Tribunal paritaire des baux ruraux de Hazebrouck, 5 juillet 2019, n° 51/17/10 , 51/18/01

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Sur la décision

Référence :
T. par. baux rur. Hazebrouck, 5 juill. 2019, n° 51/17/10 , 51/18/01
Numéro(s) : 51/17/10 , 51/18/01

Sur les parties

Texte intégral

sába

MINUTE :

N° RG 51/17/10

N° RG 51/18/01

TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX

D’HAZEBROUCK

Jugement prononcé publiquement le 05 juillet 2019, par Madame LESAY Présidente du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux d’HAZEBROUCK siégeant au Palais de Justice d’HAZEBROUCK
Monsieur Jean-Michel STAELEN assesseur bailleur titulaire,
Monsieur Jean-Gabriel DUMORTIER assesseur bailleur titulaire,
Monsieur J K assesseur preneur titulaire, Monsieur L M assesseur preneur titulaire Madame N O greffière.

Après avoir délibéré conformément à la loi, le jugement suivant a été rendu par mise à disposition au greffe, les parties ayant été avisées à l’issue des débats à l’audience du 14 juin 2019, de la date du délibéré dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile.

Toutes les formalités imposées par la loi étant accomplies, les membres assesseurs n’ayant fait l’objet d’aucune récusation.

ENTRE:

Demandeur :

Monsieur P W-AA né le […] à staples demeurant […], représenté par Me VERAGUE Jean-Philippe, avocat au barreau de ARRAS.

Monsieur P D, X, Y né à Z le […] demeurant […] représenté par Me VERAGUE Jean-Philippe, avocat au barreau de ARRAS.

- d’une part -

ET:

Défenderesse :

Madame C B-Q épouse A née le […] à HAZEBROUCK, demeurant […], représentée par Me BUE, avocat au barreau de LILLE

- d’autre part -

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EXPOSE DU LITIGE
Mme B-Q A née C est propriétaire de parcelles situées à Staple, ZC 38, d’une contenance de 41 ares 80 centiares, […], d’une contenance de 20 ares, et […], d’une contenance de 51 ares et […], et à […], d’une contenance d'1 hectare 22 ares et […], […], d’une contenance de 32 ares et […], d’une contenance de 9 ha, 92 ares et 90 centiares, pour les avoir reçues en donation-partage de ses parents, par acte notarié en date du 5 février 2001.

Ces parcelles ont été données à bail rural à M. D P, et à son épouse Mme S E, par acte notarié en date du 6 janvier 1994, ayant pris effet le 11 novembre 1992 et pour une durée de neuf ans.

Elles ont été mises à la disposition du GAEC P, dont sont associés MM. D et W-AA P.

Mme S P née E est décédée le […], laissant pour héritiers son conjoint et ses quatre enfants, F, G, H et W-AA P.

Par acte extra judiciaire en date des 7 et 22 novembre 2017, Mme B-Q A née C a fait signifier à M. D P et à ses quatre enfants un congé pour reprise, au profit de sa fille Mme T U née A, sur le fondement de l’article L411-58 du code rural et de la pêche maritime.

Par requêtes enregistrées au greffe le 10 novembre 2017, puis le 11 janvier 2018, M. W-AA P, puis ce dernier et son père M. D P, ont sollicité la convocation de Mme B-Q A née C à comparaître devant ce tribunal paritaire des baux ruraux. (affaires enrôlées sous les numéros 51 17-10 et 51 18-1)

La tentative de conciliation du 23 mars 2018 n’a pas permis de conclure un accord.

Après plusieurs remises contradictoire à la demande des parties, l’affaire a enfin été plaidée le 14 juin 2019.

Lors de cette audience, MM D et W-AA P soutiennent d’abord être recevables, en ce qu’ils sont les deux seuls co preneurs du bail, et seuls associés du GAEC.

Ils invoquent ensuite la nullité du congé, tant sur la forme que sur le fond.

Sur la forme, ils invoquent les dispositions de l’article L. 411-47 du code rural, en faisant observer que le congé comporte de nombreuses anomalies de nature à les induire en erreur.

Ils soutiennent que la bénéficiaire de la reprise est actuellement domiciliée à Lumbres, à plus de 30 km des terres en cause, de sorte qu’elle se trouve nécessairement soumise au régime de l’autorisation d’exploiter.

Ils affirment que la prétendue adresse à laquelle elle énonce se domicilier lors de la reprise se situe elle aussi à plus de 20 km des terres.

Ils estiment que l’ambiguïté entretenue sur le domicile au terme du congé encourt nécessairement l’annulation.

