Décision de la Commission des sanctions du 7 mai 2018 à l'égard de la société X et de M. D

  • Montagne·
  • Règlement·
  • Développement·
  • Information·
  • Introduction en bourse·
  • Chiffre d'affaires·
  • Objectif·
  • Instrument financier·
  • Communiqué de presse·
  • Périmètre

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
AMF, 7 mai 2018, n° SAN-2018-06
Numéro : SAN-2018-06
Identifiant AMF : SAN-2018-06

Sur les parties

Texte intégral

La Commission des sanctions

COMMISSION DES SANCTIONS Décision n° 5 du 7 mai 2018

Procédure n° 17-06

Décision n° 5

Personnes mises en cause :

M. D Né le […] Domicilié […] Ayant élu domicile au cabinet d’avocats Courtois Lebel, 34-36 Avenue de Friedland, 75008 Paris

MONTAGNE ET NEIGE DEVELOPPEMENT Société anonyme RCS Chambéry numéro 454 083 379 Dont le siège social est situé 74, voie Magellan, 73800 Sainte-Hélène-du-Lac Prise en la personne de son représentant légal Ayant élu domicile au cabinet d’avocats Courtois Lebel, 34-36 Avenue de Friedland, 75008 Paris

La 2ème section de la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (ci-après : « AMF ») :

Vu le règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché et notamment son considérant 40 et ses articles 7, 12, 15, 17, 23 et 30 ;

Vu le code monétaire et financier et notamment ses articles L. 621-14 et L. 621-15 et R. 621-38 à R. 621-40 ;

Vu le règlement général de l’AMF et notamment ses articles 223-1, 223-2, 621-1 et 632-1 ;

Après avoir entendu au cours de la séance publique du 4 avril 2018 :

— Mme Patricia Lazard-Kodyra, en son rapport ;

- Mme Virginie Adam, représentant le Collège de l’AMF ;

- M. Mayeul Tallon, représentant la directrice générale du Trésor, qui a indiqué ne pas avoir d’observations à formuler ;

- M. D, tant en son nom personnel qu’en sa qualité de représentant de la société Montagne et Neige Développement, dont il est le président-directeur général, assisté par ses conseils Me Béatrice Labboz et Me Eric Verrièle, avocats au sein du cabinet Courtois Lebel ;

M. D ayant eu la parole en dernier.

17 place de la Bourse – 75082 Paris cedex 2 – tél. 01 53 45 60 00 – fax 01 53 45 63 20 www.amf-france.org

—  2 –

I. FAITS

Créée en 2004, Montagne et Neige Développement est la société mère d’un groupe spécialisé dans l’aménagement de domaines skiables et de sites de loisirs, qui emploie 350 salariés.

M. D est le fondateur et le président-directeur général de Montagne et Neige Développement. Il préside et contrôle en outre la société Montagne & Vallée, qui est l’actionnaire principal de Montagne et Neige Développement.

En juil et 2013, Montagne et Neige Développement a acquis le groupe austro-suédois Snownet sous la condition suspensive de la réalisation d’une levée de fonds d’un montant minimum de 10,3 mil ions d’euros au plus tard le 31 octobre 2013. C’est dans ce contexte que la société a lancé son introduction en bourse.

Le 1er octobre 2013, l’AMF a apposé son visa sur le prospectus d’introduction en bourse, composé, d’une part, du document de base enregistré le 16 septembre 2013 (ci-après le « Document de base ») et, d’autre part, d’une note d’opération – incluant le résumé du prospectus – publiée le 2 octobre 2013 (ci-après la « Note d’opération »).

L’opération a consisté en l’admission aux négociations sur Euronext Paris (compartiment C), d’une part, des actions existantes de la société, d’autre part, d’actions nouvelles émises par augmentation de capital et souscrites dans le cadre d’une offre globale comportant une offre à prix ouvert auprès du public et un placement global auprès d’investisseurs institutionnels (ci-après l’ « Offre »).

L’Offre, ouverte le 2 octobre 2013 et clôturée le 16 octobre 2013, a rencontré un grand succès et permis à Montagne et Neige Développement de lever 21,16 mil ions d’euros.

Le 29 janvier 2014, à l’occasion de la communication de ses résultats semestriels, Montagne et Neige Développement a annoncé que le groupe anticipait un chiffre d’affaires pro forma de 65 millions d’euros au titre de l’exercice 2013-2014, en lieu et place de l’objectif de 75 mil ions d’euros communiqué dans le prospectus d’introduction en bourse.

Le 7 juil et 2014, elle a annoncé avoir procédé à une nouvelle augmentation de capital de 2,5 mil ions d’euros par placement privé auprès d’investisseurs institutionnels, à un prix par action de 4,84 euros.

Le 23 juil et 2014, elle a annoncé avoir conclu une ligne de financement en fonds propre (equity line) avec Kepler Cheuvreux, portant sur un maximum de 2 500 000 actions susceptibles d’être émises pendant 36 mois, avec une décote de 5 % par rapport au cours pondéré moyen de l’action au moment de l’émission.

Le 9 octobre 2014, Montagne et Neige Développement a informé le marché, dans le cadre de la publication de son document de référence, que les objectifs de chiffre d’affaires de 150 mil ions d’euros et de taux de rentabilité opérationnelle supérieur à 10 % au titre de l’exercice 2015-2016, communiqués dans son prospectus d’introduction en bourse, étaient également caducs.

Le cours de l’action Montagne et Neige Développement, qui avait dépassé le seuil de 8 euros en janvier 2014, a chuté significativement à compter de cette date jusqu’à atteindre 1,56 euro le 31 décembre 2014.

—  3 –

II. PROCÉDURE

Le 16 décembre 2014, le secrétaire général de l’AMF a décidé l’ouverture d’une enquête portant sur « l’information financière de la société MONTAGNE ET NEIGE DEVELOPPEMENT (FR0011584549) à compter du 16 septembre 2013 ».

Le 18 juil et 2016, la Direction des enquêtes et des contrôles de l’AMF a adressé à Montagne et Neige Développement et à M. D des lettres les informant de manière circonstanciée des faits éventuellement susceptibles de leur être reprochés au regard des constats des enquêteurs et de la faculté de présenter des observations dans le délai d’un mois.

Montagne et Neige Développement et M. D ont présenté des observations en réponse le 2 août 2016.

L’enquête a donné lieu à un rapport daté du 10 novembre 2016.

La Commission spécialisée n° 3 du Collège de l’AMF a décidé, le 24 novembre 2016, de notifier des griefs à Montagne et Neige Développement et à M. D.

Les notifications de griefs ont été adressées à Montagne et Neige Développement et à M. D par lettres du 2 mars 2017.

Il est reproché à Montagne et Neige Développement :

− de ne pas avoir précisé, dans la Note d’opération, qu’une partie du produit de l’Offre serait allouée au règlement des dettes fournisseurs échues, pour un montant évalué en décembre 2013 à 7 millions d’euros, en méconnaissance de l’article 632-1 du règlement général de l’AMF ;

− de ne pas avoir communiqué au public, dès que possible à compter du 6 décembre 2013, l’information privilégiée selon laquelle le groupe Montagne et Neige Développement n’atteindrait pas son objectif de chiffre d’affaires pro forma de 75 mil ions d’euros au 31 mars 2014, en méconnaissance de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF ;

− de ne pas avoir précisé, dans le communiqué de presse du 29 janvier 2014, la nature du nouveau périmètre fondant la prévision de chiffre d’affaires de 65 mil ions d’euros au

31 mars 2014, alors qu’il dif érait du périmètre sur lequel était basé l’objectif de chiffre d’affaires de 75 mil ions d’euros annoncé dans le prospectus, en méconnaissance des articles 223-1 et 632-1 du règlement général de l’AMF ;

− de ne pas avoir communiqué au public, dès que possible à compter du 3 avril 2014, l’information privilégiée selon laquelle le groupe Montagne et Neige Développement n’atteindrait pas l’objectif de chiffre d’affaires pro forma de 150 millions d’euros et de taux de rentabilité opérationnelle supérieur à 10 % au 31 mars 2016, en méconnaissance de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF.

Il est reproché à M. D:

− les quatre manquements susvisés, en sa qualité de président-directeur général de Montagne et Neige Développement à l’époque des faits ;

− de ne pas avoir remis aux enquêteurs de nombreux courriels relatifs à l’objet de l’enquête et demandés par ces derniers à l’occasion de leur visite dans les locaux de Montagne et Neige Développement le 25 février 2015, en méconnaissance du II f) de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier.

—  4 –

Une copie des notifications de griefs a été transmise le 2 mars 2017 à la présidente de la Commission des sanctions, conformément à l’article R. 621-38 du code monétaire et financier.

Par décision du 16 mars 2017, la présidente de la Commission des sanctions a désigné Mme Patricia Lazard-Kodyra en qualité de rapporteure.

Par lettres du 24 mars 2017, Montagne et Neige Développement et M. D ont été informés qu’ils disposaient d’un délai d’un mois, en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, pour demander la récusation de la rapporteure dans les conditions prévues par les articles

R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code.

Le 10 mai 2017, Montagne et Neige Développement et M. D ont présenté des observations en réponse aux notifications de griefs.

Montagne et Neige Développement, représentée par M. D, et ce dernier, à titre personnel, ont été entendus par la rapporteure le 7 décembre 2017 et, à la suite de leur audition, ont communiqué des documents complémentaires le 15 janvier 2018.

La rapporteure a déposé son rapport le 28 février 2018.

Par lettres du 28 février 2018 auxquelles était joint le rapport de la rapporteure, Montagne et Neige Développement et M. D ont été convoqués à la séance de la Commission des sanctions du 4 avril 2018 et informés qu’ils disposaient d’un délai de quinze jours pour présenter des observations en réponse à ce rapport, conformément au III de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier.

Par let res du 28 février 2018, Montagne et Neige Développement et M. D ont été informés de la composition de la formation de la Commission des sanctions appelée à délibérer lors de la séance du 4 avril 2018 ainsi que du délai de quinze jours dont il disposait, en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, pour demander, conformément aux articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code, la récusation d’un ou de plusieurs de ses membres.

Le 15 mars 2018, Montagne et Neige Développement et M. D ont présenté des observations en réponse au rapport de la rapporteure, auxquelles étaient annexées de nouvelles pièces.

III. MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Grief relatif à la qualité de l’information diffusée dans la Note d’Opération sur les raisons de l’Offre et l’utilisation prévue des fonds

Il est fait grief aux mis en cause de ne pas avoir précisé dans la Note d’Opération, notamment dans sa section 3.4 relative aux « raisons motivant l’offre et [à l’] utilisation prévue du produit de celle-ci », qu’une partie des fonds levés dans le cadre de l’Offre serait utilisée pour régler des dettes fournisseurs exigibles, alors que cette affectation était prévue à la date de publication de la Note d’Opération, en méconnaissance de l’article 632-1 du règlement général de l’AMF.

