Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 2e section, 11 mars 2016, n° 15/04612

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 2e sect., 11 mars 2016, n° 15/04612
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 15/04612

Sur les parties

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S (footnote: 1)

3e chambre 2e section

N° RG :

15/04612

N° MINUTE :

Assignation du :

06 Février 2015

INCIDENT

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT

rendue le 11 Mars 2016

DEMANDEUR

Monsieur Z Y

[…]

[…]

représenté par Maître André BERTRAND de la SELARL ANDRE BERTRAND & ASSOCIES – SOCIETE D AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #L0207

DEFENDERESSE

Sociétéde perception et de distribution des droits des artistes-interprètes ou “ SPEDIDAM

[…]

[…]

représentée par Maître Isabelle WEKSTEIN de la SELEURL IWan SELARL, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #R0058

MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT

Françoise BARUTEL, Vice-Présidente

assistée de Jeanine ROSTAL, faisant fonction Greffier

DEBATS

A l’audience du , avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 11 Mars 2016.

ORDONNANCE

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe

Contradictoire

en premier ressort

FAITS, PROCEDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par exploit d’huissier en date du 6 février 2015, Monsieur Z Y, artiste-interprète de nationalité jamaïcaine ayant notamment enregistré avec d’autres artistes tels que SHAGGY ou A B, a assigné la Société de perception et de distribution des droits des artistes-interprètes (ci-après SPEDIDAM) aux fins notamment de dire qu’il est bien fondé à revendiquer le paiement de toutes les rémunérations légales perçues en son nom par la SPEDIDAM pour la diffusion et la reproduction de ses phonogrammes en France, et notamment la rémunération pour copie privée sonore et la rémunération équitable, et ce quelle que soit l’origine de la première fixation de ces enregistrements y compris aux Etats-Unis, et quelle que soit la nationalité du producteur y compris américaine, et de condamner la SPEDIDAM à lui payer les sommes de 40.000 euros au titre des rémunérations légales pour la diffusion et la reproduction de ses phonogrammes en France pour les années 2003 à 2013, et 2.500 euros pour les rémunérations légales au titre des vidéogrammes en France sur la même période, outre condamnation aux dépens et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Selon conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 4 novembre 2015, Monsieur Z Y, au visa des articles 133, 134 et 138 du code de procédure civile, demande au juge de la mise en état de :

— Le recevoir dans son incident et le déclarer celui-ci bien fondé ;

— Ordonner à la SPEDIDAM, dans les 30 jours suivant le prononcé de l’ordonnance à intervenir, et sous astreinte de 300 euros d’astreinte par jour de retard, de communiquer le montant des sommes dites « irrépartissables » c’est-à-dire collectées par elle en son nom depuis le 1er Janvier 2003 jusqu’au 31 décembre 2014 et non payées à Mr. Z Y au motif que ces sommes auraient été collectées sur des enregistrements non fixés pour la 1re fois dans l’Union Européenne ou dans un pays signataire de la Convention de Rome ;

— Ordonner à la Société pour l’Administration des droits des artistes et musiciens-interprètes (ADAMI), dans les 30 jours suivant le prononcé de l’ordonnance à intervenir, et sous astreinte de 300 euros d’astreinte par jour de retard, le contrat de réciprocité signé par celle-ci avec la société américaine X, ainsi que le montant des sommes perçues en vertu de ce contrat de réciprocité à la date du 31 décembre 2015 ;

— Ordonner à la Société Civile des Producteurs Phonographiques (SCPP), dans les 30 jours suivant le prononcé de l’ordonnance à intervenir, et sous astreinte de 300 euros d’astreinte par jour de retard, le contrat de réciprocité signé par celle-ci avec la société américaine X, ainsi que le montant des sommes perçues en vertu de ce contrat de réciprocité à la date du 31 décembre 2015 ;

— Se réserver la liquidation des astreintes.

