CJUE, n° C-262/10, Arrêt de la Cour, Döhler Neuenkirchen GmbH contre Hauptzollamt Oldenburg, 6 septembre 2012

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Chronologie de l’affaire

Commentaires5

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Jean-pierre Maublanc · Revue Jade

La présente décision de la cour de Luxembourg, rendue sur renvoi préjudiciel du Hoge Raad der Nederlanden analyse utilement l'articulation qui peut exister entre une dette douanière à l'importation et la TVA due à raison de cette même opération d'importation. Plus précisément, la cour juge que la TVA à l'importation est due dans le cas où la dette douanière est née exclusivement sur la base de l'article 204 du code des douanes, en application de l'article 7 de la 6 e directive du 17 mai 1977. Il en résulte que les deux dettes, douanière et fiscale, naissent à la même date et au même lieu. …

 

Hélène Duclos · Revue Jade

Les parties à une affaire devant la Cour de justice de l'Union européenne ne peuvent pas présenter d'observations écrites en réponse aux conclusions de l'avocat général. C'est notamment ce qu'a réaffirmé la Cour dans un arrêt du 4 mai 2016 [1] . Le 18 juillet 2014, la Commission européenne a introduit un recours en manquement à l'encontre de la République d'Autriche [2] , estimant que cette dernière avait manqué à ses obligations découlant des traités, et plus précisément des articles 4 paragraphe 3 du Traité sur l'Union européenne (principe de coopération loyale) et 288 du Traité sur le …

 

Hélène Duclos · Revue Jade

CJUE, 1ère chbre, 4 mai 2016, Commission européenne contre République d'Autriche, aff. C-346/14. Les parties à une affaire devant la Cour de justice de l'Union européenne ne peuvent pas présenter d'observations écrites en réponse aux conclusions de l'avocat général. C'est notamment ce qu'a réaffirmé la Cour dans un arrêt du 4 mai 2016 [1] . Le 18 juillet 2014, la Commission européenne a introduit un recours en manquement à l'encontre de la République d'Autriche [2] , estimant que cette dernière avait manqué à ses obligations découlant des traités, et plus précisément des articles …

 
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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 6 sept. 2012, C-262/10
Numéro(s) : C-262/10
Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 6 septembre 2012.#Döhler Neuenkirchen GmbH contre Hauptzollamt Oldenburg.#Demande de décision préjudicielle, introduite par Bundesfinanzhof.#Code des douanes communautaire — Règlement (CEE) no 2913/92 — Article 204, paragraphe 1, sous a) — Régime du perfectionnement actif — Système de la suspension — Naissance d’une dette douanière — Inexécution de l’obligation de présentation du décompte d’apurement dans le délai prescrit.#Affaire C-262/10.
Date de dépôt : 27 mai 2010
Précédents jurisprudentiels : 11 novembre 1999, Söhl & Söhlke, C-48/98
14 janvier 2010, Terex Equipment e.a., C-430/08 et C-431/08
3 mars 2009, Commission/Autriche, C-205/06
C-17/98, Rec. p. I-665
C-205/06, Rec. p. I-1301
C-234/09, Rec. p. I-7333
C-430/08 et C-431/08, Rec. p. I-321
C-48/98, Rec. p. I-7877
DSV Road, C-234/09
JO L 62, p. 6
ordonnance du 4 février 2000, Emesa Sugar, C-17/98
Solution : Renvoi préjudiciel
Identifiant CELEX : 62010CJ0262
Identifiant européen : ECLI:EU:C:2012:559
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Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

6 septembre 2012 ( *1 )

«Code des douanes communautaire — Règlement (CEE) no 2913/92 — Article 204, paragraphe 1, sous a) — Régime du perfectionnement actif — Système de la suspension — Naissance d’une dette douanière — Inexécution de l’obligation de présentation du décompte d’apurement dans le délai prescrit»

Dans l’affaire C-262/10,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Bundesfinanzhof (Allemagne), par décision du 30 mars 2010, parvenue à la Cour le 27 mai 2010, dans la procédure

