Tribunal administratif de Rennes, 30 décembre 2022, n° 2206200

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Rennes, 30 déc. 2022, n° 2206200
Juridiction : Tribunal administratif de Rennes
Numéro : 2206200
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Satisfaction totale
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 9 décembre 2022, M. G D, M. A K, M. et Mme M et B H, N I et L J, représentés par la Selarl Valadou-Josselin et Associés, demandent au juge des référés :

1°) d’ordonner, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l’exécution, d’une part, de l’arrêté du 9 août 2021 par lequel le maire de la commune de Roscanvel a accordé un permis de construire à M. F E pour la construction d’une maison individuelle sur un terrain situé chemin de Lanvernazal, d’autre part, de la décision implicite portant rejet de leur recours gracieux et enfin, de l’arrêté du maire du 27 septembre 2022 valant permis de construire modificatif ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Roscanvel la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

— la condition d’urgence est présumée satisfaite en application de l’article L. 600-3 du code de l’urbanisme ;

— sur le doute sérieux quant à la légalité des décisions litigieuses :

— elles sont entachées d’un détournement de pouvoir à raison de la brièveté du délai d’instruction ;

— le projet méconnaît l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme ;

— il méconnaît l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme en faisant peser un risque pour la sécurité publique ;

— il méconnaît l’article UHd 5.1 du plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) de la presqu’île de Crozon Aulne Maritime ;

— il méconnaît les dispositions du chapitre E portant dispositions réglementaires relatives aux voies et accès auxquelles renvoient l’article Uhd 8 du PLUi ;

— il méconnaît les dispositions du chapitre F « Dispositions réglementaires relatives au raccordement aux réseaux » auxquelles renvoient l’article UHd 9 du PLUi ;

— le permis a été obtenu par fraude en indiquant que son terrain est desservi par le chemin de Lanvernazal et que la garenne de Lanvernazal est une " zone d’empierrement aménagée par la commune (environ 50 mètres) ;

— à titre subsidiaire :

* l’illégalité du PLUi est soulevée par voie d’exception ;

* le projet méconnaît les dispositions du règlement national d’urbanisme remises en vigueur, à savoir les articles R. 111-5, R. 111-8, R. 111-9 et R. 111-17 du code de l’urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2022, M. F E, représenté par la société d’avocats Cornet-Vincent-Ségurel, conclut au rejet de la requête et à ce qu’il soit mis à la charge solidaire des requérants la somme de 3 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2022, la commune de Roscanvel, représentée par le cabinet d’avocats Le Roy, Gourvennec, Prieur, conclut au rejet de la requête et à ce qu’il soit mis à la charge des requérants la somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune fait valoir que :

— la requête, en tant qu’elle émane de Mme J, méconnaît les articles R. 600-4 du code de l’urbanisme et R. 414-3 du code de justice administrative, est irrecevable ;

— l’urgence n’est pas établie, faute de commencement prochain des travaux ;

— les moyens soulevés ne sont pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée.

Vu :

— les autres pièces du dossier ;

— la requête au fond n° 2200640.

Vu :

— le code de l’urbanisme ;

— le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné M. Tronel, président, pour statuer sur les demandes de référé.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique du 28 décembre 2022 :

— le rapport de M. C ;

— les observations de Me Varnoux, représentant les requérants,

— les observations de Me Léon, représentant M. E,

— et les observations de Me Riou, représentant la commune de Roscanvel, qui exposent les moyens et arguments développés dans leurs écritures.

La clôture de l’instruction a été différée au 30 décembre 2022 à 12 heures.

Par un mémoire enregistré le 29 décembre 2022 à 17h03, la commune de Roscanvel conclut aux mêmes fins en soulevant les mêmes arguments que précédemment.

Par un mémoire enregistré le 30 décembre 2022 à 9h13, les requérants concluent aux mêmes fins par les mêmes moyens.

Par un mémoire enregistré le 30 décembre 2022 à 11h48 et non communiqué, la commune de Roscanvel conclut aux mêmes fins en soulevant les mêmes arguments que précédemment.

Considérant ce qui suit :

1. M. E a déposé, le 3 août 2021, une demande de permis de construire une maison individuelle sur un terrain situé chemin de Lanvernazal à Roscanvel. Par arrêté du 9 août 2021, le maire de Roscanvel lui a délivré le permis sollicité, modifié le 27 septembre 2022. Les requérants ont formé, par un courrier du 4 octobre 2021, un recours gracieux qui a été implicitement rejeté. Ils demandent la suspension de l’exécution des arrêtés des 9 août 2021, 27 septembre 2022 ainsi que de la décision de rejet de leur recours gracieux.

