Conseil de prud'hommes de Paris, 4 novembre 2020, n° 19/02428

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cons. prud’h. Paris, 4 nov. 2020, n° 19/02428
Juridiction : Conseil de prud'hommes de Paris
Numéro(s) : 19/02428

Texte intégral

CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE PARIS […]

«/p>

SECTION Fo Activités diverses chambre 5 + +

SM

N° RG F 19/02428 – N° 3521-X-B7D-JMML4

Portalis

NOTIFICATION par LRAR du :

Délivrée au demandeur le :

au défendeur le :

COPIE EXÉCUTOIRE délivrée à :

le : RECOURS n°

fait par :

le :

par L.R. au S.G.

REPUBLIQUE FRANÇAISE

_« DU PEUPLE FRANÇAIS 2 ». 7 TN R v" 2003 \\'\_\ (/ _ f/,-__-. v. \\« Lo 7 % ' \3/./ 2 Ve N 7 A J U GE ME N T \o/ Contradictoire en premier ressort Re / ( Susceptible d’appel)

/". Prononcé à l’audience du 04 novembre 2020 par Mme X,

Présidente, assistée de Madame Sophia E, Greffière. Débats à l’audience du 24 septembre 2020 Composition du bureau de jugement lors des débats et du délibéré :

Madame Françoise X, Président Conseiller (S) Madame Lucie ROLLAND, Assesseur Conseiller (S) Madame Bénédicte PEWZER, Assesseur Conseiller (E) Monsieur Eric TANNEAU, Assesseur Conseiller (E)

Assistés lors des débats de Madame Sophia E, Greffière

ENTRE

Madame B Y

née le […]

Lieu de naissance : VERSAILLES

[…]

Partie demanderesse. représentée par Maître Hélène MORATTO substituant Maître C D, Avocat au barreau de PARIS

ET

Association CENTRE D ACTION SOCIALE PROTESTANT SOUS L ENSEIGNE CASP ARAPEJ

[…]

[…]

Partie défenderesse, représentée par Maître K M, Avocat au barreau de PARIS

N° RG F 19/02428 – N° Portalis 3521-X-B7D-JMML4 PROCÉDURE – Saisine du Conseil le 22 mars 2019.

— Convocation de la partie défenderesse, par lettre recommandée reçue le 28 mars 2019, à l’audience de conciliation et d’orientation du 29 mai 2019.

— Renvoi à l’audience de jugement du 20 septembre 2019, 31 janvier 2020, 13 mai 2020, audience annulée et renvoyée au 24 septembre 2020 en raison de l’état d’urgence sanitaire instauré par la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020.

— Débats à l’audience de jugement du 24 septembre 2020, à l’issue desquels les parties ont été avisées oralement du prononcé de la décision en date du 04 novembre 2020.

— Les conseils des parties ont déposé des conclusions.

Dernier état de la demande :

— Rappel de salaires sur préavis …… …… …… ….. …. .. …… 5 358,78 € – Congés payés afférents …… …… …… ….. …. . + + + + + + + + + + + + + 535,88 € – Indemnité de licenciement . …… …… …… .. . . .. . . . . . . . . . …. 1 339,70 € – Dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du licenciement abusif

…………………………………………………… 16 076,34 € – Indemnisation au titre de la méconnaissance , par l’employeur , de son obligation de prévenir et de faire cesser les actes de harcèlement ………………. 5 000,00 € – Dommages et intérêts pour harcèlement moral …………………. 5 000,00 € – Dommages et intérêts violation obligation affiliation à la mutuelle …… 1 000,00 € – Article 700 du Code de Procédure Civile …………………….. 2 400,00 €

— Intérêts au taux légal

— Capitalisation des intérêts

— Dépens

— Exécution provisoire article 515 Code de Procédure Civile

— Remise du solde de tout compte et des documents sociaux conformes au jugement à intervenir sous astreinte de 50,00 € par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir

Demande présentée en défense par l° Association CENTRE D ACTION SOCIALE PROTESTANT SOUS L ENSEIGNE CASP ARAPEJ

— Article 700 du Code de Procédure Civile …………………….. 2 000,00 €

Les Faits

Madame B Y a été engagée par L’association CENTRE D’ACTION SOCIALE PROTESTANT (CASP ARAPJ) en qualité d’éducatrice spécialisée en contrat à durée déterminée du 3 octobre 2016 puis en contrat à durée indéterminée à compter ler décembre 2016.

