Tribunal Judiciaire de Paris, 3e chambre 3e section, 31 janvier 2024, n° 17/13010

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TJ Paris, 3e ch. 3e sect., 31 janv. 2024, n° 17/13010
Numéro(s) : 17/13010
Importance : Inédit
Dispositif : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes
Date de dernière mise à jour : 20 février 2024
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Texte intégral

TRIBUNAL

JUDICIAIRE

DE PARIS [1]

[1]

Le

Expédition exécutoire délivrée à :

— Maître Hirsch, vestiaire W3

Copie certifiée conforme délivrée à :

— Maître Warusfel, vestiaire K28

3ème chambre

3ème section

N° RG 17/13010 -

N° Portalis 352J-W-B7B-CLKZN

N° MINUTE :

Assignation du :

15 Septembre 2017

JUGEMENT

rendu le 31 janvier 2024

DEMANDERESSE

Société BIOLITEC PHARMA MARKETING Ltd

[Adresse 4]

[Adresse 4], [Localité 3] MALAYSIE

représentée par Maître Bertrand WARUSFEL de la SELARL FELTESSE WARUSFEL PASQUIER & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #K0028

DÉFENDERESSE

Société LSO MEDICAL

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Maître Marc-Roger HIRSCH de la SELARL HIRSCH et Associés, avocats au barreau de PARIS, avocats postulant, vestiaire #W0003 et par Maître Charles de HAAS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Décision du 31 Janvier 2024

3ème chambre 3ème section

N° RG 17/13010 – N° Portalis 352J-W-B7B-CLKZN

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Jean-Christophe GAYET, premier vice-président adjoint

Anne BOUTRON, vice-présidente

Linda BOUDOUR, juge

assistés de Quentin CURABET, greffier lors des débats et de Lorine MILLE, greffière lors de la mise à disposition.

DÉBATS

A l’audience du 13 Septembre 2023 tenue en audience publique devant Anne BOUTRON et Linda BOUDOUR, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seuls l’audience, et, après avoir donné lecture du rapport, puis entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux avocats que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 20 décembre 2023 puis prorogé au 31 janvier 2024.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe

Contradictoire

En premier ressort

_____________________________

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La société Biolitec Pharma Marketing Ltd (ci-après Biolitec) se présente comme l’un des principaux fournisseurs d’équipements et de services de pointe destinés au traitement médical, thérapeutique et esthétique des problèmes vasculaires.

La société Biolitec est titulaire de la partie française du brevet européen n° EP 2 620 119 (ci-après EP 119) déposé le 9 mars 2009 et publié le 2 septembre 2015, revendiquant la priorité des brevets américains US 67537 du 28 février 2008, US 79024 du 8 juillet 2008, US 104956 du 13 octobre 2008 et US 395455 du 27 février 2009. Ce brevet, dont la langue de procédure est l’anglais, a pour titre « endoluminal laser ablation device for treating veins » et dans sa traduction française « dispositif d’ablation laser endoluminal pour le traitement des veines ».

La société LSO Medical (ci-après LSO) indique avoir pour activité la conception, le développement, la fabrication et la commercialisation notamment de lasers et des consommables dans le domaine médical et esthétique. Elle commercialise en France un laser endoveineux sous le nom « Endotherme 1470 » et des fibres optiques sous le nom « fibre radiales ringlight» destinées à être utilisées avec le laser « Endotherme 1470 ».

Considérant que ces produits portent atteinte à ses droits sur le brevet précité, la société Biolitec a fait procéder à un constat sur le site internet de la société LSO Medical le 21 juin 2017 puis a fait assigner la société LSO par acte du 15 septembre 2017 en contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 7, 12, 13 et 14 de la partie française du brevet européen n° EP 119 devant le tribunal judiciaire de Paris.

Le 5 juillet 2019, la société Biolitec a soumis à l’Institut national de la propriété industrielle une requête en limitation de la partie française du brevet EP 119, acceptée le 10 juillet 2019. Aucune opposition n’a été formée pendant le délai requis.

Autorisée par ordonnance rendue sur requête du 11 décembre 2019, la société Biolitec a fait procéder le 13 septembre 2019 à une saisie contrefaçon sur le stand de la société LSO tenu au salon CIV MEDICAL à [Localité 5]. Par ordonnance du 6 mars 2020, la société LSO a été déboutée de son référé rétractation, condamnée aux dépens et à verser à la société Biolitec la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, décision confirmée en appel par un arrêt du 15 décembre 2020, la société LSO étant en outre condamnée aux dépens d’appel et à la somme de 8000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 juin 2022, la société Biolitec demande au tribunal de:

DECLARER valide la partie française du brevet européen EP 2 620 119 limité en ses revendications 1, 2, 3, 11, 12 et 13

DIRE ET JUGER que la société Biolitec est recevable et bien fondée en son action,

DIRE ET JUGER qu’en fabricant, en faisant fabriquer, en offrant à la vente, en commercialisant en France, et/ou en exportant depuis la France, les dispositifs « fibres consommables » utilisés avec un Laser « endotherme », et reproduisant à tout le moins les caractéristiques revendiquées à l’une des revendications 1, 2, 3, 11, 12 et 13 de la partie française du brevet européen n°EP 2 620 119 B1 limité de la société Biolitec, la société LSO Medical se rend coupable d’actes de contrefaçon au sens de l’article L.615-5 du Code de la propriété intellectuelle

DIRE ET JUGER qu’en offrant à la vente, en commercialisant en France, et/ou en exportant depuis la France, le LASER « endotherme » s’utilisant avec les dispositifs « fibres consommables » reproduisant à tout le moins les caractéristiques revendiquées à l’une des revendications 1, 2, 3, 11, 12, 13, 14 de la partie française du brevet européen n°EP 2 620 119 B1 limité de la société Biolitec, la société LSO MEDICAL se rend coupable d’actes de contrefaçon au sens de l’article L.615-5 du Code de la propriété intellectuelle

DIRE ET JUGER qu’il n’y a pas lieu d’écarter des débats les pièces 6 et 7 de la société Biolitec et qu’elles sont recevables et aptes à établir la preuve de la contrefaçon

DIRE ET JUGER que la société Biolitec a bien rapporté la preuve de la contrefaçon de la revendication 1 et des revendications dépendantes 2, 3, 11, 12, 13 et 14 de la partie française de son brevet européen n°EP 2 620 119 B1

EN CONSEQUENCE :

DEBOUTER la société LSO de toutes ses demandes, fins et prétentions

DEBOUTER la société LSO de sa demande de nullité des revendicatons 1, 2, 3, 11, 12 et 13 telles que limitées de la partie française du brevet EP2 620 119 pour insuffisance de description et/ou pour défaut de nouveauté et/ou pour défaut d’actvité inventive

