Tribunal de commerce de Versailles, 5 octobre 2021, n° 2021L00782
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Sur la décision
Référence : | T. com. Versailles, 5 oct. 2021, n° 2021L00782 |
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Juridiction : | Tribunal de commerce de Versailles |
Numéro(s) : | 2021L00782 |
Texte intégral
TRIBUNAL DE COMMERCE
DE VERSAILLES
JUGEMENT DU 5 Octobre 2021
5ème Chambre
N° RG: 2021L00782
N° PCL: 2018J00495
Ministère public contre
Y B
Jugement interdiction de gérer
DEMANDEUR
Ministère public Section financière Tribunal judiciaire 78000 VERSAILLES représenté par Mme Vice-procureur TABARDEL Pamela
DÉFENDEUR
M. Y B I rte de […]
MONTMORENCY non comparant
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Décision réputée contradictoire et en premier ressort.
Débats en audience publique dans la chambre du conseil portes ouvertes, lors de l’audience du 7 Septembre 2021 où siègeaient M. J-K L, juge faisant fonction de président, M. C D, juge, M. X
PERRIER, juge, assistés de Me J-Paul TEBOUL, greffier en chef. En présence du ministère public représenté par Mme Vice-procureur TABARDEL
Pamela
Délibérée par les mêmes juges. Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 5 Octobre 2021, les parties en ayant été préalablement avisées à l’issue des débats dans les conditions de l’article
450 du code de procédure civile. Minute du jugement signée par M. J-K L, juge faisant fonction de président assisté de Me J-Paul TEBOUL, greffier en chef auquel la minute de la décision a été remise par le juge signataire.
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Vu la requête en date du 14 mai 2021, aux termes de laquelle le ministère public demande à ce tribunal de bien vouloir prononcer, dans le cadre des dispositions des articles L.653-1 et suivants du code de commerce, la faillite personnelle ou l’interdiction de gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement, de droit ou de fait, toute entreprise commerciale, industrielle, artisanale, toute exploitation agricole ou toute autre entreprise ayant toute autre activité indépendante
et toute personne morale à l’encontre de :
Monsieur Y B, né le I mars 1961 à […], de nationalité française, demeurant I, route de Gambais à 95230 […]
MONTMORENCY, dernier domicile connu.
Vu le rapport du 31 mai 2021 du juge-commissaire de la liquidation judiciaire de la SAS AUTO
RESTAUR', établi conformément aux dispositions de l’article R.662-12 du code de commerce.
Vu l’ordonnance du 3 juin 2021 de monsieur le président du tribunal de commerce de Versailles décidant de faire citer à comparaître M. Y B pour l’audience de ce tribunal du 7
septembre 2021.
Vu la convocation à comparaître en date du 3 juin 2021 adressée par LRAR, en conformité avec les dispositions des articles 665 et suivants du code de procédure civile, à M. Y B, I route de Gambais, […], ayant fait l’objet d’un retour à
l’expéditeur mentionnant : « Défaut d’accès ou d’adressage ».
Vu la communication de la procédure au ministère public conformément aux dispositions de l’article
425 2° du code de procédure civile.
Vu la citation à comparaître devant ce tribunal, faite à M. Y B, I route de Gambais,
[…], en date du 19 juillet 2021 à l’initiative du ministère public, ayant fait l’objet
d’un procès-verbal de recherches infructueuses (article 659 du CPC) et valant ainsi signification.
La signification à comparaître devant ce tribunal a été délivrée à M. Y B, I route de Gambais, […], adresse de sa fille Mme E B où M. Y
B a indiqué demeurer lors de son entretien avec le liquidateur judiciaire de la SASU AUTO RESTAUR’ (société dont M. Y B est le Président), tel qu’indiqué dans le rapport en date du 28 septembre 2018 de la SELARL MARS prise en la personne de maitre F G. Dans ces conditions, M. Y B ne saurait invoquer avoir subi un grief en raison de son absence de connaissance de la présente procédure puisqu’il a procédé à son changement
d’adresse auprès du liquidateur judiciaire ; la citation est donc régulière.
Les parties ont été convoquées pour l’audience de ce tribunal du 7 septembre 2021. M. Y B était non comparant. Le même jour, le tribunal a prononcé la clôture des débats, mis
l’affaire en délibéré et avisé les parties que le jugement sera prononcé par mise à disposition au greffe
de la juridiction le 5 octobre 2021.
Après avoir entendu le ministère public en ses réquisitions, il ressort de son exposé que :
Par jugement en date du 12 juin 2018, ce tribunal a ouvert, sur assignation du 23 mai 2018 de l’URSSAF, une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre de la SAS AUTO RESTAUR', a désigné liquidateur, la SELARL MARS, prise en la personne de maître F G et a fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 12 décembre 2016.