Elle était affectée dans deux services :

— L’accompagnement des sortants de prison au centre d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS)

— La gestion et l’organisation d’activités collectives sur deux services CHRS et ACT (services orienté vers les résidents malades)

N° RG F 19/02428 – N° Portalis 3521-X-B7D-JMML4

Selon les deux parties, le salaire brut mensuel moyen s’élevait à 2 679,39 euros (moyenne des trois derniers mois).

La convention collective applicable est celle nationale des établissements privés d’hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif.

Madame Y était en arrêt pour raisons de santé constatées médicalement du 28 juillet au 09 août 2017, du 10 août au 27 août 2018, du 3 octobre au 5 novembre 2018.

Par courrier du 20 septembre 2018, la salariée a été convoquée à un entretien préalable prévu le 2 octobre 2018 reporté à la demande de la salariée au 3 octobre 2018 auquel elle s’est présentée assistée par un membre du personnel qui a établi un compte rendu.

Le licenciement pour faute grave a été notifié le 24 octobre 2018. DIRES ET MOYENS DES PARTIES

En complément des conclusions déposées et visées conformément à l’article 455 du code procédure civile.

Madame B Y représentée par Maître Charlotte Brunet substituée par Maître Hélène MORATO demande au Conseil de reconnaître qu’elle a été victime d’un harcèlement moral et de la dédommager du préjudice induit. En effet, l’employeur n’a pris aucune mesure pour la protéger des faits de harcèlements commis par un usager.

Par ailleurs, son licenciement pour faute grave est totalement injustifié, le premier grief est anodin. Ses propos non appropriés liés à sa fatigue ne relevaient pas d’une faute grave. Quant au deuxième grief, il est totalement infondé.

En réponse, L’association CENTRE D* ACTION SOCIALE PROTESTANT SOUS L’ENSEIGNE CASP ARAPEJ représentée par Maître K L M précise qu’ils n’ont jamais été informés que Madame Y était victime de harcèlement de la part d’un usager.

Il est à noter que l’employeur a répondu favorablement à sa demande d’aide pour alléger sa charge de travail.

Concernant, le licenciement, la faute grave est caractérisée par deux faits dont l’un relève du non respect des consignes liées à sa sécurité et de la non prévenance auprès de ses responsables d’événements graves.

EN DROIT

Le Conseil après en avoir délibéré conformément à la loi a prononcé, le 04 novembre 2020, le jugement suivant :

Sur les demandes de constater le harcèlement moral dont a été victime la salariée, d’en dédommager le préjudice et d’indemniser au titre de la méconnaissance par l’employeur de son obligation de prévenir et de faire cesser les actes de harcèlement :

Le Code du travail (articles L.1152-1 et 2) prévoit qu’aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Pour motiver sa demande, l’article L.1154-1 dispose que le salarié présente au juge des éléments de fait laissant présumer l’existence d’un harcèlement moral. Il incombe ensuite

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à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement.

Par ailleurs, en application de l’article L 4121-1, l’employé… prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

En l’espèce, Madame Y reproche à son employeur de n’avoir pris aucune mesure de protection quand elle a subi le harcèlement d’un usager sous l’emprise de stupéfiants ou pendant ses périodes de sevrage.

Engagée en octobre 2016, elle a écrit le 9 août 2017 par courrier électronique à son employeur. Elle indique compenser l’investissement de certains collègues dont elle critique les valeurs éthiques et professionnelles, dénonce des dysfonctionnements de la structure dont le sous effectif, une mauvaise coordination des actions envers les usagers, un manque de travail en commun, une mauvaise image donnée par l’association et son épuisement professionnel. Aucun acte de harcèlement n’est évoqué.

Le 10 août 2017, l’association lui indiquait qu’elle serait reçue après la période estivale.

Le 29 septembre 2017 en présence de son supérieur hiérarchique s’est déroulé son entretien professionnel annuel au cours duquel elle a rappelé ses griefs envers l’équipe. Il s’est dégagé de cet entretien, la nécessité de formations pour l’aider à prendre du recul entre sa pratique personnelle et 'celles de se collègues et à se protéger en tant que travailleur social notamment par une formation consacrée aux addictions.

