l’Union européenne. Le Tribunal a enfin considéré que le rejet des conclusions de la Commission quant au système de marge fractionnée et à la résiliation de certains contrats de concession ne diminue pas la gravité importante de l’infraction commise qui a été dûment établie par la preuve des autres comportements incriminés.

CXLIV. En tenant compte de l’ensemble des circonstances et considérations rappelées au point précédent, le Tribunal a, au point 348 de l’arrêt attaqué, jugé qu’il était justifié de ramener le montant de l’amende à 90 000 000 euros.

CXLV. Le moyen invoqué par la requérante comporte en substance trois griefs. En premier lieu, la requérante, en invoquant l’arrêt Sarrió/Commission, précité, reproche au Tribunal de ne pas avoir clairement indiqué les raisons pour lesquelles il s’est écarté des critères retenus par la Commission pour la détermination du montant de l’amende. En deuxième lieu, elle fait valoir que le Tribunal ne devait pas tenir compte de la relation entre l’amende et le chiffre d’affaires du groupe Volkswagen, étant donné que, d’une part, cet élément avait été introduit lors de la procédure devant le Tribunal et que, d’autre part, conformément à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, le chiffre d’affaires ne serait pertinent qu’au regard du plafond de l’amende et non en tant que critère de calcul du montant de celle-ci. En troisième lieu, la requérante soutient que le Tribunal a, à la fin du point 347 de l’arrêt attaqué, employé une formulation imprécise ne permettant pas de vérifier le degré de gravité qu’il a attribué aux différents comportements et qu’il n’a pratiquement pas répercuté sur le montant de l’amende qu’il a fixée, d’une part, le rejet de l’analyse de la Commission quant au système de marge fractionnée ainsi qu’à la résiliation des contrats de concession et, d’autre part, la limitation par lui-même de la durée de l’infraction. La requérante en conclut que le Tribunal n’a pas suffisamment exposé les raisons pour lesquelles il a considéré qu’une amende d’un montant de 90 000 000 euros est justifiée.

CXLVI. S’agissant du premier grief, il convient de rappeler que, aux points 97 et 98 de l’arrêt Sarrió/Commission, précité, la Cour a jugé que l’exercice d’une compétence de pleine juridiction ne saurait entraîner, lors de la détermination du montant des amendes, une discrimination entre les entreprises qui ont participé à un accord contraire à l’article 85, paragraphe 1, du traité et que, si le Tribunal entend s’écarter spécifiquement à l’égard de l’une de ces entreprises de la méthode de calcul suivie par la Commission et qu’il n’a pas remise en cause, il est nécessaire qu’il s’en explique dans l’arrêt attaqué.

CXLVII. Toutefois, cette constatation ne saurait être appliquée en l’espèce, étant donné que l’arrêt attaqué a été rendu dans le cadre d’une procédure ne concernant que la requérante et, partant, le Tribunal, lors de l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, n’est, en principe, pas tenu par la méthode de calcul de l’amende suivie par la Commission (voir, en ce sens, arrêt Michelin/Commission, précité, point 111).

CXLVIII. Par suite, ce premier grief doit être écarté.

CXLIX. Quant au deuxième grief, il suffit de constater que, lorsqu’il apprécie lui-même les circonstances de l’espèce dans le cadre de sa compétence de pleine juridiction, le Tribunal peut prendre en considération, conformément à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, la relation entre le montant de l’amende infligée par la Commission et le chiffre d’affaires de l’entreprise concernée. En tout état de cause, en l’espèce, le Tribunal a utilisé le chiffre d’affaires du groupe Volkswagen non pas en tant que critère de calcul du montant de l’amende infligée à la requérante, mais pour étayer la constatation, figurant au point 347 de l’arrêt attaqué, selon laquelle ce montant n’est pas anormalement élevé.