Döhler Neuenkirchen GmbH

contre

Hauptzollamt Oldenburg,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président de chambre, M. J. Malenovský, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. G. Arestis (rapporteur) et D. Šváby, juges,

avocat général: M. N. Jääskinen,

greffier: M. B. Fülöp, administrateur, puis Mme A. Impellizzeri, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 avril 2011,

vu l’ordonnance de réouverture de la procédure orale du 25 octobre 2011 et à la suite de l’audience du 1er décembre 2011,

considérant les observations présentées:

pour Döhler Neuenkirchen GmbH, par Me H. Bleier, Rechtsanwalt,

pour le Hauptzollamt Oldenburg, par Mme A. Gessler, Oberregierungsrätin,

pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et V. Štencel, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mme L. Bouyon et M. B.-R. Killmann, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 8 mars 2012,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 204, paragraphe 1, sous a), du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO L 302, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 648/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 13 avril 2005 (JO L 117, p. 13, ci-après le «code des douanes»).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Döhler Neuenkirchen GmbH (ci-après «Döhler») au Hauptzollamt Oldenburg (ci-après le «Hauptzollamt») au sujet d’une dette douanière à l’importation réclamée à Döhler en raison du fait qu’un décompte d’apurement relatif à des marchandises placées sous le régime du perfectionnement actif sous forme du système de la suspension a été présenté au bureau de contrôle des douanes en dehors du délai imparti à cet effet.

Le cadre juridique

Le code des douanes

3

Le régime du perfectionnement actif sous forme du système de la suspension est défini à l’article 114, paragraphe 1, sous a), du code des douanes. Ce régime permet de mettre en œuvre sur le territoire douanier de l’Union européenne, pour leur faire subir une ou plusieurs opérations de perfectionnement, des marchandises non communautaires destinées à être réexportées hors dudit territoire sous forme de produits compensateurs, sans que ces marchandises soient soumises aux droits à l’importation ni aux mesures de politique commerciale. Conformément au paragraphe 2, sous c) et d), dudit article, les produits compensateurs sont tous les produits résultant d’opérations de perfectionnement, notamment de la transformation des marchandises.

4

L’article 89, paragraphe 1, du code des douanes est libellé comme suit:

«Un régime économique suspensif est apuré lorsque les marchandises placées sous ce régime ou, le cas échéant, les produits compensateurs ou transformés obtenus sous ce régime, reçoivent une nouvelle destination douanière admise.»

5

L’article 118, paragraphes 1 et 2, du code des douanes prévoit:

«1. Les autorités douanières fixent le délai dans lequel les produits compensateurs doivent avoir été exportés ou réexportés ou avoir reçu une autre destination douanière. […]

2. Le délai court à partir de la date à laquelle les marchandises non communautaires sont placées sous le régime du perfectionnement actif. Les autorités douanières peuvent le prolonger sur demande dûment justifiée du titulaire de l’autorisation.

Pour des raisons de simplification, il peut être décidé que des délais commençant à courir au cours d’un mois civil ou d’un trimestre expirent le dernier jour, selon le cas, d’un mois civil ou d’un trimestre ultérieur.»

6

Le titre VII du code des douanes, intitulé «Dette douanière», contient, à son chapitre 2, les dispositions relatives à la naissance de la dette douanière. Ce chapitre contient notamment les articles 201 à 205 qui prévoient les faits générateurs faisant naître une dette douanière à l’importation.

7

L’article 204, paragraphes 1 et 2, du code des douanes dispose:

«1. Fait naître une dette douanière à l’importation:

a)

l’inexécution d’une des obligations qu’entraîne pour une marchandise passible de droits à l’importation son séjour en dépôt temporaire ou l’utilisation du régime douanier sous lequel elle a été placée

ou

[…]

dans des cas autres que ceux [relatifs à la soustraction d’une marchandise passible de droits à l’importation à la surveillance douanière], à moins qu’il ne soit établi que ces manquements sont restés sans conséquence réelle sur le fonctionnement correct du dépôt temporaire ou du régime douanier considéré.

2. La dette douanière naît […] au moment où cesse d’être remplie l’obligation dont l’inexécution fait naître la dette douanière, […]»

Le règlement d’application

8

La Commission européenne a, le 2 juillet 1993, adopté le règlement (CEE) no 2454/93 fixant certaines dispositions d’application du règlement no 2913/92 (JO L 253, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 214/2007 de la Commission, du 28 février 2007 (JO L 62, p. 6, ci-après le «règlement d’application»).

