Cour de Cassation, Assemblée plénière, du 2 novembre 1999, 97-17.107, Publié au bulletin

  • Décision ayant rejeté les " plus amples prétentions "·
  • Responsabilité à l'égard du maître de l'ouvrage·
  • Omission de statuer sur un chef de demande·
  • Expertise précédente exempte d'erreurs·
  • Emploi d'une formule de style·
  • Libre appréciation des juges·
  • Fait du maître de l'ouvrage·
  • Pouvoirs et devoirs du juge·
  • Appréciation souveraine·
  • Architecte entrepreneur

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

°

Lorsqu’il constate que les erreurs contenues dans le rapport dressé par un expert ne figuraient pas dans celui établi par de précédents experts, le juge du fond relève exactement que lui seul peut critiquer ce rapport ou en retenir les conclusions pour liquider le montant d’un dommage.

Le juge qui déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires omet de statuer sur un chef de demande, dès lors qu’il ne résulte pas des motifs de la décision qu’il l’a examiné.

Ne tire pas les conséquences légales de ses constatations au regard de l’article 1792 du Code civil, la cour d’appel qui laisse une part de responsabilité au maître de l’ouvrage, au titre de la réparation des troubles de jouissance résultant de malfaçons et du mauvais état général de la construction, alors qu’elle a constaté que la preuve de l’immixtion de ce dernier n’était pas rapportée.

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Sur la décision

Référence :
Cass., 2 nov. 1999, n° 97-17.107, Bull. 1999 Ass. plén. N° 8 p. 12
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 97-17107
Importance : Publié au bulletin
Publication : Bulletin 1999 A. P. N° 8 p. 12
Décision précédente : Cour d'appel de Fort-de-France, 22 mai 1997
Précédents jurisprudentiels : A rapprocher :
(2°). Chambre civile 1, 03/06/1998, Bulletin 1998, I, n° 196 (3), p. 134 (rejet), et l'arrêt cité.
Textes appliqués :
3° :

Code civil 1792

Dispositif : Cassation partielle sans renvoi.
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000007043384
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Sur les parties

Texte intégral

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’en 1984, M. Z…, maître de l’ouvrage, a chargé M. A…, entrepreneur, des travaux de gros oeuvre et de menuiserie dans la construction d’une maison d’habitation réalisée sous la maîtrise d’oeuvre de M. C… ; qu’après exécution M. A… a assigné M. Z… en paiement du solde du prix des travaux, tandis que ce dernier, par voie reconventionnelle, a demandé aux constructeurs le paiement du coût de la réparation des désordres ;

Attendu que M. Z… fait grief à l’arrêt de fixer le prix des travaux effectués par M. A… à 433 155,13 francs, alors, selon le moyen, 1o que lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal pour ordonner, même d’office, toute mesure d’instruction ; que la cour d’appel, qui estime que seul le tribunal pouvait ordonner une contre-expertise, viole, par fausse application, l’article 771 du nouveau Code de procédure civile, 2o que le motif dubitatif équivaut à une absence de motifs ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui retient l’évaluation des travaux effectués par M. A… à la somme de 433 155,13 francs, comme étant « la plus fiable », statue par un motif dubitatif, et viole l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 3o que la cour d’appel constate que le montant des travaux effectués par M. A… est de 433 155,13 francs, que cette somme ne comprend pas les matériaux fournis par M. Z…, et que ce dernier a avancé au fur et à mesure des travaux la somme de 257 132 francs, ce dont il résultait que M. A… était débiteur de la somme de 144 864,17 francs ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui estime que la somme de 433 155,13 francs prend en compte tous les paramètres, et qui condamne M. Z… à verser à M. A… la somme de 176 023,13 francs, ne déduit pas de ses constatations les conséquences légales au regard de l’article 1134 du Code civil :

