Tribunal administratif de Rouen, 16 juillet 2013, n° 1100887

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Chronologie de l’affaire

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www.revuegeneraledudroit.eu · 30 juin 2017

RÉPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Vu la procédure suivante : Les sociétés France-Manche et The Channel Tunnel Group ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision implicite du président du syndicat mixte de promotion de l'activité transmanche (SMPAT) refusant de prononcer la résiliation du contrat de délégation de service public conclu entre le syndicat et la société Louis Dreyfus Armateurs SAS et portant sur l'exploitation d'une liaison maritime entre Dieppe et Newhaven. Par un jugement n° 1100887 du 16 juillet 2013, le tribunal administratif de Rouen …

 
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Sur la décision

Référence :
TA Rouen, 16 juill. 2013, n° 1100887
Juridiction : Tribunal administratif de Rouen
Numéro : 1100887

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE ROUEN

N°1100887

___________

FRANCE MANCHE et THE CHANNEL TUNNEL GROUP LTD

___________

M. X

Rapporteur

___________

M. Armand

Rapporteur public

___________

Audience du 25 juin 2013

Lecture du 16 juillet 2013

___________

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Rouen

(4 ème Chambre)

PCJA : 39-04-05-02

Code publication : C

Vu la requête, enregistrée le 18 mars 2011, présentée pour la société FRANCE MANCHE, dont le siège est au 19 BD MALESHERBES à XXX et la société THE CHANNEL TUNNEL GROUP LTD, dont le siège est XXX à Folkestone, Kent, Royaume-Uni, par la SCP Boivin et associés ; la société FRANCE MANCHE et la société THE CHANNEL TUNNEL GROUP LTD demandent au tribunal :

— d’annuler la décision implicite du président du syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche refusant de prononcer la résiliation du contrat de délégation de service public portant sur l’exploitation de la liaison maritime internationale entre Dieppe et Newhaven ;

— d’enjoindre au syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche, en application de l’article L.911-1 du code de justice administrative, de tirer toutes les conséquences de l’annulation de la décision attaquée en prononçant la résolution du contrat de délégation de service public ou en saisissant le juge du contrat aux fins que celui-ci déclare nul et de nul effet ledit contrat ;

— de dire, en application de l’article L.911-3 du code de justice administrative, qu’en cas de non exécution, par le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche, de l’injonction dans le délai de trois mois courant à compter de la notification du jugement prononçant l’annulation de la décision attaquée, une astreinte de 2000 euros par jour de retard sera appliquée ;

— de condamner le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche à verser à la société Eurotunnel la somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elles soutiennent que :

. elles sont recevables, à attaquer le refus de résiliation du contrat de délégation de service public portant sur l’exploitation de la liaison maritime internationale entre Dieppe et Newhaven, la liaison transmanche Dieppe Newhaven étant en concurrence directe avec la liaison fixe transmanche ; la société Y Z Transmanche Ferries et la société Eurotunnel interviennent sur un même marché pertinent ;

. le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche était incompétent pour conclure une convention relative à l’organisation d’un service public portant sur l’exploitation d’une liaison maritime internationale, au-delà de la limite des eaux territoriales françaises, et de la limite territoriale de sa compétence ; son objet statutaire ne lui donnait pas compétence pour conclure cette convention ;

. le contrat de délégation de service public est contraire au principe de liberté du commerce et de l’industrie ; en effet en l’espèce il n’y avait pas de carence de l’initiative privée ; le besoin de service de transport était satisfait et il n’y avait donc pas d’intérêt public ; les capacités de transport mises en œuvre sont disproportionnées ;

. le contrat de délégation de service public méconnait le principe de gestion à l’équilibre des services publics industriels et commerciaux ; il méconnait en effet l’article L.3241-4 du code général des collectivités territoriales, selon lequel les budgets de ce type de service doivent être équilibrés en recettes et en dépenses, toute compensation d’un déficit de fonctionnement étant prohibée ; cette règle de l’équilibre financier s’applique aux départements comme aux communes ; or le service public de la liaison transmanche Dieppe Newhaven est structurellement déficitaire et majoritairement financé par des subventions publiques ;

. le contrat de délégation de service public a été conclu au terme d’une procédure irrégulière ; en effet l’un des critères du contrat de délégation de servie public est que la rémunération du cocontractant est substantiellement liée aux résultats de l’exploitation du service et qu’il supporte ainsi un risque ; en l’espèce le délégataire bénéficie d’un concours public annuel pouvant atteindre 14,5 millions d’euros avec le service annexe et 16,5 millions d’euros sans le service annexe ; l’article 11.2 du cahier des charges applicable au contrat établit un lien entre le versement du concours financier public et la résorption du déficit prévisionnel d’exploitation ; l’article 11.3 du cahier des charges applicable stipule que les dépenses constatées de soute et de combustible sont intégralement compensées ; la redevance annuelle acquittée par le délégataire correspondant au remboursement du prêt souscrit pour l’achat des deux navires est sous-évaluée ; l’alinéa 5 de l’article 11.2 du cahier des charges applicable au contrat limite la marge bénéficiaire d’exploitation prévisionnelle à 500.000 euros, montant porté à 1.000.000 d’euros par l’avenant n°7 au contrat, ce qui a pour effet d’amortir le risque d’exploitation ;