Selon conclusions en réponse d’incident notifiées par voie électronique le 14 décembre 2015, la SPEDIDAM demande en ces termes au juge de la mise en état de :

— CONSTATER que les demandes de communication du contrat conclu avec la société

X, et du montant des sommes perçues au titre de ce contrat sont formées à l’encontre de l’ADAMI et de la SCPP et que la SPEDIDAM n’a pas vocation à y répondre ;

— DIRE ET JUGER que les sommes dont le paiement est revendiqué par Monsieur Y ne

peuvent être réparties en application des dispositions du code propriété intellectuelle et des conventions internationales ;

— DIRE ET JUGER que lesdites sommes ne peuvent faire l’objet d’aucune individualisation par la SPEDIDAM ;

— DIRE ET JUGER que les demandes de paiement des sommes générées antérieurement à 2009

sont prescrites et qu’ainsi le montant desdites sommes n’a pas à être communiqué ;

En conséquence :

— DEBOUTER Monsieur Y de ses demandes de communication « du montant des sommes dites « irrépartissables » ;

— DEBOUTER Monsieur Y de l’ensemble de ses demandes, fin et prétentions.

En tout état de cause :

— CONDAMNER Monsieur Y à verser à la SPEDIDAM la somme de 4.000 euros au titre

de l’article 700 du code de procédure civile.

— RESERVER les dépens.

Les parties ont été entendues en leurs explications à l’audience du 11 février 2016.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de communication des contrats de réciprocité conclus par l’ADAMI et la SCPP avec la société X ainsi que des montants des sommes perçues en exécution desdits contrats

Monsieur Z Y faisant valoir que le présent litige porte sur la question de savoir si par application des dispositions du droit communautaire et des accords internationaux souscrits par la France, notamment le Traité de l’OMPI entré en vigueur en France le14 mars 2010 sur les interprétations, les exécutions et les phonogrammes, le demandeur est ou non en droit d’exiger le paiement des rémunérations légales pour ses enregistrements diffusés ou copiés en France, et ce quel que soit le lieu de première fixation de ces enregistrements, estime que dans ce contexte, il est important de connaître le périmètre des rémunérations légales payées aux Etats-Unis aux artistes français pour leur enregistrement d’origine française, et que ce périmètre résulte des accords de réciprocité signés par l’ADAMI et la SCPP avec la société de gestion collective américaine X dont il demande la production.

La SPEDIDAM, qui fait observer qu’elle n’est pas partie auxdits contrats de réciprocité, ne répond pas à cette demande.

Sur ce,

Aux termes de l’article 138 du code de procédure civile, “si dans le cours d’une instance, une partie entend faire état d’un acte authentique ou sous seing privé auquel elle n’a pas été partie ou d’une pièce détenue par un tiers, elle peut demander au juge saisi de l’affaire d’ordonner la délivrance d’une expédition ou la production de l’acte ou de la pièce”.

Il faut cependant que les actes détenus par un tiers dont le demandeur ordonne la production soient suffisamment déterminés.

Il sera en outre rappelé qu’en vertu de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention et qu’en aucun cas, la production ou communication prévue à l’article 138 sus-visé ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve.

En l’espèce, pour justifier de l’existence des contrats de réciprocité que la société X aurait conclu avec la SCPP et l’ADAMI, Monsieur Z Y se borne à produire une capture d’écran du site de la société X sur laquelle la SCPP et l’ADAMI apparaissent dans la liste des “international partners” sans aucune précision sur la nature et la date de ces prétendus accords. Ainsi si l’existence desdits accords n’est pas contestée et est vraisemblable compte tenu de la mention sus-visée, cette seule mention est insuffisante à préciser la nature et la date de la pièce dont le demandeur demande la communication forcée à des tiers, à savoir la SCPP et l’ADAMI.

En outre, Monsieur Z Y, sur qui porte la charge de la preuve, sollicite dans le présent incident la production de documents détenus par des tiers sans justifier d’aucune demande de communication ni auprès de la société américaine X signataire desdits accords alors que le producteur d’une grande partie des albums litigieux (8 de ceux enregistrés avec SHAGGY et 6 de ceux enregistrés avec A B) est de nationalité américaine, ni auprès de la société anglaise PHONOGRAPHIC PERFORMANCE LIMITED (ci-après PPL) dont il n’est pas contesté qu’elle a pour mandat de gérer ses droits pour le monde entier, et pas davantage auprès de la SCPP et de l’ADAMI.

