Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-6, 2 mai 2019, n° 18/05857

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 1-6, 2 mai 2019, n° 18/05857
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 18/05857
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Grasse, 19 février 2018, N° 12/01649
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-6

ARRÊT AU FOND

DU 02 MAI 2019

N° 2019/174

Rôle N° 18/05857

N° Portalis DBVB-V-B7C-BCHEW

SA L’EQUITE

C/

D Y

F Z

Organisme FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE D OMMAGES

Organisme CPAM DE SEINE ET MARNE MARNE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me M. GOUGOT

Me C. TOLLINCHI

Me A. TUILLIER

Me B. VERIGNON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 20 Février 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 12/01649.

APPELANTE

SA L’EQUITE,

prise en la personne de son représentant légal en exercice

siège social 7 Bd Haussmann – 75442 PARIS CEDEX 09

représentée et plaidant par Me Michel GOUGOT de la SCP TROEGELER GOUGOT B R E D E A U T R O E G E L E R M O N C H A U Z O U , a v o c a t a u b a r r e a u d’AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur D Y

assuré n° 1 73 12 51 649 056/09

né le […] à […]

[…]

représenté par Me Charles TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Aurélie HUERTAS, avocate au barreau de NICE, substituée par Me Cyril OFFENBACH, avocat au barreau de NICE

Monsieur F Z

[…]

assigné le 21/06/2018 + 30/07 – 03/10 par PVR article 659 du CPC

défaillant

FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES,

prise en la personne de son représentant légal en exercice

siège 64 rue Defrance – 94300 VINCENNES

représentée et plaidant par Me Alain TUILLIER, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

CPAM DE SEINE ET MARNE,

prise en la personne de son représentant légal en exercice

siège rue des Meuniers – Rubelles – 77951 MELUN Cedex

représentée et assistée par Me Benoît VERIGNON, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 06 Mars 2019 en audience publique. Conformément à l’article 785 du code de procédure civile, Madame Anne VELLA, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier GOURSAUD, Président

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

Madame Anne VELLA, Conseiller (rédactrice)

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame I J.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Mai 2019.

ARRÊT

Défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Mai 2019,

Signé par Monsieur Olivier GOURSAUD, Président et Madame Charlotte COMBARET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé des faits et procédure

M. D Y a été victime le 2 mai 1998, sur l’autoroute A8 dans le sens Aix/Nice à hauteur de Mandelieu, d’un accident de la circulation impliquant un véhicule taxi conduit par M. F Z, assuré auprès de la société l’Équité.

Suivant jugement du 20 octobre 2003, sur la base du rapport d’expertise du docteur X, le tribunal de grande instance de Grasse a liquidé le préjudice corporel de M. Y. Suivant arrêt du 9 janvier 2007 la cour d’appel d’Aix-en-Provence a confirmé le jugement en réformant certains postes de préjudice et a notamment déclaré irrecevable la demande de l’Equité à l’encontre du C, portant sur la reconnaissance de règlements effectués 'pour le compte de qui il appartiendra' en raison de la nullité du contrat d’assurance souscrit par M. Z, prononcée par la cour d’appel d’Aix-en-Provence le 5 janvier 2006.

Arguant d’une aggravation de son état, constatée par un certificat médical du 11 avril 2008 établi par le docteur A, M. Y a fait assigner M. Z et l’Equité en présence de la Cpam de Seine et Marne pour obtenir la désignation d’un expert médical et le versement d’une provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice corporel. Selon ordonnance du 27 octobre 2008, le juge des référés a désigné le professeur Savornin en qualité d’expert et il a rejeté la demande de provision en mettant l’Equité hors de cause.

Par arrêt du 1er juillet 2010 la cour d’appel d’Aix-en-Provence a confirmé les dispositions non critiquées de l’ordonnance du 27 octobre 2008 s’agissant de l’expertise médicale ordonnée et du rejet de la demande de provision mais en la réformant en maintenant en la cause le C et l’Equité.

Le professeur Savornin a déposé son rapport le 28 mars 2011 après avoir recueilli l’avis d’un sapiteur infectiologue, le docteur B. Il a conclu à l’existence d’une aggravation apparue le 5 février 2007, consolidée le 11 avril 2008 et justifiant 2 % de déficit fonctionnel permanent supplémentaire, de nouvelles souffrances endurées, un nouveau préjudice esthétique et un besoin en aide humaine d’une heure par jour, le reste des postes restant identique à ceux évalués par l’expertise 2001.

Par actes des 8, 12 et 15 mars 2012, M. Y a fait assigner M. Z et l’Equité devant le tribunal de grande instance de Grasse, pour obtenir l’indemnisation de ses préjudices en aggravation et ce, en présence de caisse primaire d’assurance-maladie de Seine-et-Marne.

Par jugement du 3 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Grasse a sursis à statuer sur l’ensemble des demandes en invitant les parties à procéder à la signification de leurs écritures et bordereaux de pièces à M. Z en renvoyant l’affaire à l’audience du mardi 20 septembre 2016.

Selon jugement du 22 novembre 2016,le tribunal de grande instance de Grasse a sursis à statuer sur l’ensemble des demandes en invitant M. Y, le C et l’Equité à faire signifier par voie d’huissier leurs dernières écritures à M. Z, défaillant.

Par jugement du 18 juillet 2017, le tribunal de grande instance de Grasse a ordonné la réouverture des débats en invitant les parties à conclure sur la liquidation judiciaire de M. Z et à verser aux débats le cas échéant le jugement de clôture de la liquidation judiciaire de M. Z tout en rappelant aux parties qu’elles sont tenues de faire procéder à la signification de leurs écritures et de leurs pièces à M. Z. L’affaire a été renvoyée à l’audience de plaidoirie du 18 septembre 2017, puis une nouvelle fois renvoyée, l’affaire a été retenue à l’audience du 7 décembre 2017.

Par jugement du 20 février 2018, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, le tribunal a :

— dit que l’exception de non garantie invoquée par l’Equité est inopposable à M. Y et au C en vertu des dispositions de l’article L. 421-5 du code des assurances ;

— mis hors de cause le C,

— dit que M. Z et l’Equité, respectivement conducteur et assureur du véhicule impliqué dans l’accident dont a été victime M. Y, en 1998 doivent l’indemniser de l’intégralité des préjudices résultant de l’aggravation de son état ;

— condamné in solidum M. Z et l’Equité à payer à M. Y la somme de 214'560,88€ en réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances ;

— dit que la condamnation étant prononcée en deniers ou quittance, il y a lieu d’en déduire toutes provisions déjà versées ;

— dit qu’en application de l’article 1153-1 du code civil la somme de 214'560,88€ est assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement ;

— condamné in solidum M. Z et l’Equité à payer à la Cpam de Seine-et-Marne la somme de 240'456,76€ au titre des prestations réglées avec intérêts légaux à compter du 18 septembre 2012, date de la signification de ses premières écritures, outre la

somme de 1047€ au titre de l’indemnité forfaitaire visée par l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

— condamné in solidum M. Z et l’Equité à payer en application de l’article 700 du code de procédure civile, à M. Y la somme de 1500€ et à la Cpam de Seine-et-Marne la somme de 1500€ ;

— rejeté toutes demandes plus amples ou contraires ;

— condamné in solidum M. Z et l’Equité au paiement des entiers dépens avec distraction.

Le tribunal a jugé :

— qu’en l’absence de procédure de liquidation en cours, l’action en justice engagée par M. Y à l’encontre de M. Z est recevable,

— que l’expertise établit l’aggravation de l’état séquellaire de M. Y justifiant l’indemnisation du nouveau dommage en lien avec l’accident du 2 mai 1998.