CL. Le deuxième grief doit donc être rejeté.

CLI. Le troisième grief de la requérante revient en substance à contester le caractère proportionné du montant de l’amende fixée par le Tribunal, eu égard aux constatations qu’il a effectuées, qui ont conduit au rejet de deux des griefs de la Commission, ainsi qu’à la gravité et à la durée de l’infraction. Toutefois, il n’appartient pas à la Cour, lorsqu’elle se prononce sur des questions de droit dans le cadre d’un pourvoi, de substituer, pour des motifs d’équité, son appréciation à celle du Tribunal statuant, dans l’exercice de sa pleine juridiction, sur le montant des amendes infligées à des entreprises en raison de la violation, par celles-ci, du droit communautaire. Dès lors, la Cour ne saurait, au stade du pourvoi, examiner si le montant de l’amende fixé par le Tribunal dans le cadre de sa compétence de pleine juridiction a un caractère proportionné par rapport à la gravité et à la durée de l’infraction telles que constatées par le Tribunal au terme de l’appréciation des faits effectuée par ce dernier (voir arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C-238/99 P, C-244/99 P, C-245/99 P, C-247/99 P, C-250/99 P à C-252/99 P et C-254/99 P, Rec. p. I-8375, points 611 à 614). En tout état de cause, il n’apparaît pas que la motivation figurant au point 347 de l’arrêt attaqué soit déraisonnable ou entachée de contradictions.

CLII. Dès lors, ce grief doit également être rejeté.

CLIII. Eu égard aux considérations qui précèdent, le huitième moyen doit être rejeté dans son ensemble.

Sur le neuvième moyen

Argumentation des parties

CLIV. Par son neuvième moyen, la requérante conteste la constatation du Tribunal, figurant au point 283 de l’arrêt attaqué, selon laquelle une irrégularité telle que celle découlant de la divulgation à la presse du montant de l’amende qui lui a été infligée ne saurait entraîner l’annulation de la décision attaquée que s’il est établi que, en l’absence de cette irrégularité, ladite décision aurait eu un contenu différent.

CLV. Elle estime, tout d’abord, que les arrêts cités par le Tribunal ne sont pas pertinents parce qu’ils concernaient des affaires dans lesquelles les faits étaient différents de ceux en cause dans la présente espèce. Ainsi, le point 91 de l’arrêt Suiker Unie e.a./Commission, précité, s’expliquerait par la circonstance que la Commission n’avait pas, contrairement à la présente affaire, maintenu dans sa décision l’ensemble des griefs énoncés dans la communication des griefs (voir arrêt Suiker Unie e.a./Commission, précité, point 92). En outre, il ressortirait du point 29 de l’arrêt Dunlop Slazenger/Commission, précité, que la question de savoir si les services de la Commission étaient responsables de la fuite n’avait pas été tranchée, à la différence de la présente espèce.

CLVI. La requérante soutient ensuite que, si l’on admettait que des irrégularités comme celle constatée en l’espèce ne peuvent pas remettre en cause la validité de la décision attaquée, celles-ci resteraient, en règle générale, impunies, une entreprise n’étant jamais en mesure de prouver que la décision aurait été différente si la Commission avait agi légalement, et cela même si ladite entreprise a une parfaite connaissance du dossier de la Commission. Dès lors, il devrait suffire d’invoquer la possibilité d’une influence sur ladite décision, ce que la requérante a fait en l’espèce.

CLVII. À cet égard, il ne saurait être exclu que, lors de l’examen de la proposition concernant le montant de l’amende, les membres de la Commission l’auraient acceptée non pas parce qu’ils l’estimaient justifiée, mais pour éviter le désaveu de leur collègue qui avait déjà révélé au public le montant exact de cette amende.

CLVIII. Selon la requérante, enfin, étant donné que les principes de la présomption d’innocence, de l’interdiction de nuire à l’image de marque de l’entreprise poursuivie et de la bonne administration communautaire, évoqués par le Tribunal, concernent la décision attaquée tout entière et non pas uniquement le montant de l’amende, la seule sanction envisageable serait l’annulation de cette décision dans son ensemble.

