Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 16 avril 2021, n° 18/20208

  • Urssaf·
  • Véhicule·
  • Méditerranée·
  • Associations·
  • Utilisateur·
  • Cotisations·
  • Abus de droit·
  • Salarié·
  • Sociétés·
  • Indemnité

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-8, 16 avr. 2021, n° 18/20208
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 18/20208
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Bouches-du-Rhône, 21 novembre 2018, N° 21403737
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 16 AVRIL 2021

N°2021/

Rôle N° RG 18/20208 – N° Portalis DBVB-V-B7C-BDQYC

COLAS FRANCE SOCIETE

C/

URSSAF PACA

Association CENTRALE DES UTILISATEURS DE VEHICULES

Association DES UTILISATEURS DES VEHICULES MIDI MEDITERRANEE

Copie exécutoire délivrée

le :

à : -

Me Martin PERRINEL

-

Me David RIGAUD

- URSSAF PACA

— 

Association DES UTILISATEURS DES VEHICULES MIDI MEDITERRANEE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOUCHES-DU-RHONE en date du 22 Novembre 2018,enregistré au répertoire général sous le n° 21403737.

APPELANT

La SAS COLAS FRANCE SOCIETE Venant aux droits de la Société COLAS Midi Méditerranée, demeurant 345 rue Louis de Broglie – BP 20070 – 13792 AIX-EN-PROVENCE CEDEX 3

représenté par Me Martin PERRINEL, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

INTIMEE

URSSAF PACA, demeurant […]

représenté par Mme Z A (Responsable service juridique) en vertu d’un pouvoir spécial

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

Association CENTRALE DES UTILISATEURS DE VEHICULES, demeurant […]

représentée par Me David RIGAUD de l’AARPI RIGAUD AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

Association DES UTILISATEURS DES VEHICULES MIDI MEDITERRANEE, demeurant […]

non comparante

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 23 Février 2021 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président de chambre

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Laura BAYOL.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Avril 2021.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Avril 2021

Signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président de chambre et Madame Laura BAYOL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La SA COLAS Midi Méditerranée a fait l’objet d’un contrôle de l’Union pour le Recouvrement des cotisations de Sécurité Sociale et d’Allocations Familiales (ci-après URSSAF) portant sur son établissement de Vitrolles sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012.

Ce contrôle a donné lieu à une lettre d’observations du 30 septembre 2013 ayant débouché sur une mise en demeure du 16 décembre 2013, pour un montant total de 22.348 euros, contestée par la société devant la commission de recours amiable sur les points suivants : les limites d’exonération en matière de restauration hors locaux et hors restaurant, le dépassement des paniers non soumis à CSG/CRDS en cas d’application de la déduction forfaitaire spécifique, les indemnités de fractionnement de congés payés non soumises à cotisations, les avantages en nature véhicule au titre de l’utilisation de véhicules fournis par une association des utilisateurs de véhicules, les primes de médaille du travail et la déduction forfaitaire patronale TEPA des heures supplémentaires structurelles qu’aurait effectuées le salarié s’il n’avait pas été absent pour congés payés.

Par requête du 10 juillet 2014, la SA COLAS Midi Méditerranée a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône d’un recours à l’encontre du rejet implicite de sa contestation

par la commission.

Cette procédure a été enregistrée sous le numéro 21403737.

Par décision du 25 janvier 2017, notifiée le 11 avril 2017, la commission de recours amiable a finalement rendue une décision expresse de rejet.

Par jugement du 22 novembre 2018 (21403737), le tribunal des affaires de Sécurité Sociale des Bouches du Rhône a :

— dit n’y avoir lieu à jonction des instances enrôlées sous les numéros 21403736, 21403738, 21403737 et 21402277 ;

— rejeté avant dire droit les demandes présentées par la SA COLAS Midi Méditerranée en phase contentieuse du litige, aux fins d’injonction de versement sous astreinte aux débats les délibérations du conseil d’administration de l’URSSAF des Bouches-Rhône et de l’URSSAF PACA désignant pour les années 2013 et 2014 les membres de la commission de recours amiable de l’URSSAF des Bouches du Rhône et de Provence-Alpes-Côte-d’Azur, et de sursis à statuer dans l’attente de la production de ces pièces ;