S’agissant de la demande de mise hors de cause de l’Equité et du C, le tribunal a rappelé que par arrêt du 5 janvier 2006, rendu en l’absence de M. Y, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a déclaré nul et de nul effet le contrat d’assurance souscrit par M. Z auprès de l’Equité pour fausse déclaration intentionnelle en raison de la non-déclaration d’une aggravation du risque résidant dans sa nouvelle profession d’artisan taxi. C’est pourquoi l’Equité a sollicité sa mise hors de cause pure et simple en demandant à ce que le C la relève en garantie. Le C a soutenu qu’il ne peut être appelé en intervention que dans l’hypothèse d’une nullité du contrat opposable à la victime ce qui n’est pas le cas en l’espèce, d’une part parce que l’arrêt du 5 juin 2006 n’a pas été rendu au contradictoire de M. Y et d’autre part parce que dans un arrêt du 9 janvier 2007 venant confirmer le jugement du 20 octobre 2003, la cour d’appel a indiqué que le droit à indemnisation de la victime n’était pas contesté par les défendeurs et qu’il convenait en conséquence de condamner in solidum M. Z et l’Equité pour le compte de qui il appartiendra, à réparer le préjudice subi. De son côté, M. Y a contesté l’autorité de la chose jugée attachée à l’arrêt du 5 janvier 2006 ayant prononcé la nullité du contrat d’assurance au motif qu’il n’était pas partie à cette instance, en ajoutant que l’Equité n’a pas respecté les dispositions de l’article R. 421-5 du code des assurances, la lettre recommandée avec accusé de réception ayant été envoyée à 'M. D Mesura’ au lieu de 'M. D Y', lettre qui a été retournée à l’envoyeur.

Le tribunal a jugé que l’Equité n’a pas respecté les dispositions impératives prescrites par l’article R. 421-5 du code des assurances et elle est donc irrecevable à opposer à M. Y l’exception de nullité du contrat. Cette nullité étant inopposable à la victime, il a considéré que le C devait être mis hors de cause et que M. Z et l’Equité sont tenus in solidum à prendre charge l’indemnisation du préjudice de M. Y sur aggravation.

Répondant à la prétention de l’Equité tendant au remboursement par le C des sommes qu’elle a versées au titre de la réparation du dommage initial subi par M. Y, le tribunal a considéré que la demande n’était pas prescrite, mais que l’Equité n’ayant pas respecté à l’égard de la victime, les formes imposées par l’article R. 421-du code des assurances, elle ne peut prétendre au remboursement demandé des sommes dont elle s’est acquittée dans le cadre de la procédure initiale en réparation du

préjudice corporel de M. Y.

Il a jugé que M. Z et l’Equité sont tenus de réparer les conséquences intégrales de l’aggravation en jugeant que même s’il est établi par l’expert que la moitié de l’aggravation du dommage subi par la victime relève d’une cause non imputable à l’auteur de l’accident, M. Y conserve un droit à réparation intégrale du dommage résultant des conséquences du comportement de M. Z sans lequel le dommage ne se serait pas produit. En l’espèce il a rappelé que M. Y a vu son état aggravé par un défaut technique d’une ostéosynthèse qui n’aurait pas été pratiquée sans les dommages corporels consécutifs à l’accident.

Il a détaillé les différents postes de préjudice sur aggravation de la façon suivante :

— dépenses de santé actuelles : 41'422,77€ pris en charge par la Cpam,

— assistance par tierce personne temporaire : à raison d’une heure par jour sur 365 jours par an moyennant un coût horaire de 12€ : 28'860€

— assistance par tierce personne permanente au titre des arrérages échus : 43'224€

— assistance par tierce personne permanente à échoir : 124'825,62€

— perte de gains professionnels actuels : rejet

— perte de gains professionnels futurs : rejet

— déficit fonctionnel temporaire total : 1259,82€

— déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 33 % : 2891,44€

— souffrances endurées 4/7 : 10'000€

— déficit fonctionnel permanent 2 % venant s’ajouter aux 30 % précédemment évalués : 4400€, somme totalement absorbée par le montant des pensions d’invalidité versée par la Cpam à hauteur de 199'033,99€,

— préjudice esthétique permanent 2/7 : 3500€.

Le tribunal a évalué à 457'017,64€ le montant global du préjudice dont une somme de 214'560,88€ revenant à la victime et celle de 240'456,76€ due à la Cpam.

Par déclaration du 3 avril 2018,l’Equité a relevé appel à l’encontre du C de ce jugement dans toutes ses dispositions.

Par déclaration du 20 avril 2018, l’Equité a relevé appel à l’encontre de M. Y et de la Cpam de Seine-et-Marne de ce jugement dans toutes ses dispositions.

Par déclaration du 15 mai 2018, le C a relevé appel à l’encontre de M. Y et de M. Z de ce jugement en précisant que l’appel porte sur la condamnation de M. Z à payer à M. Y la somme de 214'560,88€ et tend à obtenir une réduction de cette somme en ramenant l’évaluation des différents postes de préjudice corporel de M. Y à de plus justes proportions.

La régularité et la recevabilité de ces trois déclarations d’appel, qui ont donné lieu à une jonction, ne sont pas contestées

Prétentions et moyens des parties

Selon ses conclusions du 7 février 2019, l’Equité demande à la cour de :

' réformer le jugement ;

sur la demande de M. Y

' constater que par arrêt devenu irrévocable du 5 janvier 2006, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a définitivement jugé que le contrat d’assurance souscrit par M. Z auprès d’elle était nul et de nul effet et que cet assureur était fondé à dénier toute garantie à raison de l’accident litigieux dont M. Y a été victime ;

' juger que cet arrêt est revêtu de l’autorité de la chose jugée envers le C et qu’il est opposable à M. Y ;

' juger en conséquence qu’elle ne peut devoir en l’espèce aucune garantie à M. Y à raison des indemnités qu’il réclame au titre de l’aggravation de son préjudice corporel ;

' juger, en l’état de l’arrêt du 5 janvier 2006 de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, n’y avoir lieu à une quelconque condamnation à son encontre ;

' la mettre en conséquence purement et simplement hors de cause ;

à titre subsidiaire et si la cour venait à la condamner à indemniser M. Y

' condamner dans ce cas le C à la relever et la garantir de toutes condamnations en principal intérêts et frais, qui viendraient à être portées contre elle au profit de M. Y et de l’organisme social ;

' condamner de surcroît et en toute hypothèse le C à lui rembourser la somme de 144'940,15€ qu’elle a réglés pour le compte de qui il appartiendra ;

' le condamner à lui payer la somme de 2600€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

à titre infiniment subsidiaire

' limiter à 50 % l’indemnisation du préjudice à laquelle M. Y peut prétendre, l’autre moitié de ce préjudice étant imputable au centre hospitalier de Cannes ;

' juger que la capitalisation des pertes de gains professionnels futurs et de la tierce personne sera opérée sur la base du BCIV 2013 ;

' évaluer ex aequo et bono les différents chefs de préjudice de M. Y ;

' imputer le recours de la Cpam de Seine-et-Marne au titre de la pension d’invalidité, prioritairement sur les pertes de gains professionnels futurs, incidence professionnelle et les pertes de gains professionnels actuels et en toute hypothèse sur le poste de déficit fonctionnel permanent ;

' juger que les organismes sociaux et notamment la Cpam de Seine-et-Marne ne pourront prétendre au remboursement des sommes qu’ils ont effectivement déboursées et en ce qui concerne leurs éventuelles prestations futures, qu’au fur et à mesure de leur règlement ;

' opérer en toute hypothèse l’imputation du recours de l’organisme social poste par poste et tenir compte du partage de 50 % qui devra être instauré avec le centre hospitalier de Cannes ;

' renvoyer en tout état de cause la Cpam de Seine-et-Marne à l’exécution du protocole d’accord la liant aux assureurs ;

très subsidiairement sur le recours de la Cpam de Seine-et-Marne, si la cour était amenée à suivre la caisse dans son raisonnement :

' juger que le recours des tiers payeurs s’exerce poste par poste à due concurrence des sommes allouées à la victime ;

' juger que le capital invalidité et les arrérages échus ne peuvent s’appliquer que sur le seul poste de déficit fonctionnel permanent au titre de l’aggravation de 2 % et qui a été chiffré par le tribunal a 4400€ ;

' limiter en conséquence son obligation vis-à-vis de cet organisme social à la seule somme de 4400€ et débouter la Cpam de Seine-et-Marne de toute prétention plus ample ou contraires ;

' condamner M. Y et le C aux dépens avec distraction au profit de son conseil.

