Tribunal de grande instance de Paris, 4e chambre 2e section, 29 septembre 2011, n° 09/07905

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 4e ch. 2e sect., 29 sept. 2011, n° 09/07905
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 09/07905

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

4e chambre 2e section

N° RG :

09/07905

N° MINUTE :

Assignation du :

05 Mai 2009

(footnote: 1)

JUGEMENT

rendu le 29 Septembre 2011

DEMANDEUR

Monsieur Z A

[…]

[…]

[…]

représenté par Me Jean-Pierre FORESTIER de la SCP FORESTIER & HINFRAY, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #P255

DÉFENDERESSE

S.A. CNP ASSURANCES

[…]

[…]

représentée par Me Thierry LACAMP, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire D845

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Mme ROSSI, Vice-Présidente

Madame X, Juge

Mme Y, Juge

assistées de Sylvie DEBRAINE, Greffier,

DEBATS

A l’audience du 30 Juin 2011

tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe

Contradictoire

en premier ressort


Faits, procédure et prétentions des parties

Monsieur Z A a souscrit auprès de la société CNP ASSURANCES deux contrats d’assurance-vie en euros, le premier intitulé ACTIVAL le 16 novembre 1995, le second intitulé TRESOR VIE le 10 janvier 1996.

Le 16 février 2007, dans le cadre de l’amendement FOURGOUS – issu de la loi du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l’économie – permettant de transformer un contrat d’assurance-vie en euros en un contrat multi-supports tout en conservant le bénéfice de l’antériorité fiscale, Monsieur Z A a autorisé le transfert des contrats précités.

Aux termes des bulletins d’adhésion, le contrat ACTIVAL a ainsi été transféré vers un contrat TRESOR EPARGNE n° 163 243243 07 pour un montant brut de 265.671,74 euros réparti à hauteur de 50% sur le support en euros “Trésor Vie 2 B”, 30% sur le support en OPCVM “ Fifac 40" et 20% sur le support en OPCVM “ Ixis Equilibre”.

De son côté, le contrat TRESOR VIE a été transféré sur un contrat TRESOR EPARGNE n° 163 243242 06 pour un montant brut de 775.280,19 euros réparti à hauteur de 20% sur le support en euros “Trésor Vie 2 B” et 80% sur le support temporaire “Réactis Sérénité”.

Reprochant à l’assureur un certain nombre de manquements à ses obligations, Monsieur Z A a, par acte d’huissier délivré le 5 mai 2009, fait assigner la société CNP ASSURANCES devant la présente juridiction.

Par dernières écritures récapitulatives signifiées le 4 novembre 2010 auxquelles il est expressément référé, Monsieur Z A demande au Tribunal, au visa des articles 1134, 1147, 1382 et suivants du Code civil, et L.132-5 du Code des assurances sous le bénéfice de l’exécution provisoire, de:

— dire et juger ses demandes recevables et bien fondées,

— dire et juger que la société CNP ASSURANCES a violé les stipulations à vocation déontologiques souscrites par la Fédération Française des Sociétés d’Assurances,

— dire et juger que la société CNP ASSURANCES a manqué à ses devoirs pré-contractuels d’information et de conseil,

— dire et juger que la société CNP ASSURANCES ne lui a pas donné tous les documents prévus par la loi de telle sorte que son droit à renonciation n’a pu valablement courir,

— dire et juger que la société CNP ASSURANCES a volontairement violé ses obligations contractuelles en modifiant unilatéralement sa répartition des fonds,

— dire et juger que la société CNP ASSURANCES a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité civile,

— en conséquence,

— condamner la société CNP ASSURANCES à lui verser les sommes de 131.913 euros au titre de ses pertes financières et 10.000 euros en réparation de son préjudice moral,

— dire qu’il peut valablement renoncer à ses contrats issus du transfert FOURGOUS,

— ordonner à la société CNP ASSURANCES la réactivation des anciens contrats TRESOR VIE et ACTIVAL sur les bases contractuelles originelles telles qu’en vigueur au 15 février 2007,

— débouter la société CNP ASSURANCES de ses demandes,

— condamner la société CNP ASSURANCES à lui payer la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

En réponse, dans ses dernières écritures récapitulatives signifiées le 22 novembre 2010 et auxquelles il est expressément référé, la société CNP ASSURANCES conclut à l’irrecevabilité et au débouté des prétentions adverses et à la condamnation du demandeur à lui payer la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 20 mai 2011.