. l’article 11.2 du cahier des charges prévoit que les recettes forfaitaires correspondant à la mise à disposition des navires en vue de l’exécution des services annexes abondent le compte d’exploitation de la délégation ;

. la rémunération de l’exploitant est déconnectée des recettes tirées de la seule exploitation du service public et n’y est pas substantiellement liée ;

. la procédure suivie est donc irrégulière puisque le contrat est un marché public et que les dispositions du code général des collectivités territoriales relatives aux délégation de service public ne trouvaient pas à s’appliquer ;

. les aides prévues par le contrat de délégation de service public sont contraires aux règles communautaires régissant les aides d’Etat ; en effet les avantages octroyés au délégataire répondent aux critères de l’article 107§1 du traité sur le fonctionnement de l’union européenne : les avantages sont consentis par une personne publique au moyen de ressources publiques, cette aide favorise le délégataire, elle fausse donc la concurrence et elle affecte le commerce entre les Etats-membres ; ainsi, ces avantages étant des aides d’Etat, ils auraient dû faire l’objet d’une notification à la commission européenne en application de l’article 108.3 du traité CE, ce qui n’a pas été le cas ;

. le régime des services annexes prévu par le contrat de délégation de service public est illégal ; en effet les service annexes sont étrangers à l’objet de la délégation en ce qu’ils portent sur des liaisons différentes, en dehors du secteur géographique sur lequel le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche est compétent ; les activités annexes ont une part trop importante et n’ont donc pas un caractère secondaire ou accessoire et ne peuvent être regardées comme le complément normal du service public ;

. la modification substantielle d’éléments essentiels du contrat est illégale ; l’avenant n°5 du 11 février 2009 a réduit la fréquence de la liaison à deux aller-retour quotidiens ; l’avenant n°7 du 24 mars 2010 a réduit à 1410 le nombre annuel de traversées et autorisé le délégataire à conserver 80% du bénéfice d’exploitation et relevé le montant de la marge d’exploitation prévisionnelle à 1.000.000 d’euros ; le service annexe a augmenté de 380,26% entre 2008 et 2010, ce qui leur a fait perdre leur caractère accessoire ; l’économie du contrat a été bouleversée, et une nouvelle procédure de dévolution aurait due être mise en œuvre ;

. les stipulations relatives au montant de la redevance et au montant déductible des compensations de service public sont illégales ; les dispositions de l’alinéa 7 de l’article L.1411-2 du code général des collectivités territoriales impliquent que le montant et le mode de calcul des redevances soient justifiés ; les frais financiers afférents au prêt contracté pour l’achat des navires est de 2.205.000 euros, et non 2.200.000 euros comme stipulé à l’article 12.2 du cahier des charges ; il n’est pas justifié que le délégataire ne prenne en charge que ces frais financiers ; le montant forfaitaire déduit des compensations de service public de 25.000 euros par jour et par navire n’est pas justifié ;

. l’exécution des services annexes est insuffisamment encadrée, au sens des dispositions de l’article L.1411-3 du code général des collectivités territoriales ; les comptes retraçant les opérations de ces services ne figurent pas dans les rapports d’activité ; au surplus c’est la société LD Lines qui a pris en charge les services annexes, et non le délégataire ; la présentation des comptes ne permet pas d’apprécier la répartition des charges entre service public et service annexe ;

Vu la mise en demeure adressée le 10 novembre 2011 au syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche, en application de l’article R. 612-3 du code de justice administrative, et l’avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 novembre 2011, présenté pour le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche, par Me Guénaire, qui conclut au rejet de la requête et demande au tribunal de condamner la société Eurotunnel à lui payer la somme de 12.000 euros sur le fondement de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

. les requérantes n’ont pas d’intérêt à agir ;

. il pouvait agir au-delà de son périmètre de compétence dés lors que l’intérêt local le justifie ;

. la carence de l’initiative privée n’est pas une condition nécessaire de l’intervention d’une collectivité publique sur un marché ; la liaison transmanche entre Dieppe et Newhaven est utile au développement touristique et économique de la région dieppoise ; les moyens mis en œuvre ne sont pas disproportionnés, ils permettent la continuité du service public ;

. il est un syndicat mixte ouvert, créé en application de l’article L.5721-1 du code général des collectivités territoriales, et n’est pas soumis aux articles L.3241-4 et L.3245-5 du code général des collectivités territoriales ; les contributions au fonctionnement du service public concédé sont justifiées par les sujétions imposées en terme de fréquence des traversées et de tarifs préférentiels ;

. le contrat de délégation de service public a été conclu au terme d’une procédure régulière ; en effet la compensation provisoire versée est plafonnée, le résultat d’exploitation ne peut être supérieur à 1.000.000 d’euros après compensation, en cas de résultat réel supérieur au résultat prévisionnel, le délégataire lui reverse une part décroissante selon l’excédent constaté, en cas de résultat réel inférieur au résultat prévisionnel, aucune compensation complémentaire n’est prévue ; eu égard au caractère aléatoire du niveau de fréquentation, le délégataire supporte le risque d’un résultat déficitaire non plafonné ;