Sur les conclusions aux fins de suspension :

2. Aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision () ».

En ce qui concerne la recevabilité de la requête :

3. La circonstance que l’un des auteurs d’une requête collective ne justifie pas d’un intérêt à agir ne fait pas obstacle à ce que les conclusions de cette requête soient jugées recevables, mais seulement à ce que le juge accueille les conclusions propres à ce requérant, telles celles tendant au remboursement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce que la requête est irrecevable faute pour Mme J, de produire l’un des justificatifs prévus à l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme, qu’elle a au demeurant versé en cours d’instante, doit être écartée.

En ce qui concerne l’urgence :

4. L’urgence justifie que soit prononcée la suspension d’un acte administratif lorsque l’exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre. La construction d’un bâtiment autorisée par un permis de construire présente un caractère difficilement réversible et, par suite, lorsque la suspension d’un permis de construire ou d’une décision de non-opposition à déclaration préalable est demandée sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, la condition d’urgence est en principe satisfaite ainsi que le prévoit l’article L. 600-3 du code de l’urbanisme. Il ne peut en aller autrement que dans le cas où le pétitionnaire ou l’autorité qui a délivré le permis justifie de circonstances particulières. Il appartient alors au juge des référés de procéder à une appréciation globale de l’ensemble des circonstances de l’espèce qui lui est soumise.

5. La commune de Roscanvel, qui se borne à faire valoir que les travaux n’ont pas débuté, ne peut être regardée comme se prévalant de circonstances particulières de nature à permettre que la condition d’urgence ne soit pas, en l’espèce, considérée comme satisfaite.

En ce qui concerne les moyens propres à créer un doute sérieux sur la légalité des décisions :

6. En l’état de l’instruction, les moyens suivants soulevés à titre principal sont propres, en l’état de l’instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité des décisions en litige :

— le moyen tiré de la méconnaissance de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme et des dispositions du point 1 « conditions de desserte par les voies publiques et privées » du chapitre E « dispositions réglementaires relatives aux voies et accès » auxquelles renvoient l’article UHd8 du PLUi, dès lors qu’il résulte du constat d’huissier établi le 17 novembre 2022, que la largeur du chemin de Lanvernazal, unique voie d’accès au terrain d’assiette du projet, est réduit à 2,50 mètres vers son entrée sud et 2,10 mètres vers son entrée nord et n’est pas adapté à l’approché du matériel de lutte contre l’incendie ;

— le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du point 4 « conditions de desserte par le réseau public d’assainissement des eaux usées » du chapitre F « dispositions réglementaires relatives au raccordement aux réseaux » auxquelles renvoient l’article UHd9 du PLUi, dès lors que ce réseau public s’arrête au milieu de la garenne de Lanvernazal, à plusieurs mètres de la parcelle d’assiette du projet, sans qu’aucune extension de ce réseau ne soit prévue ;

7. Pour l’application de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme, en l’état de l’instruction, aucun des autres moyens invoqués susvisés n’est propre à créer un doute sérieux quant à la légalité des décisions attaquées.

8. Il résulte de tout ce qui précède que les conditions d’application de l’article L. 521-1 du code de justice administrative sont réunies. Il y a lieu, par suite, de suspendre l’exécution de l’arrêté du 9 août 2021 par lequel le maire de la commune de Roscanvel a accordé un permis de construire à M. E pour la construction d’une maison individuelle ainsi que de la décision implicite portant rejet du recours gracieux des requérants.

Sur les frais liés au litige :

9. En vertu des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l’autre partie des frais qu’elle a exposés à l’occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par M. E et la commune de Roscanvel doivent, dès lors, être rejetées. Il n’y pas a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les requérants au même titre.

O R D O N N E :

Article 1er : L’exécution des arrêtés des 9 août 2021 et 27 septembre 2022 par lesquels le maire de la commune de Roscanvel a accordé un permis de construire à M. E pour la construction d’une maison individuelle ainsi que de la décision implicite portant rejet du recours gracieux des requérants est suspendue.

Article 2 : Le surplus de la requête et les conclusions de M. E et de la commune de Roscanvel présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. G D, premier dénommé pour l’ensemble des requérants en application de l’article R. 751-3 du code de justice administrative, à M. F E et à la commune de Roscanvel.

Copie en sera adressée, en application de l’article R. 522-14 du code de justice administrative, au procureur de la République près du tribunal judiciaire de Quimper.

Fait à Rennes, le 30 décembre 2022.

Le juge des référés,

signé

N. CLa greffière d’audience,

signé

P. Cardenas

La République mande et ordonne au préfet du Finistère en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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