Motifs de la décision

1) Sur la recevabilité de l’action

Attendu que si la société CNP ASSURANCES rappelle justement le principe du non-cumul des responsabilités contractuelles et délictuelles, il reste qu’en application des dispositions de l’article 12 du Code de procédure civile, il appartient au juge de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et de restituer aux faits et actes litigieux leur exacte qualification; qu’en l’espèce, Monsieur Z A reproche à son cocontractant des manquements à ses obligations pré-contractuelles et contractuelles fondées sur les articles L.132-5 du Code des assurances et 1147 du Code civil; que le moyen d’irrecevabilité soulevé doit donc être rejeté;

2) Sur le fond

— Sur l’exercice de la faculté de renonciation

Attendu que l’article L.132-5-1 alinéa 1er du Code des assurances dispose que “toute personne physique qui a signé une proposition ou un contrat d’assurance sur la vie ou de capitalisation a la faculté d’y renoncer par lettre recommandée avec demande d’avis de réception pendant le délai de trente jours calendaires révolus à compter du moment où elle est informée que le contrat est conclu”;

Attendu qu’aux termes de l’article L.132-5-2 du Code des assurances, “avant la conclusion d’un contrat d’assurance sur la vie ou d’un contrat de capitalisation, par une personne physique, l’assureur remet à celle-ci, contre récépissé, une note d’information sur les conditions d’exercice de la faculté de renonciation et sur les dispositions essentielles du contrat. Un arrêté fixe les informations qui doivent figurer dans cette note, notamment en ce qui concerne les garanties exprimées en unités de compte. Toutefois, la proposition d’assurance ou le projet de contrat vaut note d’information, pour les contrats d’assurance comportant une valeur de rachat ou de transfert, lorsqu’un encadré, inséré en début de proposition d’assurance ou de projet de contrat, indique en caractères très apparents la nature du contrat. L’encadré comporte en particulier le regroupement des frais dans une même rubrique, les garanties offertes et la disponibilité des sommes en cas de rachat, la participation aux bénéfices, ainsi que les modalités de désignation des bénéficiaires. Un arrêté du ministre chargé de l’économie, pris après avis de l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles, fixe le format de cet encadré ainsi que, de façon limitative, son contenu.

La proposition ou le contrat d’assurance ou de capitalisation comprend:

1° Un modèle de lettre destiné à faciliter l’exercice de la faculté de renonciation;

2° Une mention dont les termes sont fixés par arrêté du ministre chargé de l’économie, précisant les modalités de renonciation.

La proposition ou le projet de contrat d’assurance ou de capitalisation indique, pour les contrats qui en comportent, les valeurs de rachat au terme de chacune des huit premières années du contrat au moins, ainsi que, dans le même tableau, la somme des primes ou cotisations versées au terme de chacune des mêmes années. Toutefois, pour les contrats mentionnés au deuxième alinéa de l’article L.132-23, l’entreprise indique les valeurs de transfert au lieu des valeurs de rachat. La proposition ou le projet de contrat d’assurance ou de capitalisation indique les valeurs minimales et explique le mécanisme de calcul des valeurs de rachat ou de transfert lorsque celles-ci ne peuvent être établies.

Le défaut de remise des documents et informations prévus au présent article entraîne de plein droit la prorogation du délai de renonciation prévu à l’article L.132-5-1 jusqu’au trentième jour calendaire révolu suivant la date de remise effective de ces documents, dans la limite de huit ans à compter de la date où le souscripteur est informé que le contrat est conclu.