Montagne et Neige Développement et M. D font valoir que les financements existants ou en cours de renouvellement étaient suffisants pour faire face aux engagements courants de la société et que l’introduction en bourse n’a jamais été conçue comme un moyen de régler les dettes fournisseurs. Ils ajoutent que M. D, dans un contexte de trésorerie structurel ement tendue en fin d’année en raison de la nature cyclique de l’activité, a « estimé plus logique d’utiliser en premier les sommes devant provenir de l’augmentation de capital avant les autres ressources envisageables ». Ils soutiennent également que M. D, s’il avait su que l’ordre suivant lequel la société a utilisé ses ressources était susceptible de poser une difficulté, aurait effectué un apport en compte courant, accéléré la mise en place des lignes de crédit ou même dif éré l’introduction en bourse pour éviter toute problématique liée au règlement des dettes fournisseurs. Ils arguent qu’en tout état de cause, la chronologie des sorties de trésorerie n’était pas de

—  5 –

nature à influer sur le comportement des investisseurs puisque les montants correspondant aux fonds levés ont bien été consacrés aux projets annoncés dans la Note d’opération. Ils relèvent enfin que le Document de base est très clair sur les risques de liquidité.

1.1. Textes applicables

Les faits reprochés, qui se sont déroulés de septembre à octobre 2013, seront examinés à la lumière des textes alors applicables, sous réserve de l’application rétroactive d’éventuelles dispositions plus douces entrées en vigueur postérieurement.

Aux termes de l’article 632-1, alinéa 1, du règlement général de l’AMF, dans sa version issue de l’arrêté du 2 avril 2009, non modifié sur ces points dans un sens moins sévère jusqu’à son abrogation par l’arrêté du 14 septembre 2016 : « Toute personne doit s’abstenir de communiquer, ou de diffuser sciemment, des informations, quel que soit le support utilisé, qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications inexactes, imprécises ou trompeuses sur des instruments financiers, y compris en répandant des rumeurs ou en diffusant des informations inexactes ou trompeuses, alors que cette personne savait ou aurait dû savoir que les informations étaient inexactes ou trompeuses ».

Postérieurement aux faits, le 3 juil et 2016, est entré en application le règlement (UE) n° 596 / 2014 du 16 avril 2014 sur les abus de marché (ci-après le « règlement MAR »), dont l’article 12.1 c) prévoit un cas de manipulation de marché par diffusion d’informations, ainsi formulé : « Aux fins du présent règlement, la notion de « manipulation de marché » couvre les activités suivantes : / […] ; / c) diffuser des informations, que ce soit par l’intermédiaire des médias, dont l’internet, ou par tout autre moyen, qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses en ce qui concerne l’offre, la demande ou le cours d’un instrument financier, […], ou fixent ou sont susceptibles de fixer à un niveau anormal ou artificiel le cours d’un ou de plusieurs instruments financiers, […] , y compris le fait de répandre des rumeurs, alors que la personne ayant procédé à une tel e diffusion savait ou aurait dû savoir que ces informations étaient fausses ou trompeuses ».

Par ail eurs, l’article 15 du même règlement dispose qu’« Une personne ne doit pas effectuer des manipulations de marché ni tenter d’effectuer des manipulations de marché. ».

Les définitions de la manipulation de cours prévue par l’article 12.1 c) du règlement MAR et du manquement de diffusion d’une fausse information prévu par 632-1 du règlement général de l’AMF sont rédigées en des termes très proches, sous les réserves examinées ci-après.

En premier lieu, le règlement MAR se réfère à la diffusion d’informations, tandis que l’article 632-1 du règlement général de l’AMF opère une distinction entre le fait de « communiquer » et celui de « diffuser sciemment » une information. Toutefois, l’article 1.2 c) de la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 sur les opérations d’initiés et les manipulations de marché, transposé à l’article 632-1 du règlement général de l’AMF, ne visait que « le fait de diffuser des informations ». En outre, le considérant 47 du règlement MAR emploie indifféremment les termes « diffusion » et « communiquer ». Dans ces conditions, il apparaît que la distinction entre « diffusion » et « communication » est dépourvue de portée et que l’article 12.1 c) du règlement MAR n’est pas, sur ce point, moins sévère.

En deuxième lieu, les articles 12.1 c) et 15 du règlement MAR ne répriment pas la diffusion d’une information seulement imprécise, alors que l’article 632-1 du règlement général de l’AMF vise les informations « qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications inexactes, imprécises ou trompeuses ». Toutefois, l’article 632-1 du règlement général de l’AMF n’est susceptible de recevoir application que s’il est démontré que la personne ayant communiqué les informations en cause « savait ou aurait dû savoir que les informations étaient inexactes ou trompeuses », de sorte qu’une information seulement imprécise ne peut remplir cette condition. Dès lors, l’article 12.1 c) du règlement MAR n’apparaît pas, sur ce point, moins sévère.

—  6 –

En troisième lieu, l’article 632-1 du règlement général de l’AMF s’applique aux informations donnant des indications inexactes, imprécises ou trompeuses « sur des instruments financiers », alors que le règlement MAR vise les « informations […] qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses en ce qui concerne l’offre, la demande ou le cours d’un instrument financier […] ou fixent ou sont susceptibles de fixer à un niveau anormal ou artificiel le cours d’un ou de plusieurs instruments financiers », ce qui constitue dans les deux cas une condition supplémentaire par rapport aux dispositions de l’article 632-1 du règlement général de l’AMF. Le règlement MAR est donc moins sévère que l’article 632-1 du règlement général sur ce point.

En conséquence, le manquement reproché à Montagne et Neige Développement sera examiné au regard des dispositions de l’article 632-1 du règlement général de l’AMF et de l’élément constitutif supplémentaire précité prévu par l’article 12.1 c) du règlement MAR.

1.2 Appréciation du manquement

A) Le caractère inexact ou trompeur de l’information

Pour apprécier le caractère inexact ou trompeur de l’information, il convient de rechercher si, à la date de publication de la Note d’opération, soit le 2 octobre 2013, il était prévu au sein de Montagne et Neige Développement qu’une partie des fonds levés dans le cadre de l’Offre à venir serait affectée au règlement des arriérés fournisseurs.

Dans un courriel du 10 septembre 2013 adressé aux cadres du groupe, M. Da indiqué que la « situation de trésorerie reste effectivement difficile » jusqu’à la réalisation de l’introduction en bourse et a demandé en conséquence de « décaler au 10 octobre un maximum de règlements fournisseurs ».

Interrogé sur ce courriel lors de son audition par les enquêteurs, M. A, directeur administratif et financier de Montagne et Neige Développement à l’époque des faits, a déclaré qu’« à cette date-là [le 10 septembre 2013], les paiements fournisseurs n’étaient pas envisageables » et que « l’instruction est donnée de décaler les paiements du 10 octobre, la levée de fonds permettant de solutionner ce problème et retrouver une situation normale ».

Dans un courriel du 11 septembre 2013 adressé à M. D, M. A a relevé l’incapacité de Montagne et Neige Développement à faire face à ses échéances.

Le 23 septembre 2013, M. A a transmis à M. D des prévisions de trésorerie fondées sur les financements existants qui confirment que Montagne et Neige Développement ne pouvait faire face à ses besoins de trésorerie sans utiliser des fonds issus de l’Offre (graphique intitulé « Prévisionnel de trésorerie à 12 mois sans Snownet »).

Une autre prévision du même jour, décrite par M. A comme « la plus réaliste à ce jour », met en exergue un besoin de trésorerie entre octobre 2013 et janvier 2014 et ce, même en prenant en compte, outre les financements existants, les financements bancaires complémentaires en cours de renégociation et non encore validés à cette date.

Le 25 septembre 2013, M. B, trésorier de la société, a indiqué par courriel au directeur d’une filiale relancé par un fournisseur être contraint « d’arbitrer au maximum dans les paiements [des fournisseurs] ».

Les prévisions internes et le courriel précités contredisent les allégations des mis en cause selon lesquelles les ressources disponibles étaient suffisantes pour traverser les « tensions passagères de trésorerie » et, le cas échéant, payer les dettes fournisseurs sans la levée de fonds.

Il résulte de ce qui précède qu’à la date de publication de la Note d’opération, soit le 2 octobre 2013, il était considéré au sein de Montagne et Neige Développement que seuls les fonds issus de l’Offre étaient susceptibles de « purger la situation de retards de paiements fournisseurs », comme l’a expliqué

—  7 –

M. A lors de son audition devant les enquêteurs.

En conséquence, il était prévu à cette date qu’une partie des dettes fournisseurs échues et non payées de Montagne et Neige Développement serait réglée avec les fonds issus de l’Offre.

Cette appréciation est au surplus confirmée par les documents postérieurs à la publication de la Note d’opération.

Le 14 octobre 2013, M. Da ainsi demandé à M. B de préparer les paiements « à tous les fournisseurs validés en retard sur toutes les structures » dès l’arrivée des fonds issus de l’Offre prévue le 22 octobre 2013.

Le 13 décembre 2013, M. B a transmis à M. D une situation de trésorerie faisant apparaître que 7,051 mil ions d’euros sur les 21,2 mil ions levés lors de l’Offre avaient été affectés au règlement des « retards fournisseurs ».

C’est vainement que les mis en cause contestent, sans apporter aucun élément susceptible d’étayer leur critique, le chiffre de 7,051 millions d’euros qui a été réitéré le 28 mars 2014 et n’a soulevé, à l’époque, aucune objection de la part de M. D.

L’importance de la somme consacrée au paiement du passif fournisseurs confirme que seule la perception des fonds issus de l’Offre a permis à Montagne et Neige Développement de régler les dettes fournisseurs.

Le moyen soulevé par les mis en cause selon lequel il était « plus logique d’utiliser en premier » les fonds issus de l’Offre « avant les autres ressources envisageables » est inopérant, dès lors qu’il a été démontré que le projet d’affecter une partie du produit de l’Offre au règlement des arriérés fournisseurs précédait l’arrivée effective desdits fonds. Au demeurant, l’existence d’ « autres ressources envisageables » à la date de l’introduction en bourse n’est pas démontrée. Les documents transmis le 15 mars 2018 par les mis en cause relatifs aux négociations des concours bancaires démontrent au contraire que les discussions sur un tel financement supplémentaire étaient encore en cours en janvier 2014, soit plus de trois mois après la levée de fonds.

Dès lors qu’est caractérisé le projet de Montagne et Neige Développement, à la date de la Note d’opération, d’affecter une partie du produit de l’Offre au règlement des arriérés fournisseurs, il convient de déterminer si un tel projet était précisé dans la Note d’opération.

Les sections E.2 du résumé du prospectus et 3.4 de la Note d’opération sur les « Raisons de l’Offre et utilisation prévue du produit de celle-ci » stipulent : « Le produit net de l’Offre est destiné à doter la Société des moyens financiers nécessaires pour lui permettre, par ordre de priorité décroissant de : / - Lever la condition suspensive permettant de concrétiser définitivement l’acquisition de l’ensemble Snownet […] ; / – Accompagner l’accélération de la croissance des activités historiques du Groupe ; / – Poursuivre ses projets de R&D dont prioritairement le développement d’un prototype de solution de mobilité urbaine […], étant rappelé que leur financement global prévoit également des financements de type avances Bpifrance / OSEO et financements bancaires ».

Il n’est donc fait aucune mention, ni dans cette section relative à l’utilisation prévue des fonds levés ni ailleurs dans le prospectus, du projet de payer les dettes fournisseurs échues et non payées avec une partie des fonds issus de l’Offre. A cet égard, la mention selon laquelle les fonds serviraient à « accompagner l’accélération de la croissance des activités historiques du Groupe », qui concerne le financement de la croissance à venir, ne peut être raisonnablement interprétée comme incluant implicitement le règlement des arriérés fournisseurs.

