Tribunal administratif de Lyon, 2 novembre 2011, n° 0906841

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Lyon, 2 nov. 2011, n° 0906841
Juridiction : Tribunal administratif de Lyon
Numéro : 0906841

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE LYON

N° 0906841

___________

M. A X

___________

Mme C

Rapporteur

___________

M. Dursapt

Rapporteur public

___________

Audience du 28 septembre 2011

Lecture du 2 novembre 2011

___________

36-12-03

C-BH

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le tribunal administratif de Lyon

(7e chambre)

Vu la requête, enregistrée le 12 novembre 2009, présentée pour M. A X, demeurant XXX à XXX, par Me Z, avocat ; M. X demande au tribunal :

— d’annuler la décision en date du 7 février 2008 par laquelle le directeur du centre régional des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Lyon-Saint-Etienne a pris acte de sa démission,

— d’enjoindre au CROUS de Lyon-Saint-Etienne de procéder à sa réintégration, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la lecture du jugement à intervenir,

— à titre subsidiaire, en l’absence de réintégration, de condamner le CROUS de Lyon­Saint-Etienne à lui verser une indemnité de 25 853,11 euros, au titre des salaires non perçus, et de 15 000 euros au titre du préjudice moral,

— de mettre à la charge du CROUS de Lyon-Saint-Etienne une somme de 3 000 euros, à verser à son conseil, au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Z renonce au bénéfice de l’aide juridictionnelle ;

M. X soutient que la décision attaquée constitue une mesure de licenciement ; que cette mesure est intervenue au terme d’une procédure irrégulière, en l’absence de mise en demeure de reprendre ses fonctions et d’entretien préalable, en méconnaissance du décret n° 88-145 du 15 février 1988 relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale et de l’article L. 1232-2 du code du travail ; que la décision litigieuse est dépourvue de fondement, dès lors, tout d’abord, qu’elle doit résulter d’une décision expresse et dépourvue d’ambiguïté et que l’article R. 1225-18 du code du travail prévoit qu’une démission doit être portée à la connaissance de l’employeur par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé ; qu’en outre, le délai de congé sans solde imparti par son employeur comportait une ambiguïté, de sorte qu’en vertu de l’article L. 1235-1 du code du travail, le doute doit lui profiter quant au caractère réel et sérieux du motif de son licenciement ; que le CROUS de Lyon­Saint-Etienne a également méconnu l’article L. 6323-19 du code du travail relatif au droit individuel à la formation ; qu’il subit un préjudice économique important ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les décisions du bureau d’aide juridictionnelle, en dates des 13 juin 2008 et 12 octobre 2011admettant M. X au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale ;

Vu la mise en demeure adressée le 13 septembre 2010 au CROUS de Lyon-Saint-Etienne, en application de l’article R. 612-3 du code de justice administrative, et l’avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 octobre 2010, présenté pour le CROUS de Lyon-Saint-Etienne, représenté par son directeur en exercice, par la SELARL Adamas Affaires Publiques, qui conclut au rejet de la requête ;

Le CROUS de Lyon-Saint-Etienne soutient que les conclusions indemnitaires présentées par M. X sont irrecevables en l’absence de réclamation préalable ; que les dispositions du code du travail et du décret du 15 février 1988 relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ne sont pas applicables à la situation de M. X, qui est notamment régie par le décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l’Etat ; que le congé pour raisons de famille prévu à l’article 21 de ce décret est limité à 15 jours ; qu’il incombe à l’agent bénéficiant d’un congé pour convenances personnelles prévu à l’article 22, dans le cadre duquel M. X a nécessairement entendu se placer, d’adresser une demande de réemploi à son employeur, faute de quoi il est considéré comme démissionnaire ; que le requérant n’a donc pas fait l’objet d’un licenciement pour abandon de poste ; qu’en l’absence de toute illégalité fautive, la responsabilité du CROUS de Lyon-Saint-Etienne ne saurait être engagée ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 septembre 2011, présenté pour M. X, qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