1°) Elle sollicite sa mise hors de cause s’agissant des demandes formulées par M. Y à son encontre.

Elle soutient que par cinq lettres du 15 décembre 1998 elle a notifié à M. Z, au Fonds de garantie, à M. Y et aux autres victimes de cet accident, qu’elle entendait invoquer la nullité du contrat d’assurance à l’encontre de M. Z en application de l’article L. 113-8 du code des assurances, ce qu’elle a fait par acte du 8 mars 1999 en saisissant le tribunal de grande instance de Draguignan.

Le Fonds de garantie est intervenu régulièrement à la procédure qui a abouti à un arrêt définitif du 5 janvier 2006 de la cour d’appel d’Aix-en-Provence qui a déclaré nul et de nul effet le contrat d’assurance souscrit par M. Z, et qu’elle était fondée à dénier toute garantie à raison de l’accident litigieux :

— par l’effet de cette décision, elle ne peut donc devoir aucune garantie à M. Z à raison de l’accident litigieux et donc au profit de M. Y et elle ne peut faire l’objet d’aucune condamnation ;

— c’est en vain que le C invoque pour la première fois devant la cour un arrêt prononcé par la Cour de Justice de l’Union Européenne le 20 juillet 2017 sur l’inopposabilité aux tiers victimes de la nullité d’un contrat d’assurance responsabilité civile automobile, puisque dans l’instance jugée par la CJUE, il ne s’agissait pas d’une non assurance pour fausse déclaration intentionnelle relative à la non-déclaration d’une aggravation du risque ;

— cette décision ne peut porter atteinte à l’autorité de la chose jugée attachée à l’arrêt du 5 janvier 2006 ni à son caractère irrévocable.

De son côté, M. Y a engagé une procédure d’indemnisation de son préjudice corporel au contradictoire de M. Z, de la compagnie d’assurances et du Fonds de garantie. Cette procédure a abouti à un arrêt du 9 janvier 2007 de la cour d’appel d’Aix-en-Provence qui a condamné in solidum M. Z et l’Equité à lui payer la somme de 142'744,88€ en réparation de son entier préjudice corporel en déclarant irrecevable la demande de l’Equité à l’encontre du C. C’est dans ces conditions qu’elle expose avoir acquitté le montant de la condamnation pour 'le compte de qui il appartiendra', conformément à l’article R.421-9 du code des assurances et elle ajoute que si cette demande en remboursement qu’elle a présentée à l’encontre du C a été déclarée irrecevable, c’est uniquement sur un motif procédural tiré de la présentation d’une demande nouvelle en cause d’appel et cette décision ne peut avoir aucune autorité de la chose jugée au sens de l’article 1355 du code civil.

Cet arrêt n’a pu effacer les dispositions définitives de l’arrêt du 5 janvier 2006 et il demeure bien aujourd’hui que la nullité du contrat d’assurance est définitivement jugée et parfaitement opposable à la victime. Cet arrêt a d’une part autorité de la chose jugée envers le C et il est opposable à M. Y, la nullité du contrat d’assurance étant opposable à tous bénéficiaires de la garantie stipulée.

Le C et M. Y ne peuvent valablement soutenir que les formalités de l’article R. 421-5 du code des assurances n’auraient pas été valablement accomplies dans la mesure où le courrier du 15 décembre 1998 aurait été libellé au nom de 'E’ au lieu de 'Y’ . En effet il ne s’agit que d’une erreur de plume. Ce courrier a bien été adressé à la bonne adresse et il a été renvoyé à l’expéditeur non pas au motif qu’il n’a pas pu être distribué mais pour ne pas avoir été réclamé par son destinataire. En second lieu M. Y ne peut invoquer une prétendue inopposabilité de la nullité du contrat alors que cette nullité a été consacrée par arrêt du 5 janvier 2006.

À titre infiniment subsidiaire et si la cour entrait en voie de condamnation à son encontre au profit de M. Y, il conviendra, en l’état de l’arrêt définitif du 5 janvier 2006, parfaitement opposable au C à l’égard de qui il a autorité de chose jugée, de condamner celui-ci par application de l’article R. 421-8 du code des assurances à la relever et la garantir de toute condamnation en principal intérêt et frais qui viendraient à être portées contre elle ou de l’organisme social.

2°) sur la demande de remboursement formulé à l’encontre du C.

Elle fait valoir qu’elle a acquitté une somme de 144'940,15€ en application de l’article R.421-8 et pour le compte de qui il appartiendra et qu’elle est fondée en sa demande de remboursement.

Pour la première fois devant la cour, le C soutient un nouveau moyen de prescription en considérant, compte tenu de la consolidation de l’état de santé de la victime que la demande de remboursement formulée par voie d’assignation du 12 mars 2012 soit plus de dix ans après cette consolidation du 19 septembre 2001, serait atteinte par la prescription de l’article 2226 du Code civil. Or elle oppose que ces dispositions sont radicalement inapplicables en l’espèce dans la mesure ou elle ne concerne que l’action en responsabilité engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui résultent d’un événement ayant entraîné un dommage corporel alors que la demande de remboursement qu’elle formule à l’égard du C est une action extra contractuelle relevant avant la loi du 17 juin 2008, d’un délai de prescription de trente

ans. Ce délai est désormais réduit à cinq ans. En application des dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2008 le délai de prescription de cinq ans venait en l’espèce à expiration le 19 juin 2013. Ayant signifié ses conclusions du 19 juin 2013, l’action qu’elle a engagée n’était donc pas prescrite.

L’insolvabilité de M. Z qui a totalement disparu à ce jour est incontestable.

Elle demande au C le remboursement d’une somme de 361.001,03€ correspondant à la somme de 144.940,15€, outre les causes du jugement dont appel pour un montant de 216'062,88€.

3°) sur l’étendue du droit à indemnisation de M. Y

Elle soutient que c’est bien sur la base du rapport d’expertise définitif du professeur Savornin que l’estimation du préjudice de M. Y et de l’étendue de son indemnisation devront intervenir. Or l’expert a indiqué que l’aggravation de l’état, représentée par le réveil des phénomènes infectieux au niveau du pilon tibial gauche, est en relation pour 50 % avec la gravité des lésions initiales et pour 50 % avec le défaut technique de l’ostéosynthèse réalisée au centre hospitalier de Cannes. Nul ne pouvant avoir à répondre du fait d’autrui, l’aggravation de l’état de M. Y n’est donc imputable à l’accident litigieux qu’à hauteur de 50 %.

Elle sollicite l’application du barème de capitalisation du BCIV 2013.

Sur l’indemnisation du préjudice corporel elle fait valoir que :

— la demande au titre d’une perte de gains professionnels futurs est irrecevable car déjà prise en compte au titre d’une majoration du point d’IPP aux termes de l’arrêt de janvier 2007 alors que l’expert Savornin a retenu que l’incidence professionnelle était identique à celle de 2001,

— l’assistance par tierce personne sera indemnisée sur la base d’une heure par jour et en fonction d’un coût horaire de 12€ soit une somme après capitalisation de 109'022,58€,

— le déficit fonctionnel temporaire sera indemnisé sur une base mensuelle forfaitaire de 600€, soit au titre du déficit fonctionnel temporaire total une somme de 1680€, et au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 33 % la somme de 2494,80€,

— le déficit fonctionnel permanent de 2 % justifie une somme de 4400€

— des souffrances endurées évaluées à 4/7 une sommes de 10'000€

— le préjudice esthétique évalué à 2/7 une somme de 3000€.

4°) sur le recours de la Cpam de Seine-et-Marne

Les arrérages échus et le capital invalidité doivent être imputés par priorité sur les pertes de gains professionnels futurs, sur l’incidence professionnelle, sur les pertes de gains professionnels actuels et sur le déficit fonctionnel permanent. Dans la mesure où aucune indemnité ne peut être allouée à M. Y au titre de l’incidence professionnelle, le recours de la caisse s’exercera sur le poste de déficit fonctionnel permanent et dans la limite de l’assiette chiffrée par la juridiction et non pas à hauteur de 215'825,68€.