CLIX. La Commission fait tout d’abord valoir, en renvoyant aux points 91 et 92 de l’arrêt Suiker Unie e.a./Commission, précité, et 29 de l’arrêt Dunlop Slazenger/Commission, précité, que les faits prétendument différents des affaires ayant donné lieu à ces arrêts, sur le fondement desquels la requérante soutient qu’il ne serait pas possible de tenir compte de la jurisprudence constante citée par le Tribunal, ne concernaient que des opinions incidentes qui n’ont pas constitué le fondement de la constatation de la Cour et du Tribunal selon laquelle rien ne laissait supposer, dans les affaires en question, que la décision en cause n’aurait pas été prise ou aurait eu un contenu différent s’il n’y avait pas eu irrégularité.

CLX. Elle affirme ensuite qu’il faut distinguer entre l’expression d’une opinion d’un membre de la Commission et la décision de la Commission, qui serait délibérée et adoptée conformément au principe de collégialité.

CLXI. Les déclarations publiques des membres de la Commission n’auraient aucune importance au regard de la décision elle-même, sauf si elles ont eu des répercussions sur le contenu de celle-ci. Qu’il n’en aille pas de la sorte en général ne saurait avoir pour conséquence que la simple possibilité de la répercussion d’une déclaration publique sur la décision en cause conduise nécessairement à l’annulation de celle-ci dans le seul but de ne pas laisser cette déclaration impunie. Une telle sanction n’aurait pas de base juridique et serait, par ailleurs, disproportionnée.

CLXII. Enfin, l’argument de la requérante selon lequel d’autres membres de la Commission, lorsqu’ils ont approuvé la proposition de décision, auraient simplement voulu éviter de désavouer leur collègue en charge de la concurrence ne serait que pure spéculation et ne saurait se substituer à la preuve nécessaire qu’il convient d’apporter afin d’établir le lien de causalité entre la communication à la presse et le contenu de la décision attaquée.

Appréciation de la Cour

CLXIII. Il convient de relever tout d’abord que, après avoir constaté aux points 280 à 282 de l’arrêt attaqué que par la divulgation à la presse, avec un haut degré de précision, avant l’adoption de la décision attaquée, d’un élément essentiel de celle-ci, à savoir le montant envisagé de l’amende, la Commission a porté atteinte à la dignité de l’entreprise incriminée et aux intérêts d’une bonne administration communautaire, le Tribunal a écarté l’annulation de ladite décision, demandée par la requérante, sur le fondement de la motivation figurant au point 283 de l’arrêt attaqué, qui est libellé comme suit:

«Selon une jurisprudence constante, une irrégularité du genre de celle constatée ci-dessus peut entraîner l’annulation de la décision en cause s’il est établi que, en l’absence de cette irrégularité, ladite décision aurait eu un contenu différent (arrêt de la Cour Suiker Unie e.a./Commission, [précité], point 91; arrêt Dunlop Slazenger/Commission, précité, point 29). Or, en l’espèce, la requérante n’a pas apporté une telle preuve. En effet, rien ne laisse supposer que, si les informations litigieuses n’avaient pas été divulguées, le comité consultatif ou le collège des commissaires aurait modifié le montant de l’amende ou le contenu de la décision proposés».

CLXIV. Il y a lieu de constater ensuite que, contrairement à ce que prétend la requérante, le Tribunal a considéré à bon droit que la jurisprudence mentionnée au point 283 de l’arrêt attaqué est applicable en l’espèce. En effet, hormis quelques différences non déterminantes entre la présente espèce et les affaires ayant donné lieu aux deux arrêts cités par le Tribunal, ceux-ci avaient notamment pour objet de préciser les conséquences qu’est susceptible d’entraîner, au regard de la légalité d’une décision prise par les autorités communautaires, la divulgation, avant l’adoption de la décision concernée, de l’un de ses éléments. Or, c’est précisément une telle irrégularité qui a eu lieu en l’espèce, ainsi que le Tribunal l’a constaté aux points 280 à 282 de l’arrêt attaqué.