De même, le courrier commun du 29 janvier 201 8 dénonce auprès de l’employeur le malaise de l’ensemble de l’équipe lié aux comportements de la responsable de service qui sera remplacée en avril 2018. Cependant cette lettre, n’indique pas que Madame Y serait personnellement harcelée.

Concernant les rapports des réunions de service sur le cahier de liaison des 26 octobre 2017, 13 novembre 2017, 10 janvier, 17 janvier, 11 avril, 25 avril 2018, ils laissent transparaître une activité lourde à gérer.

En janvier et en avril, Madame Y a demandé à ne plus être seule. Il a été décidé en janvier qu’un collègue travaillerait en duo avec elle. Selon l’attestation de celui-ci, cette aide n’a jamais été effective.

En avril 2018, Madame Y fera équipe avec une collègue qui s’est occupée plus particulièrement des aspects administratifs de leur mission.

Concernant les messages et les appels téléphoniques de l’usager harceleur, le Conseil constate que les rapports de réunion n’en font pas état. Selon les pièces remises à la barre les appels téléphoniques de cette personne au nombre de 41 couvrent la période du 21 juin au 2 olctobre 2018 et les messages très nombreux du 30 mars à août 2018 (plus nombreux en juillet).

Le conseil constate que Madame Z leur a apporté très peu de réponse (environ 11 selon les reflets remis à la barre) et qu’elle est restée très professionnelle dans ses écrits.

Dans ces circonstances, il est indéniable que Madame Y a eu une charge professionnelle lourde du fait notamment d’un usager particulièrement difficile à gérer.

Cependant les demandes de Madame Y axées sur la non respect par l’employeur de son obligation de sécurité face à des actes de harcèlements subis par la salariée du fait de cet individu, cette dernière n’ayant présenté au conseil aucune pièce laissant supposer que l’association était informée de l’existence de tels incidents, le conseil ne fait pas droit à ses demandes afférentes.

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Sur les demandes de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et d’en indemniser notamment les préjudices induits. =

Le licenciement a été notifié le 24 octobre 2018 comme suit

«… Afin de recueillir vos explications sur les faits qui vous sont reprochés, vous avez été reçue par E F, Directeur du Pôle droit et hébergement le mercredi 3 octobre 2018 à 9h à Châtenay-Malabry (entretien prévu le 02 octobre2Ù18, reporté suite à votre demande par mail du 28 septembre 2018).

Comme vous permet le réglementation, vous avez été assistée au cours de cet entretien par un membre du personnel, Madame G H . Nous avons souhaité qu’une parité entre salarié et représentant de l’employeur soit observée. Aussi avons-nous demandé à Monsieur I J, responsable de service. d’être présent en qualité d’assistant.

Nous vous avons exposé les faits que nous avions à vous reprocher et nous avons recueilli vos explications. Nous reprenons ces éléments ci-dessous.

1/ Le 10 août dernier, suite à l’absence dune collègue pour arrêt de maladie. votre responsable de service vous a demandé d’annuler les rendez-vous prévus de celle-ci. Vous avez refusé en lui disant que ça vous « saoulait » de faire cela, que « je ne suis pas secrétaire » renvoyant cette tâche à l’agent d’accueil.

l’otre responsable vous a alors expliqué que selon lui, prévenir les résidents de l’absence d’un collègue fait partie de l’entraide naturelle au sein d’une équipe, a fortiori entre collègues du même service par tageant le même bureau.

Que cela participe aussi à l’efficacité et à la continuité du service puisque les résidents peuvent avoir besoin de quelque chose.

Lors de l’entretien du 3 octobre. vous avez reconnu ces faits.

Vous vous êtes excusée de votre comportement et de votre attitude qui n’étaient pas adaptés, et avez expliqué que vous étiez épuisée.

Ces faits sont contraire à l’article 5 du règlement intérieur du CASP précisant (chaque membre du personnel, (…). est tenu de respecter les instructions qui lui sont données par la hiérarchie », ils sont constitutifs d’un refus d’obtempérer à un ordre direct, d’irrespect et de défiance vis-à-vis de la hiérarchie, d’un langage non acceptable, ayant une incidence sur les autres collaborateurs.