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Ils font en outre valoir que Mme B-Q A née C, par le congé en cause, déclare que sa fille, bénéficiaire de la reprise, est sans emploi alors qu’à l’occasion de précédents contentieux, il avait été fait état de ce qu’elle était pluriactive. Ils font remarquer que l’intéressée ne produit pas sa déclaration des revenus de 2018, et que cette seconde mention formelle, mensongère, est aussi un motif d’annulation.

Sur le fond, ils rappellent que le tribunal paritaire n’est pas tenu par la position de la préfecture pour juger de la soumission ou non du bénéficiaire d’un congé au régime de l’autorisation administrative d’exploiter. Ils soutiennent en effet que résidant en toute hypothèse à plus de 20 km des terres, la bénéficiaire de la reprise est bien tenue d’obtenir une autorisation administrative.

Ils ajoutent qu’à défaut de justifier de ses revenus extra agricoles, cette dernière ne justifie pas d’un revenu inférieur à 3120 x le SMIC horaire brut.

Ils soutiennent aussi qu’elle ne justifie de rien s’agissant de la détention de matériel ou des moyens financiers permettant de l’acquérir alors qu’elle prétend exploiter un élevage de poules pondeuses avec certification biologique, cependant que les parcelles objet de la reprise sont soit des prairies soit des labours. Ils font remarquer qu’il n’est justifié d’aucun bâtiment ni permis de construire ni des moyens financiers permettant d’édifier un poulailler.

Ils rappellent enfin que le lieu de résidence effectif de l’intéressée est incompatible avec l’exploitation d’un élevage.

Ils concluent en conséquence à la nullité du congé signifié le 7 novembre 2017, et sollicitent la condamnation de Mme B-Q A née C à leur payer la somme de 3000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme B-Q A née C invoque la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour agir de M. W-AA P dont la qualité de titulaire du bail est toujours contestée.

Au principal, elle fait valoir que sa fille, bénéficiaire de la reprise, répond aux exigences pour exploiter posées par l’article L 411-59 du code rural et de la pêche maritime, et précise que cette dernière va déménager pour s’installer dans un corps de ferme, où sera installé le poulailler.

Elle soutient que Mme T V née A bénéficie du matériel nécessaire et du concours de sa banque.

Elle demande que le congé soit validé, à l’échéance du 10 novembre 2019, et sollicite la condamnation de M. W-AA P à lui payer la somme de 1500 €, au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la jonction.

Il existe entre les deux instances susvisés un lien tel qu’il est de l’intérêt d’une bonne administration de la justice d’en ordonner la jonction.

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Sur recevabilité.

Mme B-Q A née C fonde l’irrecevabilité qu’elle invoque sur le fait que la qualité de co-preneur de M. W-AA P n’est pas encore définitivement tranchée, puisque la Cour de cassation a été saisie d’un recours contre l’arrêt rendu le 7 juin 2018 par la cour d’appel de Douai, qui a confirmé le jugement rendu par ce tribunal paritaire des baux ruraux, par lequel le droit au bail dont était co-titulaire Mme S E avait été transmis à son fils W P.

Toutefois, il n’existe à la date de ce jugement aucune décision définitive par laquelle il aurait été décidé que M. W-AA P ne serait pas le co- preneur du bail en cause.

En outre il y a lieu de rappeler que M. D P, auquel le bail avait été consenti, a lui aussi saisi ce tribunal, de sorte que l’action conjointe des deux seuls exploitants est recevable.

Sur le congé.

L’article L 411-58 du code rural et de la pêche maritime énonce que le bailleur a le droit de refuser le renouvellement du bail s’il veut reprendre le bien loué pour lui-même ou au profit de son conjoint, du partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité, ou d’un descendant majeur ou mineur émancipé.

Il n’est en l’espèce pas contestée que la bénéficiaire de la reprise est la fille de la propriétaire.

L’article L 411-47 du même code prévoit qu’à peine de nullité, le congé doit notamment indiquer, en cas de congé pour reprise, les nom, prénom, âge, domicile et profession du bénéficiaire devant exploiter, ainsi que l’habitation que devra occuper après la reprise le bénéficiaire du bien repris.

En l’espèce, le congé mentionne que Mme T V, qui réside actuellement à Lumbres, aura pour siège d’exploitation à l’échéance du bail renouvelé un immeuble situé à Bambecques, […], lieu où elle entend résider.

Il n’existe donc pas d’ambiguïté quant aux deux adresses mentionnées, la seconde correspondant à l’immeuble qui sera celle du futur domicile de la bénéficiaire

Par sa pièce 9, la défenderesse justifie que sa fille majeure Mme T V née A, est propriétaire, avec son époux, de cet immeuble qui avait été donné en location, dans le cadre d’un contrat soumis aux dispositions de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, par acte sous-seing privé en date du 1er septembre 2016.

