Tribunal administratif de Dijon, 1ère chambre, 23 mars 2023, n° 2102386

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Chronologie de l’affaire

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www.romain-lemaire.fr · 29 mars 2023

Où peut-on installer des panneaux photovoltaïques en zone agricole ? L'agrivoltaïsme : entre enjeux énergétiques et préservation des terres La préservation des terres agricoles est au cœur de la lutte contre l'étalement urbain et de l'objectif de réduction de l'artificialisation des sols. Le développement de la production d'électricité issue des énergies renouvelables peut créer des conflits d'usage et d'utilisation du foncier agricole. La recherche d'un équilibre est donc délicate lorsqu'il s'agit d'encourager et d'encadrer le développement des installations photovoltaïques dans …

 
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Sur la décision

Référence :
TA Dijon, 1re ch., 23 mars 2023, n° 2102386
Juridiction : Tribunal administratif de Dijon
Numéro : 2102386
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 25 septembre 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 17 septembre 2021 et des mémoires enregistrés les 31 janvier 2022, 12 mai 2022, 1er septembre 2022, et 14 novembre 2022, M. C B, Mme H G épouse B, Mme E B épouse D et Mme F B épouse A, représentés par Me Carpentier, demandent au tribunal :

1°) d’annuler l’arrêté du 22 avril 2021 par lequel la maire de Jouy a délivré, au nom de l’Etat, à la société Technique Solaire Invest 50 un permis de construire un bâtiment agricole avec couverture photovoltaïque d’une emprise au sol de 1 726 m² pour stockage de matériels et fourrage sur un terrain situé Les Brouets à Jouy, ensemble la décision de rejet de leur recours gracieux du 19 juillet 2021 ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

— ils ont intérêt pour agir, en tant que voisins immédiats, la construction présentant des nuisances visuelles et des risques d’incendie compte tenu de la proximité avec leur bien ;

— la délivrance du permis n’a pas été précédée d’une division du terrain ;

— le permis de construire a été délivré en violation de l’article R. 431-8 du code de l’urbanisme, le projet comportant des erreurs et des contradictions ;

— il a également été délivré en violation de l’article R. 431-9 du code de l’urbanisme, en l’absence d’information sur le système de récupération des eaux de pluie ;

—  il méconnait l’article R. 431-20 du même code, le récépissé de la déclaration ne figurant pas au dossier ;

— il en est de même de l’article R. 423-50 du même code, le SDIS n’ayant pas été consulté ;

— la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers n’a pas été consultée, en violation de l’article L. 111-5 du code de l’urbanisme ;

— en l’absence d’indication sur le rejet des eaux pluviales, les dispositions de l’article

R. 111-8 du code de l’urbanisme ne sont pas respectées ;

— l’arrêté méconnait les articles L. 111-3 et L. 111-4 du code de l’urbanisme, dès lors que le projet ne porte pas sur une installation nécessaire à l’exploitation agricole ;

— il méconnait l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme, eu égard aux risques d’incendie, à la proximité avec leur habitation et à l’absence de dispositif de lutte contre l’incendie ;

— il est entaché d’erreur manifeste d’appréciation au regard des dispositions de l’article

R. 111-27 du code de l’urbanisme ;

Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 décembre 2021, 24 mars 2022, 14 juin 2022 et 4 octobre 2022, le préfet de l’Yonne conclut au rejet de la requête et demande au tribunal, à titre subsidiaire, de mettre en œuvre le cas échéant la procédure de régularisation prévue à l’article

L. 600-5-1 du code de l’urbanisme et de surseoir à statuer.

Il fait valoir que :

— les requérants ne démontrent pas leur intérêt pour agir ;

— les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par décision du 9 décembre 2022, la clôture de l’instruction a été fixée au 28 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’environnement ;

— le code rural et de la pêche maritime ;

— le code de l’urbanisme ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme C,

— les conclusions de Mme Ach, rapporteure publique,

— les observations de Me Carpentier, représentant les consorts B.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 22 avril 2021, la maire de Jouy a délivré, au nom de l’Etat, un permis de construire à la société Technique Solaire Invest 50 pour la construction d’un bâtiment agricole pour stockage de matériels et fourrage, avec couverture photovoltaïque, d’une emprise au sol de