Ainsi, l’information diffusée dans la Note d’opération sur les raisons de l’Offre et l’utilisation prévue du produit de celle-ci, en ce qu’elle faisait état des différentes utilisations des fonds levés sans y inclure le règlement des dettes fournisseurs échues, pourtant prévu par Montagne et Neige Développement à la date de publication de cette Note, était inexacte. En outre, cette information était trompeuse dès lors que les indications de la Note d’opération donnaient à

—  8 –

penser aux investisseurs que leur souscription financerait notamment la croissance de l’activité de Montagne et Neige Développement sans que ceux-ci puissent subodorer que les montants levés seraient utilisés en partie pour payer des arriérés fournisseurs. Ce constat s’impose d’autant plus que les sections B11 du résumé du prospectus et 3.1 de la Note d’opération indiquaient que Montagne et Neige Développement disposait des ressources nécessaires « pour faire face à ses obligations et à ses besoins de trésorerie d’exploitation pour les 12 prochains mois », élément d’information qui figurait également à la section 4.4.1 du Document de base sur les « risques de liquidité » invoquée par les mis en cause. Contrairement à ce qu’al èguent ces derniers, le caractère trompeur de l’information a nécessairement influencé le comportement des investisseurs, qui ont souscrit à l’Offre en n’ayant pas connaissance de la véritable affectation prévue des fonds qu’ils ont apportés à la société.

En outre, le fait que les « projets annoncés dans la note d’opération » aient été financés in fine par d’autres ressources que la levée de fonds, ce qui n’est du reste pas établi par les mis en cause, n’est pas de nature à remettre en cause le caractère trompeur de l’information relative à l’utilisation prévue des fonds issus de l’Offre, dès lors que ces fonds ont été utilisés à d’autres fins que celles prévues dans la Note d’Opération.

Les informations diffusées dans la Note d’opération ont donc donné des indications inexactes et trompeuses sur les raisons de l’Offre et l’utilisation prévue des fonds.

B) Des indications inexactes et trompeuses « en ce qui concerne l’offre, la demande ou le cours d’un instrument financier »

ou qui « fixent ou sont susceptibles de fixer à un niveau anormal ou artificiel le cours d’un ou de plusieurs instruments financiers »

Les indications inexactes et trompeuses portent sur les raisons et l’utilisation du produit d’une offre consistant à proposer au public et à des investisseurs institutionnels de souscrire à de nouvelles actions Montagne et Neige Développement dans le cadre d’une introduction en bourse et, partant, concernent « l’offre d’un instrument financier », au sens de l’article 12.1 c) du règlement MAR.

C) La connaissance, avérée ou supposée, par les mis en cause du caractère faux ou trompeur de l’information

(i) Sur le fait que M. D savait ou aurait dû savoir que les indications diffusées dans la Note d’opération étaient inexactes ou trompeuses

M. Dest président-directeur général de Montagne et Neige Développement et responsable du prospectus, en vertu de la section 1.1 de la Note d’opération. Il a personnel ement attesté à ce titre que « les informations contenues dans le présent Prospectus sont, à ma connaissance, conformes à la réalité et ne comportent pas d’omission de nature à en altérer la portée ».

M. D était pleinement informé de la situation des arriérés fournisseurs à laquelle était confrontée Montagne et Neige Développement, comme le démontrent l’ensemble des échanges susmentionnés avec ses collaborateurs.

Enfin, le moyen tiré des solutions alternatives auxquelles M. D aurait eu recours pour prévenir un tel manquement s’il l’avait identifié à la date des faits est inopérant.

En conséquence, M. D savait ou en tout état de cause aurait dû savoir que les informations diffusées dans la Note d’opération à propos des raisons de l’Offre et de l’utilisation du produit de celle-ci étaient inexactes et trompeuses.

—  9 –

(ii) Sur le fait que Montagne et Neige Développement savait ou aurait dû savoir que les indications étaient inexactes ou trompeuses

Un émetteur est responsable des informations publiées en son nom et pour son compte par ses représentants légaux. En l’espèce, l’information litigieuse est contenue dans la Note d’opération qui a été publiée au nom de de la société, et dont le responsable est M. D, en sa qualité de

président-directeur général de la société. Montagne et Neige Développement est donc engagée par les informations dif usées dans cette Note d’opération.

En conséquence, Montagne et Neige Développement savait, ou aurait dû savoir, que les informations diffusées dans la Note d’opération à propos des raisons de l’Offre et de l’utilisation du produit de cel e-ci étaient inexactes et trompeuses.

Il résulte de ce qui précède qu’en ne précisant pas dans la Note d’opération, au titre des raisons de l’Offre et de l’utilisation prévue du produit de cel e-ci, qu’une partie des fonds levés serait allouée au règlement des dettes fournisseurs échues, Montagne et Neige Développement et M. D ont manqué aux dispositions combinées de l’article 632-1 du règlement général de l’AMF et de l’article 12.1 c) du règlement MAR.

2. Grief relatif à l’absence de communication dès que possible de l’information relative à l’impossibilité d’atteindre l’objectif de chiffre d’affaires pro forma de 75 millions d’euros au titre de l’exercice 2013-2014

Il est fait grief à Montagne et Neige Développement de n’avoir communiqué que le 29 janvier 2014 l’information, privilégiée dès le 6 décembre 2013, selon laquelle le groupe n’atteindrait pas son objectif de chiffre d’affaires pro forma de 75 mil ions d’euros au titre de l’exercice 2013-2014 (clôture au 31 mars 2014), en méconnaissance de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF. Selon la notification de griefs, ce manquement est également imputable à M. D, en application de l’article 221-1, dernier alinéa, du règlement général de l’AMF.

Les mis en cause soulignent tout d’abord leur bonne foi en faisant valoir que les objectifs communiqués dans le prospectus ont été établis sur la base d’audits externes, étaient cohérents avec l’historique de croissance de la société et n’ont pas fait l’objet de remarques particulières de la part des commissaires aux comptes. Ils affirment regretter que les conseils de la société aient pris l’initiative d’intégrer de tels objectifs dans le prospectus et ne les aient pas alertés sur les conséquences d’une tel e intégration. Ils relèvent que les prévisions internes du 6 décembre 2013, qui mentionnaient un chif re d’affaires se situant dans une fourchette très large, ne permettaient pas de communiquer une information suffisamment précise, exacte et sincère au marché, notamment sur la nouvelle prévision de chiffre d’affaires, et qu’à cette date, l’impossibilité d’atteindre l’objectif n’était qu’une hypothèse et non une certitude. Ils soulignent également que la révision à la baisse de l’objectif de chif re d’affaires au 31 mars 2014 résulte notamment de la contribution moindre qu’attendue de la société Snownet, nouvellement acquise, aux résultats du groupe, qui n’a été découverte qu’au terme des travaux d’audit postérieurs à l’acquisition de cette société, en janvier 2014. Ils rappellent enfin que l’information sur la révision des objectifs de chiffre d’affaires a été maintenue confidentiel e avant sa publication et qu’aucune transaction n’a été effectuée par des personnes détentrices de cette information.

2.1 Textes applicables

Les faits litigieux, qui se sont déroulés entre le 16 septembre 2013 et le 29 janvier 2014, doivent être examinés à la lumière des textes alors applicables, sous réserve de l’application rétroactive d’éventuelles dispositions plus douces entrées en vigueur postérieurement.

(i) Sur l’obligation pour l’émetteur de porter dès que possible à la connaissance du public toute information privilégiée

L’article 223-2 du règlement général de l’AMF, dans sa version issue de l’arrêté du 12 novembre 2004, non modifiée jusqu’à l’arrêté du 14 septembre 2016, dispose : « I. – Tout émetteur doit, dès que possible, porter à la connaissance du public toute information privilégiée définie à l’article 621-1 et qui le concerne

—  10 –

directement ».

Postérieurement aux faits, le 3 juil et 2016, est entré en application le règlement MAR, dont l’article 17 dispose : « 1. Tout émetteur rend publiques, dès que possible, les informations privilégiées qui concernent directement ledit émetteur ».

Les dispositions susmentionnées du règlement MAR, qui sont rédigées en des termes très proches du I de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF, ne sont pas plus douces que ces dernières et, en conséquence, ne sont pas susceptibles de recevoir une application rétroactive.

(ii) Sur la définition de l’information privilégiée

L’article 621-1 du règlement général de l’AMF, dans sa version issue de l’arrêté du 12 novembre 2004, non modifiée dans un sens moins sévère par l’arrêté du 5 juin 2014, dispose : « Une information privilégiée est une information précise qui n’a pas été rendue publique, qui concerne, directement ou indirectement, un ou plusieurs émetteurs d’instruments financiers, ou un ou plusieurs instruments financiers, et qui si elle était rendue publique, serait susceptible d’avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés […]. / Une information est réputée précise si elle fait mention d’un ensemble de circonstances ou d’un événement qui s’est produit ou qui est susceptible de se produire et s’il est possible d’en tirer une conclusion quant à l’effet possible de ces circonstances ou de cet événement sur le cours des instruments financiers concernés […]. / Une information, qui si elle était rendue publique, serait susceptible d’avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés […] est une information qu’un investisseur raisonnable serait susceptible d’utiliser comme l’un des fondements de ses décisions d’investissement ».

L’article 7 du règlement MAR, entré en application le 3 juil et 2016, dispose : « 1. Aux fins du présent règlement, la notion d’«information privilégiée» couvre les types d’information suivants : / a) une information à caractère précis qui n’a pas été rendue publique, qui concerne, directement ou indirectement, un ou plusieurs émetteurs, ou un ou plusieurs instruments financiers, et qui, si elle était rendue publique, serait susceptible d’influencer de façon sensible le cours des instruments financiers concernés […] ; / 2. Aux fins de l’application du paragraphe 1, une information est réputée à caractère précis si el e fait mention d’un ensemble de circonstances qui existe ou dont on peut raisonnablement penser qu’il existera ou d’un événement qui s’est produit ou dont on peut raisonnablement penser qu’il se produira, si el e est suffisamment précise pour qu’on puisse en tirer une conclusion quant à l’effet possible de cet ensemble de circonstances ou de cet événement sur le cours des instruments financiers […] ; / 3. […] / 4. Aux fins du paragraphe 1, on entend par information qui, si elle était rendue publique, serait susceptible d’influencer de façon sensible le cours des instruments financiers […] une information qu’un investisseur raisonnable serait susceptible d’utiliser comme faisant partie des fondements de ses décisions d’investissement ».

Ces dispositions du règlement MAR définissent l’information privilégiée en des termes très proches de celles précitées de l’article 621-1 du règlement général de l’AMF. El es ne sont donc pas plus douces que ces dernières et ne sont donc pas susceptibles de recevoir une application rétroactive.

2.2 L’appréciation du manquement

A) L’annonce de l’objectif de chiffre d’affaires pro forma de 75 millions d’euros au titre de l’exercice 2013-2014

La section 12.1 du Document de base (« Principales tendances depuis la fin du dernier exercice ») mentionne que « le Groupe a pour objectif de réaliser un chiffre d’affaires consolidé pro forma supérieur à 75 mil ions d’euros au titre de l’exercice en cours s’achevant le 31 mars 2014 ».

Les sections B.4 a et 11.1 de la Note d’opération réitèrent cet objectif et précisent que le niveau d’activité constaté par le groupe au 31 août 2013 est de nature à conforter sa réalisation.

—  11 –

Les communiqués de presse des 17 septembre et 2 octobre 2013 relatifs, respectivement, à la publication du Document de base et de la Note d’opération reprennent l’annonce de cet objectif de chif re d’affaires au 31 mars 2014.