ORDONNER la cessation de tout acte de contrefaçon et ce sous astreinte de 1000 euros par jour de retard et par produit fabriqué ou commercialisé à compter de la signification du jugement

INTERDIRE à la société LSO Medical de fabriquer, de faire fabriquer, d’offrir à la vente, de commercialiser sur le territoire français, et/ou d’exporter depuis la France, directement ou par l’intermédiaire de tiers, les dispositifs « fibres consommables » s’utilisant avec un LASER « endotherme » et reproduisant à tout le moins les caractéristiques revendiquées à l’une des revendications 1, 2, 3, 11, 12, 13, 14 de la partie française du brevet européen n°EP 2 620 119 B1 limité de la société Biolitec et ce, sous astreinte de 1000 euros par jour de retard et par produit fabriqué ou commercialisé à compter de la signification du jugement à intervenir

ORDONNER la destruction des produits mentionnés ci-dessus en possession de la société LSO Medical ou dont elle est propriétaire, à ses frais et ce sous astreinte de 1000 euros par jour de retard passé un délai d’une semaine à compter de la signification du jugement à intervenir

ORDONNER le rappel des circuits commerciaux des produits mentionnés ci-dessus et la destruction de ceux-ci, aux seuls frais de la société LSO Medical et ce sous astreinte de 1000 euros par jour de retard passé un délai d’une semaine à compter de la signification du jugement à intervenir

ORDONNER sous astreinte de 1000 euros par jour de retard passé un délai d’un mois après signification du jugement à intervenir, la production de tous les documents ou informations détenues par la société LSO Medical utiles pour déterminer l’origine et les réseaux de distribution des produits contrefaisants, et notamment :

a) Les nom et adresse des producteurs, fabricants, distributeurs, fournisseurs et autres détenteurs antérieurs des produits contrefaisants et de tous les produits de même forme, ainsi que des grossistes destinataires et des détaillants ;

b) Les quantités produites, commercialisées, livrées, reçues ou commandées, ainsi que le prix obtenu pour ces produits ;

c) La marge brute réalisée pour ces produits ;

Sous la certification d’un expert-comptable ou un commissaire aux comptes, détaillant les éléments retenus dans le calcul de la marge brute, et renvoyer l’affaire à telle audience qui lui plaira, afin de permettre à la société Biolitec de conclure sur le montant des dommages et intérêts en réparation des actes de contrefaçon.

RAPPELER que cette mesure d’instruction est exécutoire de plein droit, nonobstant appel

CONDAMNER la société LSO Medical à verser à la société Biolitec la somme provisionnelle de 300 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice financier résultant de la contrefaçon de la partie française du brevet EP 2 620 119 B1, dans l’attente de la production des documents et informations ordonnée

CONDAMNER la société LSO Medical à verser à la société Biolitec la somme provisionnelle de 100 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral résultant de la contrefaçon de la partie française du brevet EP 2 620 119 B1

EN T OUT E TA T DE C A U S E :

ORDONNER la parution du jugement à intervenir dans cinq journaux, au choix de la société Biolitec, et aux frais de la société LSO Medical dans une limite de 5000 euros maximum par insertion, soit un total de 25 000 euros

DIRE que le tribunal se déclarera compétent pour liquider les astreintes

ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir, en toutes ses dispositions, nonobstant appel et sans constitution de garantie

CONDAMNER la société LSO Medical à verser à la société Biolitec 113 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens, conformément à l’article 699 du code de procédure civile, lesquels seront recourus par la SELARL FELTESSE WARUSFEL PASQUIER & ASSOCIES

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 21 septembre 2022, la société LSO Medical demande au tribunal de:

DIRE ET JUGER recevable et bien fondée la société LSO Medical en toutes ses demandes reconventionnelles et y faisant droit :

PRONONCER la nullité de la partie française du brevet européen EP 2 620 119 limité en ses revendications 1, 2, 3, 11, 12 et 13 pour insuffisance de description ou, subsidiairement, pour défaut de nouveauté ou, encore plus subsidiairement, pour défaut d’activité inventive ;

REQUÉRIR le greffier afin de faire inscrire ledit jugement au registre national des brevets et, à défaut, autoriser la société LSO Medical à faire procéder elle-même à ladite inscription ;

En conséquence,

DIRE ET JUGER MAL FONDÉE la société Biolitec Pharma Marketing Ltd en sa demande principale en contrefaçon des mêmes revendications annulées du même brevet nul, l’en débouter ;

Ou, très subsidiairement,

DIRE ET JUGER que la société Biolitec Pharma Marketing Ltd n’établit pas la preuve que les dispositifs « fibres consommables » utilisés avec un LASER « endotherme » qu’elle incrimine reproduiraient l’ensemble des caractéristiques de la revendication 1 ni des autres revendications 2, 3, 11,12 et 13 de la partie française de son brevet européen n° 2 620 119,

En conséquence, la débouter purement et simplement de l’ensemble de ses demandes en contrefaçon desdites revendications dudit brevet,

Et, en toute hypothèse,

CONDAMNER la société la société Biolitec Pharma Marketing Ltd à payer à la société LSO Medical une indemnité de 180 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNER la société la société Biolitec Pharma Marketing Ltd aux entiers dépens de l’instance, sans distraction.

L’instruction a été close le 29 septembre 2022 et l’affaire a été plaidée l’audience du 13 septembre 2023.

MOTIVATION

Présentation du brevet EP 2 620 119

Selon le paragraphe [0001] de la partie descriptive du fascicule du brevet EP 119, le brevet concerne un dispositif de traitement endovasculaire par laser et plus particulièrement de traitement de maladies vasculaires telles que l’insuffisance veineuse avec de l’énergie laser utilisant une fibre optique.

Les paragraphes [0005] à [0007] de la description exposent qu’il existe un certain nombre de traitements pour éradiquer l’insuffisance veineuse qui se caractérise notamment par un élargissement des vaisseaux sanguins entrainant une perte de la capacité des veines à ramener le sang vers le cœur. Les veines variqueuses sont ainsi fréquemment traitées par la suppression des veines insuffisantes, par différentes méthodes comme la chirurgie, la sclérothérapie, l’électrocautérisation, la radiofréquence et les traitements au laser.

Le paragraphe [0012] de la description enseigne qu’un traitement faiblement invasif selon l’art antérieur pour les veines variqueuses est l’ablation laser endoluminale (ELA) qui permet, par l’introduction d’une fibre optique dans la veine à traiter, de générer une énergie laser dans le sang et/ou la paroi veineuse qui l’absorbe, créant ainsi un dommage thermique qui provoque une fibrose de la veine.