Elle rappelle qu’en sa qualité de tiers responsable elle ne peut être tenue de rembourser les prestations futures au tiers payeur qu’au fur et à mesure de leur règlement .

Enfin les rapports de l’assureur et de la caisse sont régis par un protocole d’accord qui fixe les modalités de remboursement de la créance des organismes sociaux et il convient donc de renvoyer la Cpam de Seine-et-Marne à l’exécution de ce protocole. Or en vertu de celui-ci, la saisine de la commission de conciliation doit sous peine de forclusion intervenir dans le délai de deux ans, c’est pourquoi par courrier du 21 mars 2018 elle a notifié à la caisse que la forclusion était encourue qu’elle n’avait pas intervenir.

Elle oppose à la caisse que le protocole s’applique d’office, qu’elle ne peut soutenir qu’elle n’a jamais rien reçu de l’assureur au sujet de l’aggravation alors que la nullité du contrat d’assurance lui a été notifiée et qu’en l’absence de contestation dans les deux ans cela équivaut selon le protocole à une acceptation de la position de non- garantie exprimée par l’assureur. En l’espèce la signification du 25 octobre 2000 a été contestée le 6 novembre 2000 mais la caisse n’a jamais saisi la commission de conciliation dans les deux ans du refus d’indemnisation de l’assureur de sorte que la forclusion est encourue.

Par conclusions du 5 novembre 2018, le C demande à la cour, de :

' écarter des débats par application des articles 16 et 135 du code de procédure civile, toutes les pièces qui n’ont pas été effectivement communiquées sous bordereau devant la cour ;

' juger que l’Equité ne pouvait pour l’indemnisation du préjudice initial disposer de plus de droit que M. Y qu’elle a indemnisé et aux droits de qui elle était subrogée ;

' juger que compte tenu de la consolidation de l’état victime fixée au 28 juin 2000, la demande de remboursement formé par l’Equité à son encontre par conclusions signifiées dans le cadre de la procédure engagée par assignation du 12 mars 2012, soit plus de dix ans après la consolidation est atteinte par la prescription de l’article 2226 du code civil ;

' débouter l’Equité de sa demande dirigée à son encontre en remboursement de l’indemnisation du préjudice initial pour lequel elle a déjà été déboutée de la demande par arrêt du 9 janvier 2007 ayant acquis autorité de la chose jugée ;

' juger qu’en vertu de l’autorité de la chose jugée attachée à l’arrêt du 9 janvier 2007 et qui l’a condamné à indemniser le préjudice de M. Y, l’Equité ne peut se prévaloir de l’arrêt précédemment rendu le 5 janvier 2006 qui avait déclaré nulle la police d’assurance souscrite par M. Z, pour refuser sa prise en charge ;

' juger qu’en vertu de la 2e directive européenne (article 2 paragraphe un, premier alinéa) l’Equité ne peut opposer à M. Y la nullité du contrat d’assurance souscrit par M. Z la législation française étant à ce titre contraire à la réglementation européenne qui prévaut sur le droit interne français ;

' juger au surplus que l’Equité, qui ne justifie pas qu’elle s’est conformée aux dispositions de l’article R. 421-5 du code des assurances en avisant simultanément et sous la même forme, M. Y et le C de son refus de prise en charge, s’interdit d’opposer la non garantie à l’un comme à l’autre ;

' juger que l’Equité qui ne produit pas les justificatifs d’envoi des lettres recommandées, mais simplement les avis de réception, ne prouve pas la simultanéité des envois ;

' constater en outre qu’à ces lettres n’était joint aucun justificatif ;

' juger que les lettres ayant été libellées dans des termes différents, l’assureur ne justifie pas avoir satisfait à l’identité de formalisme et qu’en outre ces différentes missives ne précisent pas le numéro du contrat concerné, en violation des dispositions de l’article L. 421-5 du code des assurances ;

' juger enfin que la lettre adressée à M. Y comportait une erreur dans le nom patronymique qui n’a pas permis à son destinataire de la retirer au guichet ;

' juger que les dispositions de l’article R. 421-5 étant d’interprétation stricte et l’Equité ne s’y étant pas conformée, elle ne peut opposer son exception tant à M. Y qu’au Fonds de garantie ;

' juger que pour l’indemnisation de l’aggravation, l’Equité est liée par l’arrêt du 9 janvier 2007 l’ayant condamnée à indemniser la victime, qui, de plus ne peut opposer son exception de garantie, faute d’avoir respecté les dispositions de l’article R. 421-5 du code des assurances ;

' condamner en conséquence l’Equité à indemniser l’aggravation du préjudice subi par M. Y ;

à titre très subsidiaire,

' constater qu’il ressort du rapport d’expertise du professeur Savornin que l’aggravation est consécutif pour 50 % à une erreur technique affectant le geste chirurgical initial et ouvrant au profit de M. Y un droit à indemnisation de la part du centre hospitalier concerné ou de l’Oniam ;

' juger en conséquence n’y avoir lieu à indemniser M. Y de la moitié des conséquences dommageables de l’aggravation qu’il a subie ;

' juger qu’il convient de tenir compte d’un recours actualisé de la Cpam au plus près de la date à laquelle la cour rendra son arrêt, comprenant notamment les arrérages échus et le capital constitutif de la pension d’invalidité dont bénéficie M. Y ;

' juger à cet égard que même dans l’hypothèse ou M. Y aurait négligé de faire valoir ses droits à l’encontre de possibles tiers payeurs, les sommes ainsi perdues doivent être déduites des indemnités qui lui sont allouées au titre de la réparation de l’aggravation de son préjudice ;

' juger que par application de l’article R. 421-13 du code des assurances le Fonds de garantie ne prend en charge que le préjudice complémentaire en cas d’indemnisation partielle possible de la part d’un autre débiteur ;

' juger en conséquence que l’arrêt à venir ne pourra être déclaré opposable au Fonds de garantie que pour moitié du préjudice subi par M. Y ;

' juger que la demande d’indemnisation présentée au titre de l’aide humaine par assignation délivrée plus de dix ans après la consolidation est atteinte par la

prescription de l’article 2226 du code civil ;

' juger que ce préjudice n’étant pas consécutif à l’aggravation de son état, M. Y ne peut en demander l’indemnisation dans le cadre de la présente procédure en aggravation ;

' le débouter de sa demande présentée ce titre ;

statuant sur l’appel incident de M. Y au titre de l’aide humaine

' juger que cette demande se heurte, outre l’autorité de la chose jugée par l’arrêt du 9 janvier 2007, à la prescription édictée par l’article 2226 du code civil ;

' constater que l’expert qui n’a retenu qu’un besoin en aide humaine d’une heure par jour a précisé que ce besoin n’était pas la conséquence de l’aggravation mais qu’elle existait depuis l’origine ;

' dire n’y avoir lieu à indemniser ce poste de préjudice dans le cadre de l’aggravation du préjudice de M. Y ;

' constater que le professeur Savornin n’a retenu aucune incidence de l’aggravation sur le préjudice professionnel de M. Y qui est identique à celui fixant 2001 ;

' juger au surplus qu’une aggravation de 2 % faisant passer le préjudice de 30 à 32 % à raison d’une ankylose de la cheville ne peut avoir d’incidence professionnelle ;

' débouter M. Y de sa demande formulée au titre des pertes de gains professionnels futurs qui, à les supposer avérées, ne sont pas la conséquence de l’aggravation ;

' juger que les dépens et l’indemnité éventuellement allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ne font pas partie des sommes à la charge du Fonds de garantie par application des articles L. 421-1 et R. 421-1 du code des assurances ;

' dire n’y avoir lieu à prononcer condamnation à l’encontre du Fonds de garantie partie intervenante, à quelque titre que ce soit, par application de l’article R. 421-15 du code des assurances ;

' juger que seuls M. Z et son assureur l’Equité peuvent être condamnés à indemniser M. Y ;

' juger en effet que l’inopposabilité à la victime de la nullité du contrat en application des dispositions de la réglementation européenne s’oppose à tout recours de l’Equité à son encontre en vertu de son obligation subsidiaire ;

' juger que les dépens suivront la succombance par application de l’article 699 du code de procédure civile.