Mais attendu qu’ayant constaté que l’expert Y… n’avait pas tenu compte des matériaux fournis par l’entrepreneur et avait pris comme base de calcul le marché qui finalement n’avait pas été exécuté, et exactement relevé que seul le tribunal, à l’exclusion du juge de la mise en état, pouvait critiquer le travail des précédents experts en ordonnant une nouvelle expertise, la cour d’appel a souverainement retenu, sans se déterminer par un motif dubitatif, que l’expertise effectuée par M. Y… devait être écartée, et que la somme de 433 155,13 francs représentant, d’après les experts X… et Memin, le montant des travaux réalisés par l’entrepreneur, avait été fixée en tenant compte de tous les paramètres, et notamment des matériaux fournis par M. Z… ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir omis de condamner l’entrepreneur et le maître d’oeuvre à payer au maître d’ouvrage les intérêts au taux légal de la somme de 121 000 francs due au titre de la réparation des désordres, alors, selon le moyen, que M. Z… avait sollicité dans ses conclusions d’appel l’homologation du rapport de l’expert Y… et le paiement d’une somme de 121 000 francs au titre des travaux de reprise et des malfaçons et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mai 1986, date de la prise de possession des lieux ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui condamne in solidum M. A… et M. C… à verser à M. Z… la somme de 121 000 francs au titre de la réparation des désordres, sans assortir cette condamnation des intérêts au taux légal à compter du 15 mai 1986, viole l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l’arrêt, en dépit de la formule générale du dispositif qui « déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires », n’a pas statué sur le chef de demande relatif aux intérêts, dès lors qu’il ne résulte pas des motifs de la décision, que la cour d’appel l’ait examiné ; que l’omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l’article 463 du nouveau Code de procédure civile, le moyen n’est pas recevable ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l’article 1792 du Code civil ;

Attendu qu’après avoir constaté que la preuve de l’immixtion du maître de l’ouvrage n’était pas rapportée, de sorte que la responsabilité de l’entrepreneur de construction et du maître d’oeuvre était entière sur le fondement du texte susvisé, l’arrêt laisse une part de responsabilité au maître d’ouvrage au titre de la réparation des troubles de jouissance entraînés par les malfaçons et du mauvais état général de la construction ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;

Et attendu qu’en application de l’article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour est en mesure en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a condamné MM. A… et C… à payer à M. Z… la somme de 40 000 francs au titre des préjudices annexes, l’arrêt rendu le 23 mai 1997, entre les parties, par la cour d’appel de Fort-de-France ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

Condamne in solidum MM. A… et D… à payer à ce titre à M. Z… la somme de 60 000 francs, le montant de cette condamnation étant supporté par parts égales par MM. A… et D…

MOYENS ANNEXES

Moyens produits par la SCP Lesourd, avocat aux Conseils, pour M. Z… ;

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir fixé le montant des travaux effectués par un entrepreneur à la somme de 433 155,13 francs et d’avoir condamné le maître de l’ouvrage à verser à ce dernier le solde des travaux, soit la somme de 176 023,13 francs ;

AUX MOTIFS QUE c’est à tort que l’appelant fait grief aux premiers juges d’avoir préféré les deux premières expertises à l’expertise Y… ; en effet, rien ne leur interdisait de procéder de la sorte dans la mesure où, 1° l’expert Y… n’a pas tenu compte des matériaux fournis par l’entrepreneur et a pris comme base de calcul le marché qui n’a finalement pas été exécuté ; 2° cet expert a été désigné par le juge de la mise en état alors que seul le Tribunal pouvait critiquer le travail des experts et ordonner une contre-expertise ; que l’expert B… a fait un compte détaillé de tous les travaux réellement effectués ; en prenant les prix unitaires de Pierre A… qu’il jugeait très compétitifs, il est arrivé à un chiffre de 430 870,75 francs, sans toutefois tenir compte des matériaux fournis par le maître de l’ouvrage ; que les experts X… et Memin ont, quant à eux, inclus ce paramètre dans leur calcul (cf. page 3, chapitre 5, dernier paragraphe du rapport) contrairement à ce qu’a estimé le Tribunal ; considérant, sur le dire non contesté de Roger Z…, que celui-ci avait fourni les matériaux pour faire la toiture, ils ont également fait un calcul détaillé poste par poste, en retenant les mêmes prix unitaires, sauf pour les postes afférents à la toiture ; leur évaluation à la somme de 433 155,13 francs du montant des travaux effectués par Pierre A…, doit être considérée comme la plus fiable puisqu’elle résulte de la confrontation de deux avis et qu’elle prend en compte tous les paramètres ; qu’après déduction de la somme de 257 132 francs, correspondant aux avances réglées au fur et à mesure des travaux, Roger Z… reste devoir à Pierre A… un solde de 176 023,13 francs ; que cette somme produira intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 31 juillet 1986 ;