9

L’article 496, sous m), du règlement d’application définit le «délai d’apurement» comme «le délai dans lequel les marchandises ou produits doivent avoir reçu une nouvelle destination douanière admise».

10

L’article 521 de ce même règlement d’application dispose:

«1. Au plus tard à l’expiration du délai d’apurement, indépendamment du recours ou non à la globalisation conformément à l’article 118, paragraphe 2, deuxième alinéa, du code [des douanes]:

dans le cas du perfectionnement actif (système de la suspension) […], le décompte d’apurement est présenté au bureau de contrôle dans les trente jours,

[…]

Lorsque des circonstances particulières le justifient, les autorités douanières peuvent proroger ce délai même après son expiration.

2. Le décompte ou la demande doivent comporter les indications suivantes, sauf si le bureau de contrôle en dispose autrement:

a)

les références de l’autorisation;

[…]

e)

la référence aux déclarations sous couvert desquelles les marchandises d’importation ont été placées sous le régime;

f)

le type, la quantité des produits compensateurs ou transformés ou des marchandises en l’état et la destination douanière qui leur a été assignée, avec la référence aux déclarations, à d’autres documents douaniers ou à tout autre document relatif à l’apurement et aux délais d’apurement correspondants;

[…]

i)

le montant des droits à l’importation à acquitter, rembourser ou remettre et le montant des intérêts compensatoires à acquitter, le cas échéant; lorsque ce montant se rapporte à l’application de l’article 546, il en est fait mention;

[…]

3. Le bureau de contrôle peut établir le décompte d’apurement.»

11

L’article 546, premier et deuxième alinéas, du règlement d’application, prévoit:

«[La décision des autorités douanières d’autoriser le recours au régime] précise si les produits compensateurs ou les marchandises en l’état peuvent être mis en libre pratique sans déclaration douanière, sans préjudice des mesures de prohibition ou de restriction. Dans ce cas, ils sont considérés comme ayant été mis en libre pratique, s’ils n’ont pas reçu une destination douanière à l’expiration du délai d’apurement.

Aux fins de l’application de l’article 218, paragraphe 1, premier alinéa, du code [des douanes], la déclaration de mise en libre pratique est considérée comme ayant été présentée et acceptée, et la mainlevée accordée, au moment de la présentation du décompte d’apurement.»

12

L’article 859 du règlement d’application, qui figure dans la partie IV de celui-ci, consacrée à la dette douanière, et plus précisément sous le titre II de cette partie, intitulé «Naissance de la dette», énonce:

«Sont considérés comme restés sans conséquence réelle sur le fonctionnement correct du dépôt temporaire ou du régime douanier considéré au sens de l’article 204 paragraphe 1 du code [des douanes] les manquements suivants pour autant:

qu’ils ne constituent pas de tentative de soustraction à la surveillance douanière de la marchandise,

qu’ils n’impliquent pas de négligence manifeste de la part de l’intéressé,

que toutes les formalités nécessaires pour régulariser la situation de la marchandise soient accomplies a posteriori:

[…]

9)

dans le cadre des régimes de perfectionnement actif et de la transformation sous douane, le dépassement du délai autorisé pour la présentation du décompte d’apurement, pour autant que le délai eût été prorogé si la demande en avait été faite à temps;

[…]»

13

Aux termes de l’article 860 du règlement d’application, «[l]es autorités douanières considèrent une dette douanière comme née conformément à l’article 204 paragraphe 1 du code [des douanes], à moins que la personne susceptible d’être débiteur n’établisse que les conditions de l’article 859 soient remplies».

Le litige au principal et la question préjudicielle

14

Au cours du premier trimestre de l’année 2006, Döhler a importé des concentrés de jus de fruits qu’elle a transformés dans le cadre du régime du perfectionnement actif sous forme du système de la suspension, comme le lui permettait l’autorisation qui lui avait été délivrée à cet effet. Conformément à cette autorisation, le délai d’apurement de ce régime expirait au quatrième trimestre civil suivant le placement des marchandises non communautaires sous ledit régime, soit le 31 mars 2007. Il résulte également du dossier que ladite autorisation permettait à Döhler que des marchandises en l’état ou des produits compensateurs soient mis en libre pratique sans déclaration en douane.

