Tribunal de grande instance de Paris, 1re chambre nationalité, 14 décembre 2017, n° 15/07398
Chronologie de l’affaire
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Sur la décision
Référence : | TGI Paris, 1re ch. nationalité, 14 déc. 2017, n° 15/07398 |
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Juridiction : | Tribunal de grande instance de Paris |
Numéro(s) : | 15/07398 |
Sur les parties
- Avocat(s) :
Texte intégral
T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S ■ |
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1/2/2 nationalité B N° RG : 15/07398 N° PARQUET : 15/383 N° MINUTE : Assignation du : 28 Avril 2015 DEBOUTE C.C |
JUGEMENT rendu le 14 Décembre 2017 |
DEMANDEUR
LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE
[…]
[…]
[…]
Madame X Y Viviane, vice-procureur
DEFENDERESSE
Madame Z A
[…]
Bat.E2
[…]
représentée par Me Delphine MAILLET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0117
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Carole CHEGARAY, Vice-Président
président de la formation
Madame Marion PRIMEVERT, Vice-Président
Monsieur Julien SENEL , Vice-Président
assesseurs
assistés de Madame Frédérique LOUVIGNÉ, Greffier
DÉBATS
A l’audience du 21 Septembre 2017 tenue publiquement sans opposition des représentants des parties, conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile par Carole CHEGARAY, vice-président , Magistrat rapporteur, qui a entendu les plaidoiries et en a rendu compte au tribunal dans son délibéré.
JUGEMENT
Contradictoire
en premier ressort
Prononcé à l’audience publique par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure Civile.
Signé par Carole CHEGARAY, vice-président et par Frédérique LOUVIGNÉ, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le 25 juin 2004, le greffier en chef du Tribunal d’instance de Saint-Germain-en-Laye a délivré à Madame Z B C A, né le […] à […]), un certificat de nationalité française en application des dispositions de l’article 18 du Code civil, comme née d’un père français, B D E A, ce dernier l’ayant reconnue le 27 janvier 2003 en la mairie de Chatou (78).
Par acte du 28 avril 2015, Monsieur le Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Paris a fait assigner devant ce Tribunal Madame Z B C A en contestation dudit certificat de nationalité française comme délivré à tort.
Une copie de l’assignation a été déposée au ministère de la justice le 23 décembre 2015, lequel en a délivré récépissé le 24 décembre 2015.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 février 2017, le ministère public a demandé à la juridiction saisie de:
Vu l’article 29-3 du Code civil,
— constater que le récépissé prévu par l’article 1043 du Code de procédure civile a été délivré,
— dire que le certificat de nationalité française délivré à l’intéressé l’a été à tort,
— dire que Madame Z B C A, se disant née le […] à […]), n’est pas française,
— ordonner la mention prévue par l’article 28 du Code civil,
— statuer ce que de droit quant aux dépens.
Dans ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 8 février 2017, Madame Z B C A a demandé au Tribunal de :
Vu l’article 47 du Code de procédure civile,
— débouter le ministère public de toutes ses fins et conclusions,
— le condamner à verser à Madame Z B C A une somme de 1.500 euros au visa de l’article 700 du Code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 24 février 2017.
MOTIFS
Si un certificat de nationalité française fait preuve de cette nationalité, le Procureur de la République peut toujours, en application de l’article 29-3 du Code civil, le contester lorsque les conditions pour établir la nationalité française ne lui paraissent pas avoir été remplies lors de sa délivrance. Conformément à l’article 30 du même code, la charge de la preuve incombe alors au ministère public qui doit démontrer que le certificat de nationalité française est erroné ou fondé sur des documents non probants voire falsifiés, ce qui dans une telle hypothèse lui fait perdre toute force probante, laquelle dépend des documents qui ont permis de l’établir.
En l’espèce, à l’appui de son action négatoire, le ministère public fait valoir que le certificat de nationalité délivré à Madame Z B C A a été rédigé au vu notamment de l’acte de naissance de l’intéressée issu des registres du service central de l’état civil, lequel a été transcrit par le consulat général de France à Abidjan (Côte d’Ivoire) sur la production de l’acte ivoirien n° 693 dressé le 30 décembre 1987 à Bingerville (Côte d’ivoire), alors que cet acte de naissance étranger a été établi en violation des dispositions de l’article 29 du Code civil ivoirien en ce qu’il n’a pas été signé par l’officier d’état civil l’ayant établi.
