Tribunal judiciaire de Nanterre, 16 décembre 2021, n° 20/07848

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Sur la décision

Référence :
TJ Nanterre, 16 déc. 2021, n° 20/07848
Numéro(s) : 20/07848

Sur les parties

Texte intégral

DOSSIER NE : N° RG 20/07848 – N° Portalis DB3R-W-B7E-WDEB AFFAIRE : S.A. AXA FRANCE IARD / S.E.L.A.R.L. EKIP'

Minute n° 

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTERRE

LE JUGE DE L’EXECUTION

JUGEMENT DU 16 DECEMBRE 2021

COMPOSITION DU TRIBUNAL

PRESIDENT : Noémie DAVODY

GREFFIER : Chloé COLOMBIER

DEMANDERESSE

S.A. AXA FRANCE IARD 313 Terrasses de l'[…]

représentée par Maître Catherine BONNEAU de la SELARL KAPRIME SOCIETE D’AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : C 800

DEFENDERESSE

S.E.L.A.R.L. EKIP' 2, rue de Cauderan 33000 BORDEAUX

représentée par Me Laurent FOURNIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1924

Le Tribunal après avoir entendu les parties et/ou leurs avocats en leurs conclusions à l’audience du 25 Novembre 2021 a mis l’affaire en délibéré et indiqué que le jugement serait rendu le 16 Décembre 2021, par mise à disposition au Greffe.

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EXPOSE DU LITIGE :

Par arrêt du 27 octobre 2016, la Cour d’appel de Bordeaux a notamment :

- fixé le préjudice indemnisable de la Société BERTHEAU à la somme de 322 000 €,

- condamné in solidum Monsieur X, Monsieur Y et son assureur, la SMABTP et la compagnie AXA France, assureur de la société ART’CO, à régler cette somme en deniers ou quittances,

- condamné in solidum Monsieur X, Monsieur Y et son assureur, la SMABTP et la compagnie AXA France, assureur de la société ART’CO, à la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par acte du 11 août 2020, dénoncé le 19 août 2020, la SELARL EKIP', anciennement dénommée SELARL Christophe MANDON, mandataire-liquidateur de la société BERTHEAU IMMOBILIER SAINT-LOUIS a fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes bancaires détenus par la Compagnie AXA France IARD à la BNP PARIBAS pour paiement de la somme de 353 913,76 euros.

Par exploit du 16 septembre 2020, AXA France IARD a assigné la SELARL EKIP devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de NANTERRE aux fins de :

- ORDONNER la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 11 août 2020 sur le compte bancaire de la Compagnie AXA France IARD,

- FIXER la créance totale restant due à la SELARL EKIP', prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société BERTHEAU, à la somme de 155 609,02 euros,

- FIXER la quote-part de la créance incombant à la Compagnie AXA IARD à la somme de 84 027,45 euros, Subsidiairement,

- CANTONNER la saisie litigieuse à la somme de 84 027,45 euros

A titre infiniment subsidiaire,

- CANTONNER la saisie litigieuse à la somme de 155 609,02 euros,

En tout état de cause,

- CONDAMNER la SELARL EKIP’ à régler la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Au soutien de ses prétentions, elle expose que le décompte figurant dans l’acte de saisie-attribution est erroné. Elle indique en effet que la SELARL EKIP’ a, à tort, fait application des intérêts de 1993 à 2020 alors que les intérêts ne pouvaient être réclamés aux défendeurs pour une période postérieure au 5 mars 2004.

L’affaire a été appelée à l’audience du 28 janvier 2021.

Par jugement avant-dire droit du 19 février 2021, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de NANTERRE a enjoint aux parties de rencontrer un médiateur.

La médiation n’ayant pas abouti, l’affaire a été rappelée à l’audience du 10 juin 2021, puis renvoyée à celle du 25 novembre 2021.

A cette audience, la Compagnie AXA France IARD, représentée par son conseil, a soutenu oralement des conclusions écrites au termes desquelles elle demande de :

A titre principal,

2



- ORDONNER la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 11 août 2020 sur le compte de la Compagnie AXA France,

- LIMITER le cours des intérêts de la dette à la période du 2 mars 1993 au 5 mars 2004, soit entre la date de l’assignation introductive d’instance au fond et la date à laquelle les causes du jugement rendu le 27 novembre 2001, ont été intégralement honorées,

- FIXER la créance totale restant due à la SELARL EKIP', prise en qualité de liquidateur de la Société BERTHEAU, à la somme de 44 401,36 €

- Fixer la quote-part de la créance incombant à la Compagnie AXA France à la somme de 44 401,36 €,