15

Alors que le décompte d’apurement aurait dû être présenté dans les 30 jours qui suivent l’apurement du régime douanier, soit, dans l’affaire au principal, au plus tard le 30 avril 2007, Döhler a omis de le faire et a ignoré la mise en demeure du Hauptzollamt qui réclamait ce décompte pour le 20 juin 2007.

16

En l’absence dudit décompte d’apurement, le Hauptzollamt a pris en compte, le 4 juillet 2007, des droits à l’importation sur l’ensemble des marchandises importées pour lesquelles le délai d’apurement avait expiré le 31 mars 2007, à concurrence de la valeur totale de celles-ci, soit un montant de 1403188,49 euros.

17

Le 10 juillet 2007, Döhler a finalement présenté son décompte d’apurement relatif aux marchandises en cause au principal, faisant apparaître un montant de droits à l’importation dus de 217338,39 euros, correspondant à une quantité inférieure à celle retenue par le Hauptzollamt de marchandises d’importation non exportées dans les délais impartis, soit avant le 31 mars 2007.

18

Döhler a contesté la différence entre le montant des droits à l’importation pris en compte par le Hauptzollamt et celui résultant de son décompte d’apurement et, à la suite du rejet de sa réclamation, elle a introduit un recours devant le Finanzgericht Hamburg (tribunal des finances de Hambourg) pour obtenir le dégrèvement des droits dont elle estimait ne pas être redevable.

19

Le Finanzgericht Hamburg a rejeté le recours dont il était saisi, en considérant que, en ne respectant pas le délai fixé pour le dépôt du décompte d’apurement, Döhler n’avait pas exécuté ses obligations, ce qui a donné naissance à une dette douanière conformément à l’article 204, paragraphe 1, sous a), du code des douanes. Cette juridiction a également jugé que la présentation tardive du décompte d’apurement ne pouvait être considérée comme un manquement resté sans conséquence réelle sur le fonctionnement correct du régime douanier concerné au sens de l’article 204, paragraphe 1, in fine, du code des douanes, tel que mis en œuvre par l’article 859, point 9, du règlement d’application.

20

À cet égard, ladite juridiction a considéré, d’une part, que le délai de présentation du décompte d’apurement n’aurait pu être prorogé même si la demande en avait été faite à temps, car il n’y avait pas de circonstances particulières justifiant une telle prorogation, et, d’autre part, que Döhler s’était rendue coupable d’une négligence manifeste puisque, en tant qu’opérateur économique expérimenté dans la mise en œuvre du régime du perfectionnement actif, elle connaissait l’obligation de présenter des décomptes d’apurement à certaines dates, son attention ayant en outre été attirée sur cette exigence par le Hauptzollamt.

21

Contestant le rejet de son recours par le Finanzgericht Hamburg, Döhler a alors introduit un recours en «Revision» devant le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances), faisant valoir que l’apurement du régime douanier avait eu lieu le 31 mars 2007 et que toute inexécution d’une obligation intervenue après cette date, telle que la présentation hors délai du décompte d’apurement, ne saurait avoir d’influence sur le régime douanier ni, a fortiori, donner naissance à une dette douanière.

22

La juridiction de renvoi, après voir examiné l’interprétation du code des douanes préconisée par Döhler, s’interroge sur la naissance d’une dette douanière dans des circonstances telles que celles de l’espèce. Par ailleurs, elle souligne le risque de la double naissance d’une dette douanière pour la partie des marchandises non réexportées, une première fois à l’expiration du délai d’apurement et une seconde fois à l’expiration du délai pour la présentation du décompte d’apurement.

23

C’est dans ces circonstances que le Bundesfinanzhof, estimant que la solution du litige dont il est saisi nécessite l’interprétation du code des douanes, a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«L’article 204, paragraphe 1, sous a), du [code des douanes] doit-il être interprété en ce sens qu’il vise également l’inexécution d’obligations qui ne doivent être exécutées qu’après l’apurement du régime douanier utilisé concerné, de sorte que, dans le cas de marchandises d’importation partiellement réexportées dans les délais prescrits dans le cadre d’un régime de perfectionnement actif sous forme du système de la suspension, la violation de l’obligation de présenter le décompte d’apurement au bureau de contrôle dans les 30 jours à partir de l’expiration du délai d’apurement entraîne la naissance d’une dette douanière pour la quantité totale des marchandises d’importation à apurer dans la mesure où les conditions de l’article 859, point 9, du [règlement d’application] ne sont pas remplies?»