Il soutient en premier lieu qu’en vertu de la réglementation européenne issue d’un arrêt rendu le 20 juillet 2017 par la Cour de justice de l’Union européenne qui prévaut sur le droit interne français, l’Equité ne peut opposer à M. Y la nullité du contrat souscrit par M. Z. Il en résulte également que l’assureur qui indemnise les victimes en application de la réglementation européenne, même s’il peut ensuite exercer un recours à l’encontre du responsable, ne peut en aucun cas agir contre le Fonds de

garantie. Contrairement à ce que tente de faire valoir l’Equité, la nullité d’un contrat n’est pas opposable aux victimes et la cause de cette nullité et sans incidence sur l’inopposabilité.

Il demande la confirmation du jugement qui a condamné l’Equité à indemniser le préjudice de M. Y et qui l’a déboutée de sa demande tendant à être relevée et garantie par le Fonds de garantie. En effet si l’arrêt du 5 janvier 2006 rendu entre l’Equité et M. Z a autorité de la chose jugée, il n’est pas opposable à M. Y qui n’a pas été appelé à cette procédure. Mais surtout, l’Equité qui ne s’est pas conformée aux dispositions de l’article R. 421-5 du code des assurances et qui n’a pas avisé simultanément et sous la même forme M. Y et le Fonds de garantie de sa contestation interdit de l’opposer à la victime et donc au Fonds de garantie. En effet les lettres recommandées du 15 décembre 1998 ne sont pas assorties d’une justification de la date d’envoi permettant d’en vérifier la simultanéité. Au surplus la lettre adressée à M. Y a été libellée à l’intention de 'Monsieur D E’ et n’a pas été délivrée sans doute en raison de cet intitulé inexact ne permettant pas destinataire de retirer le pli. En outre les lettres adressées au Fonds de garantie et à 'M. E’ ne le sont pas dans les mêmes termes et ne mentionnent pas le numéro du contrat. Les dispositions de cet article sont d’interprétation stricte et l’Equité ne peut pas opposer son exception à M. Y.

Surtout il a été jugé par arrêt du 9 janvier 2007 dans les rapports entre l’Equité et M. Y que la première doit indemniser le second.

En second lieu, la demande de remboursement formée par l’Equité à l’encontre du fonds de garantie par conclusions signifiées dans le cadre de la procédure engagée par assignation du 12 mars 2012 soit plus de dix ans après la consolidation du 19 septembre 2001 est atteinte par la prescription de l’article 2226 du code civil.

Au surplus pour les sommes que l’Equité a déjà versées à M. Y au titre de l’indemnisation du préjudice initial, l’assureur a déjà été débouté de sa demande dirigée à l’encontre du Fonds de garantie aux termes de l’arrêt rendu le 9 janvier 2007. En conséquence l’autorité de la chose jugée s’oppose à ce qu’il soit fait droit à la nouvelle demande de l’Equité tendant aux mêmes fins.

Il ajoute que l’accident survenu le 2 mai 1998 est postérieur à la clôture de la liquidation judiciaire et que cette procédure collective ancienne ne démontre par l’insolvabilité de M. Z.

À titre subsidiaire si la cour devait admettre que l’autorité de la chose jugée qui s’attache à l’arrêt du 9 janvier 2007 ne s’étend par l’indemnisation de l’aggravation du préjudice de la victime, elle ne pourra prononcer aucune condamnation à l’encontre du Fonds de garantie, partie intervenante, mais devra condamner uniquement M. Z, et déclarer l’arrêt opposable au Fonds de garantie. En présence d’un auteur connu, il n’est ni l’assureur ni le garant de l’auteur des faits dommageables et ne peut être condamné.

Enfin dans l’hypothèse ou l’Equité ne serait pas tenue indemniser l’aggravation de l’état de M. Y, il demande à la cour de ne l’indemniser qu’à raison de 50 % et d’autre part de dire qu’il n’y a pas lieu à indemnisation d’une aide humaine.

À la lecture des conclusions de l’expert qui a considéré que l’aggravation de l’état de M. Y représentée par le réveil des phénomènes infectieux au niveau du pilon tibial gauche est en relation pour 50 % avec la gravité des lésions initiales et pour 50 % avec le défaut technique de l’ostéosynthèse réalisée au centre hospitalier de

Cannes, M. Y peut obtenir l’indemnisation à hauteur de 50 % de l’aggravation de son état de la part du centre hospitalier de l’Oniam. À supposer même que la cour confirme l’analyse du premier juge selon laquelle l’erreur médicale initiale est une conséquence de l’accident litigieux, elle devra cependant déclarer son arrêt opposable au fonds de garantie que pour la moitié des sommes qui seront allouées puisqu’il n’a qu’une obligation subsidiaire et n’est susceptible de prendre en charge que les préjudices ne pouvant être indemnisée à aucun autre titre.

L’indemnisation de l’aide humaine n’est pas liée à l’aggravation du préjudice initial. La demande est prescrite puisqu’en effet la consolidation de ce préjudice a été fixée au 28 juin 2000 et la demande d’indemnisation de l’aggravation a été formulée par assignation du 12 mars 2012 soit plus de dix ans après. M. Y est donc prescrit en sa demande.

L’appel incident formé par M. Y au titre de la perte de gains professionnels futurs et de l’assistance par tierce personne sera rejeté. En effet l’expert a indiqué dans son rapport que le préjudice professionnel est identique à celui de 2001 et l’aggravation du déficit fonctionnel permanent à hauteur de 2 % n’est pas de nature à avoir une quelconque incidence sur son activité professionnelle. Par ailleurs il ne présente aucun élément permettant d’étendre le besoin en aide humaine qui existait depuis l’origine.

Par conclusions du 26 septembre 2018, M. Y demande à la cour, de :

' confirmer le jugement en ce qu’il a :

— déclaré inopposable à son égard, l’exception de nullité soulevée par l’Equité ;

— condamné M. Z et l’Equité à l’indemniser intégralement de son préjudice subi ;

' accueillir son appel incident ;

' condamner in solidum M. Z et l’Equité à lui payer la somme de 990'575,91€ avec intérêts de droit à compter de la décision à intervenir ;

' les condamner in solidum à lui verser la somme de 3000€ en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

à titre subsidiaire dans l’hypothèse ou la cour estimerait nécessaire de mettre hors de cause M. Z et l’Equité, de :

' juger que la décision à intervenir devra être déclarée opposable au Fond de garantie ;

' condamner M. Z et l’Equité in solidum aux dépens, distraits au profit de son conseil.

Il soutient que l’Equité ne rapporte pas la preuve qu’elle a satisfait à l’obligation visée à l’article R. 421-5 du code des assurances. En effet si l’intention de soulever la nullité du contrat d’assurance a bien été notifiée par lettre recommandée du 15 décembre 1998 au Fonds de garantie et à M. Z, cette notification n’a pas été réalisée dans les mêmes formes à son endroit la lettre ayant été adressée à 'M. E'. De surcroît cette lettre ne précise pas le numéro du contrat. La nullité du contrat lui est donc inopposable. L’Equité ne peut se prévaloir de l’arrêt du 5 janvier 2006 qui n’a pas été rendu à son contradictoire et qui n’a donc pas autorité de la chose jugée à son encontre.

Sur l’indemnisation de son état en aggravation, il ne s’explique pas les raisons qui ont conduit l’expert à minorer le taux de la tierce personne alors que son médecin conseil lui avait adressé un dire circonstancié. Il conviendra en conséquence de retenir le besoin en tierce personne fixé par l’expert lors de son pré-rapport à savoir 2 heures par jour à compter du 10 septembre 2001.