B) Le caractère privilégié de l’information en cause

Il convient de déterminer si l’information relative « au fait que l’objectif de chiffre d’affaires pro forma de 75 mil ions d’euros au titre de l’exercice 2013-2014 ne serait pas atteint » était privilégiée dès le 6 décembre 2013.

(i) Sur le caractère précis de l’information

Le 6 décembre 2013, M. C, contrôleur de gestion au sein de Montagne et Neige Développement, a transmis aux dirigeants de la société une prévision, fondée sur les données disponibles en

septembre 2013, qui anticipait un chiffre d’affaires pro forma au 31 mars 2014 situé entre 56,4 mil ions d’euros (« version prudente ») et 65,5 mil ions d’euros (« version optimiste »).

Ainsi, dès le 6 décembre 2013, soit bien avant la finalisation courant janvier 2014 de l’audit postérieur à l’acquisition de Snownet, un document interne dont la fiabilité n’est pas contestée prévoyait un chif re d’affaires pro forma inférieur de 9,5 à 18,6 millions d’euros à l’objectif de 75 millions d’euros annoncé dans le cadre de l’introduction en bourse.

Contrairement à l’allégation des mis en cause, l’ampleur de la fourchette retenue par la prévision ne fait pas obstacle au caractère précis de l’information, dès lors que la perspective de non-atteinte de l’objectif de 75 millions résultait également de la version dite « optimiste » (65,5 millions d’euros) de cette prévision.

Enfin, une information pouvant être qualifiée de précise au sens de l’article 621-1 du règlement général de l’AMF lorsqu’elle porte sur un événement « susceptible de se produire », il est indifférent que l’impossibilité d’atteindre l’objectif de chiffre d’affaires au 31 mars 2014 n’ait pas été certaine au 6 décembre 2013.

Au surplus, les prévisions du 6 décembre 2013 ont été réitérées le 26 décembre suivant.

Il en résulte que l’absence d’atteinte de l’objectif de chif re d’affaires pro forma de 75 mil ions d’euros communiqué lors de l’introduction en bourse constituait bien, dès le 6 décembre 2013, un événement susceptible de se produire.

L’impossibilité d’atteindre cet objectif, en ce qu’elle révélait une dégradation des perspectives de la société, intervenant de surcroît moins de trois mois après une opération dont l’un des motifs annoncés était la croissance de l’activité, constituait

une circonstance dont il était possible de tirer une conclusion, en l’occurrence négative, sur le cours du titre.

L’information en cause a donc revêtu, le 6 décembre 2013, le caractère de précision requis par l’article 621- 1 du règlement général de l’AMF.

(ii) Sur le caractère non public de l’information

Ce n’est que le 29 janvier 2014, à l’occasion du communiqué de presse relatif aux résultats semestriels au 30 septembre 2013, que Montagne et Neige Développement a annoncé implicitement au public que l’objectif de 75 mil ions d’euros ne serait pas atteint, en indiquant que « le Groupe anticipe pour l’ensemble de son exercice un chiffre d’affaires pro forma d’environ 65 mil ions d’euros ».

L’information litigieuse est donc demeurée non publique jusqu’au 29 janvier 2014.

—  12 –

(iii) Sur le caractère sensible de l’influence de l’information sur le cours du titre

Montagne et Neige Développement a fait de son objectif de chiffre d’affaires au 31 mars 2014 un élément clé de sa politique de communication à destination des investisseurs lors de l’introduction en bourse, en l’incluant non seulement dans le prospectus d’introduction en bourse mais également dans les communiqués de presse des 17 septembre et 2 octobre 2013 relatifs, respectivement, à l’enregistrement du Document de base et de la Note d’opération.

A cet égard, Montagne et Neige Développement a souligné dans la Note d’opération que cet objectif traduisait une croissance organique annuel e d’environ 30 % au regard du chiffre d’affaires réalisé le 31 mars 2013.

L’objectif de chiffre d’affaires au 31 mars 2014 a été ainsi présenté aux investisseurs comme un indicateur pertinent pour apprécier le potentiel de croissance organique du groupe.

Par ail eurs, le marché ne pouvait pas raisonnablement anticiper l’impossibilité pour Montagne et Neige Développement d’atteindre un objectif de chiffre d’affaires annoncé moins de trois mois plut tôt à l’occasion d’une opération destinée notamment à financer la croissance des activités.

L’information selon laquelle l’objectif de chiffre d’affaires pro forma de 75 mil ions d’euros au 31 mars 2014 ne serait pas atteint était donc susceptible d’être utilisée par un investisseur raisonnable comme l’un des fondements de ses décisions d’investissement et, partant, d’avoir une influence sensible sur le cours de l’action Montagne et Neige Développement.

Il résulte de ce qui précède que l’information litigieuse était privilégiée, au sens de l’article 621-1 du règlement général de l’AMF, à compter du 6 décembre 2013.

C) Le caractère tardif de la communication de l’information privilégiée au public

Les mis en cause affirment qu’ils ont attendu « que la société MND [Montagne et Neige Développement] dispose d’une vision suffisamment claire pour être en capacité d’annoncer un chiffre d’affaires réaliste ».

Toutefois, il résulte de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF que l’obligation de communication qui pèse sur l’émetteur n’est subordonnée à aucune condition autre que celle tenant au caractère privilégié de l’information en cause.

Montagne et Neige Développement était donc tenue de communiquer dès possible à compter du 6 décembre 2013 l’information, devenue privilégiée à cette date, selon laquel e l’objectif de chiffre d’affaires pro forma de 75 mil ions d’euros au 31 mars 2014 ne serait pas atteint, nonobstant l’impossibilité de chiffrer avec précision le nouveau chif re d’affaires prévisionnel.

L’information en cause, qui a été portée à la connaissance du public par Montagne et Neige Développement un mois et 23 jours après avoir acquis un caractère privilégié, n’a pas été communiquée dès que possible.

En se bornant à faire valoir que cette information a été maintenue confidentiel e avant sa publication et qu’aucune transaction n’a été effectuée par des personnes qui la détenaient, les mis en cause n’établissent pas avoir respecté les conditions prévues au II de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF, auxquelles la possibilité de reporter la communication au public d’une information privilégiée est subordonnée.

Le manquement de Montagne et Neige Développement aux dispositions du I de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF est donc caractérisé.

—  13 –

D) Sur l’imputabilité du manquement à M. D

La notification de griefs adressée à M. D retient que le manquement aux dispositions de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF de Montagne et Neige Développement est imputable à ce dernier à raison de ses fonctions de président-directeur général de la société à l’époque des faits, en application du dernier alinéa de l’article 221-1 du même règlement.

Le dernier alinéa de l’article 221-1 du règlement général de l’AMF, dans sa version issue de l’arrêté du 26 février 2007, toujours en vigueur, dispose : « […] / 2° le terme : « personne » désigne une personne physique ou une personne morale. / Les dispositions du présent titre [titre II du livre II du règlement général de l’AMF] sont également applicables aux dirigeants de l’émetteur, de l’entité ou de la personne morale concernée ».

Il en résulte qu’à l’époque des faits, les dispositions du titre I du livre II du règlement général de l’AMF, au sein duquel figure l’article 223-2 qui fonde le grief, étaient rendues applicables aux dirigeants de l’émetteur.

Postérieurement aux faits, est entré en application le règlement MAR qui ne comporte aucune disposition régissant l’imputabilité des manquements qu’il prévoit, de sorte que cette question relève, comme auparavant, du droit national. Cette interprétation est d’ail eurs confirmée par le considérant 40 de ce règlement, qui précise : « Afin de garantir la responsabilité tant de la personne morale que de toute personne physique participant à la prise de décision de la personne morale, il est nécessaire de reconnaître les différents mécanismes juridiques nationaux des États membres. Ces mécanismes devraient concerner directement les méthodes d’imputation de la responsabilité dans le droit national ».

La recherche d’éventuel es dispositions plus douces susceptibles de recevoir une application rétroactive implique donc de déterminer si l’obligation des émetteurs de communiquer dès que possible toute information privilégiée qui les concerne pèse encore sur leurs dirigeants depuis que l’arrêté du 14 septembre 2016 a modifié l’article 223-2 du règlement général de l’AMF afin d’en retirer les dispositions édictant cette obligation, désormais prévue, dans des termes équivalents, au point 1 de l’article 17 du règlement MAR.

Outre la modification déjà évoquée, l’arrêté du 14 septembre 2016 a procédé, au i du 1° de l’article 221-1 du règlement général de l’AMF, au remplacement des mots : « en application de l’article 223-2 » par les mots : « en application de l’article 17 du règlement sur les abus de marché (règlement n° 596/2014/ EU) », de sorte que le i du 1° dispose désormais : « Au sens du présent titre : 1° Lorsque les titres financiers de l’émetteur sont admis aux négociations sur un marché réglementé, le terme : « information réglementée » désigne les documents et informations suivants : / […] / i) L’information privilégiée publiée en application de l’article 17 du règlement sur les abus de marché (règlement n° 596/2014/EU) […] ».

La référence ainsi faite à l’article 17 du règlement MAR permet de considérer que l’obligation de communication mise à la charge des émetteurs par ce dernier texte, bien que n’étant plus directement énoncée par des dispositions figurant au sein du titre II du livre II du règlement général de l’AMF, compte bien parmi celles que le dernier alinéa de l’article 221-1 de ce règlement fait peser sur les dirigeants.

Dans ces conditions, il apparaît que les modifications issues de l’arrêté du 14 septembre 2016 n’ont pas eu pour effet d’instituer des règles d’imputabilité au dirigeant du manquement en cause plus douces qu’auparavant.

Il s’ensuit qu’il y a lieu d’examiner l’imputabilité du manquement à M. D au regard du dernier alinéa de l’article 221-1 du règlement général de l’AMF dans sa rédaction précitée, applicable à l’époque des faits.

Il découle de ce texte une obligation pour le dirigeant de veil er au respect par l’émetteur des prescriptions du I de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF, dont il ne peut s’exonérer qu’en cas de circonstances particulières l’ayant privé de l’exercice total ou partiel de ses fonctions. M. D n’établit pas l’existence de tel es circonstances en se bornant à arguer de sa bonne foi et de l’absence d’avertissement reçu de ses conseil ers financiers sur les conséquences de la publication de cet objectif

—  14 –

dans le prospectus.

Au demeurant, il était destinataire des prévisions internes du 6 décembre 2013 mettant en exergue la perspective de non-atteinte de l’objectif de chif re d’affaires pro forma de 75 mil ions d’euros au 31 mars 2014.

Il en résulte que le manquement aux dispositions de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF est imputable à M. D.

3. Grief relatif à la qualité de l’information diffusée dans le communiqué de presse du 29 janvier 2014 annonçant la nouvelle prévision de chiffre d’affaires pro forma au 31 mars 2014

Il est fait grief à Montagne et Neige Développement d’avoir méconnu les articles 632-1 et 223-1 du règlement général de l’AMF en s’abstenant de donner des précisions dans son communiqué de presse du 29 janvier 2014 sur le périmètre fondant la nouvelle prévision de chif re d’affaires pro forma de 65 mil ions d’euros au 31 mars 2014, alors que celui-ci intégrait la société Prisme à hauteur de 4 mil ions d’euros, à la différence du périmètre afférent à l’objectif de chif re d’affaires de 75 mil ions d’euros communiqué lors de l’introduction en bourse.