Les dispositions du présent article sont précisées, en tant que de besoin, par arrêté ministériel.

Elles ne s’appliquent pas aux contrats d’une durée maximale de deux mois”;

Attendu en l’espèce que l’assuré fait grief à l’assureur de n’avoir pas respecté le formalisme informatif exigé par les dispositions de l’article L.132-5 du Code des assurances;

Mais attendu qu’en vertu des dispositions légales précitées, il importe de rappeler que, d’une part, la seule sanction applicable en cas de méconnaissance des obligations pré-contractuelles d’information est la prorogation de plein droit du délai de renonciation jusqu’au 30e jour suivant la date de remise effective des documents requis, et d’autre part, la faculté de renonciation ouverte au souscripteur doit s’exprimer au moyen de l’envoi d’un courrier recommandé;

Qu’en conséquence, à supposer établies les défaillances invoquées, il doit être retenu que la faculté de renonciation ne peut être exprimée par une action en justice, que Monsieur Z A n’a pas respecté le formalisme de la lettre recommandée et qu’il n’est enfin pas fondé à réclamer des dommages et intérêts sur le fondement de ces mêmes dispositions;

Qu’il convient de débouter Monsieur Z A des demandes de ce chef;

— Sur le devoir de conseil et d’information de l’assureur

Attendu que Monsieur Z A reproche à la société CNP ASSURANCES de l’avoir mal conseillé en l’invitant à transférer ses contrats d’assurance-vie en euros vers des contrats en unités de compte sans l’informer des risques financiers encourus ni vérifier l’adéquation de ces transferts à ses objectifs et situation personnelle; qu’il ajoute avoir été laissé dans l’ignorance des unités de compte souscrites; qu’enfin, il invoque un défaut d’information relatif à l’existence d’un délai de rétractation et à l’importance des frais d’entrée;

Mais attendu qu’il ressort de l’examen des demandes d’adhésion en date du 16 février 2007 que Monsieur Z A a apposé sa signature sous la mentions selon lesquelles il reconnaît, d’une part, avoir reçu et pris connaissance des prospectus simplifiés des unités de compte choisies ainsi que de la notice d’information du contrat d’assurance TRESOR EPARGNE comportant les dispositions essentielles du contrat, les conditions d’exercice de la faculté de renonciation et un modèle de lettre de renonciation, et d’autre part, avoir été informé que “l’assureur garantit le nombre de parts d’unités de compte et non leur valeur. La valeur de la part varie à la hausse ou à la baisse en fonction du cours, sur les marchés financiers, des titres qui la composent”;

Qu’il résulte également de la lecture des bordereaux signés par l’assuré le 16 février 2007 et portant la mention “lu et approuvé”, que Monsieur Z A reconnaît “avoir pris connaissance des caractéristiques des supports choisis et demande en pleine connaissance de cause la répartition de mon versement telle qu’indiquée ci-dessus” et “ a(voir) été informé que l’assureur ne s’engage que sur le nombre d’unités de compte mais pas sur leur valeur. La valeur de ces unités de compte qui reflète la valeur d’actifs sous-jacents, n’est pas garantie mais est sujette à des fluctuations à la hausse ou à la baisse dépendant en particulier de l’évolution des marchés financiers”;

Que l’assuré ne peut valablement affirmer qu’il a été abusé par l’assureur, lors de la souscription, sur les risques encourus, dès lors que, bien qu’âgé de 75 ans comme rappelé en demande, son niveau intellectuel lui permettait parfaitement de comprendre le sens des documents contractuels qui lui ont été remis et la portée de ses engagements;

Que l’assureur fait pertinemment observer que Monsieur Z A a effectué deux rachats partiels, l’un en janvier 2008, l’autre en mai 2009, opérations qui démontrent la connaissance par l’assuré du contrat;