M. X soutient en outre qu’un congé accordé sur le fondement de l’article 21 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux agents non titulaires de l’Etat n’est pas soumis à l’obligation de présenter une demande de réemploi, prévue à peine de démission implicite par l’article 24 de ce décret ; que le CROUS de Lyon-Saint-Etienne ne pouvait donc prendre acte de sa démission ; qu’il pouvait bénéficier d’un congé annuel en application des dispositions combinées de l’article 10 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1984 et de l’article 4 du décret n° 84-972 du 26 octobre 1986 ; que les congés à l’issue desquels un agent peut être considéré comme démissionnaire en l’absence de demande de réemploi ont des durées comprises entre six mois et trois ans ; qu’aux termes de la décision du 20 août 1987 du directeur du C.N.O.U.S. l’absence momentanée d’un agent ne conduit pas nécessairement à un licenciement, dès lors qu’un mécanisme de remplacement par un autre agent est prévu ; que des autorisations d’absence pour évènements de famille sont prévues, sans limitation de durée ; que la commission paritaire n’a pas été réunie avant qu’il soit procédé à son licenciement ; que l’auteur de la décision de licenciement ne justifie pas de sa compétence ; que la sanction disciplinaire prononcée est disproportionnée ; que, s’agissant des conclusions indemnitaires, il se réserve de chiffrer plus précisément son préjudice ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 septembre 2011, présenté pour le CROUS de Lyon­Saint-Etienne, qui conclut au rejet de la requête par les mêmes moyens ;

Le CROUS de Lyon-Saint-Etienne fait, en outre, valoir qu’il n’a pas licencié son agent pour motif disciplinaire ou abandon de poste ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 octobre 2011, présentée pour M. X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat ;

Vu le décret n° 84-38 du 18 janvier 1984 modifié fixant la liste des établissements publics de l’Etat à caractère administratif prévue au 2° de l’article 3 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l’Etat pris pour l’application de l’article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat ;

Vu le décret n° 87-155 du 5 mars 1987 relatif aux missions et à l’organisation des œuvres universitaires ;

Vu le décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l’application de l’article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ;

Vu la décision du directeur du Centre national des œuvres universitaires et scolaires en date du 20 août 1987 portant dispositions applicables aux personnels ouvriers des œuvres universitaires et scolaires ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l’audience devant ces juridictions ;

Vu l’arrêté du vice-président du Conseil d’Etat du 18 mars 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l’article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 28 septembre 2011 :

— le rapport de Mme C, conseiller,

— les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,

— et les observations de Me Z, avocat, pour M. X et de Me Renouard, avocat, substituant Me Mescheriakoff, pour le CROUS de Lyon-Saint-Etienne ;

Considérant que M. A X a été recruté par le CROUS de Lyon-Saint-Etienne à compter du 1er mai 2005 par contrat à durée déterminée sur un poste de veilleur de nuit ; qu’il a été recruté par contrat à durée indéterminée à compter du 1er septembre 2005 en qualité d’agent de services spécialisé et affecté au même poste ; qu’il demande l’annulation de la décision du 7 février 2008 par laquelle le directeur du CROUS de Lyon-Saint-Etienne l’a informé qu’il prenait acte de sa démission ainsi que la condamnation du CROUS à indemniser les préjudices qu’il soutient avoir subis du fait de cette décision ;

Sur les conclusions à fins d’annulation et d’injonction :

Considérant qu’aux termes de l’article 14 du décret du 5 mars 1987 susvisé : "Les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) sont des établissements publics à caractère administratif chargés de remplir une mission de service public (…)" ; qu’aux termes de l’article 21 du même décret : « Les personnels ouvriers, lesquels participent directement à la mission de service public de l’établissement, sont des agents contractuels de droit public. Ils sont recrutés, gérés et rémunérés par les centres régionaux. Les dispositions qui leur sont applicables sont fixées par le directeur du Centre national et approuvées par le ministre chargé de la fonction publique, le ministre chargé de l’enseignement supérieur et le ministre chargé du budget » ; que les emplois de personnels ouvriers des CROUS figurent sur la liste, annexée au décret du 18 janvier 1984 modifié, des établissements publics de l’Etat à caractère administratif prévue au 2° de l’article 3 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 pour lesquels il est dérogé à la règle selon laquelle les emplois permanents doivent être occupés par des fonctionnaires ;

Considérant qu’il résulte des dispositions précitées que les personnels ouvriers des CROUS sont des agents publics non titulaires de l’Etat dont la situation est, par suite, régie par les dispositions du décret du 17 janvier 1986 susvisé, relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l’Etat, ainsi que par la décision du 20 août 1987 modifiée du directeur du Centre national des œuvres universitaires et scolaires portant dispositions applicables aux personnels ouvriers des œuvres universitaires et scolaires ;