1 726 m², sur un terrain situé Les Brouets à Jouy. Les consorts B, propriétaires d’une maison d’habitation située sur la parcelle contigüe au terrain d’assiette du projet, demandent l’annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la société Technique Solaire Invest 50 a obtenu la jouissance exclusive du terrain d’assiette du projet, qui sera, selon la promesse de bail conclue avec l’exploitant agricole propriétaire du terrain, détachée de la parcelle par une division parcellaire ultérieure, après obtention du permis de construire. Si les requérants soutiennent qu’aucune déclaration préalable de division n’a été formulée par le propriétaire du terrain, aucune disposition en matière d’urbanisme ne fait obligation de procéder à une division parcellaire avant d’obtenir un permis de construire portant sur une partie seulement du terrain d’assiette. Le moyen tiré du vice de procédure ne peut dès lors qu’être écarté.

3. En deuxième lieu, la circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l’ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l’urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n’est susceptible d’entacher d’illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l’appréciation portée par l’autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

4. Les requérants se plaignent tout d’abord d’une inexactitude concernant la surface de la couverture photovoltaïque, de 1495 m2 selon la notice, alors que les plans montrent que la surface de la toiture, de l’ordre de 1700 m2, est presque entièrement couverte de panneaux. Il est également reproché à la notice d’occulter la présence de la maison des consorts B, qui se trouve à moins de 17 mètres, alors qu’est indiquée une distance de 137 mètres avec les habitations des tiers les plus proches. Il ressort effectivement des pièces du dossier que la couverture photovoltaïque couvre presque entièrement la toiture, dont la surface est nettement supérieure à celle indiquée dans la notice architecturale, et que l’indication relative à la distance par rapport aux tiers les plus proches est erronée. En outre, il est exact que les vues sur l’environnement proche figurant au dossier ne font pas apparaître la maison des requérants, alors qu’elle est se trouve à proximité immédiate du projet. Cette maison est en revanche nettement identifiable sur la photographie aérienne et sur le plan de masse figurant au dossier. Dès lors, pour regrettables que soient les erreurs commises sur la surface photovoltaïque et la distance par rapport aux habitations de tiers, les services instructeurs disposaient d’informations suffisantes au dossier pour pouvoir d’eux-mêmes rectifier ces erreurs. Il n’est en outre pas précisé en quoi ces indications inexactes auraient faussé leur appréciation des règles d’urbanisme applicables.

5. En troisième lieu, selon l’article R. 431-9 du code de l’urbanisme : « Le projet architectural () indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d’équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l’alimentation en eau et l’assainissement ».

6. En l’espèce, la notice précise que la collecte des eaux pluviales se fera par un système de drainage sous chaque plan de toiture et évacuation par les drains, ces informations étant assorties d’un schéma. Le réseau eaux pluviales (EP) et le drain existant sont en outre matérialisés sur le plan de masse, qui montre que ce drain débouche ensuite sur un fossé. Ces informations sont suffisantes au regard des exigences des dispositions précitées, quand bien même la cuve de récupération des eaux de pluie évoquée par le préfet en défense ne serait pas mentionnée dans le dossier, cette cuve n’étant d’ailleurs qu’un dispositif intermédiaire, le trop plein de cette cuve étant lui-même évacué par les drains.

7. En quatrième lieu, selon l’article R. 431-20 du code de l’urbanisme : « Lorsque les travaux projetés portent sur une installation classée soumise à enregistrement ou déclaration en application des articles L.512-7 et L. 512-8 du code de l’environnement, la demande de permis de construire doit être accompagnée de la justification du dépôt de la demande d’enregistrement ou de la déclaration ».