Ce manquement serait également imputable à M. D, en application de l’article 221-1, dernier alinéa, du règlement général de l’AMF.

Les mis en cause font valoir que l’intégration de la société Prisme dans le périmètre de référence du chiffre d’affaires prévisionnel communiqué le 29 janvier 2014 permettait de « mieux approcher ainsi le chiffre d’affaires final » et n’a pas été contestée par le commissaire aux comptes. Ils arguent également que les explications données par M. A à M. D le 27 janvier 2014 sur le périmètre à retenir dans le communiqué de presse n’étaient pas claires. Ils indiquent enfin que la contribution de Prisme au chiffre d’affaires du groupe n’était en tout état de cause pas significatif, de l’ordre de

1 million d’euros sur l’exercice clos au 31 mars 2014, de sorte que le grief reproché n’est en vérité qu’ « une simple maladresse de présentation, sans réel impact ».

3.1 Textes applicables

Les faits reprochés, qui se sont déroulés le 29 janvier 2014, seront examinés à la lumière des textes alors applicables, sous réserve de l’application rétroactive d’éventuelles dispositions plus douces entrées en vigueur postérieurement.

L’article 223-1 du règlement général de l’AMF, dans sa rédaction issue de l’arrêté du 4 janvier 2007, non modifiée depuis, énonce : « l’information donnée au public par l’émetteur doit être exacte, précise et sincère ».

Postérieurement aux faits, le 3 juil et 2016, est entré en application le règlement MAR.

L’article 12.1 c) du règlement MAR prévoit un cas de manipulation de marché par diffusion d’informations ainsi formulé : « Aux fins du présent règlement, la notion de «manipulation de marché» couvre les activités suivantes: / […] ; / c) diffuser des informations, que ce soit par l’intermédiaire des médias, dont l’internet, ou par tout autre moyen, qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses en ce qui concerne l’offre, la demande ou le cours d’un instrument financier, […], ou fixent ou sont susceptibles de fixer à un niveau anormal ou artificiel le cours d’un ou de plusieurs instruments financiers, […] , y compris le fait de répandre des rumeurs, alors que la personne ayant procédé à une tel e diffusion savait ou aurait dû savoir que ces informations étaient fausses ou trompeuses ».

Par ailleurs, l’article 15 du même règlement dispose qu’ « une personne ne doit pas effectuer des manipulations de marché ni tenter d’effectuer des manipulations de marché ».

—  15 –

Contrairement à l’article 223-1 du règlement général de l’AMF, les articles 12 et 15 du règlement MAR ne répriment pas la diffusion d’une information seulement imprécise. En outre, ils exigent deux éléments constitutifs supplémentaires : d’une part, la circonstance que les informations litigieuses donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses « en ce qui concerne l’offre, la demande ou le cours d’un instrument financier […] ou fixent ou sont susceptibles de fixer à un niveau anormal ou artificiel le cours d’un ou plusieurs instruments financiers », d’autre part, la connaissance avérée ou supposée, du caractère faux ou trompeur de l’information diffusée.

Les articles 12.1 c) et 15 du règlement MAR apparaissent donc plus doux que l’article 223-1 du règlement général de l’AMF, de sorte qu’il y a lieu de les appliquer rétroactivement aux faits reprochés.

Enfin, il ressort de l’analyse à laquel e il a été procédé lors de l’examen du premier grief qu’il convient d’ajouter aux dispositions de l’article 632-1 du règlement général de l’AMF l’élément constitutif supplémentaire prévu par l’article 12.1 c) du règlement MAR.

Il convient donc d’examiner les dispositions combinées, d’une part, des articles 12.1 c) du règlement MAR et, d’autre part, de l’article 623-1 du règlement général de l’AMF auquel s’ajoute l’élément constitutif supplémentaire de l’article 12.1 c) du règlement MAR, pour déterminer si le manquement notifié sur le fondement des articles 223-1 et 632-1 du règlement général de l’AMF est caractérisé en l’espèce.

3.2 Sur l’appréciation du manquement

A) La diffusion par l’intermédiaire des médias, dont Internet, ou tout autre moyen

L’information litigieuse relative au chiffre d’affaires prévisionnel au 31 mars 2014 figure dans un communiqué de presse qui a été diffusé le 29 janvier 2014 sur le site Internet de Montagne et Neige Développement.

La condition de diffusion prévue à l’article 12.1 c) du règlement MAR est donc satisfaite.

B) Le caractère inexact ou trompeur de l’information diffusée

Afin d’apprécier le caractère inexact ou trompeur de l’information, il convient tout d’abord de déterminer le périmètre de référence, d’une part, de l’objectif de chiffre d’affaires de 75 mil ions d’euros annoncé lors de l’introduction en bourse, d’autre part, du chiffre d’affaires prévisionnel de 65 mil ions d’euros annoncé dans le communiqué de presse du 29 janvier 2014.

Le communiqué de presse du 17 septembre 2013 de Montagne et Neige Développement mentionne qu’ « Avec un périmètre actuel de 58 M€ de chiffre d’affaires pro forma (incluant la société Snownet), le Groupe MND a pour objectif de réaliser un chiffre d’affaires de plus de 75 M€ au 31 mars 2014 et de 150 M€ à l’horizon du 31 mars 2016, soit une croissance organique d’environ 30 % par an ».

La référence à la « croissance organique », c’est-à-dire à une croissance à périmètre constant, qu’entraînerait le respect de l’objectif de 75 millions d’euros suppose que cet objectif est assis sur un périmètre identique au « périmètre actuel de 58 M€ ».

La notion de « périmètre actuel » est ainsi définie en note de bas de page du communiqué de presse du 17 septembre 2013 : « données pro forma du périmètre juridique au 30/07/2013 incluant les sociétés de l’ensemble Snownet acquises fin juil et 2013, sous condition suspensive de la réalisation d’une levée de fonds par la société d’au moins 10,3 M€ avant le 31 octobre 2013 ».

Or, il résulte de la section 20.2 (§§ 2 et 3) du Document de base, qui définit le périmètre pro forma au 30 juil et 2013 ayant servi de référence pour obtenir le chiffre d’affaires de 58 mil ions d’euros, que la société Prisme n’était pas intégrée dans ce périmètre. La section 3 du document de référence du 9 octobre 2014 rappelle au demeurant que les divers périmètres sous-jacents aux comptes pro forma établis dans le Document de base n’incluaient pas la société Prisme : « la société Prisme dont le solde de titres a

—  16 –

été acquis le 3 février 2014 […] n’était pas intégrée dans le Pro Forma publié dans le document de base puisque n’étant alors détenue qu’à hauteur de 20 % ».

Il est donc établi que l’objectif de chiffre d’affaires pro forma de 75 mil ions d’euros au 31 mars 2014, qui a été formulé à périmètre constant, n’incluait pas le chif re d’affaires de la société Prisme.

Le 29 janvier 2014, Montagne et Neige Développement a annoncé en ces termes que le chiffre prévisionnel pro forma au 31 mars 2014 serait d’environ 65 millions d’euros : « Du fait d’une part du décalage de l’affaire en Asie et d’autre part d’une prise de contrôle tardive de Snownet qui réalise une activité en deçà des performances attendues, le Groupe anticipe pour l’ensemble de son exercice un chiffre d’affaires pro forma d’environ 65 M€ ».

Aucune précision n’était donc donnée quant au périmètre de référence de la prévision de chiffre d’affaires ainsi portée à la connaissance du public.

Or, le chiffre de 65 mil ions d’euros résulte d’une prévision interne, transmise le 23 janvier 2013 par M. A à M. D, qui mentionne l’intégration de la société Prisme (« yc [y compris] Prisme ») dans les hypothèses de chiffre d’affaires au 31 mars 2014 (prévisions « optimiste » de 65,1 millions d’euros et « prudente » de 61,7 mil ions d’euros).

Le 27 janvier 2014, des échanges sur le projet de communiqué de presse qui sera publié deux jours plus tard démontrent que M. A a alerté M. D sur le fait que le chiffre d’affaires prévisionnel de 65 millions d’euros intégrait la société Prisme et que le périmètre n’était donc pas comparable avec l’objectif de chiffre d’affaires initial communiqué lors de l’introduction en bourse.

Il résulte de ce qui précède que le périmètre de référence du chif re d’affaires prévisionnel de 65 mil ions d’euros au 31 mars 2014 annoncé le 29 janvier 2014, en ce qu’il intègre le chiffre d’affaires de la société Prisme, est différent de celui qui fonde l’objectif de chiffre d’affaires de 75 mil ions d’euros au 31 mars 2014 communiqué lors de l’introduction en bourse.

Le moyen pris de ce que l’intégration de la société Prisme « permettait de mieux approcher le chiffre d’affaires final » et de « donner une meil eure image de l’économie du groupe » est inopérant, dès lors qu’il n’est pas reproché aux mis en cause d’avoir intégré Prisme dans le périmètre sous-jacent au chiffre d’affaires prévisionnel de 65 mil ions d’euros mais de s’être abstenus de préciser l’étendue de ce périmètre dans le communiqué de presse du 29 janvier 2014.

Les mis en cause soutiennent à tort que le chiffre d’affaires de Prisme « n’est en tout état de cause pas significatif par rapport à celui du groupe » et, partant, que l’absence de précision sur l’étendue du périmètre de référence était « sans réel impact », dès lors que la comparaison des prévisions internes des 6 décembre 2013 et 23 janvier 2014 fait ressortir que la prise en compte de Prisme au titre de l’activité « Summer Leisure » dans celles du 23 janvier a eu pour effet de porter le chif re d’affaires prévisionnel de cette activité au 31 mars 2014 de 0,4 mil ion à 4,2 mil ions d’euros, soit une différence de

3,8 mil ions d’euros.

Ainsi, à périmètre identique, l’écart entre l’objectif initial de chiffre d’affaires de 75 mil ions au 31 mars 2014 annoncé lors de l’introduction en bourse et le nouvel objectif de 65 mil ions communiqué le 29 janvier 2014 n’était pas de 10 mil ions d’euros mais de près de 14 mil ions d’euros.

Il s’ensuit qu’à défaut de fournir des précisions sur l’étendue du périmètre de référence de l’objectif de chiffre d’affaires prévisionnel de 65 mil ions d’euros, le communiqué de presse du 29 janvier 2014 ne permettait pas de comprendre l’ampleur de la révision à la baisse de cet objectif par rapport à celui annoncé lors de l’introduction en bourse et, ainsi, était de nature à induire le public en erreur.

L’information diffusée relative au chiffre d’affaires prévisionnel de 65 millions d’euros au 31 mars 2014 diffusée dans le communiqué de presse du 29 janvier 2014 était donc trompeuse, au sens de l’article 632-1 du règlement général de l’AMF et de l’article 12.1 c) du règlement MAR.

—  17 –

C) Des indications fausses ou trompeuses qui concernent « l’offre, la demande ou le cours d’un instrument financier » ou qui « fixent ou sont susceptibles de fixer à un niveau anormal ou artificiel le cours d’un ou plusieurs instruments financiers » L’information litigieuse a été de nature à induire le public en erreur sur l’ampleur de la dégradation du chiffre d’affaires prévisionnel et, par conséquent, sur les performances réalisées par l’entreprise.

El e a donc donné des indications trompeuses « en ce qui concerne l’offre, la demande ou le cours » du titre Montagne et Neige Développement, au sens de l’article 12.1 c) du règlement MAR.