Le ministère public en conclut que l’acte de naissance étranger de l’intéressée est dépourvu de force probante au titre de l’article 47 du Code civil et que sa transcription sur les registres consulaires est par voie de conséquence également dénuée de force probante ; qu’en l’absence d’état civil certain, la filiation de Madame Z B C A ne peut être légalement établie à l’égard d’un parent français, de sorte que le certificat de nationalité française lui a été délivré à tort.
Madame Z B C A réplique tout d’abord qu’il appartient en droit français à l’officier de l’état civil, lorsqu’il découvre qu’un acte ne remplit pas les conditions fixées par l’article 47 du Code civil, d’en refuser la transcription et d’en aviser le demandeur, ce dernier pouvant contester la décision auprès du Procureur de la République de Nantes ; qu’en l’espèce, le ministère public en 2004 à l’occasion de la procédure de transcription de son acte de naissance n’a pas émis de contestation quant à la validité de l’acte ivoirien au regard de la loi locale.
Elle expose ensuite qu’elle apporte la preuve de la régularité de son acte de naissance ivoirien par la production d’un courrier du 11 juin 2015 du sous-préfet de Bingerville fournissant les explications nécessaires et adressant les actes permettant de reconnaître son acte de naissance comme valable selon la loi locale, et ce suivant une ordonnance rendue en matière gracieuse à la requête du Procureur de la République par le Tribunal de première instance d’Abidjan-Plateau le 2 juin 2014 et enregistrée le 3 juin 2014 aux termes de laquelle il est ordonné que “les actes de naissance reçus dans les registres de naissance du centre secondaire de BREGBO des années 1988 à 2010, ainsi que ceux du centre principal de 1975 à 2007 de la circonscription d’état civil de la sous-préfecture de Bingerville feront foi malgré l’absence de signature de leurs auteurs, de paraphe et de cotation des feuillets”.
Il s’avère que la transcription consulaire des actes de naissance des Français dressés en pays étranger, prévue par l’article 7 du décret n°62-921 du 3 août 1962, n’intervient que lorsque les actes étrangers “sont conformes aux dispositions de l’article 47 du Code civil et sous réserve qu’ils ne soient pas contraires à l’ordre public”, comme le rappelle expressément le second alinéa de l’article 5 du décret n°2008-521 du 2 juin 2008 relatif aux attributions diplomatiques et consulaires françaises en matière d’état civil.
Dans la mesure où la transcription suppose la conformité de l’acte étranger aux dispositions de l’article 47 du Code civil -ce qui donne lieu à un contrôle effectif ab initio des consulats tant sur la forme que sur la force probante des actes à transcrire- et confère à l’acte ainsi transcrit par l’administration française la valeur probatoire d’un acte d’état civil français, il appartient à celui qui considère que l’acte étranger n’est en réalité pas probant de solliciter préalablement l’annulation de l’acte transcrit auprès du Tribunal de grande instance de Nantes, seul compétent en application des articles 1047 et 1048 du Code de procédure civile, sans quoi l’acte transcrit fait nécessairement écran comme le suggère l’article 98-4 du Code civil.
Ainsi, au cas particulier, la transcription de l’acte de naissance ivoirien de Madame Z B C A par le consulat général de France à Abidjan le 20 avril 2004 -dont il n’est ni allégué ni démontré qu’elle ait fait l’objet d’une annulation judiciaire- fait obstacle à la remise en cause par le ministère public de la force probante de l’acte ivoirien sur le fondement de l’article 47 du Code civil.
En conséquence, le ministère public ne rapporte pas la preuve de l’absence d’état civil certain de Madame Z B C A qu’il allègue à l’appui de sa contestation du certificat de nationalité française délivré le 25 juin 2004. Il sera débouté de l’ensemble de ses demandes.
Compte tenu des circonstances de l’espèce, il y a lieu de laisser à la charge de Madame Z B C A les frais irrépétibles qu’elle a exposés à l’occasion de l’instance.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal statuant par mise à disposition au greffe après débats en audience publique, par jugement contradictoire et en premier ressort,
Constate que le récépissé prévu par l’article 1043 du Code de procédure civile a été délivré,
Déboute le ministère public de l’ensemble de ses demandes,
Ordonne la mention prévue par l’article 28 du Code civil,
Déboute Madame Z B C A de sa demande fondée sur l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamne le Trésor public aux dépens.
Fait et jugé à Paris le 14 Décembre 2017
Le greffier Le Président
[…]
1:
Expéditions
exécutoires
délivrées le :
Textes cités dans la décision