Par ailleurs, vos propos dénotaient un refus du travail d’équipe, pourtant inhérent à votre fonction, (soutien des collègues et continuité de service) et d’une attitude méprisante vis-à-vis d’une collègue, contraires à l’article 10.2 du règlement intérieur stipulant en effet que « le personnel doit éviter de manquer de respect, (…) ou de critiquer un autre membre du personnel ».

2/Vous avez été contactée par le co-résident d’un usager, à la suite de l’hospitalisation d’office de ce dernier le 24 juillet dernier, pour venir ouvrir la porte de sa chambre dans laquelle étaient hébergés (en violation de notre règlement de fonctionnement) une femme et deux enfants mineurs qui souhaitaient récupérer leurs affaires. Cette situation a été portée à ma connaissance le 13 septembre 2018, par témoignage écrit du co-résident.

Lors de notre entretien vous avez confirmé avoir été en contact avec cette femme, que vous êtes bien allée ouvrir la chambre pour lui donner ses affaires et avez vu les affaires de la femme et des enfants. Vous avez dit ne pas être au courant de cet hébergement et vous

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indiquez n’avoir rien caché à votre hiérarchie, tout en indiquant que vus ne vous souvenez plus de l’en avoir informé.

Vous avez expliqué que vous étiez en grande difficulté et que vous avez besoin de formation et que vous n’avez pas de reconnaissance professionnelle.

Pour rappel, l’usager qui a fait l’objet d’une hospitalisation d’office (à la demande du CHRS auprès du préfet) faisait l’objet d’un accompagnement renforcé. avec la mie en place d’un binôme (une collègue et vous) pour assurer la sécurité des intervenants, avec un soutien fort et régulier de l’équipe et de votre responsable de service sur cette situation.

Par ailleurs, la prise en charge de ce résident a été depuis interrompue, (au-delà des soupçons de radicalisation et intervention de la BAC avec plan anti-terroriste en juin dernier) en raison du comportement violent de ce monsieur, ayant investi l’appartement pour installer un trafic de drogues.

La dangerosité de ce résident était donc réelle, et nous n’avions aucune information sur la présence de cette femme, ni des conditions à l’origine de son hébergement.

Vous n’avez pas averti la direction du CASP de cet hébergement illicite, vous vous êtes rendue seule dans l’appartement pour ouvrir la porte de la chambre à cette dame sans mesurer les risques pour votre propre sécurité (vous ne connaissiez pas cette personne ni ses intentions ni même les conditions et raison pour lesquelles elle était hébergée).

Vous vous y êtes rendue à la demande d’un co-résident dont vous n’êtes pas référente.

Par ailleurs, vous n’avez pas mesuré les implications qu’il pouvait y voir sur le plan de la protection de l’enfance en remettant les deux enfants mineurs à la rue ; situation nécessitant un signalement d’enfance en danger au regard de la déontologie du travail social. et du cadre réglementaire.

Ces faits constituent une mise en danger de vous-même, des personnes et de l’institution, et sont caractérisés par l’absence d’information de la direction sur l’existence de faits graves -actant d’un défaut de loyauté, de même qu’un non respect des obligations de l’association vis-à-vis de la protection de l’enfance.

Notre institution pouvait être également mise en cause par nos partenaires institutionnels(DRIHL, ASE …), pour ne pas avoir pris les mesures adaptées.

Ces deux faits, dont le deuxième est d’une extrême gravité, sont inacceptables et totalement inadaptés à la réalisation de vos missions.

En effet, vous n’avez pas mesuré les implication de votre comportement professionnel sur votre propre sécurité, sur la sécurité des personnes hébergés, et sur les missions du service auquel vous appartenez.

Cette situation, au regard du public accompagné par le service Arapej 92, ne nous permet ps d’envisager de poursuivre la réalisation de votre contrat de travail.

Plus largement, l’ensemble de ces éléments nous amène à constater que la poursuite de notre collaboration n’est pas envisageable compte tenu des faits qui vous sont reprochés.

Aussi, par la présente, nous vous signifions votre licenciement pour faute grave… » La lettre de licenciement fixe les limites du litige.