Il est aussi justifié qu’un congé pour reprise personnelle a été notifié aux locataires, daté du 11 octobre 2018, et destiné à prendre effet le 30 septembre 2019.

Les demandeurs ne démontrent pas que l’intention de la bénéficiaire de la reprise ne serait pas d’habiter dans cet immeuble, à côté duquel elle prévoit d’installer son poulailler.

Même si l’immeuble de Bambeccques n’est pas une ferme, mais bien un immeuble à usage d’habitation, l’étude de rentabilité à laquelle Mme T V née A a fait procéder met en évidence qu’elle prévoit d’affecter 15 000 € à l’achat du terrain sur lequel sera édifié le poulailler.

Aucune ambiguïté quant aux mentions du congé n’est ainsi démontrée de ce chef.

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Le congé mentionne aussi que Mme T V née A est sans emploi, et conjoint collaboratrice.

Aucune des mentions des précédentes décisions judiciaires ne mentionne qu’elle serait pluri active, et de surcroît, l’intéressée justifie être inscrites sur la liste des demandeurs d’emploi, depuis le 19 octobre 2017 (pièce 11) et ne percevoir aucun revenu (selon déclaration des revenus imposables du couple perçus en 2018, montrant que seul son époux perçoit à la fois des salaires ou assimilés et des revenus agricoles.)

Cette seconde mention n’est donc pas mensongère.

Quant aux dispositions relatives au contrôle des structures des exploitations agricoles, l’article L 331-2, 4° du code précité n’impose une autorisation préalable pour les biens dont la distance par rapport au siège de l’exploitation du demandeur est supérieure à un maximum fixé par le schéma directeur régional des exploitations agricoles, qu’en cas d’agrandissement ou de réunions d’exploitations, et non pas aux installations.

Dès lors, le fait que les parcelles en cause soient situées à plus de 20 km de Bambecque$ ne soumet pas Mme T V née A au contrôle des structures.

Elle entend utiliser lesdites parcelles pour y procéder à l’épandage des déjections produites par son élevage, et pour convertir les terres à usage de labour en agriculture biologique, destiné à nourrir, au moins pour partie, son élevage.

La distance entre ledit élevage et les terres en cause n’est pas excessive.

Quant à la possession du matériel ou aux moyens de mettre en œuvre le projet, si Mme T V née A ne justifie que d’être propriétaire d’un tracteur immatriculé pour la première fois en 1982, elle justifie toutefois aussi être « suivie » par sa banque le Crédit Mutuel Nord Europe dans le cadre de son projet d’installation, selon attestation en date du 22 février 2019, et elle a fait procéder, en décembre 2017, à une étude de rentabilité par Cocorette mettant en évidence que pour un investissement total de 317 000 € et des charges variables de 204 000

€, compte tenu d’un remboursement du poulailler à 2 % sur 12 ans, elle pourra dégager une marge nette de 26 666 € par an.

Ces éléments permettent de mettre en évidence la possibilité effective dans laquelle elle se trouve de financer son projet.

Par ailleurs, Mme T V née A justifie être titulaire d’un brevet professionnel option responsable d’exploitation agricole, obtenue en 2015

En conséquence, aucune cause de nullité n’affecte le congé en cause, qui sera donc validé.

Sur les dépens et l’indemnité procédurale.

MM D et W-AA P seront condamnés aux dépens de l’instance, en application de l’article 696 du code de procédure civile. Par suite, ils seront déboutés de leur demande d’indemnité de procédure.

L’équité commande toutefois de laisser à la charge de Mme B-Q A née C ses frais non compris dans les dépens.

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PAR CES MOTIFS

Le tribunal paritaire des baux ruraux d’Hazebrouck statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort, par jugement mis à disposition au greffe,

Ordonne la jonction des instances enrôlées sous les numéros 51 17-10 et 51 18-1,

Déclare MM D et W-AA P recevables,

Déboute MM D et W-AA P de l’ensemble de leurs demandes,

Déclare valable le congé qui leur a été délivré le 7 novembre 2017, avec effet au 10 novembre 2019,

Déboute Mme B-Q A née C de sa demande d’indemnité de procédure,

Condamne MM D et W-AA P aux dépens.

Et la minute du présent jugement a été signée par le juge d’instance et la greffière.

La-Corfasome. La greffière.

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Tribunal paritaire des baux ruraux de Hazebrouck, 5 juillet 2019, n° 51/17/10 , 51/18/01