Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 4e section, 14 avril 2016, n° 15/11901

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 4e sect., 14 avr. 2016, n° 15/11901
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 15/11901
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Paris, 5 octobre 2017, 2015/11901
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : DM/082596
Classification internationale des dessins et modèles : CL06-01
Référence INPI : D20160079
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Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT rendue le 14 avril 2016

3e chambre 4e section N° RG : 15/11901

INCIDENT

DEMANDERESSE S.A.S. CINNA […] 01470 BRIORD agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège, et représentée par Maître Pierre ORTOLLAND de la SEP O, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #R0231

DÉFENDERESSES Société G.NICOLETTI TRADE S.R.L Viale Del Vignola 68- C ROME (ITALIE) prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège. représentée par Maître Dariusz SZLEPER de l’A SZLEPER HENRY Avocats, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0017

S.A.R.L. DIPAVI, au nom commercial HOME CENTER […] 77410 CLAYE SOUILLY prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège. représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #K00065 et par Me Jean-Baptiste L, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant.

MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT Laure A, Vice-Présidente chargée de la mise en état, assistée de Sarah BOUCRIS, Greffier.

DÉBATS À l’audience des plaidoiries sur incident le 24 mars 2016, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 14 avril 2016.

ORDONNANCE Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoire En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

La société CINNA qui conçoit et commercialise des meubles, expose être titulaire de droits d’auteur sur un canapé qu’elle a créé en 2013 dénommé « PRADO » qui a fait l’objet d’un dépôt le 9 janvier 2014 auprès de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI). Ce dépôt a été enregistré sous le numéro DM/082596 et désigne l’Union Européenne. Ayant au cours de l’année 2015 appris la commercialisation par la société de droit italien G. NICOLETTI TRADE S.R.L d’un canapé dénommé «MOOD» qui serait contrefaisant selon elle du canapé « PRADO », elle a fait constater les faits par huissier de justice sur le site internet la société NICOLETTI.

Elle a su qu’en France la société DIPA VI située à CLA YE-SOUILLY qui exploite des magasins de meubles sous l’enseigne Home Center, avait commandé un exemplaire du canapé MOOD.

Autorisée par ordonnance présidentielle du 17 juillet 2015, elle a fait pratiquer par huissier de justice le 22 juillet 2015 à une saisie descriptive du canapé prétendument contrefaisant au centre commercial Domus de Rosny-sous- Bois. Par exploit en date du 6 août 2015, la société CINNA a assigné la société G. NICOLETTI TRADE et la société DIPAVI devant ce tribunal en contrefaçon de droits d’auteur et de modèle d’une part et de concurrence déloyale d’autre part aux fins d’obtenir l’indemnisation de son préjudice. Au cours de la procédure, par conclusions d’incident, les défenderesses ont sollicité du juge de la mise en état qu’il annule l’assignation. Au terme de leurs écritures signifiées le 18 mars 2016 la société NICOLETTI TRADE SRL demande au juge la mise en état de : DECLARER irrecevable comme tardive la tentative de régularisation de l’exploit introductif d’instance du 19 août 2015 par l’identification des références du modèle international DM/082596 correspondant aux photographies présentant le modèle invoqué par la société CINNA dans le cadre de l’action en contrefaçon à rencontre de la société NICOLETTI ; DECLARER irrecevable et en tout cas mal fondée la société CINNA en toutes ses demandes, fins et conclusions ; L’en DEBOUTER ; ADJUGER à la société NICOLETTI, l’entier bénéfice de ses précédentes écritures ; CONSTATER que les demandes formées par la société CINNA au titre de la prétendue contrefaçon de modèle et de droits d’auteur ne remplissent pas les exigences de l’article 56 du code de procédure civile en ce qu’elles ne définissent pas les moyens de la demande en fait et en droit ; En conséquence, PRONONCER la nullité de l’assignation du 19 août 2015, CONDAMNER la société CINNA à payer à la société NICOLETTI, une indemnité de 3 000 € en application de l’article 700 code de procédure civile,

CONDAMNER la société CINNA en tous les dépens qui pourront être recouvrés directement par Me Dariusz SZLEPER, avocat postulant. Selon ses écritures signifiées le 23 février 2016, la société DIPAVI a conclu à la même demande sollicitant une indemnité de 3 000 euros au titre de l’article 700 code de procédure civile.