Considérant qu’aux termes de l’article 48 du décret du 17 janvier 1986 susvisé : « L’agent non titulaire informe son administration de son intention de démissionner par lettre recommandée » ; qu’aux termes de l’article 21 du même décret : « Dans la mesure où les nécessités du service le permettent, l’agent non titulaire peut solliciter pour raisons de famille l’octroi d’un congé sans rémunération dans la limite de quinze jours par an » ; qu’aux termes de l’article 22 de ce décret : "L’agent non titulaire employé de manière continue depuis au moins trois ans peut solliciter, dans la mesure compatible avec l’intérêt du service, un congé sans rémunération pour convenances personnelles (…) / La demande initiale et de renouvellement doit être formulée au moins deux mois à l’avance, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception (…)" ; qu’enfin, l’article 24 dispose que : "Pour les congés faisant l’objet des articles 22 et 23 ci-dessus, l’agent doit adresser une demande de réemploi par lettre recommandée au moins deux mois avant le terme du congé. En l’absence d’une telle demande de réemploi, l’agent est considéré comme démissionnaire et se voit appliquer les règles prévues en ce cas (…)" ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. X a sollicité auprès de son employeur, par courrier du 13 décembre 2007, l’octroi d’un congé sans rémunération pour convenances personnelles, pour la période du 15 décembre 2007 au 22 janvier 2008 ; que le CROUS de Lyon-Saint-Etienne, constatant qu’il ne justifiait pas de l’ancienneté requise, lui a accordé, par courrier du 18 décembre 2007, un congé sans rémunération pour raisons de famille, sur le fondement de l’article 21 précité du décret du 17 janvier 1986, d’une durée maximale de 15 jours ; que le congé ainsi accordé n’était pas soumis à l’obligation pour son bénéficiaire de présenter une demande de réemploi, sous peine d’être considéré comme démissionnaire et que, d’ailleurs, ce courrier du 18 décembre 2007 se bornait à préciser que tout dépassement de la durée de quinze jours serait regardé comme une absence injustifiée ; qu’ainsi, et contrairement à ce que soutient le CROUS, M. X ne pouvait, en s’abstenant de reprendre son service à l’issue de ce congé, être considéré comme s’étant, de lui-même, placé dans la position de congé sans rémunération pour convenances personnelles ni, par suite, comme démissionnaire en l’absence de demande de réemploi ; qu’il est constant qu’il n’a jamais informé son employeur d’une quelconque intention de démissionner par lettre recommandée et ne pouvait dès lors être regardé comme ayant manifesté une telle intention, de manière expresse et dépourvue d’ambiguïté, au sens des dispositions précitées de l’article 48 du décret du 17 janvier 1986 ; qu’il suit de là, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que M. X est fondé à demander l’annulation de la décision en date du 7 février 2008 par laquelle le directeur du CROUS de Lyon-Saint-Etienne a pris acte de sa démission ;

Considérant que le présent jugement implique qu’il soit enjoint au CROUS de Lyon­Saint-Etienne de réintégrer M. X, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement, sans qu’il soit besoin d’assortir cette injonction d’une astreinte ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant qu’aux termes de l’article R. 421-1 du code de justice administrative : "Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision (…)" ;

Considérant que M. X n’a, ni avant d’introduire son recours ni en cours d’instance, formé devant le CROUS une réclamation tendant à l’octroi d’une indemnité ; que, dans son mémoire en défense, le CROUS de Lyon-Saint-Etienne n’a conclu au fond qu’à titre subsidiaire après avoir opposé la fin de non-recevoir tirée de l’absence de demande préalable ; que, dès lors, le contentieux n’étant pas lié, les conclusions susvisées de la requête, au demeurant présentées à titre subsidiaire, ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu’il n’y a pas lieu dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du CROUS de Lyon-Saint-Etienne la somme réclamée par M. X ou son conseil au titre des frais non compris dans les dépens ; que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font, par ailleurs, obstacle à ce que soit mise à la charge de M. X, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par le CROUS de Lyon-Saint-Etienne au même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : La décision du 7 février 2008 du directeur du CROUS de Lyon-Saint­Etienne est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au CROUS de Lyon-Saint-Etienne de réintégrer M. X dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions présentées par le CROUS de Lyon-Saint-Etienne sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. A X et au CROUS de Lyon-Saint-Etienne.

Délibéré après l’audience du 28 septembre 2011, à laquelle siégeaient :

M. Kolbert, président,

Mme C et Mme Y, conseillers.

Lu en audience publique le deux novembre deux mille onze.

Le rapporteur, Le président,

M. C E. KOLBERT

Le greffier,

F. E

La République mande et ordonne au ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Un greffier,

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Tribunal administratif de Lyon, 2 novembre 2011, n° 0906841