8. Les requérants fournissent eux-mêmes la déclaration de l’exploitant, signée le 8 mars 2021, soit à une date antérieure à celle du dépôt du dossier de demande de permis de construire. A supposer que cette justification n’ait pas été effectivement jointe à la demande de permis de construire lors du dépôt de celle-ci, la notice descriptive du projet mentionne expressément que, compte tenu de la quantité de fourrage stockée, celui-ci est soumis au régime de la déclaration. Le service instructeur était ainsi en mesure de vérifier si le pétitionnaire avait réellement satisfait à ses obligations déclaratives au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement. L’éventuelle absence de la déclaration au dossier n’aurait, dans ces circonstances, pu exercer d’influence sur l’appréciation portée par l’autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

9. En cinquième lieu, aux termes de l’article R. 423-50 du code de l’urbanisme : « L’autorité compétente recueille auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur ».

10. Il ne résulte pas de ces dispositions que la consultation du service d’incendie et de secours préalablement à la délivrance d’un permis de construire serait une obligation. Le moyen ne peut donc qu’être écarté.

11. En sixième lieu, aux termes de l’article L. 111-3 du code de l’urbanisme : « En l’absence de plan local d’urbanisme, de tout document d’urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune. ». Aux termes de l’article L. 111-4 du même code : « Peuvent toutefois être autorisés en dehors des parties urbanisées de la commune : () 2° Les constructions et installations nécessaires à l’exploitation agricole, à des équipements collectifs dès lors qu’elles ne sont pas incompatibles avec l’exercice d’une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées, () ». Et aux termes de l’article L. 111-5 du même code : « La construction de bâtiments nouveaux mentionnée au 1° de l’article L. 111-4 et les projets de constructions, aménagements, installations et travaux mentionnés aux 2° et 3° du même article ayant pour conséquence une réduction des surfaces situées dans les espaces autres qu’urbanisés et sur lesquelles est exercée une activité agricole ou qui sont à vocation agricole doivent être préalablement soumis pour avis par l’autorité administrative compétente de l’Etat à la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l’article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime. () ». Selon l’article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime, dans sa version alors applicable au litige : « Dans chaque département, il est créé une commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers. () Elle émet, dans les conditions définies par le code de l’urbanisme, un avis sur l’opportunité, au regard de l’objectif de préservation des terres naturelles, agricoles ou forestières, de certaines procédures ou autorisations d’urbanisme. () ».

12. En l’espèce, il n’est pas contesté que la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, n’a pas été consultée sur le projet en litige. Si le préfet soutient que le bâtiment projeté se trouve dans les parties urbanisées de la commune, il ressort des pièces du dossier que le terrain d’assiette du projet est une vaste parcelle, entourée d’un côté par la maison des requérants, de l’autre par celle de l’exploitant agricole. Si elle supporte deux autres hangars, l’ensemble constitue un groupe de constructions isolées, à l’écart du bourg, dans un environnement agricole ; eu égard à ces caractéristiques, et quand bien même elle est située le long d’une route départementale et est desservie pas les réseaux, cette parcelle ne peut être regardée comme située dans une « agglomération secondaire de la commune ». Pour autant, le terrain d’assiette du projet, s’il est rattaché à l’exploitation agricole du propriétaire des lieux qui stockera dans le futur bâtiment des matériels et produits agricoles, est constitué d’un terre-plein empierré et tassé qui sert d’ores et déjà de lieu de stockage de bottes de paille et qui n’est manifestement plus cultivé. S’il est entouré d’une mince bande d’herbe, celle-ci ne constitue par une prairie. Eu égard à ses caractéristiques et à son emplacement, le projet ne peut en l’espèce être regardé comme conduisant à une réduction des surfaces agricoles ou à vocation agricole existantes. Par suite, le permis de construire en litige a pu être accordé sans que la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers soit consultée.

13. En septième lieu, aux termes de l’article R. 111-8 du code de l’urbanisme : « L’alimentation en eau potable et l’assainissement des eaux domestiques usées, la collecte et l’écoulement des eaux pluviales et de ruissellement ainsi que l’évacuation, l’épuration et le rejet des eaux résiduaires industrielles doivent être assurés dans des conditions conformes aux règlements en vigueur ».