. les avantages consentis au délégataire remplissent les quatre conditions prévues par la jurisprudence de la CJCE du 24 juillet 2003 Altmark Trans GmbH n° C-280/00 pour qu’ils ne soient pas regardés comme des aides d’Etat au sens du droit communautaire ; en effet le délégataire a en charge des missions de service public ; les paramètres sur la base desquels la compensation est établie ont été définis au préalable et figuraient dans le dossier de consultation ; la compensation ne dépasse pas ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public ; le choix du délégataire a été effectué après une procédure de mise en concurrence ; la compensation annuelle est inférieure à 30 millions d’euros et le délégataire réalise un chiffre d’affaires moyen hors taxe inférieur à 100 millions d’euros sur la période de deux ans précédant l’attribution de la délégation, ainsi elle ne figurait pas, au sens de la décision du 28 novembre 2005 de la commission européenne, parmi les aides devant être notifiées à ladite commission ;

. le régime des services annexes est légal ; ces services présentent un intérêt général et sont utiles au délégant, en effet ils contribuent au développement économique et touristique du territoire et au maintien d’emplois locaux et permettent de diminuer le montant de la compensation; ces services constituent le complément normal du service principal ; ils ont un caractère limité par rapport au service public ;

. les avenants n°5 et 7 n’ont pas réduit le risque d’exploitation encouru par le délégataire de façon substantielle ; les stipulations limitant les services annexes n’ont pas été modifiées ;

. la redevance pour mise à disposition des navires est justifiée par les stipulations des articles 12.1 et 12.2 du cahier des charges ; l’article 7.3 du cahier des charges précise que la déduction forfaitaire du montant de la compensation est la contrepartie des dépenses et recettes résultant de l’exploitation d’un service annexe ; ainsi, les dispositions de l’article L.1411-2 du code général des collectivités territoriales n’ont pas été méconnues ;

. l’exécution des services annexes est suffisamment encadrée, au sens des dispositions de l’article L.1411-3 du code général des collectivités territoriales ; l’article 7.3 du cahier des charges prévoit que les comptes d’exploitation distinguent les charges et recettes liées à l’exécution du service public, d’une part, et à celles des services annexes, d’autre part ; aucune stipulation du contrat ne faisait obstacle à ce qu’un service annexe soit exécuté par une filiale du délégataire ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 mai 2012, présenté pour la société FRANCE MANCHE et la société THE CHANNEL TUNNEL GROUP LTD, qui concluent aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Elles soutiennent en outre que :

. Sur le moyen tiré de l’incompétence du syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche : celui-ci ne fournit aucune précision sur la base légale qui lui procurerait une compétence générale ; il ne peut agir en dehors des limites territoriales des personnes qui en sont membres ; c’est l’Etat qui, dans le silence des textes, est compétent pour ériger en service public une liaison maritime internationale ; l’objet statutaire du syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche est trop floue au regard des exigences du principe de spécialité ;

. Sur le moyen tiré de ce que le contrat de délégation de service public est contraire au principe de liberté du commerce et de l’industrie : la réactivation de la ligne Dieppe-Newhaven n’avait pas d’intérêt public ; la population seino-marine n’avait pas besoin de la réactivation de ce service ; le coût est disproportionné par rapport aux retombées en matière d’emploi ;

Sur le moyen tiré de ce que le contrat de délégation de service public méconnait le principe de gestion à l’équilibre des services publics industriels et commerciaux : à supposer que le contrat litigieux soit soumis au règles de l’article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales, ces dispositions ne font qu’atténuer le principe et il demeure en l’espèce méconnu, l’équilibre du budget n’étant pas en l’espèce assuré ;

Sur le moyen tiré de ce que le contrat de délégation de servie public a été conclu au terme d’une procédure irrégulière : la compensation versée par le syndicat n’est pas établie en fonction du nombre d’usagers ; le caractère variable des recettes du cocontractant ne fait pas obstacle à ce qu’un contrat soit qualifié de marché public ; l’existence d’un risque de fréquentation du service n’établit pas le risque d’exploitation ; les dépenses de soute et de carburant, qui constituent un poste très important, sont intégralement compensées à postériori ; le syndicat prend en charge une part significative du coût des navires ;

Sur le moyen tiré de ce que l’exécution des services annexes est insuffisamment encadrée : La production des comptes définitifs séparés des deux types de service n’est pas prévue ;

Vu l’ordonnance en date du 7 décembre 2012 fixant la clôture d’instruction au 7 janvier 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 janvier 2013, présenté pour le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que :

. aucun texte n’attribue à l’Etat de compétence pour ériger en service public une liaison maritime internationale ;

. le prétendu surdimensionnement des navires n’est pas de nature à entacher la délégation de nullité ;

. les conclusions aux fins d’injonction des sociétés requérantes doivent en tout état de cause être rejetées ; en effet aucun des moyens invoqués par elles ne parait d’une gravité suffisante pour justifier la résolution de la convention ; il ne peut être fait droit à la demande tendant à ce que le tribunal lui enjoigne de saisir le juge du contrat ;