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La SASU AUTO RESTAUR’ a été immatriculée au RCS de Versailles sous le n° 794 886 093 le 26 août 2013 et était dirigée par M. Y B en qualité de président. Elle avait une activité de restauration de voitures anciennes, mécanique générale dépannage de véhicules.
Le passif déclaré s’élève à 170 434,35 €. Un procès-verbal de carence a été établi par le commissaire
priseur. Il ressort de la procédure que M. Y B a créé plusieurs sociétés : La SARL OUEST DEPANNAGE dont il était le gérant; immatriculé au RCS Versailles
n°413 068 818 avait pour activité le dépannage automobile. Cette société a fait l’objet d’une
- liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Versailles le 3 septembre 2002 et d’une clôture pour insuffisance d’actif suivant jugement du 8 août 2006 ; La SASU SCA dont sa fille (Mme H B) est présidente, immatriculée au RCS
Versailles 530 846 435 le 8 mars 2011 ayant pour activité la réparation de véhicules automobiles ; cette société aurait cessé toute activité et a été radiée du RCS le 29 juin 2016;
Il est aussi à noter l’existence de la SASU LES PETITES ANCIENNES immatriculée le 9 janvier
2018 au RCS Versailles 834 471 260 ayant pour activité le commerce de voitures dont la dirigeante
est Mme H B.
Plusieurs fautes de gestion sont relevées contre monsieur M. Y B qui :
A omis de tenir une comptabilité conformément aux dispositions légales (article L.653-5
-
alinéa 6 du code de commerce);
✔ A omis sciemment de demander l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de 45 jours de l’état de cessation des paiements sans avoir par ailleurs demandé l’ouverture d’une procédure de conciliation (article L.653-8 alinéa 3 du
code de commerce);
M. Y B, non comparant, n’a pas déposé de conclusions.
Au vu de ces éléments, le ministère public demande au tribunal de prononcer à l’encontre de M.
Y B une mesure d’interdiction de gérer d’une durée de cinq années.
MOTIFS DU JUGEMENT
Sur l’absence de M. Y B
M. Y B n’a jamais comparu; le tribunal constatera son absence et, faisant application des dispositions de l’article 472 du code de procédure civile, a vérifié que la demande est régulière, la citation à comparaître satisfaisant aux dispositions des articles 56 et 855 du même code; la demande est recevable, la juridiction étant compétente et aucune exception de nullité ou fin de non
recevoir d’ordre public n’étant relevée.
Sur l’insuffisance d’actif Selon la liste des créances figurant dans le rapport en date du 28 septembre 2018 établi par le liquidateur, le passif de la SASU AUTO RESTAUR’ est de 170 434,35 €, se répartissant comme suit :
Privilégié : IRP Auto (2015 à 2018) 10 736,00 DGFP (TVA 2016, IS 2016 CFE 2017, Amendes) 22 745,50
DGFP provisionnel (TVA 2017 & 2018, CFE 2018) 20 800,00
URSSAF taxation d’office (S2 2017 à avril 2018) 34 839,00
URSSAF provisionnel (juin 2018 & régul) 50 000,00
139 120,50 € Sous total
Chirographaire : 7 609,06 URSSAF (2016 & S1 2017) I 018,92 Banque populaire 10
[…]
-
7 000,00 M. Z
129,58 ORANGE
31 313,85 € Sous total
La créance de M. Z correspond à des avances faites par ce dernier à la SASU AUTO RESTAUR’ sur l’achat et les travaux de restauration d’une voiture ancienne dont M. Z n’a
jamais été livré. Par ailleurs le liquidateur judiciaire indique avoir reçu une déclaration de créance de M. A concernant des avances de 5 500 € faites à la SASU AUTO RESTAUR’ pour des réparations sur un véhicule ancien dont il est propriétaire, véhicule qui ne lui a jamais été restitué. Cette créance n’a pas été admise au passif de la société, car reçue hors délai légal.
Aucun actif n’a été réalisé.
L’insuffisance d’actif de la SASU AUTO RESTAUR’ est donc de 170 434,35 €.