14. Les requérants se bornent à soutenir qu’en l’absence d’indication dans le dossier sur le traitement des eaux pluviales, les dispositions de l’article R. 111-8 du code de l’urbanisme sont méconnues. Mais, ainsi qu’il a été dit au point 6, des indications suffisantes sur le traitement des eaux pluviales figurent au dossier et il n’est aucunement démontré que le dispositif prévu ne serait pas conforme aux règlements en vigueur.

15. En huitième lieu, les requérants soutiennent que le bâtiment projeté ne peut être regardé comme nécessaire à une activité agricole et que le permis de construire a dès lors été délivré en violation des articles L.111-3 et L.111-4 du code de l’urbanisme. Ainsi qu’il a été dit au point 12, le projet en litige ne se trouve pas dans une partie urbanisée de la commune, et les dispositions précitées lui sont dès lors applicables. La circonstance que des constructions et installations à usage agricole puissent aussi servir à d’autres activités, notamment de production d’énergie, n’est pas de nature à leur retirer le caractère de constructions ou installations nécessaires à l’exploitation agricole au sens des dispositions de l’article L. 111-4 du code de l’urbanisme, dès lors que ces autres activités ne remettent pas en cause la destination agricole avérée des constructions et installations en cause.

16. En l’espèce, la circonstance que le permis de construire soit accordé à une société d’investissement et non à l’exploitant agricole directement n’est pas déterminante, le permis de construire n’étant pas délivré en considération de la personne qui en devient titulaire, mais en fonction du projet de bâtiment qui lui est soumis. En l’espèce, selon la promesse de bail conclue entre la société pétitionnaire et l’exploitant agricole propriétaire de la parcelle, le hangar restera à la disposition de ce dernier, qui pourra s’en servir, conformément à l’article 8 de cette promesse de bail, pour y installer une citerne à eau, y stocker des produits phyto sanitaires, du matériel, et dans la limite de 50% de la surface, de la paille, du foin, ou du fourrage, ainsi que, dans la même limite, du grain. Les requérants ne peuvent à cet égard se prévaloir utilement du non-respect éventuel de ces stipulations par le bailleur.

17. Si les requérants soutiennent que ce hangar présente des dimensions qui excèdent considérablement les besoins de l’exploitant agricole, il ressort des pièces du dossier que cette exploitation porte sur environ 150 hectares, cultivés en céréales, et que l’exploitant souhaite stocker dans le bâtiment un nombre important d’engins agricoles, dont cinq tracteurs, trois remorques, des semoirs et divers engins, son fourrage, sur 233 m2 ainsi que des graines pour la même surface. Les engins et le fourrage sont pour le moment stockés à l’air libre et les céréales à la coopérative. Il est également prévu de transférer sous le hangar un local pour les produits phytosanitaires et une citerne, actuellement installés dans un bâtiment vétuste qui sera détruit. Si les requérants mettent en doute l’existence de ce matériel et la nécessité d’installer un nouvel abri, il ressort des pièces du dossier et notamment des photographies produites en défense que l’exploitation dispose d’un nombre important d’engins et véhicules agricoles, et que le bâtiment à détruire est dans un réel état de délabrement. Il n’apparait pas que le futur hangar, malgré ses dimensions imposantes, serait disproportionné au regard des besoins de l’exploitation. Enfin, l’installation de panneaux solaires sur la toiture n’apparait pas incompatible avec l’activité agricole de l’exploitation, le terrain d’assiette étant d’ores et déjà affecté à un usage de stockage, qui perdurera une fois le hangar installé. Le projet qui porte sur un bâtiment destiné au stockage de matériel agricole et à l’entreposage de céréales, est ainsi directement lié et nécessaire à une telle exploitation agricole.

18. En neuvième lieu, aux termes de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme : « Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales s’il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d’autres installations ».