Les paragraphes [0013] et [0015] évoquent l’art antérieur, en particulier les brevets américains n°6 200 332 de Del Giglio et n°6 398 777 de Navarro qui enseignent que l’application d’un niveau d’énergie relativement élevé permet d’améliorer le succès du traitement de l’ELA des veines concernées.

L’objet de l’invention (paragraphe [0021]) est de remédier à un ou plusieurs des inconvénients présentés par le traitement ELA et d’autres traitements de l’art antérieur décrits aux paragraphes [0016] et [0018], en particulier:- celui d’un rayonnement laser appliqué seulement par la toute petite surface émettrice plate de l’extrémité nue de la fibre ne permettant qu’à une partie localisée très minime de recevoir l’énergie du laser;

Décision du 31 Janvier 2024

3ème chambre 3ème section

N° RG 17/13010 – N° Portalis 352J-W-B7B-CLKZN

— celui d’un rayonnement laser dirigé vers une direction frontale de la face émettrice plate de la fibre limitant le rayonnement à une application localisée, pratiquement aucun rayonnement n’étant émis radialement;

— celui de l’application de niveaux d’énergie élevés pouvant provoquer des lésions thermiques au sein des tissus adjacents, une possibilité de paresthésie et des perforations de veines;

— celui de nécessiter des volumes significatifs d’anesthésie tumescente pouvant provoquer par ailleurs des niveaux plus élevés de lésions thermiques sur les tissus adjacents que ce qui est souhaité.

Selon les paragraphes [0022] à [0024], la solution proposée par l’invention consiste en un dispositif amélioré d’ablation endoluminale (ELA) qui peut être effectuée à des densités de puissance relativement faibles. Le dispositif comprend un guide d’ondes flexible définissant un axe longitudinal, une extrémité proximale pouvant être raccordée optiquement à une source de rayonnement, et une extrémité distale pouvant être introduite dans le vaisseau sanguin. L’extrémité distale comprend une surface émettant un rayonnement qui provient de la source de rayonnement sur le plan latéral par rapport à l’axe longitudinal du guide d’ondes sur une partie anguleuse de la paroi du vaisseau enveloppante.

Aux paragraphes [0025] à [0038] sont décrits plusieurs modes de réalisation du dispositif.

La partie française du brevet EP 119 a fait l’objet d’une limitation présentée sur requête auprès de l’INPI et acceptée le 10 juillet 2019 (pièce Biolitec n°12), visant à inclure les caractéristiques techniques de la revendication 7 d’origine à la revendication 1. Suite à cette limitation, la revendication 7 d’origine a été retirée et les revendications 8 à 15 ont été renumérotées 7 à 14.

Sont énoncées ci-dessous les revendications 1, 2, 3, 11, 12 à 14 du brevet EP 119 tel que limité, opposées par la société Biolitec à la société LSO :

“1. Un dispositif de traitement endoluminal d’insuffisances veineuses, comprenant : un guide d’ondes flexible (100, 200, 500, 600, 800, 900) définissant un axe allongé, une extrémité proximale pouvant être raccordée optiquement à une source de rayonnement (424) et une extrémité distale pouvant être reçue à l’intérieur du vaisseau sanguin et comprenant une surface d’émission de rayonnement (110, 210, 510, 610) adaptée pour émettre un rayonnement à partir de la source de rayonnement (424) latéralement par rapport à l’axe allongé du guide d’ondes (100, 200, 500, 600, 800, 900) et de manière annulaire à partir du guide d’ondes (100, 200, 500, 600, 800, 900) sur une partie s’étendant de manière angulaire de la paroi de vaisseau enveloppante, le dispositif comprenant en outre un couvercle (106, 206, 506, 606, 906) qui est rattaché de manière fixe au guide d’ondes (100, 200, 500, 600, 800, 900) et scellé à celui-ci, sensiblement transparent par rapport au rayonnement émis, qui englobe la surface d’émission (110, 210, 510, 610) dans celui-ci et qui définit une interface guide d’ondes-gaz qui réfracte un rayonnement émis latéralement par rapport à l’axe allongé du guide d’ondes (100, 200, 500, 600, 800, 900) sur la paroi de vaisseau enveloppante dans lequel l’étalement du faisceau annulaire est défini par un angle situé dans la plage d’environ 30° à environ 40° et/ou dans lequel le centre approximatif du faisceau est de préférence orienté à un angle situé dans la plage d’environ 700 à environ 900 par rapport à l’axe allongé du guide d’ondes.

2. Le dispositif selon la Revendication 1, dans lequel la surface d’émission (110, 210, 510,610) est inclinée par rapport à l’axe allongé du guide d’ondes (100, 200, 500, 600, 800, 900), la surface d’émission (110, 210, 510, 610) étant orientée à un angle aigu par rapport à l’axe allongé du guide d’ondes (100, 200, 500, 600, 800, 900) et la surface d’émission (110, 210, 510, 610) définissant un contour de surface arqué.

3. Le dispositif selon la Revendication 1 ou 2, dans lequel la surface d’émission (110, 210, 510, 610) est sensiblement de forme conique.

11. Le dispositif selon l’une quelconque des Revendications 1 à 10, dans lequel le guide d’ondes est une fibre optique (100, 200, 500, 600, 900) et dans lequel le couvercle est un capuchon (106, 206, 506, 606, 906) qui est fusionné à l’âme de fibre.

12. Le dispositif selon l’une quelconque des Revendications 1 à 11, comprenant en outre au moins une source laser (424) qui fournit un rayonnement laser d’au moins une longueur parmi environ 980 nm, environ 1470 nm et environ 1950 nm, chaque longueur +/- environ 30 nm, à une puissance inférieure ou égale à environ 10 W, l’extrémité proximale du guide d’ondes (100, 200, 500, 600, 800, 900) étant optiquement couplée à la au moins une source laser (424) et la surface d’émission (110, 210, 510, 610) du guide d’ondes (100, 200, 500, 600, 800, 900) émettant un rayonnement latéralement par rapport à l’axe allongé du guide d’ondes (100, 200, 500, 600, 800, 900) selon un schéma annulaire s’étendant axialement sur la paroi de vaisseau enveloppante.

13. Le dispositif selon la Revendication 12, dans lequel la source laser (424) fournit une puissance inférieure à 5 W.

14. Le dispositif selon l’une quelconque des Revendications 1 à 13, comprenant en outre un dispositif de retrait électrique (430) couplé par entraînement au guide d’ondes (100, 200, 500, 600, 800, 900) et configuré de façon à retirer le guide d’ondes (100, 200, 500, 600, 800, 900) au travers du vaisseau sanguin tout en fournissant un rayonnement laser à un débit d’apport d’énergie inférieur à environ 50 J/cm, 40 J/cm, 30 J/cm, 20 J/cm ou 10 J/cm en moyenne à la paroi du vaisseau sanguin.”