La procédure devant la Cour

La réouverture de la procédure orale

24

Par décision du 1er mars 2011, la Cour a attribué la présente affaire à la septième chambre et a convoqué les parties à une audience qui s’est tenue le 13 avril 2011. Elle a décidé, en outre, que cette affaire serait jugée sans conclusions.

25

En application de l’article 44, paragraphe 4, du règlement de procédure de la Cour, la septième chambre a, le 22 septembre 2011, décidé de renvoyer l’affaire devant la Cour aux fins de sa réattribution à une formation de jugement plus importante. Par suite, la Cour a décidé de réattribuer l’affaire à la troisième chambre et de la juger après avoir entendu les conclusions de M. l’avocat général.

26

Par ordonnance du 25 octobre 2011, conformément à l’article 61 du règlement de procédure, la Cour a ordonné la réouverture de la procédure orale et la convocation des parties à une nouvelle audience qu’elle a fixée au 1er décembre 2011.

27

M. l’avocat général a présenté ses conclusions lors de l’audience du 8 mars 2012, à la suite de laquelle la procédure orale a été clôturée.

Sur la demande de réouverture de la procédure orale à la suite des conclusions

28

Par lettre du 9 mars 2012, Döhler a demandé le droit de pouvoir réagir par écrit aux conclusions de M. l’avocat général ou la réouverture de la procédure orale. À l’appui de sa demande, Döhler indique son désaccord avec la position adoptée par M. l’avocat général et soutient que les conclusions ont été présentées en dehors de la procédure orale qui a été clôturée le 1er décembre 2011.

29

Tout d’abord, il convient de constater que le statut de la Cour de justice de l’Union européenne et le règlement de procédure de celle-ci ne prévoient pas la possibilité pour les parties de déposer des observations en réponse aux conclusions présentées par l’avocat général (ordonnance du 4 février 2000, Emesa Sugar, C-17/98, Rec. p. I-665, point 2).

30

Concernant la réouverture de la procédure orale, il y a lieu de rappeler que la Cour peut, d’office ou sur proposition de l’avocat général, ou encore à la demande des parties, ordonner la réouverture de la procédure orale, conformément à l’article 61 de son règlement de procédure, si elle considère qu’elle est insuffisamment éclairée ou que l’affaire doit être tranchée sur la base d’un argument qui n’a pas été débattu entre les parties (voir arrêt du 3 mars 2009, Commission/Autriche, C-205/06, Rec. p. I-1301, point 13).

31

En l’occurrence, la Cour s’estimant suffisamment éclairée pour statuer et l’affaire ne nécessitant pas d’être tranchée sur la base d’arguments qui n’auraient pas été débattus entre les parties, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de réouverture de la procédure orale.

32

Concernant l’argument de Döhler selon lequel les conclusions ont été présentées en dehors de la procédure orale, il convient de rappeler que l’article 59 du règlement de procédure prévoit, d’une part, que l’avocat général présente ses conclusions orales et motivées avant la clôture de la procédure orale et, d’autre part, que le président de la Cour prononce la clôture de ladite procédure après la présentation des conclusions. En l’espèce, il est établi que la procédure orale n’a pas été clôturée avant que M. l’avocat général ait présenté ses conclusions lors de l’audience du 8 mars 2012. Il y a donc lieu de constater que les modalités de présentation des conclusions dans la présente affaire n’ont comporté aucune violation des règles applicables devant la Cour.

33

Par conséquent, la Cour, l’avocat général entendu, considère qu’il y a lieu de rejeter les demandes de la requérante au principal visant à être autorisée à déposer des observations écrites supplémentaires ou tendant à la réouverture de la procédure orale.

Sur la question préjudicielle

34

Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 204, paragraphe 1, sous a), du code des douanes doit être interprété en ce sens que la violation de l’obligation de présenter le décompte d’apurement au bureau de contrôle dans les 30 jours à partir de l’expiration du délai d’apurement, prévue à l’article 521, paragraphe 1, premier alinéa, premier tiret, du règlement d’application, entraîne la naissance d’une dette douanière visant l’ensemble des marchandises d’importation à apurer, y compris celles réexportées en dehors du territoire de l’Union européenne, dans la mesure où les conditions énoncées à l’article 859, point 9, du règlement d’application sont considérées comme n’étant pas remplies.