19. Les requérants soulèvent un risque particulier d’incendie, et estiment qu’il n’existe aucun dispositif adapté de lutte contre l’incendie. Toutefois, les éléments produits ne permettent pas d’établir que la présence d’une couverture photovoltaïque serait de nature à accroître de façon notable le risque d’incendie par rapport à un bâtiment de stockage classique. De même, il n’est produit aucun élément permettant d’accréditer l’idée d’un risque particulier en raison du stockage de foin, de paille, ou de produits phyto sanitaires, quand bien même il s’agit de produits inflammables. Si les requérants font valoir un risque lié à la foudre, qui serait fréquente sur les lieux, aucune donnée n’est produite sur ce point. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier qu’il existe d’ores et déjà deux points d’eau (un plan d’eau et une borne incendie), à proximité du terrain d’assiette, et il est en outre prévu la création d’un troisième plan d’eau, qui, s’il n’existe pas encore, est bien représenté sur les plans, contrairement à ce que soutiennent les requérants. Il n’est pas sérieusement contesté que ces trois points d’eau permettront de respecter les dispositions de l’article 57 du règlement départemental de défense extérieure contre l’incendie de l’Yonne, applicable aux bâtiments agricoles servant au stockage mixte, de stockage de matériel et véhicule ou d’atelier, en fournissant un débit d’au moins 150 m³ par heure, les deux points existants permettant d’ores et déjà d’atteindre 134 m³ par heure, ce qui est supérieur au volume d’eau résultant de la formule de calcul mentionné dans ce même article. Si cet article ajoute que les points d’eau doivent être à une distance maximale de 200 mètres, l’article 13 du même règlement ajoute que « lorsque le premier point d’eau incendie doit être situé au maximum à 200 mètres de l’entrée du bâtiment, le deuxième point d’eau incendie peut être situé à 400 mètres maximum de l’entrée du bâtiment ». En l’espèce, la condition de distance est remplie dès lors que le point d’eau le plus proche se situe à moins de 100 mètres de l’entrée du bâtiment, et le deuxième à 264 mètres. Les distances minimales sont donc respectées.

20. Les requérants soutiennent également que ce volume d’eau serait insuffisant eu égard à la surface de l’ensemble des hangars existants sur le terrain, et au risque de propagation d’un incendie aux bâtiments voisins ; toutefois, le caractère suffisant des moyens de lutte contre l’incendie ne s’apprécie qu’au vu du projet, et non de tous les bâtiments d’ores et déjà présents alentour, qui ne sont pas attenants au hangar.

21. Dès lors, il n’apparait pas que le projet présenterait des risques pour la sécurité publique tels que le permis de construire serait entaché d’illégalité sur ce point.

22. En dernier lieu, aux termes de de l’article R. 111-27 du code de l’urbanisme : « Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales. »

23. En l’espèce, le projet se situe dans un environnement rural, caractérisé par des paysages champêtres, dans l’ensemble préservés. Pour autant, les lieux environnants ne présentent pas de caractéristiques telles que l’implantation d’un hangar agricole, même surmonté d’une couverture photovoltaïque, serait de nature à leur porter une atteinte inacceptable. Si la maison des requérants, qui présente une indéniable qualité architecturale, est très proche du projet, celui-ci ne sera visible que depuis la façade Nord de cette maison, alors que la façade principale se trouve au Sud, ainsi que, partiellement, depuis leur jardin, sous certains angles de vue. Cette covisibilité reste toutefois limitée, et le bâtiment est d’aspect particulièrement sobre, ce qui en attenue la présence, malgré ses dimensions. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la maire de Jouy a entaché sa décision d’erreur manifeste d’appréciation en délivrant le permis de construire en litige.

24. Il résulte de ce qui précède que les conclusions tendant à l’annulation du permis de construire attaqué doivent être rejetées, sans qu’il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête.

Sur les frais liés au litige :

25. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement aux requérants d’une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. C B, Mme H G épouse B, Mme E B épouse D et Mme F B épouse A, à la société Technique Solaire Invest 50 et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au préfet de l’Yonne et à la commune de Jouy.

Délibéré après l’audience du 2 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Olivier Rousset, président,

Mme Marie-Eve Laurent, première conseillère,

Mme Océane Viotti, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023.

La rapporteure,

M-E C

Le président,

O. Rousset

La greffière,

C. Chapiron

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent jugement.

Pour expédition,

La greffière,

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