S’il ne conteste pas que l’expert met en évidence que l’aggravation de son état est en relation pour 50 % avec les lésions initiales et pour 50 % avec le défaut technique de l’ostéosynthèse réalisée au centre hospitalier de Cannes, cela n’exclut pas pour autant que l’Equité soit tenue à la réparation intégrale du préjudice qu’il a subi dès lors que l’ostéosynthèse est consécutive à l’accident dont il a été victime. Il est en effet de jurisprudence constante que le préjudice, eut-il été aggravé par la suite du fait d’autres personnes ou d’autres causes non imputables à l’auteur de la faute, celui-ci n’en doit pas moins être condamné à réparation intégrale du dommage résultant des conséquences de son geste sans lequel le dommage ne se serait pas produit. Aucune prescription ne peut être opposée à la demande, l’aide humaine ayant bien été retenue au titre de l’aggravation de son état mais aussi en raison de la date de la consolidation fixée au 11 avril 2008.

Il chiffre son préjudice de la façon suivante :

— perte de gains professionnels actuels : 5969,15€ calculée sur la base d’un Smic mensuel de 1000€,

— perte de gains professionnels futurs : 515'473,20€, sur la base d’un Smic mensuel de 1000€, dont il demande la capitalisation en fonction du barème publié dans la gazette du palais 2018 et sous déduction du capital invalidité versée par la Cpam d’un montant de 126'351,48€ outre les arrérages pour 72'682,51€ et donc une somme de 316'493,21€ lui revenant,

— assistance par tierce personne avant consolidation : sur un volume horaire quotidien de 2 heures et un coût horaire de 15€ : 72'150€

— assistance par tierce personne échue après consolidation sur les mêmes bases : 120'450€

— assistance par tierce personne à échoir à partir du 11 avril 2019 sur 400 jours pour tenir compte des jours fériés et des congés payés en fonction d’un coût horaire de 18€ la somme de 452'635,20€,

— déficit fonctionnel temporaire total sur une base mensuelle de 700€ : 1283,15€

— déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 33 % : 2895,20€

— déficit fonctionnel permanent 2 % s’ajoutant aux 30 % soit globalement 32 % et une valeur du point qui ne saurait être inférieur à 2600:5200€

— souffrances endurées 4/7 : 10'000€

— préjudice esthétique 2/7 : 3500€.

Par conclusions du 22 octobre 2018, la caisse primaire d’assurance-maladie de Seine-et-Marne demande à la cour, de :

' confirmer le jugement ;

' condamner in solidum M. Z et l’Equité à lui régler les sommes suivantes :

— dépenses de santé actuelles : 41'422,77€ avec intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2012 date de la signification de ses écritures de première instance,

— perte de gains professionnels futurs ou incidence professionnel ou déficit fonctionnel permanent : 215'125,68€ avec intérêts à compter du 18 septembre 2012 date de la signification de ces écritures de première instance ;

' les condamner in solidum à lui verser la somme de 1066€ au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion sur le fondement de l’ordonnance du 24 janvier 1996, ainsi que la somme de 1500€ au titre des frais exposés en première instance et celle de 2000€ au titre des frais exposés devant la cour ;

' les condamner in solidum aux dépens de première instance et d’appel distraits au profit de son conseil.

Elle estime que c’est à bon droit que le premier juge a considéré que :

— l’Equité n’a pas respecté les dispositions impératives prescrites par l’article R. 421-5 du code des assurances et qu’elle est donc irrecevable à opposer à M. Y l’exception de nullité du contrat,

— M. Y a droit à l’indemnisation de l’intégralité de son dommage l’ostéosynthèse réalisée au centre hospitalier de Cannes devant être considérée comme une des conséquences de l’accident subi.

Elle conclut à la confirmation du jugement en indiquant qu’elle a exposé les dépenses suivantes dont elle demande paiement :

— dépenses de santé actuelles : 41'422,77€

— arrérages échus en invalidité : 113'870,85€

— capital représentatif de la pension d’invalidité : 101'954,83€.

Contrairement à ce que prétend l’Equité, ce dossier n’a jamais été réglé dans le cadre d’un protocole d’accord. La Cpam de Seine et Marne n’a jamais reçu la moindre demande aux fins de règlement protocolaire de ce dossier en aggravation, mentionnant le protocole d’accord de 1983. Elle attire l’attention sur des courriers échangés en 2000 et 2002 entre l’Equité et la Cpam du Var, et non pas la Cpam de Seine et Marne et qui de surcroît n’intéressent nullement l’aggravation révélée en 2008. La seule lettre qui lui a été adressé date du 21 mars 2018, et elle est donc postérieure au prononcé du jugement dont appel. Elle ne saurait en conséquence se voir opposer une quelconque forclusion.

M. Z, assigné par C, par acte d’huissier du 21 juin 2018, délivré au dernier domicile connu, et suivi d’un procès-verbal de recherches infructueuses n’a pas constitué avocat.

L’arrêt sera rendu par défaut conformément aux dispositions de l’article 474 du code de procédure civile.

Motifs de la décision

Sur la mise hors de cause de la société l’Équité

Si la nullité du contrat d’assurance souscrit par M. Z auprès de l’Equité, qui résulte de l’arrêt du 5 janvier 2006 rendu par la cour d’appel d’Aix-en-Provence, est opposable à tout bénéficiaire de la garantie, il n’en demeure pas moins, d’une part que l’article R.421-4 du code des assurances prévoit que le Fonds de garantie ne peut être appelé à payer l’indemnité allouée à la victime qu’à la condition que la nullité du contrat est opposable à celle-ci, et que d’autre part les dispositions de l’article R.421-5 du même code doivent avoir été observées et les conditions remplies. Elles imposent à l’assureur qui entend invoquer la nullité du contrat, de le déclarer, par lettre recommandée avec accusé de réception, au Fonds de garantie en joignant à sa déclaration les pièces justificatives de son exception, et dans le même temps et dans les mêmes formes d’en aviser la victime en précisant le numéro du contrat.

En l’espèce l’Equité justifie de l’envoi le 15 décembre 1998, de deux lettres recommandées avec accusé de réception au Fonds de garantie et à l’adresse de M. Y.

Toutefois le courrier, s’il a bien été envoyé à l’adresse de M. Y, a été libellé au nom de 'M. D E'. Alors qu’un courrier recommandé avec avis de réception n’est délivré à son destinataire que sur contrôle effectif de son nom sur la boite aux lettres et sur vérification de son identité, l’Equité ne peut sérieusement venir soutenir que si M. Y n’a pas eu connaissance de ce courrier ce serait en raison de sa propre défaillance, et pour ne pas avoir pris la peine d’aller retirer le courrier auprès des services de la Poste, alors qu’il lui était impossible de justifier d’une identité conforme à 'M. D E'. De surcroît, ce courrier qui ne vise que la référence de dossier donnée par l’assureur et la date de l’accident, ne supporte pas le numéro de la police d’assurance dont la nullité était poursuivie, en l’occurrence le n° 4237979.

Il s’ensuit que la nullité du contrat est inopposable à M. Y, et que le Fonds de garantie doit être mis hors de cause.

Sur la demande de remboursement

l’Equité sollicite du Fonds de garantie le remboursement de la somme de 144.940,15€, qu’il a acquittée auprès de M. Y pour le compte de qui il appartiendra et en exécution de l’arrêt rendu le 9 janvier 2007 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence qui a statué sur l’indemnisation du préjudice initial de M. Y. Pour fonder sa demande elle invoque les dispositions de l’article R.421-8 alinéa 3 du code des assurances qui prévoient que lorsque le bien fondé de l’exception de garantie est reconnu par une décision définitive opposable au Fonds de garantie, l’assureur peut lui réclamer les sommes qu’il a payées pour le compte de cet organisme, après établissement de l’insolvabilité partielle ou totale du tiers responsable, en l’espèce M. Z.

Cependant, même si la nullité du contrat souscrit par M. Z auprès de l’Equité, a été consacrée par l’arrêt du 5 janvier 2006 devenu définitif, le remboursement prévu par l’article R.421-8 alinéa 3 est subordonné au préalable posé par l’article R.421-4 du code des assurances et donc au respect impératif des formes prescrites par l’article R.421-5, et il est établi que ces conditions de formes, exigées à peine d’irrecevabilité, ne sont pas remplies.