La faute grave résulte d’un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de

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travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la période de préavis.

La charge de la preuve de la faute grave incombe dans tous les cas à l’employeur.

Au préalable, concernant la prescription des faits évoquée par la partie demanderesse, le conseil indique qu’en application de l’article L 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.

En l’espèce, Les faits reprochés sont datés respectivement du 25 juillet et 10 août 2018,

Madame Y a été convoquée à un entretien préalable le 20 septembre 2018 soit moins deux mois après les faits. La convocation à l’entretien préalable interrompant le délai de prescription et non la lettre de licenciement comme indiqué par la partie demanderesse, le conseil dit que l’action disciplinaire n’était pas prescrite au 20 septembre 2018.

Concernant les motifs du licenciement, il est reproché à la salariée, le 10 août 2018 d’avoir eu des propos déplacés, une attitude méprisante envers ses collegues et un refus d’obtempérer à un ordre de son responsable, le 25 juillet 201 8, de s’être rendue au domicile d’un résident sans autorisation. d’avoir accepté qu’il héberge dans son logement une femme et deux enfants sans avertir ses responsables hiérarchiques, de ne pas avoir fait un signalement auprès l’administration de la protection de l’enfance et de s’être mise en danger.

Concemant les faits du 25 juillet 2018, il est avéré que Madame Y s’est rendue au domicile d’un résident en cours d’hospitalisation d’office, qu’elle a vu et pris en photos dans le logement des sacs d’où sortaient des affaires d’une femme et d’enfants, que ces affaires ont été remis à une femme. Il est avéré que Monsieur A à la demande de Madame Y a changé les serrures de l’appartement.

La partie défenderesse n’a présenté aucun élément de preuve sur la connaissance de Madame Y de l’hébergement de cette femme et de deux enfants. Ainsi. selon le deuxième témoignage de Monsieur A , toujours en poste contredisant celui établi en novembre 2018, 6 mois plus tôt, il aurait changé un carreau cassé par les enfants.

Or selon la page du cahier de liaison datée d’avril 2018 (pièce remise par la partie défenderesse), il est fait référence à un carreau cassé du fait du résident lui-même lors d’une altercation avec son co-résident.

Ainsi, il ne pouvait pas être reproché à Madame Y de ne pas avoir contacté les services de protection de l’enfance sans preuve de sa connaissance de l’hébergement d’enfants en bas âge dans le chambre du résident.

Il est indiqué dans la lettre de licenciement que Madame Y se soit rendue au domicile de ce résident hospitalisé à la demande d’un autre résident. Or selon, une page du cahier de liaison du 25 juillet 2018 (pièce remise par la partie défenderesse), il est indiqué que Madame Y « dépose des affaires à ce résident ».

Cette inscription correspond aux dires de la salariée qui précise être allée chercher quelques affaires à la demande du résident hospitalisé.

Cette inscription contredit aussi l’employeur qui affirme de ne pas en avoir été informé. Concernant la consigne de ne pas se rendre au domicile du résident, consigne faite à toute

l’équipe dont Madame Y, elle date du 6 juillet 2018 avant son hospitalisation d’office. A sa lecture, elle indique l’attitude à avoir notamment à l’occasion de la

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manifestation d’un comportement excessif de cette personne. En conséquence la portée de ces consignes n’est plus la même lors de l’absence du résident.

Concernant les faits du 10 août 2018, il est avéré que Madame Y a répondu à son responsable que « ça me saoulait » quand il lui a demandé d’annuler les rendez-vous de sa collègue absente et que c’était un travail de secrétaire.

L’expression « ça me saoule » est une expression familière et négative. Cependant, elle ne peut pas être considérée comme un propos injurieux.

Par ailleurs si le refus d’obtempérer à un ordre est caractérisé, il est à considérer dans un contexte d’une tâche supplémentaire donnée au propre planning à une employée qui le jour même se voyait prescrire par son médecin traitant, dix jours d’arrêt de travail.