Que les termes du courrier du 31 août 2007, adressé par Monsieur Z A à l’assureur dans le but de contester les frais, selon lesquels “il était évident pour moi qu’il ne s’agissait que d’une simple formalité de transfert (le transfert FOURGOUS) qui consistait à affecter une partie de mon ancien capital à des supports en valeurs mobilières”, prouvent que l’assuré avait pleinement conscience qu’une partie de son investissement le serait en valeurs mobilières; que la soumission d’une partie de son épargne aux fluctuations boursières n’avait pas échappé à l’assuré; qu’il n’est donc pas rapporté la preuve que les deux souscriptions par transfert FOURGOUS au contrat TRESOR EPARGNE n’ont pas été réalisées en adéquation avec les attentes de Monsieur Z A, étant rappelé qu’une partie de son investissement l’a été sur un support en euros et l’autre sur des supports en unités de compte;

Attendu enfin que contrairement à ce qu’il prétend, Monsieur Z A a été dûment informé de l’existence d’un délai de rétractation de 30 jours, ce dernier étant expressément visé dans le bulletin d’adhésion; que de même, il ne peut sérieusement soutenir qu’il ignorait que des frais seraient prélevés puisque la notice d’information dont il a reconnu avoir pris connaissance stipule, page 3, en caractères gras: “le contrat prévoit les frais suivants” – suit la liste de ces frais dont les frais à l’entrée dans le contrat;

Attendu qu’en l’absence de démonstration d’un manquement de l’assureur à ses obligations d’information et de conseil, Monsieur Z A sera débouté de sa demande de dommages et intérêts;

— Sur la modification unilatérale des supports et du pourcentage d’investissement du contrat TRESOR EPARGNE n°163 243242 06

Attendu que lors du transfert du contrat TRESOR VIE vers le contrat TRESOR EPARGNE n°163 243242 06, les supports suivants ont été retenus: 20% sur le support en euros Trésor Vie 2 B, 80% sur le support en unités de compte Réactis Sérénité; qu’il n’est pas contesté que l’assureur a unilatéralement modifié cette répartition au profit d’un support en unités de compte Ixis Equilibris à hauteur de 20% et d’un support en euros Trésor Vie 2 B à hauteur de 80%;

Que la société CNP ASSURANCES explique que cette rectification s’est avérée nécessaire pour respecter les dispositions légales, le support en OPCVM Réactis Sérénité n’étant pas éligible au transfert FOURGOUS; qu’elle ajoute que cette modification n’a pas nui aux intérêts “sécuritaires” du demandeur puisque le choix retenu a finalement été un support en euros à hauteur de 80% au lieu des 20% initialement choisis, et un support en unités de compte à hauteur de 20% au lieu des 80% initialement retenus; qu’enfin, elle souligne avoir, par courrier du 15 avril 2009, proposé à titre amiable à l’assuré l’annulation du transfert litigieux et la réactivation de son contrat d’assurance-vie en euros TRESOR VIE, proposition qui est demeurée vaine;

Mais attendu que Monsieur Z A ne démontre ni la réalité du préjudice financier allégué ni le lien de causalité entre ledit préjudice et le manquement de l’assureur; que compte tenu en outre de la proposition amiable de ce dernier, le préjudice moral du demandeur n’est pas plus caractérisé;

Qu’au vu de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de débouter Monsieur Z A de ses demandes indemnitaires;

3) Sur les dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et les dépens

Attendu que l’équité justifie, eu égard à la situation respective des parties, de déroger aux dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, la société CNP ASSURANCES conservant l’entière charge de ses frais irrépétibles;

Attendu que Monsieur Z A, succombant à la présente instance, supportera les entiers dépens;

4) Sur l’exécution provisoire

Attendu qu’eu égard à la solution retenue, il n’y a pas lieu d’ordonner l’exécution provisoire;

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire, en premier ressort:

DECLARE recevable l’action formée par Monsieur Z A à l’encontre de la société CNP ASSURANCES;

DEBOUTE Monsieur Z A de l’ensemble de ses demandes;

DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile;

REJETTE toute autre demande;

CONDAMNE Monsieur Z A aux dépens;

DIT n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Fait et jugé à Paris le 29 Septembre 2011

Le Greffier Le Président

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