D) La connaissance, avérée ou supposée, par les mis en cause du caractère faux ou trompeur de l’information diffusée

(i) La connaissance, avérée ou supposée, de Montagne et Neige Développement

Un émetteur est réputé connaître le caractère inexact ou trompeur d’une information qui a été publiée en son nom et pour son compte.

En conséquence, Montagne et Neige Développement savait, ou aurait dû savoir, que les informations diffusées dans le communiqué de presse du 29 janvier 2014 étaient trompeuses, au sens de l’article 632-1 du règlement général de l’AMF et de l’article 12.1 c) du règlement MAR.

(ii) La connaissance, avérée ou supposée, de M. D

M. D était destinataire des prévisions internes du 23 janvier 2014 mentionnant expressément l’intégration de Prisme dans le périmètre de référence du chiffre d’affaires prévisionnel de

65 millions d’euros.

De surcroît, les échanges de courriels du 27 janvier 2014, évoqués plus haut, démontrent qu’il a ignoré délibérément les alertes de son directeur financier – qui étaient parfaitement claires contrairement à ce qu’il allègue – sur le caractère non comparable du nouveau chif re d’affaires prévisionnel et de l’objectif de chif re d’affaires communiqué lors de l’introduction en bourse, obtenus en se fondant sur des périmètres différents.

L’approbation du communiqué de presse par le commissaire aux comptes, qui n’est du reste pas démontrée, ne saurait exonérer M. D de sa responsabilité au titre de l’information diffusée.

En conséquence, M. D savait, ou aurait dû savoir, que l’information diffusée dans le communiqué de presse du 29 janvier 2014 était trompeuse, au sens de l’article 632-1 du règlement général de l’AMF et de l’article 12.1 c) du règlement MAR.

E) L’imputabilité du manquement à M. D à l’article 223-1 du règlement général de l’AMF

La notification de griefs impute le manquement à l’article 223-1 du règlement général de l’AMF à M. D, en sa qualité de président-directeur général de Montagne et Neige Développement, sur le fondement du 2° de l’article 221-1 du règlement général de l’AMF.

Le 2° de l’article 221-1 du règlement général de l’AMF, dans sa version issue de l’arrêté du 26 février 2007, dispose : « […] / 2° le terme : « personne » désigne une personne physique ou une personne morale. / Les dispositions du présent titre [titre II du livre II du règlement général de l’AMF] sont également applicables aux dirigeants de l’émetteur, de l’entité ou de la personne morale concernée ». En conséquence, les dispositions du titre II du livre II du règlement général de l’AMF, au sein duquel figure l’article 223-1 qui fonde le grief, étaient, à l’époque des faits, applicables aux dirigeants de l’émetteur.

Postérieurement aux faits est entré en vigueur le règlement MAR qui dispose, en son article 12.4 : « Lorsque la personne visée dans le présent article est une personne morale, le présent article s’applique également,

—  18 –

conformément au droit national, aux personnes physiques qui prennent part à la décision de mener des activités pour le compte de la personne morale concernée ».

Ces dispositions, qui posent un principe d’imputabilité aux « personnes physiques qui prennent part à la décision de mener des activités pour le compte de la personne morale concernée » et renvoient sa mise en œuvre au droit national, ne sont pas plus douces que cel es précitées du 2° de l’article 221-1 du règlement général de l’AMF, de sorte que ces dernières sont seules applicables.

A l’époque des faits, M. D exerçait les fonctions de président-directeur général de la société Montagne et Neige Développement et avait, en conséquence, la qualité de dirigeant de cette société au sens du 2° de l’article 221-1 du règlement général de l’AMF.

Il ne justifie d’aucune circonstance particulière l’ayant privé de l’exercice de ses fonctions. Au demeurant, les échanges de courriels du 27 janvier 2014 établissent que M. Da participé activement à l’élaboration du communiqué publié le 29 janvier suivant.

Le manquement à l’article 223-1 du règlement général de l’AMF est donc imputable à M. D

Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le manquement de Montagne et Neige Développement et M. D aux dispositions combinées, d’une part, des articles 632-1 du règlement général de l’AMF et 12.1 c) du règlement MAR, d’autre part, des articles 223-1 du règlement général de l’AMF et 12.1 c) du règlement MAR, est caractérisé.

4. Grief relatif à l’absence de communication dès que possible de l’information relative à l’impossibilité d’atteindre les objectifs de chiffre d’affaires pro forma de 150 millions d’euros et de taux de rentabilité opérationnelle supérieur à 10 % au titre de l’exercice 2015-2016

Il est fait grief à Montagne et Neige Développement de n’avoir communiqué que le 9 octobre 2014 l’information, privilégiée à compter du 3 avril 2014, selon laquelle le groupe n’atteindrait pas les objectifs annoncés lors de l’introduction en bourse de chiffre d’affaires pro forma de 150 mil ions d’euros et de taux de rentabilité opérationnelle supérieur à 10 % au titre de l’exercice 2015-2016, en méconnaissance de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF.

Selon la notification de griefs, ce manquement est également imputable à M. D, en application de l’article 221-1, dernier alinéa, du règlement général de l’AMF.

Les mis en cause relèvent tout d’abord que ces objectifs sur trois ans, par définition aléatoires et susceptibles d’évolution, ont été déterminés au vu de rapports d’audit externe et inclus dans la documentation d’introduction en bourse à l’initiative des conseils de la société. Ils précisent que le maintien d’une prévision concernant une entreprise en croissance tel e que Montagne et Neige Développement peut dépendre de la conclusion d’un seul contrat, de sorte que ce n’est qu’en

octobre 2014, avec la perte ou le report de certains appels d’offres, que M. Da su avec certitude que le groupe n’atteindrait pas de tels objectifs au 31 mars 2016. Ils ajoutent que les différentes prévisions internes antérieures établies par la direction financière traduisaient « une vision conservatrice et prudente des chiffres, dans laquelle le dirigeant ne s’est pas reconnu ». Enfin, ils relèvent que la somme de plus d’un million d’euros investie par M. D, par l’intermédiaire de sa société Montagne & Vallée, dans une augmentation de capital de Montagne et Neige Développement par placement privé en

juil et 2014, témoigne de la confiance de ce dernier dans la société.

4.1 Textes applicables

Il a été dit lors de l’examen du second grief que les dispositions des articles 17 et 7 du règlement MAR, non moins sévères que celles, respectivement, des articles 223-1 et 621-1 du règlement général de l’AMF, n’étaient pas susceptibles de s’appliquer rétroactivement.

—  19 –

4.2 L’appréciation du manquement

A) L’annonce des objectifs de chiffre d’affaires pro forma de 150 mil ions d’euros et de taux de rentabilité opérationnel e de 10 % au titre de l’exercice 2015-2016

La section 12.1 du Document de base indique : « le Groupe a pour objectifs d’ici l’exercice clos le 31 mars 2016 de : – Franchir le seuil des 150 M€ de chiffre d’affaires, sur la base du périmètre actuel intégrant l’ensemble Snownet […] – Restaurer un taux de rentabilité opérationnelle supérieur à 10 %, correspondant à un niveau historiquement constaté au 31 mars 2012 ».

La section B.4 a) du résumé du prospectus qui figure dans la Note d’opération et la section 11.1 de la Note d’opération réitèrent ces objectifs, qui sont également rappelés par les communiqués de presse des 17 septembre et 2 octobre 2013.

B) Le caractère privilégié de l’information en cause

Il convient de déterminer si l’information selon laquelle les objectifs de chiffre d’affaires pro forma de 150 millions d’euros et de taux de rentabilité opérationnelle supérieur à 10 % au 31 mars 2016 ne seraient pas atteints était privilégiée dès le 3 avril 2014.

(i) Sur le caractère précis de l’information

Le business plan présenté au CODIR [comité de direction] de Montagne et Neige Développement le 18 mars 2014 fait état d’une prévision de chiffre d’affaires pro forma de 94,6 mil ions d’euros au 31 mars 2016 et de 146,1 mil ions d’euros au 31 mars 2017, montant encore inférieur à l’objectif fixé au titre de l’exercice précédent.

Au vu de cette prévision, le conseil d’administration de Montagne et Neige Développement du 1er avril 2014 a maintenu les objectifs de marge opérationnel e de 10 % et de chif re d’affaires de 150 M€ « à moyen terme », abandonnant ainsi implicitement l’échéance du 31 mars 2016.

Un nouveau business plan transmis le 3 avril 2014 à M. D par M. C, contrôleur de gestion, prévoyait un taux d’ « EBIT », c’est-à-dire de rentabilité opérationnel e, de 2,6 % au 31 mars 2016, l’atteinte d’un taux de 10 % n’étant prévue qu’en mars 2019, soit plus de trois ans après l’échéance annoncée lors de l’introduction en bourse.

Ainsi, à la date du 3 avril 2014, des prévisions internes à la société prévoyaient un chiffre d’affaires pro forma au 31 mars 2016 inférieur de 55 mil ions d’euros à l’objectif initial et un taux de rentabilité opérationnelle quatre fois inférieur à l’objectif.

Les al égations des mis en cause selon lesquel es ces prévisions étaient excessivement pessimistes ne sont étayées par aucune pièce et il convient de relever que le chiffre d’affaires prévisionnel présenté au CODIR le 18 mars 2014 l’a également été au conseil d’administration sans qu’il résulte du procès-verbal de la réunion de ce dernier que des réserves sur ce chiffre aient été formulées.

Ces prévisions ont au surplus été confirmées postérieurement, une nouvel e estimation présentée au CODIR du 16 juin 2014 prévoyant un chiffre d’affaires de 96,7 millions d’euros au 31 mars 2016.

Comme il a été dit, il résulte des termes mêmes de l’article 621-1 du règlement général de l’AMF qu’une information portant sur un évènement seulement « susceptible de se produire » peut être qualifiée de précise, de sorte qu’il est indifférent que la société n’ait acquis qu’en octobre 2014 la « certitude » de l’impossibilité d’atteindre ses objectifs au 31 mars 2016, à l’issue d’appels d’offres relatifs à l’activité « transport urbain ». Au demeurant, le business plan du 18 mars 2014 ne prévoyait aucune contribution au chiffre d’affaires du groupe de l’activité « transport urbain » au 31 mars 2016.

—  20 –

Il résulte de ce qui précède que l’impossibilité d’atteindre les objectifs de chiffre d’affaires de 150 millions d’euros et de taux de rentabilité opérationnel e de 10 % au 31 mars 2016 annoncés lors de l’introduction en bourse constituait bien, dès le 3 avril 2014, un évènement susceptible de se produire.

Cette impossibilité, en ce qu’elle révélait une dégradation des perspectives de la société, constituait

une circonstance dont il était possible de tirer une conclusion, en l’occurrence négative, sur le cours du titre.

L’information relative à l’impossibilité d’atteindre l’objectif de chiffre d’affaires de 150 millions d’euros et de taux de rentabilité opérationnel e de 10 % au 31 mars 2016 a ainsi revêtu, dès le 3 avril 2014, le caractère de précision requis par l’article 621-1 du règlement général de l’AMF.

(ii) Sur le caractère non public de l’information

L’information litigieuse a été communiquée pour la première fois dans le document de référence de Montagne et Neige Développement du 9 octobre 2014, dont la section 6.1 indique : « Compte-tenu de cet exercice de transition et d’intégration du nouveau périmètre, le Groupe considère comme caducs les objectifs avancés lors de son introduction en bourse en octobre 2013 (franchir le cap des 150 M€ de chiffre d’affaires et dégager une rentabilité opérationnelle supérieure à 10 % à l’horizon mars 2016) ».