Dans ces circonstances, les reproches liés aux faits du 25 juillet 2018 ( le conseil jugeant ceux du 10 août 2018 infondés) ne justifiant pas une mise à l’écart de l’entreprise de Madame Y, le conseil dit son licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’employeur est condamné à lui verser une indemnité légale de licenciement, une indemnité de préavis sur la base de deux mois de salaire en raison de son ancienneté de deux ans, de l’indemnité de congés payés afférente.

Par ailleurs, en application de l’article L 1235-3 du code du travail, Madame Y indemnisée par pôle emploi du 13 décembre 2018 au 28 février 2019 et ayant présenté la plan de remboursement d’un crédit pour acquérir un bien immobilier dont les échéances mensuelles s’élèvent à 564,68 euros, l’association est condamnée à verser une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d’une valeur de trois mois de salaire.

Sur la demande de dédommagement en raison de la non affiliation à une mutuelle

Il est rappelé que l’employeur a une obligation d’aftilier les salariés à une mutuelle et de participer au financement de la cotisation pour moitié.

En l’espèce, à la barre, la partie défenderesse reconnaît avoir oublié cet aspect lors de la poursuite du contrat de travail durée déterminée en contrat à durée indéterminée. Cependant, Madame Y ne précise pas le détail de son préjudice.

En effet ni dans ses écritures, ni à la barre, la partie demanderesse n’a pu préciser l’évaluation de son préjudice.

Dans ces circonstances et à défaut de toutes pièces afférentes, le conseil ne peut pas faire droit à cette demande.

Sur la demande de l’exécution provisoire du présent jugement au titre de l’article 515 du code procédure civile :

Le conseil estime équitable d’ordonner l’exécution provisoire selon l’article 515 du code de procédure civile et la remise des documents sociaux conformes au présent jugement sans l’assortir d’une astreinte.

Sur les demandes au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile, tant principale que reconventionnelle :

Il apparaît équitable au Conseil de laisser à la charge de l’employeur les frais irrépétibles que la partie demanderesse a dû exposer à l’occasion de cette procédure pour le montant de mille cinq cents euros et de lui laisser à sa charge ses propres frais.

N° RG F 19/02428 – N° Portalis 3521-X-B7D-JMML4 PAR CES MOTIFS Le Conseil statuant publiquement, par jugement contradictoire en premier ressort : Dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

— Condamne l° Association CENTRE D’ACTION SOCIALE PROTESTANT SOUS L ENSEIGNE CASP ARAPEJ à payer à Madame B Y les sommes suivantes:

—  5358.78€ à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

—  535.87€ au titre des congés payés sur préavis

—  1339.70€ à titre d’indemnité de licenciement

—  8039€ à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Les intérêts courent à compter de la réception, par la partie défenderesse, de la convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation, pour les créances de nature salariale et à compter du prononcé du jugement pour les créances à caractère indemnitaire.

—  1500€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile

Ordonne à l’ Association CENTRE D’ACTION SOCIALE PROTESTANT SOUS L ENSEIGNE CASP ARAPEJ de remettre à Madame B Y les documents

sociaux de fin de contrat conformes à la présente décision.

Ordonne l’exécution provisoire du jugement en application des dispositions de l’article 515 du Code de procédure civile.

Déboute Madame B Y du surplùs de ses demafides. Déboute l’Association CENTRE D’ACTION SOCIALE PROTESTANT SOUS L ENSEIGNE CASP ARAPEJ de sa demande formulée au titre de l’article 700 du Code de

procédure civile.

CONDAMNE l’Association CENTRE D° ACTION SOCIALE PROTESTANT SOUS L ENSEIGNE CASP ARAPEJ au paiement des entiers dépens.

DENTE,

EXPÉDITION […]

N° R.G. : N° RG F 19/02428 – N° Portalis 3521-X-B7D-JMMLA Mme B Y C/ Association CENTRE D ACTION SOCIALE PROTESTANT SOUS L ENSEIGNE CASP ARAPEJ

Jugement prononcé le : 04 Novembre 2020

En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux judiciaires d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

En foi de quoi le présent jugement a été signé par le président et le greffier.

La présente expédition (en 10 pages) revêtue de la formule exécutoire est délivrée le 16 Novembre 2020 par le directeur de greffe adjoint du tribunal judiciaire à :

Mme B Y

P/ Le directeur de greffe adjoint L’adjointe administrative Vos.

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