CLXV. Il convient enfin d’ajouter que, contrairement aux affirmations de la requérante, le critère retenu dans les deux arrêts mentionnés au point 283 de l’arrêt attaqué, à savoir celui selon lequel une irrégularité résultant d’une divulgation prématurée d’un élément de la décision peut entraîner l’annulation de celle-ci seulement s’il est établi que, en l’absence de cette irrégularité, ladite décision aurait eu un contenu différent, n’a pas pour effet que des irrégularités de ce genre resteraient pratiquement impunies. En effet, indépendamment de la possibilité d’obtenir l’annulation de la décision en cause dans l’hypothèse où l’irrégularité commise se serait répercutée sur son contenu, l’intéressé serait fondé à rechercher la responsabilité de l’institution concernée en raison du préjudice qu’il estimerait avoir subi du fait de cette irrégularité.

CLXVI. Il s’ensuit que le neuvième moyen doit être écarté.

CLXVII. Aucun des moyens invoqués par la requérante n’étant susceptible d’être accueilli, le pourvoi principal doit être rejeté dans son ensemble.

Sur le pourvoi incident

Argumentation des parties

CLXVIII. La Commission conteste, dans son pourvoi incident, la constatation figurant au point 343 de l’arrêt attaqué selon laquelle, même dans le cas où la règle des 15 % stipulée dans la «convenzione B» n’aurait pas été notifiée en bonne et due forme, la Commission ne pouvait pas considérer que cette règle constituait, à elle seule, un élément justifiant la majoration du montant fixé pour la gravité de l’infraction et, par conséquent, la période de 1988 à 1992, pendant laquelle ladite règle constitue le seul acte reproché à la requérante, n’aurait pas dû être prise en compte pour la détermination du montant de l’amende infligée à cette dernière.

CLXIX. Le Tribunal contredirait ainsi la jurisprudence constante de la Cour qu’il venait de citer au point 342 de l’arrêt attaqué et selon laquelle l’interdiction d’infliger des amendes, prévue à l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n° 17, ne joue que pour les accords effectivement notifiés selon les formalités requises. Le fait que la «convenzione B» a été communiquée à la Commission en 1988 ne saurait justifier une exception à ce principe.

CLXX. Le respect des formalités prescrites à l’article 4 du règlement n° 27 ne serait pas une fin en soi, mais viserait à permettre à la Commission d’examiner l’accord notifié sous l’angle du droit de la concurrence en incitant les entreprises concernées à lui fournir les renseignements requis à cet effet, en présentant, notamment, un exposé complet des faits.

CLXXI. En outre, compte tenu de la lettre que la Commission avait adressée dès 1988 à Autogerma (voir point 342 de l’arrêt attaqué), la requérante n’aurait pu s’attendre à ce que la Commission considérât malgré tout que la communication du nouveau contrat et de ses annexes constituait une notification en bonne et due forme ou examinât ce contrat sous l’angle du droit de la concurrence sans tenir compte du fait qu’il n’avait nullement été notifié.

CLXXII. Il en résulterait que, dans la mesure où le Tribunal a réduit le montant de l’amende à 90 000 000 euros sans prendre en considération l’infraction découlant de l’application de la règle des 15 % pendant la période de 1988 à 1992, l’arrêt attaqué doit être annulé pour violation de l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n° 17. Conformément à la jurisprudence (arrêts BPB Industries et British Gypsum/Commission, précité, point 34, et du 16 novembre 2000, Weig/Commission, C-280/98 P, Rec. p. I-9757, point 62), l’affaire devrait être renvoyée devant le Tribunal afin qu’il puisse fixer de nouveau le montant de l’amende en tenant compte de l’infraction commise pendant ladite période.

CLXXIII. La requérante fait valoir que l’exemption d’amende prévue en cas de notification régulière n’implique pas qu’une amende doive être infligée ou majorée en l’absence d’une telle notification, dès lors que le montant de l’amende ne dépend pas uniquement de la durée, mais aussi de la gravité de l’infraction et du degré de culpabilité de son auteur.