Vu l’ordonnance en date du 9 janvier 2013 fixant la réouverture de l’instruction, en application de l’article R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 1er février 2013, présenté pour la société FRANCE MANCHE et la société THE CHANNEL TUNNEL GROUP LTD qui concluent aux mêmes fins par les mêmes moyens;

Vu le mémoire, enregistré le 24 mai 2013, présenté pour le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 25 juin 2013 ;

— le rapport de M. X ;

— les conclusions de M. Armand, rapporteur public ;

— et les observations de Me Memlouk, pour la société FRANCE MANCHE et la société THE CHANNEL TUNNEL GROUP LTD, et de Me Guénaire, pour le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche ;

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

En ce qui concerne le moyen tiré de l’incompétence du syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche :

1. Considérant que, selon ses statuts, le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche a pour objet le développement et la promotion de l’activité transmanche entre la Seine-Maritime et le sud de l’Angleterre et qu’il peut notamment déléguer à un prestataire l’exploitation de la ligne transmanche entre Dieppe et Newhaven dans les conditions prévues à l’article L.1411-1 du code général des collectivités territoriales, relatives aux délégations de service public ; que contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, ces stipulations ne sont pas imprécises ; qu’ainsi les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que l’objet statutaire du syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche ne lui donnait pas compétence pour conclure la convention en litige;

2. Considérant qu’aux termes de l’article L.5721-2 du code général des collectivités territoriales : « Un syndicat mixte peut être constitué par accord entre des institutions d’utilité commune interrégionales, des régions, des ententes ou des institutions interdépartementales, des départements, des établissements publics de coopération intercommunale, des communes, des syndicats mixtes définis à l’article L. 5711-1 ou à l’article L. 5711-4, des chambres de commerce et d’industrie territoriales, d’agriculture, de métiers et d’autres établissements publics, en vue d’œuvres ou de services présentant une utilité pour chacune de ces personnes morales. » ; qu’aux termes de l’article L.5721-3 du même code : « Les communes, départements, chambres de commerce et d’industrie territoriales et établissements publics peuvent se grouper sous forme de syndicats pour l’exploitation, par voie de convention, de services publics présentant un intérêt pour chacune des personnes morales en cause. Les comptes et budgets des syndicats ainsi constitués entre collectivités et établissements publics sont justiciables de la chambre régionale des comptes. » ; que, si les sociétés requérantes soutiennent que l’Etat est, dans le silence des textes, seul compétent pour ériger en service public une liaison maritime internationale, il ressort des dispositions précitées des articles L.5721-2 et suivants du code général des collectivités territoriales que les communes, départements, chambres de commerce et d’industrie territoriales et établissements publics peuvent se grouper sous forme de syndicats pour l’exploitation, par voie de convention, de services publics présentant un intérêt pour chacune des personnes morales en cause ; qu’en l’espèce le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche a pour objet l’exploitation d’une liaison maritime entre Dieppe et Newhaven qui présente un intérêt pour chacun des membres fondateurs du syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche ;

3. Considérant que l’objet du syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche présente une utilité, au sens des dispositions précitées des articles L.5721-2 et L.5721-3 du CGCT, pour le département de la Seine-Maritime, lequel détient une compétence générale en ce qui concerne les affaires du département ; qu’ainsi, si la requérante soutient que le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche ne pouvait se voir déléguer une compétence ratione loci et ratione matériae excédant celle du département de la Seine-Maritime, son principal membre fondateur, il ne ressort pas des pièces du dossier que le département de la Seine-Maritime aurait, en l’espèce, excédé le cadre légal de ses compétences en matière de création de syndicat mixte ; que le même raisonnement peut être repris en ce qui concerne les autres collectivités ou organismes fondateurs du syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche ; qu’enfin, aucune disposition n’interdit au syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche de créer une activité de liaison par transport maritime entre le territoire sur lequel ont compétence les institutions et collectivités qui l’ont constitué et un territoire situé au-delà de la limite des eaux territoriales françaises ;

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que le contrat de délégation de service public est contraire au principe de liberté du commerce et de l’industrie :

4. Considérant que la liaison transmanche entre Dieppe et Newhaven, alors même que l’offre privée de transport maritime ou fixe entre la France et le sud de l’Angleterre ne serait pas globalement insuffisante, correspond à l’intérêt public local de la région de Dieppe, et en particulier à l’objectif de développement de son activité économique et touristique ; que la continuité de l’exécution du service public en litige nécessite l’utilisation de deux navires ; qu’eu égard au nombre de passagers ‘Tourisme’ et au trafic de fret et véhicules ‘Tourisme’ constaté au cours des années 2007 à 2011, et notamment au cours des périodes ou le taux d’occupation est le plus élevé, en l’espèce les mois de juillet et aout, les capacités des navires n’ont pas un caractère disproportionné ; que, dans ces conditions, les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le contrat de délégation de service public en litige serait contraire au principe de liberté du commerce et de l’industrie ;

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que le contrat de délégation de service public méconnait le principe de gestion à l’équilibre des services publics industriels et commerciaux :

