Conseil de prud'hommes de Reims, 31 mai 2022, n° R 22/00009

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cons. prud’h. Reims, 31 mai 2022, n° R 22/00009
Juridiction : Conseil de prud'hommes de Reims
Numéro(s) : R 22/00009

Sur les parties

Texte intégral

CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE REIMS

[…]

[…]

[…]

Tél. 03.26.49.53.95

MINUTE N°22/00036

N° RG R 22/00009 -

N° Portalis DCWQ-X-B7G-YVF

FORMATION DE REFERE

AFFAIRE

B X contre

S.A.S. WESTLAKE COMPOUNDS

FRANCE

QUALIFICATION

contradictoire premier ressort

Nature de l’affaire : 80J

Notifiée le :

Copie exécutoire délivrée le :

à:

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

ORDONNANCE DE REFERE

Audience du : 31 Mai 2022
M. B X

[…]

Représenté par Me Carlos DE CAMPOS (Avocat au barreau de REIMS)

DEMANDEUR

S.A.S. WESTLAKE COMPOUNDS FRANCE en son représentant […]

ZI sud-est

[…]

Représentée par Me Chloé BOBAN (Avocat au barreau de MARSEILLE) substituant Me Hélène DAIOGLOU (Avocat au barreau de MARSEILLE)

DEFENDERESSE

COMPOSITION DE LA FORMATION DE REFERE lors des débats et du délibéré :

Madame Patricia SIKORSYNSKI, Président Conseiller (S) Monsieur Christian ARBAL, Assesseur Conseiller (E) Assistés lors des débats de Madame Eva MARTYNIUK,

Greffier

PROCEDURE

- Date de la réception de la demande : 10 Février 2022

- Convocations envoyées le 10 Février 2022 pour l’audience du 8 Mars 2022

- Le 8 Mars 2022, le dossier est renvoyé au 19 Avril 2022 et au 3 Mai 2022

- Débats à l’audience de Référé du 03 Mai 2022

- Décision prononcée conformément à l’article 453 du code de procédure civile, par mise à disposition au greffe, en présence de Madame Sylvie DE PUNZIO, Greffier

La formation de référé, statuant publiquement, après avoir entendu les parties comparantes ou leur représentant, a rendu l’ordonnance suivante :

1



EXPOSE DU LITIGE
Monsieur B X est salarié de la société WESTLAKE COMPOUNDS France (anciennement A) par contrat à durée indéterminée à compter du 1er novembre 2008.

De 2008 à 2014, il occupe un poste au sein de la Direction Générale de A (Groupe ARKENA) et de 2015 à 2018 à la Direction du Développement du Groupe IVRY E.

Il est salarié du groupe depuis le 23 novembre 1978 et il a exercé la majorité de sa carrière à l’étranger.

Un avenant au contrat de travail en date du 12 septembre 2018 est signé par Monsieur B X suite à son affectation à la Société A C, filiale d’IVRY E, en qualité de Directeur Général.

Un accord de détachement est régularisé entre A SAS et A C le 19 juillet 2019 pour la répartition des dépenses liées à l’affectation de Monsieur X à A C.

Monsieur B X emménage au C le 1er décembre 2018 et prend ses fonctions au

1er janvier 2019.

A l’arrivée du nouvel actionnaire WESTLAKE CHEMICAL CORPORATION, société de droit américain, ce dernier mandate le cabinet local MEKONG LLC pour une étude des problèmes fiscaux au C.

Le 12 février 2019, une réunion est organisée entre Monsieur X, Madame Y (Vice présidente des Compounds et en charge de Nakan), Monsieur Z (Directeur d’usine WESTLAKE de Reims) avec à l’ordre du jour la situation fiscale de Monsieur X.

Le 11 avril 2019, il est proposé à Monsieur X un contrat « d’embauche » entre Monsieur X et D E F G MANAGEMENT H. Ce contrat faisant sortir Monsieur X du droit français et le soumettant au droit suisse. Monsieur X le refuse.

Le 16 avril 2019, Monsieur X est destinataire d’une note émanant de la Direction basée à HOUSTON l’informant de l’illégalité de sa situation et d’un mail lui demandant de contacter expressément le cabinet MEKONG LLC.