35

Conformément à l’article 204, paragraphe 1, sous a), du code des douanes, une dette douanière à l’importation naît de l’inexécution de l’une des obligations qu’entraîne pour une marchandise passible de droits à l’importation l’utilisation du régime douanier sous lequel elle a été placée, à moins qu’il ne soit établi que ce manquement est resté sans conséquence réelle sur le fonctionnement correct de ce régime. Il convient de souligner, à l’instar de M. l’avocat général au point 49 de ses conclusions, que tout cas qui ne relève pas de cette exception tombe dans le champ d’application de l’article 204 du code des douanes.

36

Döhler soutient que, dans l’affaire au principal, le régime du perfectionnement actif a été apuré, conformément à l’article 89, paragraphe 1, du code des douanes, par la réexportation des marchandises dans les formes et délais prescrits, et que le bénéfice de ce régime ne peut donc être retiré rétroactivement par la naissance d’une dette douanière au motif que le décompte d’apurement n’a pas été présenté dans le délai prescrit. Ainsi, selon Döhler, la violation de l’obligation de présenter le décompte d’apurement, prévue à l’article 521, paragraphe 1, premier alinéa, premier tiret, du règlement d’application, ne peut faire naître une dette douanière dans la mesure où cette obligation intervient après l’apurement du régime douanier concerné.

37

Cette position ne saurait être retenue.

38

En effet, aucune disposition du code des douanes et de son règlement d’application, dans leurs versions applicables à l’époque des faits, ne permet d’établir qu’il y a lieu, concernant l’effet d’un manquement sur la naissance d’une dette douanière, en application de l’article 204 du code des douanes, de distinguer entre une obligation s’effectuant avant ou après l’apurement du régime douanier concerné ou encore entre une obligation dite «principale» et une autre dite «secondaire».

39

Par ailleurs, l’article 204 du code des douanes énonce, à son paragraphe 1, qu’une dette douanière naît de «l’inexécution d’une des obligations qu’entraîne […] l’utilisation du régime douanier», visant ainsi toutes les obligations découlant du régime douanier concerné. De plus, il y a lieu de souligner que le point 9 de l’article 859 du règlement d’application prévoit expressément que le dépassement du délai autorisé pour la présentation du décompte d’apurement ne figure pas parmi les manquements qui font naître une dette douanière dans la mesure où certaines conditions, contenues audit article, sont remplies.

40

Il y a lieu de rappeler que le régime de perfectionnement actif sous forme du système de la suspension constitue une mesure exceptionnelle destinée à faciliter le déroulement de certaines activités économiques. Ce régime implique la présence, sur le territoire douanier de l’Union, de marchandises non communautaires qui risquent d’être intégrées, sans être dédouanées, dans le circuit économique des États membres (voir arrêt du 15 juillet 2010, DSV Road, C-234/09, Rec. p. I-7333, point 31).

41

Dès lors que ce régime comporte un risque évident pour l’application correcte de la réglementation douanière de l’Union et la perception des droits y afférents, les bénéficiaires de celui-ci sont tenus au strict respect des obligations qui en découlent. De la même manière, il y a lieu de procéder à une interprétation stricte des conséquences à leur égard en cas de non-respect de leurs obligations (voir arrêt du 14 janvier 2010, Terex Equipment e.a., C-430/08 et C-431/08, Rec. p. I-321, point 42).

42

Ainsi, comme le souligne M. l’avocat général au point 50 de ses conclusions, c’est par l’apurement du régime du perfectionnement actif sur la base du décompte y afférent que le sort définitif des marchandises importées est établi, par dérogation au régime général. Le décompte constitue donc un document central dans le cadre du fonctionnement du régime de perfectionnement actif sous forme du système de la suspension, comme le démontrent aussi les mentions détaillées qui doivent y figurer selon l’article 521, paragraphe 2, du règlement d’application et l’obligation de déposer ce décompte dans les 30 jours qui suivent l’expiration du délai d’apurement, telle que prévue à l’article 521, paragraphe 1, premier alinéa, premier tiret, du règlement d’application, revêt une importance particulière pour la surveillance douanière dans le cadre de ce régime douanier.