Le communiqué de presse de Montagne et Neige Développement du même jour fait également état de l’abandon des objectifs en cause.

L’information est donc demeurée non publique jusqu’au 9 octobre 2014.

(iii) Sur le caractère sensible de l’influence de l’information sur le cours du titre

Montagne et Neige Développement a fait de son objectif de chiffre d’affaires et de rentabilité opérationnelle au 31 mars 2016 un élément clé de sa politique de communication à destination des investisseurs lors de l’introduction en bourse, en l’incluant non seulement dans le Document de base et la Note d’opération, mais également dans les communiqués de presse des 17 septembre et

2 octobre 2013 annonçant l’opération.

Dans le communiqué de presse du 17 septembre 2013, Montagne et Neige Développement mettait en outre en exergue que l’objectif de chiffre d’affaires de 150 mil ions d’euros au 31 mars 2016 correspondait « à une croissance organique de 30 % par an » et que l’objectif de marge opérationnel e supérieure à 10 % correspondait à « une hausse de la rentabilité » : « Cette accélération de la croissance s’accompagnera d’une hausse de la rentabilité avec l’objectif d’atteindre une marge opérationnelle de plus de 10 % au 31 mars 2016 ».

Les objectifs au 31 mars 2016, en ce qu’ils traduisent une « accélération de la croissance organique » et une « hausse de la rentabilité », ont ainsi été présentés aux investisseurs par Montagne et Neige Développement comme des indicateurs pertinents pour apprécier le potentiel de développement du groupe.

L’information selon laquelle ces objectifs ne seraient pas atteints, que le marché ne pouvait anticiper quelques mois seulement après leur annonce, était donc susceptible d’être utilisée par un investisseur raisonnable comme l’un des fondements de ses décisions d’investissement, et partant, d’avoir une influence sensible sur le cours de l’action Montagne et Neige Développement.

L’information litigieuse était donc privilégiée dès le 3 avril 2014, au sens de l’article 621-1 du règlement général de l’AMF.

C) Le caractère tardif de la communication de l’information privilégiée au public

En application de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF, une information privilégiée relative à l’impossibilité d’atteindre un objectif financier annoncé préalablement doit être communiquée dès que possible par l’émetteur, nonobstant l’impossibilité de chiffrer avec précision l’indicateur s’y substituant.

—  21 –

Le fait que lesdits objectifs aient été inclus à l’initiative de conseils externes, que leur réalisation soit soumise nécessairement à un aléa, ou encore que Montagne et Neige Développement ait connu « une très forte croissance » n’est pas de nature à remettre en cause cette obligation.

Montagne et Neige Développement était donc tenue de communiquer, dès possible, à compter du 3 avril 2014, l’information relative à l’incapacité d’atteindre son objectif de chiffre d’affaires et de rentabilité opérationnelle au 31 mars 2016.

En attendant plus de 6 mois avant de communiquer cette information, Montagne et Neige Développement n’a pas porté cel e-ci à la connaissance du public dès que possible.

Le manquement de Montagne et Neige Développement aux dispositions du I de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF est donc caractérisé.

D) Sur l’imputabilité du manquement à M. D

La notification de griefs impute le manquement aux dispositions de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF à M. D, en sa qualité de président-directeur général de la société à l’époque des faits, sur le fondement du dernier alinéa de l’article 221-1 du même règlement.

Il a été rappelé, à lors de l’examen du deuxième grief, que les modifications issues de l’arrêté du 14 septembre 2016 n’ont pas eu pour effet d’instituer des règles d’imputabilité au dirigeant du manquement à l’article 223-2 du règlement général de l’AMF plus douces qu’auparavant et qu’il convenait donc d’examiner l’imputabilité du manquement à M. D au regard du dernier alinéa de l’article 221-1 du règlement général de l’AMF.

Il découle de ce texte que le dirigeant a l’obligation de veil er au respect par l’émetteur des prescriptions du I de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF, dont il ne peut s’exonérer qu’en cas de circonstances particulières l’ayant privé de l’exercice total ou partiel de ses fonctions.

Aucune circonstance particulière de cette nature n’est invoquée par M. D. Au demeurant, ce dernier était destinataire des prévisions internes des 18 mars et 3 avril 2014 soulignant le risque que le groupe Montagne et Neige Développement n’atteigne pas les objectifs au 31 mars 2016.

Enfin, le fait que M. D ait souscrit, par l’intermédiaire de sa société Montagne & Vallée, à une augmentation de capital de Montagne et Neige Développement en juil et 2014 est dénué de toute portée quant à l’imputabilité du manquement.

Il en résulte que le manquement aux dispositions de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF est imputable à M. D.

5. Grief relatif à la suppression par M. D de courriels préalablement à la remise de sa messagerie aux enquêteurs.

Il est fait grief à M. D d’avoir remis, le 26 février 2016, une copie de sa messagerie professionnelle aux enquêteurs de l’AMF après l’avoir expurgée de plus de 38 000 courriels qui entraient dans le champ de la demande de communication faite la veil e par les enquêteurs à l’occasion de leur visite effectuée dans les locaux de la société, en méconnaissance du II f) de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier. La notification de griefs précise que ces courriels supprimés n’ont pu être détectés que grâce à un logiciel d’investigation numérique et qu’une expertise réalisée à la demande des enquêteurs a confirmé que la suppression était intervenue les 25 et 26 février 2016.

Le mis en cause soutient que les courriels n’ont pas été supprimés définitivement, leur absence dans la copie remise aux enquêteurs étant due à « un déplacement de fichiers après compression aux fins

—  22 –

d’archivage ». Il ajoute que les éléments ainsi archivés restaient disponibles dans les messageries professionnelles de ses collaborateurs et des prestataires externes de Montagne et Neige Développement. Enfin, il souligne que les enquêteurs n’ont pas donné suite à sa proposition, formulée dans la réponse à la lettre circonstanciée du 2 août 2016, dans laquelle il « regrette la transmission d’une information incomplète du fait du déplacement d’un dossier d’emails et rappelle qu’il tient l’ensemble de ces éléments à la disposition de l’Autorité ».

5.1 Textes applicables

Les faits litigieux, qui se sont déroulés entre le 25 et le 26 février 2016, doivent être examinés à la lumière des textes alors applicables, sous réserve de l’application rétroactive d’éventuelles dispositions plus douces entrées en vigueur postérieurement.

Le II f) de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur à la date des faits litigieux, non modifiée depuis dans un sens plus doux, dispose : « La commission des sanctions peut, après une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l’encontre des personnes suivantes : a) […] ; / f) Toute personne qui, dans le cadre d’une enquête effectuée en application du I de l’article L. 621-9, sur demande des enquêteurs et sous réserve de la préservation d’un secret légalement protégé et opposable à l’Autorité des marchés financiers, refuse de donner accès à un document, quel qu’en soit le support, et d’en fournir une copie, refuse de communiquer des informations ou de répondre à une convocation, ou refuse de donner accès à des locaux professionnels ».

L’article 30 du règlement MAR, entré en vigueur le 3 juil et 2016, dispose : « Les Etats membres, conformément au droit national, font en sorte que les autorités compétentes aient le pouvoir de prendre les sanctions administratives et autres mesures administratives appropriées en ce qui concerne au moins les violations suivantes : […] / b) défaut de coopérer ou de se soumettre à une enquête ou une inspection ou à une demande visées à l’article 23, paragraphe 2 ».

L’article 23, paragraphe 2, du règlement MAR dispose : « 2. Afin de mener à bien leurs missions au titre du présent règlement, les autorités compétentes sont dotées, conformément au droit national, au moins des pouvoirs d’enquête et de surveil ance suivants : a) avoir accès à tout document et à toute donnée, sous quelque forme que ce soit, et en recevoir ou en prendre une copie / […] b) exiger des informations de toute personne ou leur en demander […] / ».

Le règlement MAR renvoie donc au droit national le soin de sanctionner le fait, notamment, de ne pas donner aux enquêteurs « accès à tout document et à toute donnée, sous quelque forme que ce soit, et en recevoir ou en prendre une copie ».

Il n’est donc pas plus doux sur ce point que le II f) de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’en faire une application rétroactive.

5.2 L’appréciation du manquement

Le 25 février 2016, lors de leur visite au sein des locaux de Montagne et Neige Développement, les enquêteurs de l’AMF ont demandé, en application de l’article L. 621-10 du code monétaire et financier, à se faire communiquer, notamment, la copie des messageries professionnelles électroniques de certains dirigeants de la société, dont M. D, « comprenant l’intégralité des messages et documents s’y trouvant, du 1er avril 2013 à ce jour ».

A 10h50, M. D, alors à l’étranger, a été contacté téléphoniquement par les enquêteurs, qui lui ont exposé l’objet de leur visite et leurs demandes. A 11h53, M. D a transmis par courriel au directeur administratif et financier de Montagne et Neige Développement à l’époque des faits une délégation de pouvoirs l’autorisant à remettre une copie des messageries demandées aux enquêteurs.

Les opérations d’extraction de la messagerie de M. D n’ayant pas pu être finalisées le jour même, il a été

—  23 –

convenu avec les enquêteurs qu’une copie de cel e-ci leur serait transmise le lendemain par voie postale.

Le 26 février 2016, M. D a adressé une copie de sa messagerie professionnelle électronique aux enquêteurs de l’AMF, en mettant en exergue le caractère exhaustif des éléments communiqués : « Suite à votre passage en nos locaux le 25 février 2015 et comme demandé dans votre Procès-Verbal ci-joint, je vous prie de trouver la copie intégrale de ma boîte Outlook incluant l’agenda, les contacts, les tâches et les emails pour la période du 1er avril 2013 au 25 février 2015. La différence de volume constatée par vos soins hier en lien avec notre Service Informatique concerne les archives de mails avant le 1er avril 2013. Vous constaterez afin qu’il n’y ait aucun malentendu, que j’ai laissé l’ensemble de mes mails, contacts, et agenda personnels, même si ceux-ci sont clairement identifiés comme tel ».

A la demande des enquêteurs, surpris de ne pas trouver dans la copie de la messagerie électronique de M. D de dossiers relatifs à l’introduction en bourse de la société, M. Philippe Joliot, expert près la cour d’appel de Nancy, a examiné cette copie et établi un rapport daté du 8 juil et 2016.

Ce rapport indique que l’utilisation du logiciel d’investigation numérique FTK a permis de révéler que plus de 38 000 emails avaient été « supprimés définitivement » de la messagerie, c’est-à-dire non seulement supprimés de la boîte de réception mais aussi vidés de la « corbeille » de la messagerie Outlook.

Il précise également que cette suppression massive a eu lieu principalement le 25 février 2016, entre 11h18 et 11h46 (38 374 éléments définitivement supprimés) et entre 13h27 et 14h (33 éléments).

La liste, jointe à ce rapport, des éléments supprimés, tels qu’identifiés par le logiciel FTK, démontre que la quasi-totalité des courriels ont été envoyés ou réceptionnés après le 1er avril 2013 et entraient donc dans le champ de la demande des enquêteurs.