I – Sur la demande reconventionnelle en nullité des revendications 1, 2, 3, 11, 12 et 13 du brevet EP 119

a) Sur la nullité de la revendication 1 pour insuffisance de description

Moyens des parties

La société LSO fait valoir à titre principal la nullité des revendications 1, 2, 3, 11, 12 et 13 pour insuffisance de description aux motifs que la personne du métier, qui est un clinicien des traitements endovasculaires qui connait la physique du laser et l’optique, ne serait pas capable de reproduire la caractéristique de la revendication n°1 selon laquelle “l’étalement du faisceau annulaire est défini par un angle situé dans la plage d’environ 30° à environ 40°”, en raison de l’absence de précisions techniques sur les ouvertures numériques et sur les méthodes de mesures optiques du rayonnement permettant de connaître la valeur de l’angle d’étalement, n’étant pas établi que la personne du métier aurait connaissance de ces méthodes. Elle ajoute que les deux méthodes appliquées par la société Opto Services aboutissent à une dispersion importante des résultats, prouvant qu’il n’existe pas de méthode fiable permettant d’obtenir une mesure avec le degré de certitude et de précision exigé par la revendication. Elle en conclut que l’invention n’est pas suffisamment décrite, justifiant l’annulation de la revendication n°1.

La société Biolitec fait valoir en réponse que le grief porte non pas sur une caractéristique de l’invention, à savoir la valeur de l’angle d’étalement du faisceau, mais sur la méthode nécessaire pour la mesurer, laquelle n’est pas revendiquée. Elle ajoute que la personne du métier, qui est un ingénieur ayant des connaissances de base en optique et en mathématiques, sait qu’il devra sélectionner une fibre dont les caractéristiques techniques et en particulier les indices de réfraction lui permettront d’obtenir la valeur d’angle dans la plage revendiquée, qu’il s’enquerra auprès d’un fournisseur des données lui permettant de déduire l’angle revendiqué par application des règles usuelles d’optique et qu’il pourra également effectuer des essais, précisant que quelle que soit la méthode employée, il s’agit de pratiques connues sur le marché et qui n’ont pas besoin d’être plus amplement décrites.

Réponse du tribunal

L’article L.614-12 du code de la propriété intellectuelle dispose que la nullité du brevet européen est prononcée en ce qui concerne la France par décision de justice pour l’un quelconque des motifs visés à l’article 138, paragraphe 1, de la Convention de Munich.

Aux termes de l’article 138 de la Convention de Munich du 5 octobre 1973 sur la délivrance de brevets européens, 1. Sous réserve des dispositions de l’article 139, le brevet européen ne peut être déclaré nul, avec effet pour un État contractant, que si : […] b) le brevet européen n’expose pas l’invention de façon suffisamment claire et complète pour qu’un homme du métier puisse l’exécuter.

L’article 83 de même Convention énonce que l’invention doit être exposée dans la demande de brevet européen de façon suffisamment claire et complète pour qu’un homme du métier puisse l’exécuter.

Une invention est suffisamment décrite lorsque la personne du métier est en mesure, à la lecture de la description et grâce à ses connaissances professionnelles normales, théoriques et pratiques, d’exécuter l’invention (Com., 23 janvier 2019, pourvoi n° 17-14.673, 16-28.322).

Le fait que certains éléments indispensables au fonctionnement de l’invention ne figurent ni explicitement dans le texte des revendications ou de la description, ni dans les dessins représentant l’invention revendiquée, n’implique pas nécessairement que l’invention n’est pas exposée dans la demande de façon suffisamment claire et complète pour qu’une personne du métier puisse l’exécuter dès lors que ces éléments indispensables appartiennent à ses connaissances générales (Cass. com., 23 janvier 2019, n°17-14.673 et n°16-28.322).

La personne du métier est celui du domaine technique où se pose le problème que l’invention, objet du brevet, se propose de résoudre (Cass. com., 20 novembre 2012, n°11-18.440).

En l’espèce, la personne du métier est un clinicien des traitements endovasculaires qui connait la physique du laser et les règles d’optique.

La revendication n°1 du brevet telle que limitée prévoit que le rayonnement en sortie de fibre est un : “ (…) un rayonnement émis latéralement par rapport à l’axe allongé du guide d’ondes sur la paroi de vaisseau enveloppante dans lequel l’étalement du faisceau annulaire est défini par un angle situé dans la plage d’environ 30° à environ 40° (…).” (souligné par le tribunal)

Aussi, pour exécuter l’invention, la personne du métier doit pouvoir reproduire un rayonnement en sortie de fibre dont l’étalement du faisceau annulaire se situe dans la plage angulaire revendiquée.

Les termes “environ 30° à environ 40°” ne sont pas explicités dans le brevet. La personne du métier comprendra toutefois nécessairement que ce terme fait référence à une marge d’approximation. Les parties s’accordent d’ailleurs à dire (page 37 des conclusions Biolitec et pages 90 et 111 des conclusions LSO) qu’en l’absence de précision dans le brevet sur la variation d’angle induite par le terme “environ”, elle se déduit par application des directives F-IV 4.7.1 et G-IV 8.1 de l’Office européen des brevets (OEB) comme couvrant une marge d’erreur de +/- 0,5° de la plage 30° à 40° revendiquée.

Il est constant que tant la description que les revendications et les dessins du brevet ne donnent aucune autre précision relativement à l’angle d’étalement du faisceau annulaire visé dans la revendication n°1 que les mentions du paragraphe [0042] de la description du brevet selon lesquelles:“dans certains modes de réalisation, le rayonnement est émis latéralement et annulairement sur la paroi vasculaire avoisinante, et le faisceau annulaire du rayonnement s’étend sur tout un arc (autrement dit la diffusion du faisceau) défini par l’ouverture numérique de la fibre. Dans certains modes de réalisation, l’étalement du faisceau annulaire est défini par un angle de l’ordre de 30° à 40° environ”.

L’ouverture numérique correspond, selon la société Biolitec (page 68 de ses conclusions), qui n’est en celà pas démentie par la société LSO, à “un nombre sans dimension qui caractérise la plage d’angles sur laquelle le système peut accepter ou émettre de la lumière”, précisant que le faisceau laser et la fibre optique ont chacun une ouverture numérique et que “pour un laser, l’ouverture numérique caractérise la plage d’angles d’émission de lumière, et pour la fibre optique d’acceptation de la lumière”. La société Biolitec explique de plus que “lorsque l’on désire coupler le laser à la fibre optique, l’ouverture numérique de l’un et de l’autre va avoir une incidence sur le faisceau émis en bout de fibre” et “l’angle d’émission du laser influe directement sur l’angle d’étalement en bout de fibre”.