Au terme de ses écritures signifiées le 8 mars 2016, la société Cinna a conclu au rejet de l’exception de nullité et sollicite du juge de : JUGER que la société CINNA a précisément identifié le modèle contrefait par les sociétés G. NICOLETTI TRADE et DIPAVI dans son assignation du 19 août 2015, JUGER que la société CINNA a décrit les caractéristiques originales conférant la protection du droit d’auteur au modèle « PRADO », Que de surcroît elle produit aux débats son catalogue dans lequel figure le modèle de canapé contrefait qui est d’ailleurs représenté aux photographies 5.1 à 5.5 et 6.1 à 6.5 du dépôt international DM/082596, JUGER infondée l’exception de nullité de l’assignation du 19 août 2015 soulevée par les sociétés G. NICOLETTI TRADE et DIPAVI, Par conséquent, REJETER l’exception de nullité soulevée par les sociétés G. NICOLETTI TRADE et DIPAVI, CONDAMNER solidairement les sociétés G. NICOLETTI TRADE et DIPAVI au paiement de la somme de 6.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile, CONDAMNER les sociétés G. NICOLETTI TRADE et DIPAVI en tous les dépens de l’incident, DELIVRER injonction aux sociétés G. NICOLETTI TRADE et DIPAVI de conclure au fond dans les quinze jours de l’ordonnance à venir. L’incident a été fixé au 25 mars 2016 et mis en délibéré au 14 avril 2016. MOTIVATION Selon les défenderesses, l’assignation ne remplirait pas les conditions de l’article 56 du code de procédure civile aux motifs que le modèle « PRADO » argué de contrefaçon ne serait pas identifiable dans le dépôt international visé et les caractéristiques revendiquées ne lui permettraient pas d’accéder à la protection du droit d’auteur. Selon les sociétés G. NICOLETTI TRADE et DIPAVI, il leur est donc impossible de savoir à quel modèle elles doivent se rapporter et d’identifier les faits de contrefaçon reproché ce qui ne leur permet pas d’organiser leur défense et leur cause grief. En réponse, la société CINNA soutient que le modèle contrefait est précisément identifié et au besoin qu’il s’agit des références photographies 5.1 à 5.5 et 6.1 à 6.5 du dépôt international DM/082596 et que les caractéristiques conférant la protection du droit d’auteur au modèle sont clairement décrites dont l’appréciation relève en tout état de cause du juge du fond.

Elle soutient que l’acte introductif de procédure satisfait aux conditions prescrites par l’article 56 du code de procédure civile.

Sur la nullité de l’assignation pour indétermination de son objet Aux termes de l’article 56 du code de procédure civile, « l’assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d’huissier de justice, l’objet de la demande avec les moyens en fait et en droit ».

Cette obligation sanctionnée par la nullité de l’acte introductif d’instance en cas de grief, vise à permettre au défendeur de connaître l’ensemble des faits qui lui sont reprochés et les moyens de manière à pouvoir se défendre.

La validité d’une assignation doit être appréciée par rapport à l’objet de l’action dont est saisi le tribunal sur le fondement de cet acte.

Aux termes de l’assignation délivrée respectivement aux sociétés Nicolletti et Dipavi, la société CINNA a engagé une action visant à juger qu’en offrant à la vente le modèle canapé « MOOD » les sociétés NICOLETTI TRADE SRL et DIPAVI se sont rendues coupables de contrefaçon de droits d’auteur dont la société CINNA est investie sur le modèle « PRADO » et de contrefaçon du modèle « PRADO » régulièrement enregistré auprès de 1' OMPI le 9 janvier 2014 sur le fondement des articles L 335-3 et L 513-5 et suivants du code de la propriété intellectuelle. Elle incrimine également ces agissements au titre de la concurrence déloyale sur le fondement des dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil.