A titre subsidiaire,

- CANTONNER la saisie litigieuse à la somme de 44 401,36 euros

En tout état de cause,

- CONDAMNER la SELARL EKIP’ à régler la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

En réplique, la SARL EKIP', représentée par son conseil, a soutenu oralement des conclusions écrites aux termes desquelles elle sollicite :

- Le débouté de la Compagnie AXA France IARD de l’ensemble de ses demandes, sauf à voir constater son offre de paiement de la somme de 44 401, 36 €,

- La validation de l’exécution de l’arrêt du 27 octobre 2016 pour le solde impayé de 193 489,41 euros au 10 juin 2021 et la condamnation de la Compagnie AXA France IARD à payer cette somme à la SARL EKIP', sans préjudice du paiement des intérêts légaux dus après le 10 juin 2021, ni en conséquence, d’un décompte final à la date du jugement à intervenir,

- La condamnation de la Compagnie AXA France IARD à payer à la SARL EKIP’ une indemnité de 3000 euros sur le fondement de l’article 70 du code de procédure civile, outre les dépens.

A l’appui de ses demandes, elle rappelle que la condamnation prononcée par la Cour d’appel de BORDEAUX est une condamnation in solidum, permettant à la créancière d’exiger l’intégralité de la dette à l’un ou à l’autre des débiteurs. Par ailleurs, elle soutient que la prétention de la Compagnie AXA France IARD à dénier un cours d’intérêts à partir du 5 mars 2004 est infondée dans la mesure où la condamnation de première instance n’était pas intégralement réglée.

A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré au 16 décembre par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION :

A titre liminaire, il convient de relever que les demandes de la Compagnie AXA France IARD ont évolué entre son assignation et ses dernières conclusions soutenues oralement à l’audience du 25 novembre 2021. Au regard de l’oralité de la procédure devant le juge de l’exécution, le tribunal n’est saisi que des demandes formulées à l’audience.

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Sur la validité de la saisie-attribution

L’article L. 111-2 du code des procédures civiles d’exécution dispose que le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d’exécution.

Selon les dispositions de l’article L. 121-2 de ce même code, le juge de l’exécution a le pouvoir d’ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d’abus de saisie.

Il sera rappelé que l’erreur sur le montant des sommes dues en vertu du titre exécutoire n’a pas d’incidence sur la validité de l’acte d’exécution qui reste valable à concurrence du montant réel de la dette, l’erreur affectant le montant réclamé ne justifiant ni la nullité de la mesure d’exécution ni sa mainlevée mais la limitation de ses effets au montant des sommes effectivement dues.

Par arrêt du 27 octobre 2016, la Cour d’appel de Bordeaux a notamment :

- fixé le préjudice indemnisable de la Société BERTHEAU à la somme de 322 000 €,

- condamné in solidum Monsieur X, Monsieur Y et son assureur, la SMABTP et la compagnie AXA France, assureur de la société ART’CO, à régler cette somme en deniers ou quittances,

- condamné in solidum Monsieur X, Monsieur Y et son assureur, la SMABTP et la compagnie AXA France, assureur de la société ART’CO, à la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par acte du 11 août 2020, dénoncé le 19 août 2020, la SELARL EKIP’ a fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes bancaires de la Compagnie AXA France IARD à la BNP PARIBAS, pour paiement de la somme de 353 913,76 euros, sur le fondement de l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Bordeaux, le 27 octobre 2016.

A titre liminaire, il sera rappelé qu’en vertu de l’article 1313 du code civil, la solidarité entre les débiteurs oblige chacun d’eux à toute la dette. Le paiement fait par l’un d’eux les libère tous envers le créancier. Par ailleurs, le créancier peut demander le paiement au débiteur solidaire de son choix. Les poursuites exercées contre l’un des débiteurs solidaires n’empêchent pas le créancier d’en exercer de pareilles contre les autres.

Il découle en outre de l’article 1317 du code civil que les codébiteurs solidaires ne contribuent à la dette que chacun pour sa part. Celui qui a payé au-delà de sa part dispose d’un recours contre les autres à proportion de leur propre part.

En l’espèce, le créancier, la SELARL EKIP', est donc fondé à réclamer l’intégralité de la dette à l’un ou à l’autre des débiteurs, en l’occurrence la Compagnie AXA France IARD, à charge pour elle d’exercer un recours contre les co-débiteurs.

Si le principe de créance n’est pas contesté par la demanderesse, les parties s’opposent en revanche sur le montant de cette créance.

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A l’audience du 25 novembre 2021, la Compagnie AXA France IARD a demandé à ce que le montant de la créance restant due à la SELARL EKIP’ soit fixé à la somme de 44 401,36 euros tandis que la SELARL EKIP’ revendique une créance d’un montant de 193 489,41 € au 10 juin 2021.

