Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 30 mars 2004, n° 08/13547

  • Train·
  • Gauche·
  • Force majeure·
  • Quai·
  • Victime·
  • Préjudice·
  • Voyageur·
  • Expertise·
  • Faute·
  • Transporteur

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 30 mars 2004, n° 08/13547
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 08/13547

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

10° Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 03 FEVRIER 2010

N° 2010/

Rôle N° 08/13547

B X

C/

SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANCAIS S.N.C.F.

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE

Grosse délivrée

le :

à :

réf

Décision déférée à la Cour :

Prononcé sur saisine de la Cour suite à l’arrêt de la Cour de Cassation de PARIS en date du 13 Mars 2008 enregistré au répertoire général sous le n° W05-12551 qui a cassé et annulé l’arrêt n° 04/235 rendu le 30 mars 2004 par la Cour d’Appel D’AIX EN PROVENCE 10e Chambre

Appel d’un Jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 02 juillet 2001

DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

Madame B X

née le XXX à XXX

représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY – LEVAIQUE, avoués à la Cour

ayant Me Sophie DERAISON avocat au barreau du Val de Marne

DEFENDERESSES SUR RENVOI DE CASSATION

SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANCAIS S.N.C.F., RCS PARIS N° B 552 049 447 prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège, XXX

représentée par la SCP PRIMOUT-FAIVRE, avoués à la Cour,

assistée de la SCP SCAPEL ET ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE substituée par Me Aude VAISSIERE, avocat au barreau de MARSEILLE

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE, XXX

représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour,

ayant Me Jacques DEPIEDS, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785, 796, et 910 du Code de procédure Civile, l’affaire a été débattue le 10 novembre 2009 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Brigitte VANNIER, Présidente et Mme Marie-Vianneytte BOISSEAU, Conseiller, chargés du rapport.

Mme Marie-Vianneytte BOISSEAU, Conseiller a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu-compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme Brigitte VANNIER, Présidente

Madame Marie-Vianneytte BOISSEAU, Conseiller

Madame Chantal ACQUAVIVA, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame D E.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Janvier 2010. Le 06 janvier 2010 le délibéré a été prorogé au 03 février 2010

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 février 2010,

Signé par Mme Brigitte VANNIER, Présidente et Madame D E, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Le 26 septembre 1999, B X a été victime en gare SNCF d’ Avignon d’un accident lors duquel elle a eu la jambe gauche sectionnée au dessus du genou.

Par jugement rendu le 02.07.2001, le tribunal de grande instance de Marseille a déclaré la SNCF responsable contractuellement, sur le fondement de l’article 1147 du Code Civil, du préjudice subi par B X à hauteur de la moitié du dommage en raison de la faute commise par cette dernière, a condamné la SNCF à réparer la moitié du préjudice subi par B X et à lui verser une provision de 50.000 francs et la somme de 3000 francs au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile et a ordonné une expertise médicale de la victime, l’exécution provisoire étant prononcée;

B X a interjeté appel de cette décision le 25.09.2001;

Par arrêt en date du 13.03.2008, statuant sur le pourvoi formé par B X contre l’arrêt du 30.03.2004 de la Cour d’Appel d’Aix en Provence confirmant le jugement du 02.07.2001, la Cour de Cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l’arrêt attaqué;

'

' '

Vu la déclaration de saisine après arrêt de cassation au nom de B Ibournoi en date du 18.07.2008 et les conclusions déposées par celle-ci le 15.12.2008;

Vu les conclusions déposées le 04.06.2009 par la SNCF;

Vu les conclusions déposées le 05.03.2009 par la CPAM des Bouches du Rhône se réservant le droit de réclamer ultérieurement le remboursement des prestations versées;

MOTIFS DE L’ARRÊT:

Sur la responsabilité de la SNCF:

Attendu qu’il ressort des pièces versées aux débats que le 26.09.1999 , B X, voyageant en train de Marseille à Toulon, est descendue à l’arrêt en gare d’Avignon ainsi que plusieurs autres passagers du même wagon, dont M. F Y, mais que, lorsque le train a commencé à repartir, et tandis que ces personnes ont pu précipitamment remonter dans le train, B X tentant aussi d’y parvenir, a chuté entre le quai et le train et a été grièvement blessée;

que, soutenant qu’elle n’a pas commis de faute présentant les caractères de la force majeure et invoquant le non respect par la SNCF de son obligation de sécurité de résultat, B X sollicite l’infirmation du jugement rendu le 2.07.2001, et la condamnation de la SNCF à réparer l’intégralité des préjudices qu’elle a subis du fait de l’accident;

que la SNCF, prétend au principal, que la faute de B X, imprévisible et irrésistible ,est seule exclusivement à l’origine du dommage qu’elle a subi et constitue un cas de force majeure exonératoire de la responsabilité de la SNCF et qu’elle conclut à titre subsidiaire, à la confirmation du jugement entrepris prévoyant un partage de responsabilité;