En conséquence, et sans qu’il soit besoin de répondre à la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande, soulevée par le Fonds de garantie, l’Equité est irrecevable en sa demande en remboursement dirigée contre le Fonds de garantie de la somme de 144.940,15€ versée à M. Y.

Sur l’aggravation du préjudice de M. Y

Un rappel des conclusions du docteur X, chargé d’évaluer les conséquences médico-légales initiales liées à l’accident du 2 mai 1998, et contenues dans son rapport du 10 septembre 2001, est nécessaire pour statuer sur les chefs d’indemnisation réclamés par M. Y à ce jour sur aggravation. L’expert a alors conclu :

— ITT du 2 mai 1998 au 18 juin 1998, plus trois semaine à compter du 20 mars 2001,

— consolidation au 19 septembre 2001,

— IPP : 30%

— pretium doloris 5,5/7

— préjudice esthétique 3,5/7

— incidence professionnelle : impossibilité de reprendre la profession de magasinier, nécessité d’une activité sédentaire ne nécessitant pas de station debout prolongée ni de manutention de charges lourdes,

— préjudice d’agrément pour la pratique de la boxe, du footing et du tennis.

Dans son rapport définitif et sur aggravation le professeur Savornin, a conclu que depuis l’examen du docteur X, du 10 septembre 2001, il existe une aggravation de l’état de M. Y, apparue le 5 février 2007, représentée par un réveil des phénomènes infectieux au niveau du pilon tibial gauche avec séquestre mis en évidence par scanner et fistulograhie.

Il a évalué les postes de préjudice de la façon suivante :

— déficit fonctionnel temporaire total du 5 février 2007 au 30 mars 2007, période d’hospitalisation,

— déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 33% jusqu’au 11 avril 2008,

— consolidation au 11 avril 2008, comme établie par le docteur A,

— déficit fonctionnel permanent sur aggravation : 2%, venant s’ajouter aux 30%, précédemment fixé par le docteur X, au 10 septembre 2001,

— souffrances endurées : 4/7, au titre des deux interventions chirurgicales dont l’une avec prise de greffe au niveau des deux crêtes iliaques postérieures, ayant nécessité une longue période de traitement,

— préjudice esthétique permanent : 2/7 au titre de deux cicatrices de crêtes iliaques postérieures,

— il n’y a pas de nouveaux besoins en aide humaine en rapport avec l’aggravation, mais l’aide humaine d’une tierce personne, représentée actuellement pas son épouse, qui peut être estimée à 1 heure par jour pour la toilette, la coupe des ongles et la mise de la chaussette gauche, est motivée par l’ensemble du handicap et aurait dû figurer dans le rapport du docteur X,

— il n’y a pas d’aggravation du préjudice d’agrément qui reste identique à celui de 2001,

— le préjudice professionnel est identique à celui de 2001. M. Y reste toujours inapte à la reprise de sa profession de magasinier,

— nous considérons que l’aggravation de l’état de M. Y représentée par un réveil des phénomènes infectieux au niveau du pilon tibial gauche est en relation pour 50% avec la gravité des lésions initiales et pour 50% avec le défaut technique de l’ostéosynthèse réalisée au centre hospitalier de Cannes.

L’aggravation de l’état de M. Y n’est pas contestée par l’Equité, qui cependant en discute l’étendue outre la recevabilité de certaines demandes indemnitaires.

Une partie de l’aggravation relève d’une cause qui n’est pas directement imputable au tiers responsable de l’accident puisqu’il est établi qu’au sein du centre hospitalier de Cannes où M. Y a été pris en charge dès après l’accident, comme le dit le professeur Sanvoisin, la continuité de la corticale tibiale latérale n’ayant pas été restaurée, le tibia n’était plus en contact du péroné au niveau de la syndesmose, et que ce défaut, du fait de l’ischémie engendrée par traction cutanée, dans une zone où la vascularisation cutanée est déjà précaire, ne pouvait qu’évoluer vers une désunion cutanée, puis vers une nécrose avec une infection consécutive ayant nécessité fixateur externe et lambeau tye cross-leg. Ainsi cette malfaçon technique ne pouvait que favoriser la complication infectieuse telle que présentée par M. Y.

Néanmoins et à l’inverse de ce que l’expert affirme, et qui est soutenu par l’Equité devant la cour, M. Y conserve un droit à indemnisation intégrale du dommage qui résulte du comportement de M. Z, sans lequel le dommage lié au défaut technique de l’ostéosynthèse ne se serait pas produit. Il s’ensuit que l’Equité est tenue d’indemniser M. Y de l’intégralité des conséquences médico-légales liées à l’aggravation du préjudice initial.

L’Equité soutient que la Cpam de Seine et Marne est forclose en sa demande en paiement de ses débours au motif que ce dossier est régi par l’exécution du protocole d’accord de 1983, liant la Caisse aux assureurs.

Le texte, inséré dans les articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale, confère une base légale au protocole d’accord du 24 mai 1983 conclu entre les organismes professionnels d’assurance et certaines caisses nationales d’assurance maladie, dont les Cpam. Lorsque la garantie du contrat n’est pas acquise à l’assuré du fait d’une exception opposable au tiers, l’assureur en informe la caisse. Celle-ci dispose alors d’un délai d’un mois pour contester la position de l’assureur. Pour permettre l’information des caisses, les articles précités du code de la sécurité sociale prévoient en faveur de la caisse primaire d’assurance maladie une obligation d’information de la survenance de lésions causées par un tiers. Cette obligation pèse notamment sur les tiers et leur assureur. Le décret n° 2004-1076 du 12 octobre 2004 est venu préciser les modalités de cette obligation d’information et impose notamment à l’assureur du tiers responsable d’informer la caisse d’assurance maladie dont relève la victime dans les trois mois suivant la date à laquelle il a connaissance de la survenue de l’accident, et

donc de l’aggravation et le manquement à cette obligation est sanctionné par une majoration de 50 % de l’indemnité forfaitaire de gestion.

En l’espèce, l’Equité ne démontre pas que le dossier de l’aggravation du préjudice de M. Y, a été réglé avec la Cpam de Seine et Marne, dont relève à ce jour M. Y, dans le cadre d’un protocole d’accord ou encore qu’elle l’aurait informée de l’exception de garantie, dans des délais conduisant à sa forclusion.

En effet les courriers que l’Equité verse aux débats émanent non pas de la Cpam de Seine et Marne mais de la Cpam du Var qui a géré les conséquences de l’accident initial ou encore, ils ont été adressés à la Cpam du Var et non pas à la Cpam de Seine et Marne. Le seul courrier que l’Equité a adressé à la Cpam de Seine et Marne porte la date du 21 mars 2018, et il fait état d’une signification du 25 octobre 2000, de la nullité du contrat d’assurance, de la contestation émise alors par la caisse, et de son absence de saisine de la commission de conciliation dans les deux ans du refus d’indemniser. En conséquence la forclusion invoquée à l’encontre de la Cpam de Seine et Marne n’est pas encourue.

L’évaluation du préjudice de M. Y s’établit comme suit.

Préjudices patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

—  Dépenses de santé actuelles 41.422,77€

Ce poste est constitué des frais médicaux et pharmaceutiques, frais de transport, massages, appareillage pris en charge par la Cpam soit 41.422,77€, la victime n’invoquant aucun frais de cette nature restés à sa charge.

- Perte de gains professionnels actuels Rejet

Ce poste vise à compenser une incapacité temporaire spécifique concernant les répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime et doit être évalué au regard de la preuve d’une perte effective de revenus.

M. Y ne justifie pas de ce qu’était sa situation professionnelle avant l’aggravation apparue le 5 février 2007, alors que devant le professeur Savornin il a déclaré n’avoir repris aucune activité professionnelle, ce qu’il convient de comprendre comme une absence de reprise d’activité professionelle depuis l’accident. Il ne démontre pas qu’il a été confronté à une perte de revenus en lien avec l’aggravation retenue ; la seule justification de la décision de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées, du 31 mars 2008, lui ayant reconnu un taux d’invalidité égal ou supérieur à 80% ne suffisant pas à déterminer la réalité d’une perte de revenus avant la consolidation du 11 avril 2008. Il est donc débouté de sa demande et le jugement est confirmé de ce chef.