En réalité, le point de litige entre les parties réside dans le calcul des intérêts, la SELARL EKIP’ réclamant des intérêts jusqu’en 2020 alors que la Compagnie AXA France IARD soutient que les intérêts ne peuvent être réclamés aux débiteurs pour une date postérieure au 5 mars 2004, date à laquelle le premier jugement aurait été exécuté en totalité.

En vertu de l’article 1343-1 du code civil, « lorsque l’obligation de somme d’argent porte intérêt, le débiteur se libère en versant le principal et les intérêts. Le paiement partiel s’impute d’abord sur les intérêts ».

Ainsi, le taux d’intérêt sanctionne le défaut de paiement et a donc vocation à courir jusqu’à l’exécution totale de la décision, en principal et en intérêts.

Il convient de vérifier si à la date du 5 mars 2004, le jugement du Tribunal de grande instance de BORDEAUX du 27 novembre 2001 avait été intégralement exécuté, et par suite, de déterminer si le taux d’intérêt a continué ou non à courir à compter de cette date.

En vertu du jugement du Tribunal de grande instance de BORDEAUX du 27 novembre 2001, Monsieur X, Monsieur Y, la SMABTP, comme assureur de Monsieur Y et la compagnie AXA COURTAGE comme assureur de l’entreprise ART’CO, devaient régler à la société BERTHEAU la somme de 3 200 000 francs, soit 487 836,86 euros à titre principal, 5000 francs au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

Conformément à l’article 1231-7 du code civil, ces condamnations ont emporté intérêt au taux légal.

En l’espèce, la Compagnie AXA France IARD invoque les règlements suivants pour prétendre que le jugement de première instance a été intégralement exécuté:

- règlement de 239 315,85 euros effectué par la Compagnie AXA France le 18 février 2003 ;

- règlement de 120 351,35 euros effectué par Monsieur X le 18 juillet 2003 ;

- règlement de 121 959, 21 euros effectué par la SMABTP le 6 mars 2002.

En conséquence, les débiteurs invoquent des règlements à hauteur de 481 626,41 euros au profit du créancier.

A supposer même que ces règlements couvriraient l’intégralité des condamnations en principal prononcées par le Tribunal de grande instance de BORDEAUX, il n’est pas contestable qu’à la date du 5 mars 2004, les débiteurs ne s’étaient pas acquittés des intérêts légaux, de sorte que la condamnation de première instance n’était pas intégralement exécutée et que les intérêts légaux dus ont continué à courir postérieurement à la date du 5 mars 2004.

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C’est donc à tort que la Compagnie AXA France IARD soutient que les intérêts ont cessé de courir à compter du 5 mars 2004.

La demanderesse conteste le décompte produit par la SARL EKIP’ exclusivement sur ce point, à savoir le fait que les intérêts légaux ont continué à courir depuis le 5 mars 2004.

Il sera observé que le décompte produit dans le procès-verbal de saisie-attribution du 11 août 2020 prend en compte, dans le calcul des intérêts, les règlements partiels effectués par les débiteurs.

Compte-tenu du paiement de 111 585,17 euros effectué par Monsieur X le 15 février 2021 (pièce n°3 de la défenderesse), la créance revendiquée par la SELARL EKIP’ arrêtée au 10 juin 2021 est de 193 489,41 euros (pièce n°4 de la défenderesse).

Le point de contestation soulevé par la Compagnie AXA France IARD ayant été écarté, il y a lieu de fixer le montant de la créance de la SELARL EKIP’ à la somme de 193 489,41 euros et de valider la saisie-attribution effectuée le 11 août 2020 et dénoncée le 19 août 2020 à hauteur de la somme de 193 489,41 euros. Il sera ordonné mainlevée pour le surplus, au frais des débiteurs.

Sur les autres demandes

La société AXA FRANCE sera condamnée à payer à la SELARL EKIP’ la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle sera également condamnée aux dépens de la procédure.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l’exécution, statuant par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et rendu à charge d’appel

FIXE la créance de la SELARL EKIP’ à la somme de 193 489,41 euros,

VALIDE la saisie-attribution pratiquée le 11 août 2020 et dénoncée le 19 août 2020 sur les comptes détenus par la Compagnie AXA France IARD à la BNP PARIBAS à hauteur de 193 489,41 euros, et ordonne mainlevée pour le surplus, au frais des débiteurs ;

CONDAMNE la société AXA FRANCE IARD à payer à la SELARL EKIP’ la somme de 1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE la société AXA FRANCE IARD aux dépens,

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

RAPPELLE que la décision est exécutoire de droit.

Le Greffier Le Juge de l’Exécution

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