Attendu que l’exécution du contrat de transport comportant pour le transporteur l’obligation de conduire le voyageur sain et sauf à destination est générateur d’une obligation de sécurité de résultat de nature à engager sur le fondement de l’article 1147 du Code Civil la responsabilité contractuelle du transporteur;

qu’en l’espèce, et sans qu’il y ait lieu de rechercher à ce stade les fautes éventuelles de la SNCF, les blessures avérées et non contestées subies par B X au cours de l’exécution du contrat de transport liant celle-ci au transporteur suffisent à établir le manquement de la SNCF à son obligation de sécurité de résultat;

Attendu , cependant, que le transporteur ferroviaire peut s’exonérer de la responsabilité de plein droit qui pèse ainsi sur lui s’il démontre l’existence d’une cause étrangère, soit un cas de force majeure, le fait d’un tiers ou la faute de la victime;

qu’en l’espèce la SNCF invoque la faute de Madame X mais qu’elle ne peut s’exonérer de sa responsabilité que si cette faute présente les caractères de la force majeure, auquel cas cette faute emporte nécessairement exonération totale;

Attendu qu’il est incontestable, en l’espèce, que B X a contrevenu à la réglementation des chemins de fer et en particulier à l’article 74 alinéa 5 du décret du 22.03.1942 qui interdit à toute personne de monter ou descendre lorsque le train n’est pas complètement arrêté et à l’arrêté du 28.04.2004 également invoqué par la SNCF qui prévoit que les voyageurs ne doivent monter dans un train ou en descendre que lorsque le train est à quai et à l’arrêt;

qu’en effet, il est établi que B X a tenté de monter dans le train alors que celui-ci était en marche, ainsi que cela résulte tant des déclarations de M. Y que de celles de M. Z, employé de la SNCF;

qu’en revanche, les déclarations , contradictoires sur ces points, de ceux-ci, ne permettent pas de savoir si le jour de l’accident le départ du train a été préalablement et correctement annoncé et si les portes étaient à ce moment là ouvertes ou fermées;

que s’agissant de la neutralité du témoignage de M. Y mise en doute par la SNCF, s’il est vrai qu’il ressort de certaines pièces versées aux débats , et en particulier de la main-courante du 26.09.1999, que celui-ci est l''ami’ de la victime, force est de rappeler que M. Z est l’employé de la SNCF;

qu’aucun témoin neutre n’a pu être identifié et entendu;

Attendu qu’en considération de ces éléments, la faute d’imprudence commise par B X , si elle revêt , certes, une gravité certaine, ne présente pas les caractères d’imprévisibilité et d’irresistibilité de la force majeure ;

qu’en effet, la descente momentanée de voyageurs sur le quai d’une gare lors de l’arrêt d’un train, devant donc remonter lorsque ce dernier repart, n’est nullement imprévisible et qu’il ressort en outre des pièces produites que le quai et le train n’étaient manifestement pas suffisamment surveillés alors qu’un nombre suffisant d’agents pouvant dissuader par leur simple présence les voyageurs ou même intervenir pour empêcher ceux-ci de commettre une imprudence , aurait permis d’éviter l’accident;

qu’il apparaît, en outre, que le train a pu repartir avec un portière maintenue (en l 'espèce par M. Y) en position ouverte, et ce, assez longtemps pour que quatre personnes descendues sur le quai en même temps que la victime puissent remonter dans le train déjà en marche alors qu’un système interdisant l’ouverture des portières dans de telles conditions aurait également permis d’éviter l’accident;

Attendu que la SNCF tenue à une obligation de sécurité de résultat envers B X , ne démontre pas l’existence d’une faute imputable à cette dernière présentant le caractère de la force majeure lui permettant de s’exonérer totalement de cette obligation et qu’elle ne peut s’en exonérer partiellement en faisant la démonstration d’une simple faute d’imprudence, même grave, de la voyageuse;

que dès lors, la décision du tribunal qui a décidé que l’attitude de Mme X avait contribué à la survenance de l’accident et exonérait partiellement la SNCF de la moitié de la responsabilité pesant sur elle et qui a condamné cette dernière à indemniser la victime de la moitié de son préjudice doit être infirmée;

que la SNCF doit être déclarée entièrement responsable de l’accident du 26.09.1999 et condamnée à réparer l’intégralité des préjudices subis par B X;

Sur l’évaluation du préjudice et les demandes d’expertise et de provision formées par B X

Attendu que le docteur A désigné le 20 octobre 2001 pour procéder à l’expertise médicale ordonnée par le jugement dont appel a retenu dans son rapport déposé le 02 mai 2002 que l’accident dont B X, née le XXX, a été victime le 26 septembre 1999 a entraîné :

' un traumatisme crânien sans perte de connaissance initiale

' un traumatisme thoraco-abdominal avec des démarbrasions cutanées au niveau de l’hémi-thorax gauche ainsi qu’au niveau du flanc gauche

' un traumatisme du bassin avec une fracture sacrée à droite, une disjonction sacro-illiaque et une fracture de la branche ischio-pubienne gauche

' des plaies multiples du membre inférieur droit

' une entorse grave du genou droit

' une section du membre inférieur gauche au niveau des 2/3, 1/3 inférieur de la cuisse gauche.