Il résulte des développements qui précèdent qu’en l’état de ces éléments les demandes sous astreinte d’ordonner à la SCPP et à l’ADAMI de communiquer sous astreinte des contrats de réciprocités signés avec la société X seront rejetées.

Sur la demande de communication du montant des sommes dites “irrépartissables”

Monsieur Z Y fait valoir que dans l’hypothèse où le tribunal ferait droit à ses arguments en droit, le litige porte sur le montant des rémunérations légales qui lui seraient dues pour ses enregistrements fixés pour la première fois soit en dehors de l’Union Européenne, soit en dehors des pays membres de la Convention de Rome, montant qui correspond en réalité aux montant des sommes dites « irrépartissables » c’est-à-dire perçues par la SPEDIDAM à son nom mais non payées en vertu de la loi telle qu’elle est interprétée restrictivement à ce jour, et ajoute que contrairement aux allégations de la défenderesse sa demande n’est pas imprécise s’agissant des sommes perçues du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2014.

La SPEDIDAM, outre qu’elle conteste le droit de Monsieur Z Y à une rémunération au titre de la copie privée ainsi qu’au titre de la rémunération équitable lorsque le phonogramme est produit par un producteur ressortissant des Etats-Unis et soulève la prescription pour toutes sommes antérieurement à 2009, oppose que la nature des sommes prévues par l’article L. 321-9 du code de la propriété intellectuelle, qui n’ont pu être réparties en application de conventions internationales, et qui sont en vertu de l’article sus-visé affectées à des actions d’aide à la création, à la diffusion du spectacle vivant et à des actions de formation d’artistes, exclut toute individualisation desdites sommes, de sorte que la communication sollicitée est impossible. Elle ajoute en outre que Monsieur Z Y, qui n’est pas membre de la SPEDIDAM, a choisi d’adhérer à la PPL, société de gestion de droits de propriété intellectuelle de nationalité anglaise, qui gère ses droits pour le monde entier dont la FRANCE, doit former ses réclamations auprès de cette société, l’article 7 de l’accord qu’elle a conclu avec cette dernière le 20 novembre 2012 prévoyant que toute demande faite par un membre d’une des deux sociétés parties à l’accord concernant sa rémunération doit être portée exclusivement auprès de cette société.

Sur ce,

Il doit être rappelé qu’il appartient au demandeur de démontrer que les pièces dont il demande la communication forcée, vraissemblablement existent, que la défenderesse, selon la même vraissemblance, est en leur possession et que leur production est indispensable à la solution du litige.

En l’espèce, outre que la SPEDIDAM oppose l’impossibilité de la communication du montant des sommes irrépartissables collectées pour Monsieur Z Y du fait que la nature de ces sommes affectées à des actions d’aide à la création, à la diffusion du spectacle vivant et à des actions de formation d’artistes en application de l’article L. 321-9 du code de la propriété intellectuelle exclut toute individualisation, cette demande de communication, qui aux termes des écritures du demandeur est faite pour le cas où le tribunal ferait droit à ses arguments, est en tout état de cause prématurée.

Il s’ensuit que cette demande de Monsieur Z Y sera également rejetée.

Sur les autres demandes

Il n’y a pas lieu de faire droit aux demandes de la SPEDIDAM sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Les frais comme les dépens de l’incident suivront le sort de ceux de la procédure au fond.

PAR CES MOTIFS

Nous, Juge de la mise en état, par ordonnance contradictoire rendue par mise à disposition au Greffe et en premier ressort,

— REJETONS les demandes de communication de pièces de Monsieur Z Y,

— RENVOYONS à l’audience de mise en état du 19 mai 2016 pour conclusions demandeur et fixation d’un calendrier,

— DISONS que les frais comme les dépens de l’incident suivront le sort de ceux de la procédure au fond,

Fait à PARIS, le 11 mars 2016

Le Greffier Le Juge de la Mise en Etat

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