- Assistance de tierce personne temporaire et permanente 306.705,60€

Dans ses dernières écritures du 7 février 2018, l’Equité qui ne conteste pas le principe d’une aide humaine en lien avec l’aggravation, n’en calcule le montant que par voie de capitalisation et pour la période future.

M. Y estime qu’il est fondé à solliciter l’indemnisation de l’aide humaine au titre de l’aggravation mais aussi pour la période écoulée entre la consolidation initiale fixée au 10 septembre 2001 et la date de consolidation de l’aggravation le 11 avril 2008.

Mais cette demande ne peut aboutir dans son intégralité. En effet, en vertu de l’article 2226 du code civil, l’action en responsabilité née à raison d’un événement ayant entraîné un dommage corporel, engagée par la victime directe des préjudices qui en résultent se prescrit par dix ans à compter de la date de la consolidation du dommage initial. Or la consolidation du préjudice initial a été fixée par le docteur X, au 19 septembre 2001, de telle sorte que M. Y était recevable jusqu’à la date du 19 septembre 2011 pour formuler cette demande en indemnisation de l’aide par tierce personne due au titre de ce préjudice et qu’il ne l’est plus, cette demande ayant été formée par assignations des 8, 12 et 15 mars 2012.

De ces données l’indemnisation de ce poste de préjudice s’établit au regard de la nature de l’aide requise et du handicap qu’elle est destinée à compenser, des tarifs d’aide à domicile en vigueur dans la région, sur la base d’un taux horaire moyen de 18€, et en fonction d’une heure retenue par l’expert médical, et de la façon suivante :

— de la date de l’aggravation au 5 février 2007 jusqu’à la date de la consolidation du 11 avril 2008, soit sur une période de 431 jours la somme de 7.758€ (18€ x 1h x 431j),

— du 12 avril 2008 à la date du prononcé du présent arrêt le 2 mai 2019, sur une période de 11 ans et 20 jours, soit sur 4035 jours la somme de 72.630€ (18€ x 1h x 4035j),

— pour la période future, sur 400 jours, pour tenir compte des jours fériés et des congés payés, la somme annuelle de 7200€ (18€ x 1h x 400) et sur la base d’un euro de rente viagère de 31,433, issu de la Gazette du Palais du 28 novembre 2017, conformément à la demande de M. Y, pour un homme âgé de 45 ans à la liquidation et donc la somme de 226.317,60€ (7200€ x 31,433),

et donc au total celle de 306.705,60€ (7.758€ + 72.630€ + 226.317,60€)

Préjudices patrimoniaux

permanents (après consolidation)

- Perte de gains professionnels futurs Rejet

M. Y qui réclame l’indemnisation d’une perte de gains professionnels futurs sur la base d’un Smic limité à 1.100€, ne justifie pas de la réalité de cette perte alors que l’expert médical a conclu que le préjudice professionnel est identique à celui de 2001, que M. Y reste toujours inapte à la reprise de sa profession de magasinier et que par arrêt du 9 janvier 2007, l’incidence professionnelle après consolidation du 19 septembre 2001 a été prise en compte au titre d’une majoration du point d’IPP. La demande est donc rejetée.

Préjudices extra-patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

—  Déficit fonctionnel temporaire 4140€

Ce poste inclut la perte de la qualité de la vie et des joies usuelles de l’existence et le préjudice d’agrément et le préjudice sexuel pendant l’incapacité temporaire.

Il doit être réparé sur la base de 700€ par mois, conformément à la demande de la victime, soit :

— déficit fonctionnel temporaire total de 53 jours : 1236,66€

— déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 33% de 377 jours : 2.902,90€

soit au total 4139,56€ arrondi à 4140€.

—  Souffrances endurées 10.000€

Ce poste prend en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime en raison de deux interventions chirurgicales dont l’une avec prise de greffe au niveau des deux crêtes iliaques postérieures, ayant nécessité une longue période de traitement ; évalué à 4 /7 par l’expert, il justifie l’octroi d’une indemnité de 10.000€, somme réclamée par la victime.

permanents (après consolidation)

—  Déficit fonctionnel permanent 5200€

Ce poste de dommage vise à indemniser la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l’atteinte anatomo-physiologique à laquelle s’ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d’existence personnelles, familiale et sociales.

Le déficit fonctionnel permanent au titre du préjudice initial a été évalué à 30%, le professeur Savornin estime que ce taux a été aggravé de 2%, soit donc au total un déficit fonctionnel permanent de 32%, qui sert de base à son évaluation à hauteur de 2%, ce qui justifie une indemnité de 5200€ pour un homme âgé de 34 ans à la consolidation, et conformément à la demande de M. Y.

En présence de pertes de gains professionnels ou d’incidence professionnelle de l’incapacité, la rente versée par le tiers payeur s’impute en priorité sur ces deux postes de préjudice patrimoniaux, tandis que le reliquat éventuel s’impute sur le poste de préjudice extrapatrimonial du déficit fonctionnel permanent, s’il existe.

En l’espèce la demande d’indemnisation de la perte de gains professionnels futurs ayant été rejetée, la créance de la Cpam de Seine et Marne s’impute sur le poste de déficit fonctionnel permanent et à hauteur de l’assiette soit la somme de 5200€, si bien qu’aucune somme ne revient à M. Y.

—  Préjudice esthétique 3500€

Ce poste de dommage cherche à réparer les atteintes physiques et plus généralement les éléments de nature à altérer l’apparence physique

Qualifié de 2/7 au titre de deux cicatrices de crêtes iliaques postérieures, il doit être indemnisé à hauteur de 3.500€, demandée par M. Y.

Le préjudice corporel global sur aggravation subi par M. Y s’établit ainsi à la somme de 370.968,37€ soit, après imputation des débours de la Cpam (46.622,77€), une somme de 324.345,60€ lui revenant qui, en application de l’article 1153-1 du code civil, porte intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, soit le 20 février 2018 à hauteur de 214.560,88€ et du prononcé du présent arrêt soit le 2 mai 2019 à hauteur de 109.784,72€.

Sur les demandes en paiement de la Cpam

L’Equité est tenue d’acquitter auprès de la Cpam de Seine et Marne, la somme de 41.422,77€ due au titre des prestations en nature, outre la somme de 5200€ correspondant à l’imputation de son recours à hauteur de l’assiette du poste de déficit fonctionnel permanent, soit au total celle de 46.622,77€, outre la somme de 1.066€, en son montant applicable au 1er janvier 2018 et due au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion, et 1500€ au titre des frais exposés devant la cour.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles alloués à la victime et à la Cpam de Seine et Marne sont confirmées.

L’Equité qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des entiers dépens d’appel. L’équité ne justifie pas de lui allouer une somme sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité commande d’allouer à M. Y une indemnité de 1800€ au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

Par ces motifs

La Cour,

— Confirme le jugement,

hormis sur le montant de l’indemnisation de la victime, les sommes lui revenant, le montant de la condamnation de l’Equité à paiement de sommes au profit de la Cpam de Seine et Marne,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

— Fixe le préjudice corporel global de M. Y sur aggravation à la somme de 370.968,37€ ;

— Dit que l’indemnité revenant à cette victime s’établit à 324.345,60€ ;

— Condamne l’Equité à payer à M. Y les sommes de :

* 324.345,60€, sauf à déduire les provisions versées, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, soit le 20 février 2018 à hauteur de 214.560,88€ et du prononcé du présent arrêt soit le 2 mai 2019 à hauteur de 109.784,72€,

* 1800€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel ;

— Condamne l’Equité à payer à la Cpam de Seine et Marne,

* 46.622,77€ au titre des débours,

* 1.066€ au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion prévue par l’article L.376-1 du code de la sécurité sociale et sur le fondement de l’ordonnance du 24 janvier 1996,

* 1500€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel

— Déboute l’Equité de sa demande au titre de ses propres frais irrépétibles exposés en appel ;

— Condamne l’Equité aux entiers dépens d’appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande, le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,

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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-6, 2 mai 2019, n° 18/05857