CLXXIV. Le Tribunal disposant dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction d’un large pouvoir d’appréciation, sa décision ne pourrait être annulée par la Cour que dans le cas où une erreur de droit manifeste a été commise. En jugeant que la seule application de la règle des 15 %, qui était connue de la Commission et à laquelle celle-ci n’avait pas mis fin, ne justifiait pas la condamnation de la requérante à une amende, le Tribunal n’a pas outrepassé les limites de son pouvoir d’appréciation en tant que juge des faits.

Appréciation de la Cour

CLXXV. Au point 343 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que, indépendamment de la question de savoir si la communication de la «convenzione B» constituait ou non une notification au sens du règlement n° 17, le fait même que cette convention avait été communiquée à la Commission déjà en 1988 aurait dû conduire celle-ci à ne pas considérer que ladite convention constituait, à elle seule, un élément justifiant la majoration du montant fixé pour la gravité de l’infraction.

176 Sur le fondement de cette constatation le Tribunal a, au point 343 de l’arrêt attaqué, jugé que la période de 1988 à 1992, pendant laquelle la règle des 15 % stipulée dans la «convenzione B» constituait le seul acte incriminé, ne devait pas être prise en compte pour la fixation de l’amende. Il a ensuite réduit le montant de celle-ci en tenant également compte de cet élément (points 346 et 348 de l’arrêt attaqué).

177 Contrairement à ce que soutient la Commission, la constatation du Tribunal selon laquelle la période de 1988 à 1992 ne devait pas être prise en compte pour la fixation de l’amende n’est pas entachée d’erreur de droit.

178 En effet, d’une part, l’argumentation de la Commission repose sur la prémisse selon laquelle le Tribunal s’est trompé dans l’application de l’article 15, paragraphe 5, sous a), du règlement n° 17, qui prévoit l’exemption d’amende uniquement pour les accords dûment notifiés. Or, cette prémisse est erronée, puisque, ainsi qu’il a déjà été relevé aux points 77 et 78 du présent arrêt, le Tribunal ne s’est pas prononcé sur la question de savoir si la communication à la Commission de la «convenzione B» constituait une notification au sens du règlement n° 17 ni, par conséquent, sur la question de savoir si la règle des 15 % qui y était stipulée pouvait bénéficier de l’exemption d’amende au titre de cette disposition.

179 D’autre part, dans un cas tel que celui de l’espèce, où l’infraction commise était constituée d’un faisceau de mesures dont faisait partie la règle des 15 % et dont l’effet combiné s’est produit depuis le 1er septembre 1993 (voir point 344 de l’arrêt attaqué), il n’est pas erroné de considérer comme injustifiée une majoration du montant de l’amende pour la gravité de l’infraction d’ensemble par rapport à une période antérieure à la date susmentionnée, située entre 1988 et 1992, pendant laquelle il n’existait qu’une seule des mesures constitutives de l’infraction et que cette mesure avait, de surcroît, été communiquée à la Commission. Partant, l’absence d’autre comportement incriminé pendant ladite période a permis au Tribunal de conclure, à bon droit, que celle-ci ne devait pas être prise en compte pour la fixation de l’amende, nonobstant le fait que la règle des 15%, prise isolément, constituait une mesure incompatible avec l’article 85, paragraphe 1, du traité.

180 Il résulte de ce qui précède que le pourvoi incident doit être rejeté.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens 181 Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, selon l’article 69, paragraphe 3, premier alinéa, dudit règlement, la Cour peut décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. La requérante ayant succombé en ses moyens et conclusions dans le cadre du pourvoi principal et la Commission ayant succombé en ses moyens et conclusions dans le cadre du pourvoi incident, il y a lieu de décider que chacune d’elles supporte ses propres dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR (sixième chambre)

déclare et arrête:

1) Le pourvoi principal et le pourvoi incident sont rejetés.

2) Chaque partie supporte ses propres dépens.

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CJCE, n° C-338/00, Arrêt de la Cour, Volkswagen AG contre Commission des Communautés européennes, 18 septembre 2003