Il est également constant (page 25 des conclusions Biolitec et page 97 des conclusions de la société LSO) que le brevet ne propose aucune méthode de calcul de l’angle d’étalement du faisceau annulaire.

Le fait de ne décrire aucune méthode de calcul ne compromet pas en soi la suffisance de description du brevet dès lors que la revendication n°1 ne se rapporte pas à une méthode, comme le souligne la société Biolitec, sous réserve toutefois que les résultats obtenus par les différentes méthodes connues de la personne du métier lui permettent d’exécuter l’invention.

À cet égard, la société Biolitec soutient en substance (pages 18 et 68 de ses conclusions) que les méthodes de calcul permettant d’exécuter l’angle d’étalement du faisceau annulaire font partie des connaissances générales de la personne du métier, sans cependant produire aucun document de nature à justifier desdites connaissances générales, tandis que la société LSO le conteste.

La société Biolitec affirme ainsi que la personne du métier peut exécuter l’angle d’étalement revendiqué, soit par l’application d’une formule mathématique usant des données relatives à l’ouverture numérique du laser, de la fibre et des indices de réfraction, soit en procédant à des essais trouvant leur traduction dans une courbe à partir de laquelle ledit angle peut être calculé.

S’agissant du premier cas de figure, la demanderesse affirme en particulier que “l’homme du métier qui connaît l’usage des fibres optiques pour le traitement de l’insuffisance veineuse sait donc qu’il faut qu’il sélectionne une fibre dont les caractéristiques techniques (en partculier les indices de réfraction) permettront d’obtenir – une fois adaptée structurellement conformément à l’invention – une valeur d’angle comprise entre 30° et 40°. Pour ce faire et comme cela est usuel dans l’industrie, il s’enquerra auprès d’un fournisseur de fibre pour obtenir les données d’indice de réfraction du cœur et de la gaine lui permettant de déduire aisément l’étalement du faisceau, par application des règles usuelles d’optique qu’il connaît s’agissant de la propagation de la lumière dans une fibre optique”. Elle présente de plus dans le cadre de sa démonstration sur la contrefaçon le détail d’un tel calcul appliqué à l’espèce.

Toutefois, la société Biolitec ne verse aux débats aucun document permettant d’établir ces allégations, ni n’identifie, documents à l’appui, les “règles usuelles d’optique” invoquées, de sorte que son exposé argumentaire est inopérant.

S’agissant du second cas de figure, si la société LSO ne conteste pas la possibilité de procéder à des essais, sans que celà représente un effort excessif pour la personne du métier, elle soutient que la personne du métier ne peut être considérée comme ayant dans ses connaissances générales les méthodes permettant de calculer l’angle d’étalement à partir de telles courbes. Pourtant, la société LSO reconnaît elle-même (page 98 de ses conclusions) que les publications de l’art antérieur qu’elle produit et qui présentent pour la plupart des courbes gaussiennes obtenues à partir de données de mesures, théoriques ou expérimentales, n’indiquent, pas plus que le brevet objet du litige, la méthode permettant de déterminer la valeur de l’angle d’étalement à partir de l’une de ces courbes.

Or les études réalisées par la société Opto Services à la demande de chacune des parties (pièce Biolitec n°19 et pièce LSO n°58), dans lesquelles ont été utilisées différentes méthodes pour déterminer la valeur de l’angle d’étalement du faisceau annulaire à partir de données reproduites sur une courbe, démontrent que ces méthodes font partie des connaissances générales en optique de la personne du métier.

Ainsi :- s’agissant de l’étude effectuée à la demande de la société Biolitec (sa pièce n°19), l’angle d’étalement a été déterminé par une première méthode dite “papier-crayon” et par une deuxième méthode utlisant la “formule de la régression linéaire”

— dans l’étude effectuée à la demande de la société LSO (sa pièce n°58), la société Opto Services a recherché les valeurs d’angles par application de la formule de la régression linéaire correspondant à la méthode utilisée dans la première étude, comme le reconnaît la société LSO et d’autre part au regard de “l’intersection de la courbe avec un seuil de bruit de puissance Pmax/22".

Il se déduit ainsi de l’absence de mention de méthode de calcul dans les documents de l’art antérieur sus évoqués la présomption que la personne du métier sait à partir de ses connaissances générales en optique et mathématique, calculer l’angle d’étalement d’un faisceau annulaire à partir d’une courbe.

Si, comme le souligne la société LSO (page 99 de ses conclusions) l’application de ces deux méthodes de calcul aboutit à des écarts de valeurs, comme le montrent les études réalisées par la société Opto Services (un écart de valeur de 2,8° pour l’étude produite par la société Biolitec et des écarts pouvant aller jusqu’à 5° pour l’étude produite par la société LSO en prenant le calcul des angles négatifs, et non 7,9° comme le soutient la société LSO), ces écarts ne sont pas significatifs au regard de la plage d’angle revendiquée (10 °et 0,5° de marge d’erreur en plus ou en moins) ni dirimant pour l’exécution de l’invention, comme le prouve l’étude Opto Services produite par Biolitec qui rapporte des valeurs d’angle de 36° et 33,2° selon la méthode utilisée, dans la plage d’angle revendiquée.

Celà est d’autant plus vrai que la société LSO invoque à son tour ces mêmes méthodes de calcul au soutien du défaut de nouveauté de la revendication 1 (conclusions LSO page 130).

Il en résulte que les résultats de l’étude précitée mettant en œuvre au moins une méthode faisant partie des connaissances générales de la personne du métier permet de parvenir au résultat mentionné par la revendication 1 du brevet EP 119, ce dont il se déduit qu’elle peut exécuter l’invention sans effort excessif (voir en ce sens Chambre des recours de l’OEB, 22 septembre 2004, Minerals technologies Inc. c/ Solvay, T485/00).

Le moyen de nullité de la revendication 1 du brevet EP 119 pour insuffisance de description doit par conséquent être écarté.

b) Sur la nullité de la revendication 1 pour défaut de nouveauté

Moyens des parties

La société LSO Medical fait valoir que la revendication 1 du brevet EP 119 est nulle pour défaut de nouveauté motif pris de l’existence de deux documents de l’art antérieur qui pris chacun isolément sont destructeurs de nouveauté, à savoir l’article « probe for laser angioplasty radiating a corolla shaped beam » publié en 1989 (qu’elle traduit par “sonde pour angioplastie laser irradiant un faisceau en forme de corolle”, ci-après “D3”), et l’article “modified fiber tips for light application in hollow organs” publié en 1990 (qu’elle traduit par “ pointes de fibres modfiées pour application de lumière dans des organes creux”, ci-après “D9”).