6. Considérant qu’aux termes de l’article L.3241-4 du code général des collectivités territoriales, relatif à la gestion des services publics départementaux : « Les budgets des services publics à caractère industriel ou commercial exploités en régie, affermés ou concédés, doivent être équilibrés en recettes et en dépenses. » ; qu’aucune disposition ne rend ces dispositions applicables aux syndicats mixtes institués en application des dispositions de l’article L.5721-2 du code général des collectivités territoriales ; que par suite, le moyen tiré de ce que le budget du syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche serait déséquilibré, circonstance d’ailleurs non établie, est sans incidence sur l’issue du litige ;

7. Considérant qu’aux termes de l’article L.2224-1 du code général des collectivités territoriales : « Les budgets des services publics à caractère industriel ou commercial exploités en régie, affermés ou concédés par les communes, doivent être équilibrés en recettes et en dépenses. » ; qu’aux termes de l’article L2224-2 du même code : « Il est interdit aux communes de prendre en charge dans leur budget propre des dépenses au titre des services publics visés à l’article L. 2224-1 . » ; qu’il ne résulte pas des termes de ces dispositions que l’article L.2224-2 du code général des collectivités territoriales, applicable aux services publics à caractère industriel ou commercial concédés par les communes, seraient également applicable aux syndicats mixtes institués en application des dispositions de l’article L.5721-2 ;

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que le contrat de délégation de servie public a été conclu au terme d’une procédure irrégulière :

8. Considérant qu’aux termes de l’article 11 du cahier des charges applicable au contrat en litige, la compensation de service public est égale au déficit prévisionnel d’exploitation majoré de la somme de 500.000 euros, soit la marge bénéficiaire du délégataire, somme portée à 1.000.00 d’euros par l’avenant n°7 au contrat ; que, toutefois, les dépenses de soute et de combustible font l’objet d’une compensation calculée par rapport aux dépenses constatées ; qu’en application de l’avenant n°1 au contrat en litige, le montant de la compensation de service public a été plafonnée à 14.553.013 euros à compter de l’année 2008; que, lorsque le résultat réel après compensation est inférieur au résultat prévisionnel, le délégataire ne peut prétendre à aucune compensation supplémentaire ; que, lorsque ce résultat est supérieur au résultat prévisionnel, une part dégressive, de 75% à 55%, en fonction du niveau de cet excédent , est remboursée au délégant, cette part ayant cependant été fixée à 20% par l’avenant n°7 au contrat ; qu’ainsi, la rémunération du délégataire est liée aux résultats de l’exploitation du service ; qu’au surplus, dans le cas où le résultat d’exploitation réel est inférieur au résultat prévisionnel, le délégataire est susceptible de prendre en charge un déficit d’exploitation non plafonné ; qu’eu égard aux aléas propres à ce type de service, et notamment au taux de fréquentation, le risque en question est réel, quand bien même les dépenses de soute et de carburant font l’objet d’une compensation spécifique intégrale ; que la circonstance que la redevance annuelle versée par le délégataire au titre de l’utilisation des navires soit déterminée par rapport aux frais financiers afférents aux emprunts contractés par le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche pour l’acquisition desdits navires, et non par rapport aux annuités d’emprunt, intérêt et capital compris, est sans incidence sur l’appréciation du risque d’exploitation dés lors que la convention de délégation ne prévoit pas de transfert de propriété des deux navires au profit du délégataire ; qu’au demeurant, il est constant que le délégataire a effectivement supporté des déficits d’exploitation ; que la circonstance que la compensation n’est pas déterminée en fonction du nombre de passagers est sans incidence sur l’issue du litige ;

9. Considérant que les deux navires sont mis à disposition du délégataire par le délégant; qu’ainsi la circonstance que le délégataire verse au titre de l’utilisation des navires une redevance égale aux frais financiers annuels supportés par le délégant afférents aux emprunts contractés par ce dernier, et non à la totalité des annuités de ces emprunts, n’est pas de nature à démontrer l’absence de risque d’exploitation pour le délégataire ;

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que les aides prévues par le contrat de délégation de service public sont contraires aux règles communautaires régissant les aides d’Etat :

10. Considérant qu’aux termes de l’article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne : « 1. Sauf dérogations prévues par les traités, sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre Etats membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d’Etat sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. (…) » ; que selon le paragraphe 3 de l’article 108 du même traité : « La Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu’un projet n’est pas compatible avec le marché intérieur, aux termes de l’article 107, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L’Etat membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale. » ;

11. Considérant qu’il résulte des stipulations des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne que, s’il ressortit à la compétence exclusive de la Commission de décider, sous le contrôle de la Cour de justice de l’Union européenne, si une aide de la nature de celles visées par l’article 107 du traité est ou non, compte tenu des dérogations prévues par le traité, compatible avec le marché commun, il incombe, en revanche, aux juridictions nationales de sanctionner, le cas échéant, l’invalidité des dispositions de droit national qui auraient institué ou modifié une telle aide en méconnaissance de l’obligation, qu’impose aux Etats membres la dernière phrase du paragraphe 3 de l’article 108 du traité, d’en notifier à la Commission, préalablement à toute mise à exécution, le projet ; que l’exercice de ce contrôle implique, notamment, de rechercher si les dispositions contestées ont institué des aides d’Etat au sens de l’article 107 du traité ;

