Tribunal administratif de Nantes, 8ème chambre, 18 avril 2025, n° 2318652
TA Nantes
Annulation 18 avril 2025

Arguments

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  • Accepté
    Insuffisance de motivation de la décision

    La cour a jugé que la décision attaquée méconnaissait les dispositions légales relatives à la réunification familiale, en ne tenant pas compte de l'âge de M me A au moment de la demande.

  • Accepté
    Erreur d'appréciation sur l'état de dépendance

    La cour a estimé que la commission de recours avait mal appliqué les critères d'évaluation de l'état de dépendance, ce qui a conduit à une décision erronée.

  • Accepté
    Délai de délivrance du visa

    La cour a ordonné au ministre de délivrer le visa dans un délai de deux mois, considérant que les conditions légales étaient remplies.

  • Accepté
    Frais liés au litige

    La cour a décidé de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme aux requérants pour couvrir les frais liés au litige, conformément à la législation en vigueur.

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Sur la décision

Référence :
TA Nantes, 8e ch., 18 avr. 2025, n° 2318652
Juridiction : Tribunal administratif de Nantes
Numéro : 2318652
Importance : Inédit au recueil Lebon
Dispositif : Satisfaction totale
Date de dernière mise à jour : 30 mai 2025

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 15 décembre 2023 et le 23 janvier 2025, Mme C E et M. B D, représentés par Me Taelman, demandent au tribunal, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d’annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France sur le recours préalable formé contre la décision de l’autorité consulaire française au Bangladesh rejetant la demande de visa de long séjour présentée par Mme A en qualité de membre de famille d’un réfugié ;

2°) d’enjoindre au ministre de l’intérieur de délivrer le visa sollicité dans le délai de trente jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de la demande dans le délai d’un mois et sous la même astreinte ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 400 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

— il appartiendra au ministre de l’intérieur de démontrer que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France s’est réunie dans une composition régulière ;

— la décision attaquée est insuffisamment motivée en fait et en droit ;

— elle méconnaît les articles L. 561-2 et R. 561-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et est entachée d’une erreur d’appréciation en ce que le motif opposé par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France n’est pas prévu par ces dispositions et que la demandeuse de visa était âgée de moins de 19 ans lors du dépôt de sa demande de visa ; en tout état de cause, elle est dépendante de son père, qui subvient à l’ensemble de ses besoins ;

— elle porte une atteinte au droit de mener une vie privée et familiale garanti par les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, par le point 8 de la directive 2003/86/ CE du 22 septembre 2003 et par la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;

— elle est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation eu égard aux conséquences qu’elle emporte sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 janvier 2025, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme Fessard-Marguerie,

— et les observations de Me Pronost, substituant Me Taelman, représentant les requérants.

Considérant ce qui suit :

1. M. D, ressortissant bangladais, a été admis au statut de réfugié par une décision du 9 septembre 2019 du directeur général de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Mme A, l’une de ses enfants, a déposé une demande de visa de long séjour auprès de l’autorité consulaire française au Bangladesh au titre de la réunification familiale. Par une décision du 17 juillet 2023, cette autorité a refusé de lui délivrer le visa sollicité. Par une décision implicite née le 21 octobre 2023, dont les requérants demandent l’annulation, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision consulaire.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. Aux termes de l’article L. 561-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, le ressortissant étranger qui s’est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : (.) / 3° Par les enfants non mariés du couple, n’ayant pas dépassé leur dix-neuvième anniversaire. / Si le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire est un mineur non marié, il peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint par ses ascendants directs au premier degré, accompagnés le cas échéant par leurs enfants mineurs non mariés dont ils ont la charge effective. / L’âge des enfants est apprécié à la date à laquelle la demande de réunification familiale a été introduite. ». Aux termes de l’article R. 561-1 du même code : « La demande de réunification familiale est initiée par la demande de visa des membres de la famille du réfugié ou du bénéficiaire de la protection subsidiaire mentionnée à l’article L. 561-5. Elle est déposée auprès de l’autorité diplomatique ou consulaire dans la circonscription de laquelle résident ces personnes ».

3. Il résulte de ces dispositions que l’âge de l’enfant pour lequel il est demandé qu’il puisse rejoindre son parent réfugié sur le fondement de l’article L. 561-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile doit être apprécié à la date de la demande de réunification familiale, c’est-à-dire à la date à laquelle est présentée la demande de visa à cette fin, sans qu’aucune condition de délai ne puisse être opposée. La circonstance que cette demande de visa ne peut être regardée comme effective qu’après son enregistrement par l’autorité consulaire, qui peut intervenir à une date postérieure, est sans incidence à cet égard. Doit être regardée comme date de présentation de la demande de visa, la date à laquelle le demandeur effectue auprès de l’administration toute première démarche tendant à obtenir un visa au titre de la réunification familiale. Par ailleurs, lorsqu’une nouvelle demande de visa est déposée après un premier refus définitif, il convient, pour apprécier l’âge de l’enfant, de tenir compte de cette demande, et non de la première demande.

4. Il résulte de l’article D. 312-8-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France doit être regardée comme s’étant appropriée le motif retenu par l’autorité consulaire française au Bangladesh et tiré de ce que Mme A, née le 11 mars 2002, était âgée de plus de dix-neuf ans lors du dépôt de sa demande de visa et qu’elle ne justifie pas d’un état de dépendance à l’égard de M. D, le réunifiant.

5. Il ressort des pièces du dossier que le père de la demandeuse de visa, qui a obtenu le statut de réfugié le 9 septembre 2019, a, par un courriel du 6 mars 2021 adressé à l’autorité consulaire française au Bangladesh, sollicité un rendez-vous afin de déposer des demandes de visa au titre de la réunification familiale pour son épouse et ses six enfants, dont Mme A. Si les demandes de visas des intéressés n’ont été enregistrées que le 8 janvier 2023, date de rendez-vous fixée par le consulat, il résulte du principe énoncé au point 3, qu’elles doivent être regardées comme ayant été présentées le 6 mars 2021, date correspondant aux premières démarches effectuées par M. D pour obtenir la délivrance de visas au titre de la réunification familiale. Or, à cette date, Mme A, née le 11 mars 2002, était âgée de moins de 19 ans et était donc éligible à la procédure de réunification familiale. Dans ces conditions, les requérants sont fondés à soutenir que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France a méconnu les dispositions précitées de l’article L. 561-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile en refusant de délivrer à Mme A le visa sollicité.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que Mme A et M. D sont fondés à demander l’annulation de la décision attaquée.

Sur les conclusions à fin d’injonction sous astreinte :

7. Eu égard à ses motifs, le présent jugement implique nécessairement, compte tenu de l’absence de changements de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle, qu’il soit enjoint au ministre de l’intérieur de faire délivrer à Mme A le visa sollicité, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’assortir cette injonction d’une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement aux requérants d’une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France née le 21 octobre 2023 est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l’intérieur de faire délivrer le visa sollicité dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.

Article 3 : L’Etat versera aux requérants la somme de 1 200 (mille deux cents) euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à Mme C E, à M. B D et au ministre d’Etat, ministre de l’intérieur.

Délibéré après l’audience du 14 mars 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Poupineau, présidente,

M. Ravaut, conseiller,

Mme Fessard-Marguerie, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 avril 2025.

La rapporteure,

A. FESSARD-MARGUERIE

La présidente,

V. POUPINEAU

La greffière,

A-L. LE GOUALLEC

La République mande et ordonne au ministre d’Etat, ministre de l’intérieur, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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