La société Biolitec répond que D3 divulgue un dispositif d’angioplastie aortique qui n’a pas d’application pour l’insuffisance veineuse; le rayonnement en sortie de fibre n’est pas annulaire mais frontal; ce rayonnement frontal est atténué par un couvercle permettant de produire un rayon divergent latéral de 30° à 40° vis-à-vis de l’axe allongé du guide d’ondes et non d’environ 70° à environ 90°; l’étalement de l’angle n’est que de 5° à 6°; elle estime que les calculs d’angles déduits par LSO à partir de ce document ne sont pas fiables et les courbes d’angles sont imprécises et ne correspondent pas au rayonnement réel en sortie de surface émettrice. S’agissant du document D9, elle fait valoir qu’il se rapporte au traitement d’organes creux de type coeur ou oesophage et n’est pas applicable au traitement d’une veine; qu’il ne divulgue pas un rayonnement substantiellement transverse à l’axe allongé du guide d’onde ni une plage d’angle du faisceau annulaire de 30° à 40°.

Réponse du tribunal

L’article L. 614-12 du code de la propriété intellectuelle dispose que « la nullité du brevet européen est prononcée en ce qui concerne la France par décision de justice pour l’un quelconque des motifs visés à l’article 138, paragraphe 1, de la Convention de Munich ».

Aux termes de l’article 138 de la Convention de Munich du 5 octobre 1973 sur la délivrance de brevets européens, « 1. Sous réserve des dispositions de l’article 139, le brevet européen ne peut être déclaré nul, avec effet pour un État contractant, que si : […] a) l’objet du brevet européen n’est pas brevetable aux termes des articles 52 à 57 ».

L’article 52.1 de la même Convention énonce que « les brevets européens sont délivrés pour toute invention dans tous les domaines technologiques, à condition qu’elle soit nouvelle, qu’elle implique une activité inventive et qu’elle soit susceptible d’application industrielle ».

Selon l’article 54 « Nouveauté » de ladite Convention, « 1. Une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique. 2. L’état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet européen par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen. Une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique ».

Pour être comprise dans l’état de la technique et être privée de nouveauté, l’invention doit s’y retrouver tout entière, dans une seule antériorité au caractère certain avec les éléments qui la constituent dans la même forme, le même agencement, le même fonctionnement et le même résultat technique (Cass. Com., 17 mai 2023, n°19-25.509).

L’absence de nouveauté peut ressortir de ce qui est implicitement contenu dans un document de l’art antérieur pourvu que la mise en œuvre des enseignements de ce document conduise sans ambiguïté aux revendications du brevet.

L’article 9 du code de procédure civile dispose qu’il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

La revendication 1 peut se décomposer selon les caractéristiques suivantes :

1) Un dispositif de traitement endoluminal d’insuffisances veineuses, comprenant :

2) un guide d’ondes flexible définissant un axe allongé,

3) une extrémité proximale pouvant être raccordée optiquement à une source de rayonnement et

4) une extrémité distale pouvant être reçue à l’intérieur du vaisseau sanguin et

5) comprenant une surface d’émission de rayonnement adaptée pour émettre un rayonnement à partir de la source de rayonnement (424)

6) latéralement par rapport à l’axe allongé du guide d’ondes et de manière annulaire à partir du guide d’ondes sur une partie s’étendant de manière angulaire de la paroi de vaisseau enveloppante,

7) le dispositif comprenant en outre un couvercle

8) qui est rattaché de manière fixe au guide d’ondes et scellé à celui-ci,

9) sensiblement transparent par rapport au rayonnement émis,

10) qui englobe la surface d’émission dans celui-ci et

11) qui définit une interface guide d’ondes-gaz qui réfracte un rayonnement émis latéralement par rapport à l’axe allongé du guide d’ondes sur la paroi de vaisseau enveloppante

12) dans lequel l’étalement du faisceau annulaire est défini par un angle situé dans la plage d’environ 30° à environ 40° et/ou

13) dans lequel le centre approximatif du faisceau est de préférence orienté à un angle situé dans la plage d’environ 700 à environ 900 par rapport à l’axe allongé du guide d’ondes.

Les parties s’accordent à dire que la caractéristique 13 est optionnelle (page 15 des conclusions de la société Biolitec et page 35 des conclusions de la société LSO), de sorte qu’elle ne sera pas prise en compte dans l’analyse de la nouveauté.

L’article “modified fiber tips for light application in hollow organs”(“pointes de fibres modifiées pour application de lumière dans des organes creux”, ci-après “D9” – pièces LSO n°24.1 et 24.2) a été publié en 1990, soit avant les dates de priorité du brevet litigieux.

Sont présentées dans cet article quatre applications techniques de traitements assistés par laser dans les organes creux. La deuxième application technique (partie 2.2 de D9) divulgue un dispositif constitué d’un guide d’onde pour un traitement par laser permettant la “coagulation complète et circonférentielle des fistules oesophago-trachéales du nouveau-né” (“circumrefentially complete coagulation of esophagotracheal fistulae of the newborn”).

La personne du métier comprend que ce dispositif est indiqué pour le traitement endoluminal d’insuffisances veineuses, qui vise, selon la description des utilisations exemplaires du brevet, la “fermeture”, “l’occlusion” ou “l’obstruction” de la veine insuffisante (paragraphes [0012], [29] à [31] du brevet), peu importe que cette utilisation ne soit pas expressément indiquée dans D9. En effet, D9 enseigne que le dispositif divulgué dans sa partie 2.2, permet la coagulation sans perforation de l’oesophage du rat qui est un conduit cylindrique creux de 1,5 mm de diamètre, comparable au diamètre d’une veine, pour traiter la fistule oesophago-trachéale, consistant à fermer cette communication anormale entre la trachée et l’oesophage. Les affirmations de la société Biolitec, selon lesquelles le dipositif divulgué par D9 nécessiterait une adaptation pour être appliqué au traitement des insuffisances veineuses ne sont nullement étayées et donc inopérantes, et ce d’autant plus que D9 précise que les diamètres extérieurs de la fibre et du capuchon varient entre 500 μm et 2mm, ce qui correspond aux diamètres visés dans les modes de réalisation préférés du brevet : ainsi, selon le paragraphe [59] de la description, “dans les modes de réalisation actuellement préférés, “les fibres définissent un diamètre extérieur de l’ordre de 1235 μm à 1365 μm, les capuchons définissent un diamètre extérieur de l’ordre de 1 800 μm à 2 000 μm”. De plus, le paragraphe [43] du brevet précise que “les caractéristiques d’émission peuvent être ajustées pour faire varier la longueur de la zone annulaire du vaisseau sanguin ou d’autres structures anatomiques vreuses traitées”, ce qui conforte la possibilité d’utiliser sans adaptation un dispositif de traitement d’organe creux au traitement des veines.