Qu’il précise que la section du membre inférieur gauche a donné lieu a de nombreuses interventions chirurgicales de greffe et d’aménagement du moignon d’amputation et que la patiente, porteuse d’une prothèse articulée de cuisse, ne peut être considérée comme consolidée et est à revoir dans un an ;

Que ses conclusions prévisionnelles sont les suivantes :

' ITT : tous les éléments n’ayant pas été fournis, on peut retenir dans un premier temps : du 26 septembre 1999 au 26 septembre 2000

' Pretium doloris : non inférieur à 4,5/7

' Préjudice esthétique : non inférieur à 3,5/7

' IPP : non inférieure à 40%

Que B X fait valoir que depuis le dépôt du rapport datant de plus de 6 ans, elle a été, à maintes reprises hospitalisée pour des changements de prothèses et n’a jamais été réexaminée par l’expert, si bien qu’elle sollicite une nouvelle expertise permettant de fixer ses préjudices ;

Que la SNCF ne s’oppose pas à cette demande ;

Attendu qu’au regard des conclusions du Docteur A faisant ressortir que lors de son examen, B X n’était pas encore consolidée, de sorte que l’expert n’a pu formuler que des conclusions prévisionnelles, une expertise complémentaire s’impose, et ce, d’autant que le rapport est effectivement ancien et que B X produit des documents médicaux postérieurs ;

Que cette expertise complémentaire doit être confiée au même expert qui possède déjà toutes les données de base et a déjà examiné de nombreux documents médicaux et qui pourra ainsi actualiser et affiner ses conclusions en prenant en compte l’évolution de l’état de santé de B X ;

Attendu que B X sollicite l’allocation d’une nouvelle provision à hauteur de 50 000 euros et que la SNCF propose la somme de 7 000 euros ;

Attendu que compte tenu des provisions déjà perçues par B X, soit la somme de 50 000 francs (7 622,45 euros) en vertu du jugement dont appel et celle de 7 630 euros selon ordonnance d’incident du 23 octobre 2003, et en l’état des graves lésions présentées par B X, de son incapacité permanente qui ne sera pas inférieure à 40% et de l’importance prévisible de ses préjudices, il lui sera allouée une provision complémentaire de 20 000 euros ;

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Attendu qu’il sera sursis à l’application de l’article 700 et que les dépens seront réservés ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

— Infirme le jugement déféré sur la responsabilité et statuant à nouveau,

— déclare la SNCF contractuellement et entièrement responsable du préjudice subi par B X du fait de l’accident dont elle a été victime le 26 septembre 1999 ;

— condamne la SNCF à réparer l’intégralité des préjudices subis par B X ;

— confirme le jugement déféré en ce qu’il a ordonné une expertise médicale ;

Y ajoutant,

— ordonne une mesure d’expertise médicale en complément de celle effectuée par ses soins le 02 mai 2002 ;

Désigne pour y procéder Monsieur le Docteur A, inscrit sur la liste des experts de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence demeurant 152, XXX . Marseille 13008, lequel aura pour mission :

— d’examiner Madame B X

— d’ indiquer son état antérieur à l’accident du 26 septembre 1999 ;

— de décrire les lésions qui lui ont été causées par l’accident du 26 septembre 1999, en exposer les conséquences, estimer la durée de l’incapacité totale et/ou partielle de travail en indiquant la date de consolidation des blessures, apprécier le degré des souffrances physiques supportées, évaluer le taux de l’incapacité permanente partielle qui peut subsister avec, le cas échéant sa répercussion sur la vie professionnelle, indiquer si l’état de la victime nécessite l’assistance d’une tierce personne, donner son avis sur le préjudice esthétique ainsi que sur le préjudice d’agrément ;

— d’indiquer l’évolution prévisible dans le temps de l’état de la victime ;

— dit que pour l’accomplissement de sa mission l’expert devra convoquer et entendre les parties, recueillir leurs observations et se faire remettre toutes pièces utiles à l’accomplissement de sa mission

— Dit que l’expert pourra, s’il le juge nécessaire, recueillir l’avis d’un autre technicien dans une spécialité distincte de la sienne ;.

— Dit que l’expert devra déposer son rapport en double exemplaire, au secrétariat-greffe de la Cour de céans dans les quatre mois de l’avertissement qui lui sera donné par ce greffe du versement de la provisions, et conformément à l’article 173 du Code de procédure civile, en le mentionnant dans l’original, remettre aux parties et à leurs avoués copie de son rapport.

— Dit encore que Madame B X , devra consigner dans le mois de la présente décision la somme de 400 euros à la régie d’avances et de recettes de la cour d’appel d’Aix-en- Provence destinée à garantir le paiement des frais et honoraires de l’expert ;

— Désigne le Conseiller de la Mise en Etat de la 10e Chambre de la Cour de céans pour contrôler l’expertise ordonnée.

— Condamne la SNCF à verser à Madame B X une provision de 20 000 euros à valoir sur son préjudice définitif ;

— Sursoit à statuer sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile;

— Réserve les dépens.

Le Greffier, Le Président,

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 30 mars 2004, n° 08/13547