ALORS QUE, D’UNE PART, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du Tribunal pour ordonner, même d’office, toute mesure d’instruction ; que la cour d’appel, qui estime que seul le Tribunal pouvait ordonner une contre-expertise, viole, par fausse application, l’article 771 du nouveau Code de procédure civile ;

ALORS QUE, D’AUTRE PART, le motif dubitatif équivaut à une absence de motifs ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui retient l’évaluation des travaux effectués par M. A… à la somme de 433 155,13 francs, comme étant « la plus fiable », statue par un motif dubitatif, et viole l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

ALORS QU’ENFIN, la cour d’appel constate que le montant des travaux effectués par M. A… est de 433 155,13 francs, que cette somme ne comprend pas les matériaux fournis par M. Z…, et que ce dernier a avancé au fur et à mesure des travaux la somme de 257 132 francs, ce dont il résultait que M. A… était débiteur de la somme de 144 864,17 francs, qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui estime que la somme de 433 155,13 francs prend en compte tous les paramètres, et qui condamne M. Z… à verser à M. A… la somme de 176 023,13 francs, ne déduit pas de ses constatations les conséquences légales au regard de l’article 1134 du Code civil ;

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir omis de condamner un entrepreneur et un maître d’oeuvre in solidum à verser au maître de l’ouvrage les intérêts au taux légal de la somme de 121 000 francs due au titre des réparations des malfaçons ;

ALORS QUE que M. Z… avait sollicité dans ses conclusions d’appel (production n° 3, p. 8 et 10) l’homologation du rapport de l’expert Y… et le paiement d’une somme de 121 000 francs au titre des travaux de reprise et des malfaçons et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mai 1986, date de la prise de possession des lieux ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui condamne in solidum M. A… et M. D… à verser à M. Z… la somme de 121 000 francs au titre de la réparation des désordres, sans assortir cette condamnation des intérêts au taux légal à compter du 15 mai 1986, viole l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir laissé à la charge du maître de l’ouvrage le tiers des réparations des préjudices causés par les fautes de l’entrepreneur et du maître d’oeuvre ;

AUX MOTIFS QUE rien au dossier ne permet d’établir d’une part que le maître de l’ouvrage se serait immiscé dans la confection des parties d’ouvrage où ont été constatés les désordres et d’autre part qu’il serait notoirement compétent en matière de gros-oeuvre ; que la responsabilité de M. A… à l’égard de M. Z… est entière ; que M. D…, qui a accepté une mission complète de maîtrise d’oeuvre, doit en assumer toutes les conséquences et l’incompétence technique qu’il revendique, loin de constituer une cause d’exonération de sa responsabilité, ne peut qu’aggraver celle-ci ; que c’est à juste titre que les premiers juges ont laissé une part de ces préjudices à la charge du maître de l’ouvrage, celui-ci ayant fait preuve d’une grande imprudence dans le choix des intervenants, probablement par souci d’économie ;

ALORS QUE, D’UNE PART, le partage de responsabilités entre le maître de l’ouvrage, l’entrepreneur et le maître d’oeuvre ne peut intervenir que si l’immixtion fautive du maître de l’ouvrage est caractérisée ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui constate la responsabilité entière à l’égard de M. Z… de MM. A… et D…, ainsi que l’absence d’immixtion fautive de M. Z…, ce qui écartait tout partage de responsabilités des préjudices causés par les désordres et malfaçons, et qui laisse cependant à la charge de M. Z… le tiers des réparations des préjudices, ne déduit pas de ses constatations les conséquences légales au regard des articles 1147 et 1792 du Code civil ;

ALORS QUE, D’AUTRE PART, le motif dubitatif équivaut à une absence de motifs ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui relève que M. Z… a fait preuve d’une grande imprudence, « probablement » par souci d’économie, statue par des motifs dubitatifs et viole l’article 455 du nouveau Code de procédure civile.

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