L’application technique de la partie 2.2 de D9, est donc relative à une sonde constituée:- d’une fibre optique, divulgant ainsi la caractéristique 2 du brevet EP 119;

— cette sonde ayant pour objet le traitement par laser d’organes creux, la personne du métier comprend que l’extrémité proximale de la sonde doit être raccordée à une source laser et l’extrémité distale doit pouvoir être reçue dans la cavité corporelle, qui peut être une veine, de sorte que D9 divulgue également les caractéristiques 3 et 4 du brevet EP 119;

— le guide d’ondes divulgué par D9 comporte une extrémité distale conique permettant une application de lumière radiale (radial light application), divulgant ainsi les caractéristiques 5 et 6 du brevet EP 119, la partie 2.2 de D9 mentionnant précisément une “ application de lumière radiale au moyen de têtes de fibres coniques”;

— cette extrémité distale est pourvue d’un capuchon protecteur (fiber with a conical distal end and a protecting fused sillica tube) collé à la fibre et englobant la surface d’émission, tel qu’illustré sur la figure 3 de D9, divulgant ainsi les caractéristiques 7, 8 et 10 du brevet EP 119 ;

— le capuchon couvrant la fibre est selon la figure 3 de D9 un tube en silice qui est nécessairement sensiblement transparent pour permettre la diffusion du faisceau lumineux, comme le revendique la caractéristique 9 du brevet EP 119;

— la figure 3 de D9 montre la présence d’air entre la surface d’émission de la fibre et le capuchon la couvrant, divulgant ainsi la caractéristique 11 du brevet EP 119; l’affirmation de la société Biolitec, selon laquelle D9 divulguerait une émission conique immergée de liquide et non de gaz est erronée au regard de cette figure;

— la figure 4 de D9 relative à la “répartition angulaire de la lumière d’une extrémité conique de fibre” (“angular light distribution of conical fiber tip”) divulgue une courbe gaussienne dont les données, bien que succinctes, suffisent à déduire que l’angle d’étalement du rayonnement annulaire se trouve dans la plage de “environ 30° à environ 40 °” comme revendiqué par le brevet en sa caractérisque 12. C’est ainsi à tort que la société Biolitec conteste la divulgation de cette caractéristique en prenant de manière inappropriée la figure 6 de D9 qui ne concerne pas un rayonnement radial mais axial et qui porte sur la répartition lumineuse dans la fibre et non au sortir de la fibre.

Par ailleurs, la société Biolitec soutient à tort que le dispositif divulgué par D9 présenterait un risque de surchauffe, au motif que le rayonnement serait concentré sur une surface de 1000J/cm, un tel enseignement ne ressortant pas de D9.

Il résulte du tout que la revendication 1 du brevet EP 119 se retrouve toute entière dans D9 avec les éléments qui la constituent dans la même forme, le même agencement, le même fonctionnement et le même résultat technique, de sorte que la revendication 1 apparaît dépourvue de nouveauté.

Il résulte de ce qui précède que la revendication 1 est nulle pour défaut de nouveauté.

c) Sur la nullité des revendications dépendantes 2, 3, 11, 12 et 13 du brevet EP 119

Moyen des parties

La société LSO fait valoir à titre principal que les revendications 2, 3, 11, 12 et 13 du brevet EP 119 étant dépendante de la revendication 1, elles sont nulles pour insuffisance de description et, à titre subsidiaire que:- les revendications 2 et 3 sont nulles pour défaut de nouveauté et d’activité inventive au regard des documents de l’art antérieur D3, D9, D11 (demande de brevet US 2005/0015123) et D12 (publication de « SIDE RADIATION OPTICAL FIBERS FOR MEDICAL APPLICATION » de Russo et al), pris isolément ou en combinaison;

— la revendication 11 est dépourvue d’activité inventive au regard de D6 (brevet WO2007/058891) qui divulgue une sonde médicale dont le guide d’onde est une fibre optique avec un capuchon fusionné à l’âme de la fibre;

— la revendication 12 est dépourvue de nouveauté et d’activité inventive au regard de D10 (demande brevet US 2005/0131400);

— la revendication 13 est dépourvue de nouveauté et d’activité inventive au regard de D10 et D11 et des attaques d’activité inventives précédentes.

La société Biolitec fait valoir que la revendication 1 du brevet EP 119 est valide, nouvelle et fait preuve d’activité inventive, de sorte que les revendications dépendantes 2,3,11,12 et 13 doivent être déclarées valides. Elle conteste plus particulièrement que D11 puisse être invoqué pour invalider la revendication 12 du brevet EP 119.

Réponse du tribunal

L’article L.614-12 du code de la propriété intellectuelle dispose que la nullité du brevet européen est prononcée en ce qui concerne la France par décision de justice pour l’un quelconque des motifs visés à l’article 138, paragraphe 1, de la Convention de Munich.

Aux termes de l’article 138 de la Convention de Munich du 5 octobre 1973 sur la délivrance de brevets européens, 1. Sous réserve des dispositions de l’article 139, le brevet européen ne peut être déclaré nul, avec effet pour un État contractant, que si : […] a) l’objet du brevet européen n’est pas brevetable aux termes des articles 52 à 57

b) le brevet européen n’expose pas l’invention de façon suffisamment claire et complète pour qu’un homme du métier puisse l’exécuter.

L’article 83 de même Convention énonce que l’invention doit être exposée dans la demande de brevet européen de façon suffisamment claire et complète pour qu’un homme du métier puisse l’exécuter.

L’article 52.1 de la même Convention énonce que « les brevets européens sont délivrés pour toute invention dans tous les domaines technologiques, à condition qu’elle soit nouvelle, qu’elle implique une activité inventive et qu’elle soit susceptible d’application industrielle ».

Selon l’article 54 « Nouveauté » de ladite Convention, « 1. Une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique. 2. L’état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet européen par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen. Une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique ».

Il résulte de ce texte, tel que l’interprètent les juridictions françaises, que pour être comprise dans l’état de la technique et être privée de nouveauté, l’invention doit s’y retrouver tout entière, dans une seule antériorité au caractère certain avec les éléments qui la constituent dans la même forme, le même agencement, le même fonctionnement et le même résultat technique (Cass. Com., 17 mai 2023, n°19-25.509).

De plus, en application de l’article 56 de la Convention de Munich, une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique.

Les éléments de l’art antérieur ne sont destructeurs d’activité inventive que si, pris isolément ou associés entre eux selon une combinaison raisonnablement accessible à la personne du métier, ils permettaient à l’évidence à cette dernière d’apporter au problème résolu par l’invention, la même solution que celle-ci.

Sur la nullité des revendications dépendantes pour insuffisance de description : le moyen principal de nullité des revendications dépendantes 2, 3, 11, 12 et 13 du brevet EP 119 fondé sur l’insuffisance de description, en conséquence de la nullité de la revendication 1, doit être écarté, la nullité de la revendication 1 sur ce fondement n’ayant pas été retenue.