Il résulte de ce qui précède, d’une part, que la suppression, dans la messagerie professionnelle de M. D, de plus de 38 000 courriels entrant dans le champ de la demande de communication des enquêteurs a coïncidé chronologiquement avec la prise de connaissance par M. D de cette demande, d’autre part, que cette suppression ne pouvait être détectée par l’utilisateur de la copie remise aux enquêteurs qu’au moyen d’un logiciel d’investigation numérique. A supposer que la suppression de ces 38 000 courriels corresponde à un déplacement de fichier d’emails vers un site d’archivage, opération dont M. D a soutenu lors de son audition par la rapporteure qu’elle était destinée à faciliter l’extraction de sa messagerie électronique par les informaticiens de la société en vue de sa remise, il reste que ce dernier, au lieu d’en avertir les enquêteurs, a certifié dans sa lettre du 26 février 2016 que la copie remise contenait l’intégralité des éléments demandés.

La suppression de plus de 38 000 courriels de sa messagerie électronique préalablement à la remise d’une copie de celle-ci, dans des conditions qui rendaient cette suppression dif icilement détectable, conjuguée à l’indication donnée aux enquêteurs selon laquel e la copie était intégrale, s’analysent en un refus de M. D de donner accès à des éléments demandés par les enquêteurs.

Enfin, il est indifférent que d’autres messageries professionnelles communiquées aux enquêteurs aient été susceptibles de contenir des courriels supprimés ou encore que M. D ait indiqué tenir les éléments supprimés à la disposition de l’AMF, dès lors que ce dernier n’a formulé cette offre de mise à disposition qu’après avoir été informé par la lettre circonstanciée de la découverte du caractère lacunaire de la copie remise.

M. D a ainsi refusé « de donner accès à un document, quel qu’en soit le support, et d’en fournir une copie » au sens du II f) de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, de sorte que le manquement est caractérisé.

—  24 –

IV SANCTIONS ET PUBLICATION

Montagne et Neige Développement et M. D ont méconnu :

— les dispositions de l’article 223-2 du règlement général de l’AMF, en ne communiquant pas au public dès que possible les informations privilégiées relatives à l’impossibilité d’atteindre les objectifs au 31 mars 2014 et au 31 mars 2016 annoncés lors de l’introduction en bourse ;

— les dispositions de l’article 632-1 du règlement général de l’AMF, en ne précisant pas dans le prospectus d’introduction en bourse qu’une partie des fonds levés avaient vocation à régler les arriérés fournisseurs ;

— les dispositions des articles 223-1 et 632-1 du règlement général de l’AMF, en ne précisant pas dans le communiqué de presse du 29 janvier 2014 le périmètre de référence du chiffre d’affaires prévisionnel de 65 mil ions d’euros au 31 mars 2014, alors qu’il était différent de celui sur lequel était assis l’objectif de chiffre d’affaires au 31 mars 2014 annoncé lors de l’introduction en bourse.

M. D a enfin méconnu les dispositions du II f) de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, en ayant supprimé plus de 38 000 courriels de sa messagerie électronique avant la remise d’une copie de celle-ci aux enquêteurs.

L’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur du 28 juil et 2013 au 5 juin 2016, non modifiée depuis dans un sens moins sévère, dispose : « II.- La commission des sanctions peut, après une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l’encontre des personnes suivantes : […] / c) Toute personne qui, sur le territoire français ou à l’étranger, s’est livrée ou a tenté de se livrer à une opération d’initié, à une manipulation de cours, à la diffusion d’une fausse information ou s’est livrée à toute autre manquement mentionné au premier alinéa du I. de l’article L. 621-14, dès lors que ces actes concernent : / – un instrument financier […] admis aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation qui se soumet aux dispositions législatives ou réglementaires visant à protéger les investisseurs contre les opérations d’initiés, les manipulations de cours et la diffusion de fausses informations […] ».

Le premier alinéa du I de l’article L. 621-14 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur aux mêmes dates, fait référence à « tout autre manquement de nature à porter atteinte à la protection des investisseurs ou au bon fonctionnement du marché ».

Les manquements à la qualité de l’information donnée au public et à l’obligation de communiquer dès que possible au public toute information privilégiée sont de nature à porter atteinte à la protection des investisseurs et au bon fonctionnement du marché et, en conséquence, passibles de sanctions sur le fondement du II c) précité de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier.

Quant au manquement d’entrave, il est passible de sanction sur le fondement du II f) du même article.

Le III de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans la même version, non modifiée depuis dans un sens moins sévère, dispose : « III.- Les sanctions applicables sont : […] c) Pour les personnes autres que l’une des personnes mentionnées au II de l’article L. 621-9, auteurs des faits mentionnés aux c à g du II, une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 100 mil ions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuel ement réalisés ; les sommes sont versées au Trésor public ».

Montagne et Neige Développement et M. D encourent donc chacun une sanction au plus égale à 100 mil ions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuel ement réalisés.

Le III ter de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur depuis le 11 décembre 2016, dispose : « Dans la mise en œuvre des sanctions mentionnées aux III et III bis, il est tenu compte notamment : - de la gravité et de la durée du manquement ; / - de la qualité et du degré

—  25 –

d’implication de la personne en cause ; / - de la situation et de la capacité financières de la personne en cause, au vu notamment de son patrimoine et, s’agissant d’une personne physique de ses revenus annuels, s’agissant d’une personne morale de son chiffre d’affaires total ; / – de l’importance soit des gains ou avantages obtenus, soit des pertes ou coûts évités par la personne en cause, dans la mesure où ils peuvent être déterminés ; / - des pertes subies par des tiers du fait du manquement, dans la mesure où elles peuvent être déterminées ; / - du degré de coopération avec l’Autorité des marchés financiers dont a fait preuve la personne en cause, sans préjudice de la nécessité de veil er à la restitution de l’avantage retiré par cette personne ; /- des manquements commis précédemment par la personne en cause ; / - de toute circonstance propre à la personne en cause, notamment des mesures prises par elle pour remédier aux dysfonctionnements constatés, provoqués par le manquement qui lui est imputable et le cas échéant pour réparer les préjudices causés aux tiers, ainsi que pour éviter toute réitération du manquement ».

En l’espèce, les manquements aux obligations d’information ont eu pour effet, d’une part, de tromper les investisseurs sur la destination des fonds qui seraient levés grâce à l’introduction en bourse, d’autre part, de soustraire à la connaissance de ces derniers la dégradation de la situation de Montagne et Neige Développement au regard des objectifs annoncés lors de cette opération pendant une période qui a duré plus de six mois s’agissant de l’impossibilité d’atteindre les objectifs fixés au 31 mars 2016 et, enfin, de masquer l’ampleur de la révision à la baisse de l’objectif de chiffre d’affaires.

Concernant M. D, il convient de prendre en considération le fait qu’il était particulièrement impliqué dans la communication financière de Montagne et Neige Développement et avait un rôle décisionnaire en la matière, comme l’il ustre le projet du communiqué de presse du 29 janvier 2014, dont il a imposé le contenu sans tenir compte des alertes de son directeur administratif et financier sur la qualité de l’information.

Enfin, la suppression par M. D de plus de 38 000 courriels de sa messagerie préalablement à la remise d’une copie de cel e-ci aux enquêteurs de l’AMF est particulièrement grave, en ce qu’el e avait pour objet d’induire en erreur ces derniers sur le contenu de cette messagerie, de dissimuler des éléments pertinents pour l’enquête et, en conséquence, de faire obstacle à la manifestation de la vérité.

Montagne et Neige Développement a réalisé au 31 mars 2017 un chiffre d’affaires annuel de 8,4 millions d’euros et enregistré une perte de 267 754 €. Il sera relevé au surplus que le chiffre d’affaires consolidé du groupe Montagne et Neige Développement est de 76,4 mil ions d’euros pour un résultat net de 2,2 millions d’euros. Quant à M. D, il a déclaré […] de revenus au titre de l’année 2016. Selon les informations transmises par ce dernier à la rapporteure, son patrimoine serait d’environ […], montant auquel il convient toutefois d’ajouter la valeur, non connue, de ses actions représentant 70,56 % du capital de la société Montagne et Vallée, qui détient el e-même 35,48 % du capital et 51 % des droits de vote de Montagne et Neige Développement.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, il sera prononcé une sanction pécuniaire de 400 000 euros à l’égard de Montagne et Neige Développement et de 150 000 euros à l’encontre de M. D.

Le V de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, dispose : « La décision de la commission des sanctions est rendue publique dans les publications, journaux ou supports qu’elle désigne, dans un format proportionné à la faute commise et à la sanction infligée. Les frais sont supportés par les personnes sanctionnées. / La commission des sanctions peut décider de reporter la publication d’une décision ou de publier cette dernière sous une forme anonymisée ou de ne pas la publier dans l’une ou l’autre des circonstances suivantes / : a) Lorsque la publication de la décision est susceptible de causer à la personne en cause un préjudice grave et disproportionné, notamment, dans le cas d’une sanction infligée à une personne physique, lorsque la publication inclut des données personnelles ; / b) Lorsque la publication serait de nature à perturber gravement la stabilité du système financier, de même que le déroulement d’une enquête ou d’un contrôle en cours […] ».

—  26 –

La publication de la présente décision n’est ni susceptible de causer aux personnes mises en cause un préjudice grave et disproportionné, ni de nature à perturber gravement la stabilité du système financier ou encore le déroulement d’une enquête ou d’un contrôle en cours. Le seul fait qu’une telle publication soit de nature à préjudicier aux intérêts des mis en cause, comme l’affirment ces derniers, ne constitue pas un motif suffisant pour décider en application du texte mentionné ci-dessus d’anonymiser la présente décision. La publication sera donc ordonnée sans anonymisation.

PAR CES MOTIFS,

Et ainsi qu’il en a été délibéré par M. Jean Gaeremynck, Président de la 2ème section de la Commission des sanctions, par M. Didier Guérin, Mme Anne-José Fulgeras, MM. Christophe Lepitre et Lucien Millou, membres de la 2ème section de la Commission des sanctions, en présence du secrétaire de séance, la Commission des sanctions :

— prononce à l’encontre de la société Montagne et Neige Développement une sanction pécuniaire de 400 000 € (quatre cent mil e euros) ;

— prononce à l’encontre de M. D une sanction pécuniaire de 150 000 € (cent cinquante mil e euros) ;

— ordonne la publication de la présente décision sur le site Internet de l’Autorité des marchés financiers et fixe à cinq ans à compter de la date de la présente décision la durée de son maintien en ligne de manière non anonyme.

Fait à Paris, le 7 mai 2018

Le Secrétaire de séance,

Le Président,

Marc-Pierre Janicot

Jean Gaeremynck

Cette décision peut faire l’objet d’un recours dans les conditions prévues à l’article R. 621-44 du code monétaire et financier.

Document Outline

  • I. FAITS
  • III. MOTIFS DE LA DÉCISION
  • 2.1 Textes applicables
  • 2.2 L’appréciation du manquement
    • 3.1 Textes applicables
    • 3.2 Sur l’appréciation du manquement
    • E) L’imputabilité du manquement à M. D à l’article 223-1 du règlement général de l’AMF
    • 4.1 Textes applicables
  • 4.2 L’appréciation du manquement
    • 5.1 Textes applicables
  • 5.2 L’appréciation du manquement
    • IV SANCTIONS ET PUBLICATION
    • La publication de la présente décision n’est ni susceptible de causer aux personnes mises en cause un préjudice grave et disproportionné, ni de nature à perturber gravement la stabilité du système financier ou encore le déroulement d’une enquête ou d’…
    • PAR CES MOTIFS,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Décision de la Commission des sanctions du 7 mai 2018 à l'égard de la société X et de M. D