Sur les fautes de gestion
Sur le défaut de tenue de la comptabilité
Les articles L.123-12 à L.123-28 et R.123-172 à R.123-209 du code de commerce imposent aux commerçants la tenue d’une comptabilité donnant une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise, au moyen de la tenue d’un livre journal, d’un grand livre et
d’un livre d’inventaire; les mouvements affectant le patrimoine de l’entreprise doivent être enregistrés chronologiquement au jour le jour, les comptes annuels qui comprennent le bilan, le compte de résultat étant établis à la clôture de l’exercice ;
Dans son rapport du 28 septembre 2018, le liquidateur indique que la comptabilité de la SASU AUTO
RESTAUR’ lui est inconnue, indiquant ainsi qu’aucune comptabilité ne lui a été remise.
Il est de jurisprudence constante que la non remise de la comptabilité vaut présomption de non tenue
régulière.
La tenue d’une comptabilité irrégulière ou incomplète est une infraction qui relève des dispositions de l’article L.653-5 alinéa 6 du code de commerce. Le tribunal retiendra ce grief à l’encontre de M.
Y B.
Sur l’absence de déclaration de cessation des paiements dans le délai légal
Par jugement en date du 12 juin 2018, ce tribunal a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à
l’encontre de la SASU AUTO RESTAUR’ et fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 12 décembre 2016, soit 18 mois antérieurement à la date du jugement d’ouverture de la procédure. A
La date de cessation des paiements n’ayant pas été contestée, est devenue définitive et s’impose à
tous, notamment dans la présente instance.
La procédure a été ouverte sur assignation de l’URSSAF, faute d’avoir pu recouvrer une somme de
26 955,31 €. Il est de jurisprudence constante que l’assignation d’un créancier antérieurement à toute déclaration de cessation des paiements de la part du débiteur ou des dirigeants, démontre le défaut de déclaration
de cessation des paiements dans le délai légal.
Du fait des spécificités des procédures de recouvrement de l’URSSAF, M. Y B ne pouvait ignorer l’existence de ces dettes et l’état de cessation des paiements de sa société. Il n’a cependant entrepris aucune démarche pour le déclarer puisque c’est sur citation de l’URSSAF que la procédure a été ouverte. Il ne justifie pas non plus que cet organisme lui aurait accordé des moratoires, ni qu’il a sollicité l’ouverture d’une procédure de conciliation.
M. Y B s’est donc abstenu de régulariser une déclaration de cessation des paiements dans le délai de quarante-cinq jours, prévu à l’article L.631-4 du code de commerce, sans pour autant avoir sollicité l’ouverture d’une procédure de conciliation. Il a ainsi commis une faute relevant des dispositions de l’article L.653-8 alinéa 3 du code de commerce. Le tribunal retiendra ce grief à
l’encontre de M. Y B.
Sur la situation personnelle du dirigeant M. Y B, étant absent à la présente audience, n’a fourni aucun élément sur sa situation
personnelle, familiale et sociale.
Il convient cependant de noter que M. Y B a fait l’objet d’un jugement d’interdiction de gérer pour une durée de 5 ans, prononcé par le tribunal de commerce de Versailles en date du 15 juin 2004 suite à la liquidation judiciaire de la SARL OUEST DEPANNAGE dont il était le gérant.
En conséquence, le tribunal, considérant l’importance de l’insuffisance d’actif, le nombre et la gravité des fautes de gestion commises par M. Y B, estimera nécessaire de l’écarter de la vie des affaires et le condamnera par application des dispositions des articles L.653-1 et suivants du code de commerce, à une mesure d’interdiction de gérer d’une durée de dix années.
La décision n’est pas exécutoire de plein droit à titre provisoire; en l’espèce, l’exécution provisoire étant facultative, le tribunal, l’estimant nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire,
l’ordonnera. Le tribunal ordonnera la signification de la décision aux formes de droit, puis sa transcription au
casier judiciaire national. En application des articles L.128-1 et suivants et R.128-1 et suivants du code du commerce, cette sanction fera l’objet d’une inscription au fichier national des interdits de gérer, dont la tenue est assurée par le conseil national des greffiers des tribunaux de commerce.
Les dépens seront mis à la charge de M. Y B qui succombera en l’instance.
JIK/
PAR CES MOTIFS :
Le tribunal:
Ⓡ Constate l’absence de M. Y B; Prononce, pour une durée de dix ans, une mesure d’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole ou toute entreprise ayant toute autre activité indépendante et toute personne morale, à l’encontre de M. Y B né le I mars 1961 à […]
MONTMORENCY (95), de nationalité française, ayant demeuré I route de Gambais à
[…] et actuellement sans adresse, ni domicile connus.
Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision. Ordonne la signification de la décision aux formes de droit, puis sa transcription au casier
judiciaire national. Ordonne l’inscription de cette sanction au fichier national des interdictions de gérer.
Condamne M. Y B aux dépens de l’instance.
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Le président Le greffier
Textes cités dans la décision