Le canapé revendiqué est décrit en page 3 de l’assignation comme suit : « Conçu à partir d’une vaste banquette associable et modulable à volonté, sur laquelle des coussins de dossier lestés et maintenus sans point d’accroché, sont disposés librement et installés au gré de la fantaisie, ce modèle dégage une impression de liberté, particulièrement séduisante, qui lui a conféré un succès immédiat. Il se caractérise plus particulièrement par une structure inférieure biseautée sur toute sa périphérie sur laquelle repose une assise monobloc de forme générale parallélépipédique de même longueur et de même largeur que la structure inférieure. Les coussins amovibles positionnés sur l’assise comprennent deux parties, un coussin placé verticalement venant en appui sur un support en forme de « L » inversé. Ce support est constitué d’une base de faible épaisseur reliée à l’une de ses extrémités à une partie sensiblement verticale présentant un profil triangulaire. Le piètement est réalisé par quatre pieds droits reliés à une pièce plane horizontale formant ainsi quatre « T » inversés. » Il figue sur la liste des pièces jointes le certificat de dépôt international du 9 janvier 2014, le procès-verbal de constat de l’huissier du 19 mai 2015, les pièces du procès-verbal de saisie et le reportage photographique du 22 juillet 2015. Il est exact que sous le modèle international DM/082596 ont été enregistrées 7 modèles de meubles identifiés par des photographies et des numéros allant de 1 à 7.

Cependant, il y figure seulement deux canapés, dont les lignes sont bien distinctes, et les autres meubles sont un pouf, des tables et tables de chevet sans rapport avec l’objet du litige.

Les photographies des deux canapés prises sous divers angles sont référencées 1.1 à 1.5 et 5.1 à 5.5. 6.1 à 6.5.

Il ressort des photographies 5.1 à 5.5. 6.1 à 6.5 du modèle que le canapé PRADO en cause est facilement reconnaissable au vu de la description détaillée qui figure dans l’assignation notamment par ses coussins lestés et maintenus sans point d’accroché et que les défenderesses ne peuvent sérieusement soutenir qu’elles n’ont pas été en mesure de l’identifier.

Il s’ensuit que la société CINNA a suffisamment identifié dans son assignation le modèle revendiqué pour permettre aux défenderesses de conclure au fond.

Les défenderesses font également grief à la société CINNA de ne pas avoir défini dans sa description les caractéristiques originales justifiant la protection aux droits d’auteur mais seulement des caractéristiques fonctionnelles du canapé en cause. S’agissant d’une action en contrefaçon de droits d’auteur, en vertu de l’article L 112-4 du code de la propriété intellectuelle, il est constant que pour prospérer, le demandeur doit précisément identifier les œuvres et les décrire en caractérisant leur originalité, de manière à définir le périmètre auquel s’applique la protection qu’il entend voir reconnue.

Pour autant I’ absence prétendue de démonstration de l’originalité du canapé revendiqué au titre du droit d’auteur n’est pas de nature à entraîner la nullité de l’assignation. Cette discussion relève d’un débat au fond qui excède la compétence du juge de la mise en état. En conséquence, dès lors que le canapé en cause est clairement identifié pour permettre aux défenderesses de conclure au fond, il y a lieu de rejeter la demande en nullité de l’acte introductif d’instance. Sur les autres demandes L’équité commande de ne pas faire droit à la demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile par les défendeurs. PAR CES MOTIFS. Nous, le juge de la mise en état, statuant publiquement par mise à disposition de la décision au greffe, contradictoire et susceptible d’appel dans les conditions de l’article 776 du code de procédure civile,

Rejetons la demande en nullité de l’assignation.

Renvoyons l’affaire à la mise en état du 26 mai 2016 à 14h30 pour signification des conclusions au fond des défendeurs. Réservons les dépens. Déboutons les parties de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

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