Dans le même temps, le Cabinet de fiscalisation DELOITTE est mandaté par le Vice-président Finances de NAKAN (du Groupe D E) pour régulariser le risque fiscal latent concernant trois expatriés, dont Monsieur X car aucune déclaration fiscale le concernant n’a été effectuée entre décembre 2018 et juin 2019.

Après différents échanges, le 12 juillet 2019, le cabinet fiscaliste DELOITTE confirme la nécessité impérieuse de déclarer les trois expatriés, dont Monsieur X et de payer leur impôt au C.

Le 20 février 2020, le cabinet fiscaliste DELOITTE indique dans une nouvelle note :

1. Que Monsieur X a résidé au C plus de 183 jours sur 12 mois consécutifs,

2. Qu’il est par conséquent considéré comme résident fiscal vietnamien,

3. Qu’il est assujetti à l’impôt vietnamien sur l’intégralité de ses revenus.

En exécution de cette note, A C a payé l’impôt sur le revenu vietnamien de Monsieur X afin de se mettre en conformité avec la fiscalisation vietnamienne.

En mai 2020, Monsieur X fait valoir ses droits à congés à compter du 1¹ octobre 2020, découlant de son séjour au C et de son CET.

Le 18 octobre 2020, Monsieur X rentre en France et pose des congés qu’il indique comme devant être refacturés par A à A C car liés à l’activité dans ce pays.

2



Le 16 novembre 2020, le Cabinet fiscaliste DELOITTE confirme que l’employeur au C est responsable du paiement de l’impôt pour l’ensemble des salariés (locaux et expatriés). Le 1er décembre 2020, il adresse les déclarations pour signature, Monsieur X refuse de signer.

Le 2 avril 2021, Monsieur X est destinataire d’une mise en demeure réclamant le remboursement spontané de son impôt théorique à hauteur de 96 710 €.

Le 7 septembre 2021, Monsieur X reçoit un courrier pour retenue sur salaire.

Le 1er octobre 2021, la retenue est mise en place à hauteur de 6 450 € par mois.

Monsieur X conteste devoir cette somme et indique que la Société WESTLAKE COMPOUNDS France ne détient pas de créance, qu’elle ne qualifie pas la somme qu’elle entend compenser, que seul 1/10ème du salaire peut être retenu en application des dispositions de l’article L 3251-3 du Code du Travail.

Il a alors fait convoquer en référé la Société WESTLAKE COMPOUNDS France prise en la personne de son représentant légal devant le présent Conseil par saisine du 3 février 2022 reçue le 10 février 2022. L’affaire a été retenue à l’audience du 3 mai 2022, les parties étant toutes présentes ou représentées, de sorte qu’il sera statué par ordonnance contradictoire.

Ses chefs de demande sont les suivants :

Vu l’absence de créance certaine, liquide et exigible de l’employeur sur le salarié,

Condamner à titre provisionnel la Société WESTLAKE COMPOUNDS France à payer à Monsieur X les sommes indûment retenues, soit 6 450 €/mois depuis octobre 2021, avec intérêts au taux légal à compter de la date d’exigibilité de chaque salaire,

Subsidiairement,

Condamner la Société WESTLAKE COMPOUNDS France à payer à Monsieur X les sommes retenues mensuellement depuis octobre 2021 sur son salaire excédant le 1/10ème du salaire versé, avec intérêts au taux légal à compter de la date d’exigibilité de chaque salaire,

Condamner la Société WESTLAKE COMPOUNDS France à payer à Monsieur X la somme de 3 000 € au titre des frais irrépétibles,

Condamner la Société WESTLAKE COMPOUNDS France aux entiers dépens.

En réplique, les demandes de la Société WESTLAKE COMPOUNDS France sont les suivantes :

A titre principal:

Dire et juger que la demande présentée par Monsieur X ne relève pas de l’urgence, ni de l’évidence, Dire et juger que cette demande se heurte à une contestation sérieuse et qu’il n’existe aucun trouble manifestement illicite.