43

Par conséquent, la naissance d’une dette douanière ne revêt pas, dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, le caractère d’une sanction, mais doit être regardée comme la conséquence de l’absence de réunion des conditions requises aux fins de l’obtention de l’avantage résultant de l’application du régime de perfectionnement actif sous forme du système de la suspension. En effet, ce régime implique l’octroi d’un avantage conditionnel qui ne peut être octroyé si les conditions y afférentes ne sont pas respectées, ce qui rend inapplicable la suspension et justifie, par conséquent, l’imposition des droits de douanes.

44

En outre, la Cour a jugé que l’article 859 du règlement d’application met valablement en place un régime régissant de manière exhaustive les manquements, au sens de l’article 204, paragraphe 1, sous a), du code des douanes, qui «sont restés sans conséquence réelle sur le fonctionnement correct du dépôt temporaire ou du régime douanier considéré» (arrêt du 11 novembre 1999, Söhl & Söhlke, C-48/98, Rec. p. I-7877, point 43). Or, dans l’affaire au principal, la juridiction de renvoi a formulé sa question préjudicielle en se fondant sur l’hypothèse selon laquelle les conditions énoncées audit article 859 ne sont pas remplies.

45

Dès lors, il y a lieu de retenir que la violation d’une obligation, liée au bénéfice du régime de perfectionnement actif sous forme du système de la suspension, devant être exécutée après l’apurement dudit régime douanier, en l’occurrence l’obligation de présenter le décompte d’apurement dans le délai de 30 jours prescrit à l’article 521, paragraphe 1, premier alinéa, premier tiret, du règlement d’application, fait naître, pour toutes les marchandises à apurer, une dette douanière en application de l’article 204, paragraphe 1, sous a), du code des douanes dans la mesure où les conditions énoncées à l’article 859, point 9, du règlement d’application ne sont pas réunies.

46

En ce qui concerne le risque évoqué, par la juridiction de renvoi et Döhler, de la naissance d’une double dette douanière pour les marchandises non réexportées dans le litige au principal, il convient de rappeler que l’Union douanière s’oppose à la double imposition d’une même marchandise (arrêt du 20 septembre 1988, Kiwall, 252/87, Rec. p. 4753, point 11).

47

Il revient donc à la juridiction de renvoi de s’assurer que les autorités douanières ne fassent pas naître une seconde dette douanière pour les marchandises pour lesquelles une dette douanière serait déjà née sur la base d’un fait générateur antérieur.

48

Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de répondre à la question posée que l’article 204, paragraphe 1, sous a), du code des douanes doit être interprété en ce sens que la violation de l’obligation de présenter le décompte d’apurement au bureau de contrôle dans les 30 jours à partir de l’expiration du délai d’apurement, prévue à l’article 521, paragraphe 1, premier alinéa, premier tiret, du règlement d’application, entraîne la naissance d’une dette douanière visant l’ensemble des marchandises d’importation à apurer, y compris celles réexportées en dehors du territoire de l’Union, dans la mesure où les conditions énoncées à l’article 859, point 9, du règlement d’application sont considérées comme n’étant pas remplies.

Sur les dépens

49

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit:

L’article 204, paragraphe 1, sous a), du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié par le règlement (CE) no 648/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 13 avril 2005, doit être interprété en ce sens que la violation de l’obligation de présenter le décompte d’apurement au bureau de contrôle dans les 30 jours à partir de l’expiration du délai d’apurement, prévue à l’article 521, paragraphe 1, premier alinéa, premier tiret, du règlement (CEE) no 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement no 2913/92, tel que modifié par le règlement (CE) no 214/2007 de la Commission, du 28 février 2007, entraîne la naissance d’une dette douanière visant l’ensemble des marchandises d’importation à apurer, y compris celles réexportées en dehors du territoire de l’Union européenne, dans la mesure où les conditions énoncées à l’article 859, point 9, dudit règlement no 2454/93 sont considérées comme n’étant pas remplies.

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: l’allemand.

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CJUE, n° C-262/10, Arrêt de la Cour, Döhler Neuenkirchen GmbH contre Hauptzollamt Oldenburg, 6 septembre 2012