Sur la nullité des revendications 2 et 3 pour défaut de nouveauté et d’activité inventive: les revendications 2 et 3 sont relatives à la forme de la surface d’émission de la fibre de nature à émettre un rayonnement radial. La société Biolitec explique (page 10 de ses conclusions), sans être contredite par la société LSO, que la forme conique de la surface d’émission (objet de la revendication 3) permet de faire diverger le faisceau de lumière et (page 72 de ses conclusions) que l’angle auquel il est fait référence dans la revendication 2 correspond à un angle entre l’axe du guide d’onde et une droite appartenant à la surface d’émission, la configuration de la revendication 2 étant selon elle présentée sur la figure 1b du brevet qui montre justement une fibre à embout conique. Il a été vu plus haut que D9 divulgue une fibre optique comportant une extrémité distale conique. Il en est de même de D3 (« probe for laser angioplasty radiating a corolla shaped beam » – traduit par “Sonde pour angioplastie laser irradiant un faisceau en forme de corolle” – pièces LSO n°8 et 8 bis), publié le 1er mars 1989, qui divulgue un dispositif de traitement par angioplastie laser se composant d’une fibre optique avec un embout conique permettant l’émission latérale d’un faisceau en forme de corolle (« corolla shaped beam ») visant à remédier au risque de perforations des vaisseaux. Il en résulte que D3 et D9 sont chacun destructeurs de nouveauté des revendications 2 et 3 du brevet litigieux.

Sur la nullité de la revendication 11 pour défaut d’activité inventive: la revendication 11 vise la fusion du capuchon à l’âme de la fibre. La personne du métier sait par les enseignements de D3 et D9 que la fibre peut être encapsulée de manière fixe, le capuchon couvrant l’extrémité distale de la fibre pouvant être fixé par un “adhésif” selon D9. Le document de l’art antérieur D6 (brevet WO2007/058891 publié le 24 mai 2007, pièce LSO n°14), divulgue de plus un dispositif composé d’une fibre optique laser destinée à des traitements médicaux par laser (“optical fiber treatment system for high power laser transmission to a area of medical treatment”) comportant en son extrémité distale un tube capillaire qui y est fusionné (figure 3). Ainsi la revendication 11 découle de manière évidente de la combinaison de ces documents de l’art antérieur pour la personne du métier et ne témoigne d’aucune activité inventive.

Sur la nullité de la revendication 12 pour défaut de nouveauté et défaut d’activité inventive: la revendication 12 est relative aux longueurs et à la puissance du rayonnement laser. La demande brevet US 2005/0131400 publiée le 16 janvier 2005 (“D10”, pièces LSO n° 34-1 et 34-2) divulgue un procédé et un dispositif assistés par laser pour le traitement des varices et enseigne l’utilisation dans la technique antérieure de lasers émettant des longueurs d’onde de 500 à 1064 nm ainsi que des tentatives à 810, 940, 980 et 1064 nm (paragraphe 16) ainsi que le recours à des niveaux de puissance entre environ 10 et environ 20 watts (paragraphe 006). De plus, la demande de brevet US 2005/0015123 publiée le 20 janvier 2005 (“D11” – pièces LSO n° 53-1 à 53-3) divulgue un dispositif de traitement endovasculaire des vaisseaux sanguins à l’aide d’un faisceau lumineux et enseigne (paragraphe 14) que dans certains modes de réalisation, le faisceau lumineux a une longueur d’onde comprise entre environ 1160 nm et environ 2600 nm et dans d’autres modes de réalisation, la longueur d’onde du faisceau lumineux est comprise entre environ 1300 nm et environ 1560 nm; dans un mode de réalisation détaillé, le faisceau lumineux a une longueur d’onde d’environ 1450 nm; dans un autre mode de réalisation détaillé, le faisceau lumineux a une longueur d’onde d’environ 2100 nm. D11 enseigne également l’utilisation d’une puissance du faisceau lumineux comprise entre environ 0,5 W et environ 5 W (paragraphe 14 et revendication 16). Les caractéristiques de la revendication 12 découlent ainsi de manière évidente des enseignements de l’état de la technique pour la personne du métier et la revendication 12 ne témoigne donc pas d’une activité inventive.

Sur la nullité de la revendication 13 pour défaut de nouveauté et défaut d’activité inventive: la revendication 13 revendique une puissance de la source laser inférieure à 5 W. Comme vu ci-dessus, D11 divulgue (paragraphe 14 et revendication 16) la mise en oeuvre d’une source de rayonnement de faible puissance pouvant être inférieure à 5W quelle que soit la longueur d’ondes utilisée. La caractéristique ajoutée par la revendication 13 se déduit ainsi de manière évidente de l’art antérieur pour la personne du métier.

Il résulte de ce qui précède que les revendications dépendantes 2 et 3 sont nulles pour défaut de nouveauté et les revendications dépendantes 11, 12 et 13 du brevet EP 119 sont nulles pour défaut d’activité inventive.

II – Sur l’action en contrefaçon

Il s’évince de la nullité des revendications opposées 1, 2, 3, 11, 12 et 13 du brevet EP119 l’absence de contrefaçon.

S’agissant de la revendication 14 visée dans le dispositif des conclusions de la société Biolitec, le tribunal constate que la contrefaçon de cette revendication n’est pas débattue dans la partie discussion et que la société Biolitec rappelle que par l’effet de la limitation, intervenue postérieurement à son assignation, la revendication 14 est devenue la revendication 13, ce dont il s’infère que la référence à cette revendication dans son dispositif est nécessairement une erreur matérielle.

III – Sur les demandes accessoires

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.

L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.

En l’occurrence, la société Biolitec, partie perdante, sera condamnée aux dépens et l’équité commande de la condamner à payer à la société LSO 30 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En outre, il n’y a pas lieu de déroger aux dispositions de l’article 514 du code de procédure civile selon lesquelles les décisions de première instance sont de droits exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

Déclare nulles les revendications 1, 2, 3, 11, 12 et 13 de la partie française du brevet européen EP 2 620 119 limité ;

Dit que la présente décision, une fois devenue définitive, sera transmise à l’Institut National de la Propriété Industrielle aux fins d’inscription au registre national des brevets à l’initiative de la parie la plus diligente ;

Déboute la société Biolitec Pharma Marketing Ltd de toutes ses demandes ;

Condamne la société Biolitec Pharma Marketing Ltd aux dépens ;

Condamne la société Biolitec à payer à la société LSO Médical 30 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Fait et jugé à Paris le 31 janvier 2024

La greffièreLe président

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Tribunal Judiciaire de Paris, 3e chambre 3e section, 31 janvier 2024, n° 17/13010