En conséquence

Se déclarer incompétent au regard des dispositions des articles R 1455-1 et suivants de Code du Travail, Débouter Monsieur X de l’ensemble de ses demandes

A titre subsidiaire, si par extraordinaire, le Conseil de prud’hommes de Reims statuant en matière de référé

s’estimait compétent,

Constater l’existence d’une créance fongible, certaine, liquide et exigible de la Société WESTLAKE COMPOUNDS France à l’encontre de Monsieur X à hauteur de 96 710 €

En conséquence,

Débouter Monsieur X de sa demande de provision des sommes dûment retenues, soit 6 450 € par mois depuis octobre 2021, avec intérêt légal,

3



Débouter Monsieur X de ses autres demandes,

En tout état de cause,

Condamner Monsieur X à verser à la Société WESTLAKE COMPOUNDS France la somme de

1 500 € au titre des dispositions de l’article 700.

EXPOSE DE LA DECISION

Les articles R 1455-5 et R 1455-6 du Code du travail fixent les limites de la compétence du Juge des référés en matière prud’homale.

Aux termes de l’article R 1455-5 du Code du travail, la formation de référé du Conseil de prud’hommes peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

En outre et selon les dispositions de l’article 1353 du Code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit le prouver alors que réciproquement, celui qui s’en prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

Monsieur B X emménage au C le 1er décembre 2018. Etant domicilié au C et percevant des revenus de source vietnamienne, Monsieur X n’est pas soumis à l’impôt sur le revenu français conformément à la convention collective fiscale franco-vietnamienne de non double imposition. L’impôt sur le revenu au C est payé par l’employeur et récupéré sur les salariés.

Le Cabinet international fiscaliste DELOITTE, mandaté par le Vice-président Finances de NAKAN (du Groupe D E), confirme que Monsieur B X doit être assujetti à l’impôt au C.

Les termes de l’avenant au contrat de travail en date du 12 septembre 2018, suite à l’affectation de Monsieur B X à la Société A C, filiale d’IVRY E, en qualité de Directeur Général, statut Cadre, en détachement, prévoit les conditions suivantes : Rémunération brute mensuelle forfaitaire de 15 834 €4.

Rémunération variable à objectif atteint pouvant atteindre 15 % du salaire de base 5.

Indemnité logement forfaitaire mensuelle de 5 000 $ 6.

Véhicule de fonction avec chauffeur 7.

L’accord de détachement régularisé entre A SAS et A C le 19 juillet

2019 indique que :

A C devait supporter l’intégralité des dépenses liées au détachement de 8.

Monsieur X, A paiera le salaire, la prime, les congés et autres avantages du salarié au nom de 9. A C et refacturera cette dernière. A C paye les dépenses de logement, frais médicaux et autres dépenses de l’employé et de ses proches directement aux intéressés.

A C est responsable du paiement des frais refacturés par A 10.

à la demande de A

Aucunes dispositions dans l’avenant au contrat de travail et l’accord de détachement de Monsieur B

X ne prévoient que l’entreprise prend à sa charge les impôts dus.

La Société WESTLAKE COMPOUNDS France indique que le montant des impôts payés par la Société A C pour Monsieur X s’élève à 96 710 €. Ce montant n’est quantifié par aucun document officiel.

D’autre part, des documents sont en anglais, rendant difficile leur compréhension.

En conséquence de ces éléments, la formation de référé dit qu’il y a contestation sérieuse sans dommage imminent. Elle constate qu’elle ne possède pas tous les éléments nécessaires pour statuer en toute connaissance de cause et qu’il convient de renvoyer Monsieur B X à mieux se pourvoir devant le juge du fond s’il le souhaite.



PAR CES MOTIFS

Le Conseil de Prud’hommes pris en sa formation de référé, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement par ordonnance CONTRADICTOIRE et en PREMIER RESSORT, mise à disposition au greffe,

DIT qu’il n’y a pas lieu à référé,

RENVOIE Monsieur B X à mieux se pourvoir devant les juges de fond s’il le souhaite,

LAISSE à la charge de chacune des parties leurs entiers dépens et frais irrépétibles relevant de l’article 700 du Code de procédure civile.

La présente ordonnance a été signée par le président et le greffier.

Le Greffier, Le Président

S. DE PUNZIO P. SIKORSYNSKI

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