12. Considérant que par un arrêt du 24 juillet 2003 Altmark Trans GmbH (C-280/00), la Cour de justice des Communautés européennes a jugé que des subventions représentant la contrepartie des prestations effectuées par des entreprises pour exécuter des obligations de service public ne constituaient pas des aides d’Etat, à condition de remplir les quatre conditions cumulatives suivantes : premièrement, l’entreprise bénéficiaire a effectivement été chargée de l’exécution d’obligations de service public et ces obligations ont été clairement définies ; deuxièmement, les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation ont été préalablement établis de façon objective et transparente, afin d’éviter qu’elle comporte un avantage économique susceptible de favoriser l’entreprise bénéficiaire par rapport à des entreprises concurrentes ; troisièmement, la compensation ne dépasse pas ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes qui y sont relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable ; quatrièmement, lorsque le choix de l’entreprise chargée de l’exécution d’obligations de service public n’est pas effectué dans le cadre d’une procédure de marché public au sens des conventions soumises aux règles communautaires de publicité et de mise en concurrence, permettant de sélectionner le candidat capable de fournir ces services au moindre coût pour la collectivité, le niveau de la compensation nécessaire a été déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée afin de pouvoir satisfaire aux exigences de service public requises, aurait encourus pour exécuter ces obligations, en tenant compte des recettes qui y sont relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations ;

13. Considérant, en premier lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que le délégataire a été chargé de l’exploitation d’un service public dont les obligations, notamment en terme de fréquence du service, de tarifs préférentiels et de qualité du service, ont été clairement définies, notamment dans le règlement de consultation; qu’ainsi la première des conditions posées par la jurisprudence de la Cour de justice doit être regardée comme satisfaite ;

14. Considérant, en deuxième lieu, que les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation, qui ont été communiqués au stade de la consultation, ont été préalablement établis de façon objective et transparente; que les stipulations du cahier des charges relatives à l’indemnisation des pertes directement provoquées par un évènement de force majeure, à l’exclusion du manque gagner ne sont pas, par elles-mêmes, de nature à établir une absence de transparence ou d’objectivité ; qu’ainsi la deuxième des conditions posées par la jurisprudence de la Cour de justice doit être regardée comme satisfaite ;

15. Considérant, en troisième lieu, que la compensation stipulée ne dépasse pas ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable ; que la subvention ne dépasse donc pas ce qui est nécessaire pour permettre à l’entreprise d’atteindre un niveau de rentabilité considéré comme raisonnable pour les entreprises du secteur concerné ; qu’ainsi la troisième des conditions posées par la jurisprudence de la Cour de justice doit être regardée comme satisfaite ;

16. Considérant, enfin, que la procédure de passation d’une délégation de service public permet la mise en concurrence, dans des conditions transparentes, des offres de plusieurs entreprises en fonction de critères de sélection préalablement définis ; qu’en l’espèce, le montant de la subvention demandée était l’un des critères de sélection et il n’est pas contesté que deux offres recevables ont été présentées et que la société retenue est celle qui avait demandé la subvention la moins importante ; que la procédure mise en œuvre a donc permis de sélectionner le candidat capable d’exploiter le service de transport maritime transmanche au moindre coût pour la collectivité ; qu’ainsi la quatrième des conditions posées par la jurisprudence de la Cour de justice doit être regardée comme satisfaite ;

17. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la subvention accordée n’est pas une aide d’Etat au sens de l’article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ;

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que le régime des services annexes prévu par le contrat de délégation de service public est illégal :

18. Considérant qu’aux termes des stipulations de l’article 2 du cahier des charges applicable au contrat en litige : « Le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche peut déléguer à un prestataire l’exploitation de la ligne transmanche entre Dieppe et le sud de l’Angleterre dans les conditions définies aux articles L.1411-1 et suivants du code général des collectivités territoriales » ; qu’aux termes de l’article 7.2 du même cahier des charges : « Le délégataire peut utiliser les biens de la délégation pour assurer des services annexes ne correspondant pas à l’exécution des obligations de service public figurant à l’annexe 7, à la condition que : – cette utilisation ne porte pas atteinte au respect des obligations pesant sur le délégataire en vertu de la délégation, notamment de l’article 7.1 et de l’annexe 7 ; – les navires mentionnés à l’article 2.1 ne soient pas affectés à ces service annexes pour plus de cinquante pour cent de leur temps d’exploitation annuel. Tout service annexe ou programmes de service annexes donne lieu à une autorisation préalable expresse du délégant demandée par le délégataire au moins trente jours avant le commencement de son exécution. L’autorisation du délégant n’affranchit pas le délégataire du respect, en toutes circonstances, des conditions posées à l’alinéa précédent. » ;

19. Considérant qu’aux termes de l’article L.1411-2 du code général des collectivités territoriales: « Les conventions de délégation de service public ne peuvent contenir de clauses par lesquelles le délégataire prend à sa charge l’exécution de services ou de paiements étrangers à l’objet de la délégation. » ;

20. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 30 mars 2007, le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche a autorisé le délégataire a effectuer un service annexe consistant en une rotation journalière entre Le Havre et Newhaven du 1er mai au 30 septembre, le délégataire versant une somme forfaitaire de 12.950 euros par jour d’utilisation de navire; que le délégataire, eu égard à son caractère déficitaire, a mis un terme à ce service annexe à compter du 30 septembre 2008 ; que, par une délibération du 5 décembre 2008, le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche a autorisé le délégataire a effectuer un service annexe consistant en une rotation journalière entre Dieppe et Douvres du 1 février au 31 décembre 2009 et trois rotations journalières entre Douvres et Boulogne à compter du 1er juillet 2009, le délégataire versant une somme forfaitaire de 12.950 euros par jour d’utilisation de navire ; qu’il a été mis un terme à ces services annexes à compter du 2 aout 2009 ; que, par une délibération du 11 septembre 2009, le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche a autorisé le délégataire a effectuer un service annexe consistant en une rotation journalière entre Le Havre et Portsmouth 5 jours par semaine du 15 septembre au 31 décembre 2009 ;

21. Considérant que les dispositions de l’article L.1411-2 du code général des collectivités territoriales précitées ne font pas obstacle à ce que l’autorité délégante autorise le délégataire à prendre en charge l’exécution de service accessoires, complémentaires ou connexes à l’objet de la délégation ; que les liaisons transmanche autorisées par le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche, qui devaient permettre au délégataire d’améliorer la rentabilité globale de l’exploitation des deux navires, avaient un caractère complémentaire à l’objet de la délégation et n’ont pas eu pour conséquence de mettre à la charge de la collectivité des charges étrangères au service public concédé ; qu’eu égard à leur caractère saisonnier et à leur fréquence, les services annexes en question ont un caractère accessoire ;

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que la modification substantielle d’éléments essentiels par avenants du contrat est illégale :

22. Considérant que la requérante soutient que les modifications par voie d’avenants successifs apportées au contrat ont eu pour conséquence d’en bouleverser l’économie et de modifier la part prise par le délégataire dans le risque d’exploitation ;

23. Considérant qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que les stipulations du contrat relatives au Services annexes et à la limite de 50% du temps d’exploitation des navires qui peut y être consacré aurait été modifiées ; que la circonstance que les services annexes auraient augmenté en cours d’exécution du contrat en litige n’a pas eu pour effet de modifier substantiellement un élément du contrat en litige ;

24. Considérant que la circonstance que l’avenant n°4 au contrat en litige ait mis à la charge du délégant le cout, d’un montant de 600.000 euros, des pièces de rechange indispensables au bon fonctionnement des navires ne constitue pas une modification des modalités de calcul de la compensation ; que, de plus aucune stipulation du contrat ne prévoyait les modalités de prise en charge de ce type de charge ; qu’ainsi les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que l’avenant n°4 aurait eu pour effet de modifier substantiellement un élément du contrat en litige ;

25. Considérant que le contrat initial prévoyait un service passager et fret 7 jours sur 7 de 2 rotations par jour du 1er octobre au 30 avril et de 3 rotations du 1er mai au 30 septembre, soit 882 rotations annuelles ; que l’avenant n°5 du 5 décembre 2008 a limité le service à deux rotations 7 jours sur 7 sur toute l’année, soit 152 rotations en moins qu’initialement prévu; que le compte d’exploitation prévisionnel pour l’année 2009 a été, en conséquence, modifié, ce qui a entrainé une réduction du montant de la compensation de 730.765 euros ; que l’avenant n°6 a limité le montant forfaitaire dû au titre de l’utilisation des navires dans le cadre des services annexes de 25.000 euros par jour et par navire à 22.650 euros ; que l’avenant n°7 a diminué le nombre annuel de rotation de 25, afin d’assurer l’avitaillement et la maintenance du navire et limité le montant forfaitaire dû au titre de l’utilisation des navires à 16.200 euros ; que cet avenant modifie également le mode de répartition du résultat d’exploitation effectif ; qu’en effet le contrat d’origine prévoit que ce résultat serait versé au délégant à hauteur de 75% jusqu’à 500.000 euros, 65% jusqu’à 1 million d’euros, 60% jusqu’à 1.500.000 euros et 55% au-delà, l’avenant remplaçant ce dispositif dégressif par un taux de répartition unique de 20% en faveur du délégant et 80% en faveur du délégataire; que le même avenant augmente le montant de la marge bénéficiaire prise en compte dans le calcul de la compensation, initialement fixé à 500.000 euros, pour le porter à 1 million d’euros ;

26. Considérant que, si les modifications précitées ont eu pour effet mécanique premièrement de limiter le risque d’exploitation encouru par le délégataire en diminuant le nombre de rotation, cet effet étant toutefois atténué par la compensation intégrale des frais de soute et de carburant, deuxièmement d’améliorer les perspectives de rentabilité des services annexes, en réduisant le montant forfaitaire dû au titre de l’utilisation des navires, et troisièmement d’améliorer les perspectives de profitabilité globale de l’exploitation, en augmentant le résultat d’exploitation prévisionnel et en modifiant les modalités de répartition du résultat d’exploitation excédentaire, elles n’ont pas eu, dans les circonstances de l’espèce, pour effet, eu égard premièrement à leur importance relative dans l’équilibre général du contrat en litige, deuxièmement au maintien d’un risque d’exploitation effectif lié notamment à l’incertitude relative au niveau de fréquentation du service et, troisièmement, au maintien d’un lien substantiel entre les résultats de l’exploitation du service public concédé et la rémunération du délégataire, de bouleverser l’économie du contrat en litige;

27. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les avenants n°4, 5, 6 et 7 au contrat en litige ne constituent pas un nouveau contrat ; qu’ainsi le moyen tiré de qu’ils auraient dû être soumis à la procédure de mise en concurrence prévue à l’article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que les stipulations relatives au montant de la redevance et au montant déductible des compensations de service public sont illégales :

28. Considérant qu’aux termes de l’article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction alors en vigueur : « (…) Les montants et les modes de calcul des droits d’entrée et des redevances versées par le délégataire à la collectivité délégante doivent être justifiés dans ces conventions. (…) » ;

27. Considérant que l’article 12 du cahier des charges stipule que le délégataire verse un redevance annuelle de 2.200.000 euros par navire correspondant aux frais financiers payés par le délégant pour le remboursement du prêt souscrit pour financer l’acquisition des navires au taux de 4,5%, sur un capital de 49 millions d’euros ; qu’ainsi la requérante n’est pas fondée à soutenir que ladite redevance serait insuffisamment justifiée par le contrat en litige ;

28. Considérant que l’article 7 du contrat en litige stipule que les dépenses et les recettes à caractère commercial (frais de manutention, de courtage et de commercialisation) et maritimes (frais portuaires) afférentes aux services annexes doivent être neutralisées afin d’éviter qu’elles aient une incidence sur le montant de la compensation de service public et que ce montant est évalué forfaitairement à 25.000 euros par jour et par navire, montant ramené à 22.650 euros puis à 16.200 euros par les avenants précités ; que ce montant forfaitaire, qui a seulement pour but d’assurer que le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche ne compense pas les pertes éventuelles constatées en matière de service annexe, et qui n’a pas la nature d’une contrepartie versée au titre de l’utilisation des navires, ne peut être regardé comme une redevance au sens des dispositions précitées ; qu’au demeurant, à supposer que ce montant forfaitaire puisse être regardé comme une redevance, il est justifié par le contrat et ses modalités de calcul sont indiquées dans l’avenant n°7 ;

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que l’exécution des services annexes est insuffisamment encadrée :

29. Considérant que, selon les stipulations de l’article 18.1 du cahier des charges, et conformément à l’article L.1411-3 du code général des collectivités territoriales, le délégataire remet au délégant un rapport comportant notamment les comptes retraçant la totalité des opérations afférentes à l’exécution de la délégation et, selon les stipulations de l’article 7.3, les comptes d’exploitation mentionnées à l’article 10, qui comprennent les comptes d’exploitation prévisionnels et les comptes d’exploitation définitifs, distinguent les charges et les recettes afférentes au service public, d’une part, et au service annexe, d’autre part ; que, par suite, le délégant est en mesure de suivre distinctement l’exécution financière des deux types de service ;

30. Considérant que, selon les stipulations de l’article 7.2 du cahier des charges, les services annexes, qui ne peuvent consister qu’en l’exploitation des navires sur des lignes différentes de celle exploitée dans le cadre du service public, donnent lieu à autorisation préalable du délégant et ne peuvent excéder 50% du temps d’utilisation des navires ; que, par suite, les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que ces services seraient insuffisamment délimités dans leur contenu et leur modalités d’exécution, quand bien même aucune stipulation du contrat ne faisait obstacle à ce qu’un service annexe soit exécuté par une filiale du délégataire ;

31. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que, sans qu’il soit besoin de statuer leur recevabilité, les conclusions aux fins d’annulation des sociétés requérantes doivent être écartées ;

Sur les conclusions aux fins d’injonction et d’astreinte :

32. Considérant que le présent jugement n’appelle aucune mesure d’exécution ; qu’il y a lieu de rejeter pour ce motif les conclusions aux fins d’injonction et d’astreinte des sociétés requérantes ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

33. Considérant qu’en vertu des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l’autre partie des frais qu’elle a exposés à l’occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la société FRANCE MANCHE et la société THE CHANNEL TUNNEL GROUP LTD doivent, dès lors, être rejetées ; qu’il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge desdites sociétés, partie perdante à l’instance, la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société FRANCE MANCHE et la société THE CHANNEL TUNNEL GROUP LTD est rejetée.

Article 2 : La société FRANCE MANCHE et la société THE CHANNEL TUNNEL GROUP LTD verseront au syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche la somme de 500 euros.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société FRANCE MANCHE, à la société THE CHANNEL TUNNEL GROUP LTD et au syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche.

Délibéré après l’audience du 25 juin 2013, à laquelle siégeaient :

Mme Gaillard, président,

M. X, premier conseiller,

Mme Jeanmougin, premier conseiller,

Lu en audience publique le 16 juillet 2013.

Le rapporteur, Le président,

H. X A. GAILLARD

Le greffier,

M. BONVOISIN

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Tribunal administratif de Rouen, 16 juillet 2013, n° 1100887