— débouté la SA COLAS Midi Méditerranée prise en son établissement de Vitrolles de sa contestation de la décision adoptée le 25 janvier 2017 par la commission de recours amiable de l’URSSAF PACA avant d’être notifiée le 11 avril 2017 à l’issue de la procédure de contrôle diligentée par l’URSSAF des Bouches du Rhône pour la période écoulée du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012 ayant donné lieu à la lettre d’observations du 30 septembre 2013 portant initialement sur six chefs de redressement opérés et s’étant traduite par la mise en demeure du 16 décembre 2013, en ce qui concerne les chefs de redressement demeurant contestés correspondant dans l’ordre de la lettre d’observations du 30 septembre 2013 aux numéros 8, 9, 10, 16 et 17, et portant respectivement sur les limites d’exonération en matière de restauration hors locaux et hors restaurant, l’impact du dépassement des paniers non soumis à CSG/CRDS en cas d’application de la déduction forfaitaire spécifique, les indemnités de fractionnement de congés payés non soumises à cotisations, les primes de médaille du travail et la déduction forfaitaire patronale TEPA des heures supplémentaires structurelles qu’aurait effectuées le salarié s’il n’avait été absent de l’entreprise pour congés payés ;

— fait droit à sa contestation de la position de la commission de recours amiable de l’URSSAF PACA adoptée le 25 janvier 2017 correspondant au numéro 17 dans l’ordre de la lettre d’observations du 30 septembre 2013, et portant sur la réintégration dans l’assiette des cotisations d’un montant correspondant à l’utilisation de véhicules fournis et facturés par une association des utilisateurs de véhicules ;

— dit que cette décision avait pour effet de ne pas confirmer la position de la commission de recours amiable adoptée le 11 décembre 2014 dans le litige opposant la SA COLAS Midi Méditerranée à l’URSSAF des Bouches du Rhône devenue l’URSSAF PACA ;

— débouté les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires ;

— renvoyé les parties à nouveau calcul contradictoire du montant des cotisations et contributions sociales tenant compte de la présente décision ;

— dit n’y avoir lieu à statuer sur les dépens et à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 21 décembre 2018, la SA COLAS Midi Méditerranée a interjeté appel de ce jugement.

Cette procédure a été enregistrée sous le numéro RG 18/20208.

Par acte du 21 décembre 2018, reçu au greffe de la cour le 16 janvier 2019, après demande de la copie de la décision attaquée, l’URSSAF a également interjeté appel de ce jugement.

Cette procédure a été enregistrée sous le numéro RG 19/00835.

Par une ordonnance du 8 février 2019, la cour a ordonné la jonction de l’instance enregistrée sous le numéro RG 19/00835 pour être suivie sous le numéro RG 18/20208 .

Par conclusions déposées et développées oralement à l’audience, la société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée demande à la cour de la dire et juger recevable en sa contestation.

Sur l’intervention forcée de l’association des utilisateurs de véhicules Midi Méditerranée, la SA COLAS Midi Méditerranée demande à la cour, à titre liminaire, de juger nulle et de nul effet l’assignation délivrée le 17 février 2020, à titre principal de juger irrecevables les demandes formées par l’URSSAF PACA à l’encontre de cette association et à titre subsidiaire de débouter l’URSSAF PACA de ses demandes formées à l’encontre de cette association et de mettre cette dernière hors de cause.

Sur le jugement entrepris, la SA COLAS Midi Méditerranée demande à la cour d’infirmer celui-ci en ce qu’il l’a déboutée de sa demande d’annulation de la mise en demeure du 16 décembre 2013 et a validé la procédure de contrôle, en ce qu’il l’a déboutée de sa demande relative au remboursement des somme qu’elle avait versées à titre conservatoire et en ce qu’il a validé les chefs de redressement n°8 relatifs aux indemnités de panier, n°9 relatif à la CSG/CRDS sur les indemnités de panier, n°10 relatif aux indemnités pour fractionnement de congés payés et n°17 relatif à la loi TEPA.

Elle demande de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a annulé le chef de redressement n°12 relatif à l’avantage en nature véhicule.

La SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée demande à la cour, statuant à nouveau :

— à titre principal, de juger que l’URSSAF lui a implicitement mais nécessairement reproché l’existence d’un abus de droit tel que prévu par l’article L. 243-7-2 du code de la sécurité sociale sans mettre en oeuvre les garanties procédurales qui y sont attachées et, en conséquence, de juger irrégulières les opérations de contrôle et d’annuler lesdites opérations de contrôle, la mise en demeure du 16 décembre 2013 et l’entier redressement,

— à titre subsidiaire, d’annuler les chefs de redressement n°8 relatifs aux indemnités de panier, n°9 relatif à la CSG/CRDS sur les indemnités de panier, n°10 relatif aux indemnités pour fractionnement de congés payés et n°17 relatif à la loi TEPA,

— de condamner l’URSSAF PACA à lui rembourser les versements partiels effectués par elle au titre des chefs de redressement annulés,

— de condamner l’URSSAF à lui payer les intérêts légaux à compter des règlements partiels du 7 novembre 2013 et en ordonner la capitalisation,

La SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée demande à la cour, en tout état de cause, de :

— rectifier le dispositif du jugement du 22 novembre 2018 de la manière suivante : « Fait droit à la contestation par la SA COLAS MIDI-MEDITERRANEE prise en son établissement d’Aix-en-Provence de la position de la commission de recours amiable de la région Provence Alpes Côte d’Azur adoptée le 25 janvier 2017 correspondant au numéro 12 dans l’ordre de la lettre d’observations du 30 septembre 2013, et portant sur la réintégration dans l’assiette des cotisations du montant correspondant à l’utilisation de véhicules fournis et facturés par une Association des Utilisateurs de véhicules (AUV). »,

— annuler la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de l’URSSAF suite à la réclamation adressée le 15 janvier 2014 ainsi que la décision explicite de rejet en date du 25 janvier 2017 et notifiée à la société par un courrier en date du 11 avril 2017,

• – débouter l’URSSAF de Provence-Alpes-Côte d’Azur de l’intégralité de ses demandes,

• – condamner l’URSSAF de Provence-Alpes-Côte d’Azur à lui verserla somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile

— condamner l’URSSAF de Provence-Alpes-Côte d’Azur aux éventuels dépens.

La SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée soutient en premier lieu le rejet de la demande d’intervention forcée de l’association des utilisateurs de véhicule Midi-Méditerranée. D’une part, en ce que l’assignation est viciée pour irrégularité de fond insusceptible de régularisation puisque l’association en cause est dépourvue de la personnalité juridique. D’autre part, en ce que les demandes à son encontre sont irrecevables pour la même cause. Enfin, en ce que l’assignation est irrecevable au regard des dispositions des articles 331 et 555 du code de procédure civile.

S’agissant de la nullité pour vice de fond de l’assignation de l’association, la SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée rappelle, au visa de l’article 117 alinéa 2 du code de procédure civile, la nullité de l’acte pour défaut de capacité d’ester en justice. Elle rappelle que cette nullité n’a d’effet qu’à l’égard de celui qui l’invoque et que la nullité de l’acte est acquise dès lors que l’acte introductif d’instance a été délivré par ou à l’encontre d’une personne morale inexistante ou d’une entité dépourvue de toute personnalité juridique.

Elle fait valoir que l’association en cause, que l’URSSAF PACA a assigné par acte du 17 février 2020, a été dissoute comme il ressort de la publication au Journal Officiel du 15 janvier 2011.

La SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée soutient également, au visa de l’article 32 du code de procédure civile, que toute prétention émise contre une personne dépourvue du droit d’agir est irrecevable. Or, étant dépourvue de la personnalité morale, l’association en cause est nécessairement dépourvue du droit d’agir.

La SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée ajoute, au visa des articles 331 et 555 du code de procédure civile, que les conditions de l’intervention forcée en cause d’appel ne sont pas réunies dès lors qu’aucune demande de condamnation ou de déclaration en arrêt commun n’a été formulée par l’URSSAF et qu’aucune évolution du litige ne justifie la mise en cause d’un tiers pour la première fois en appel. Elle fait valoir, d’une part, qu’il ressort de l’assignation que l’intervention de l’association n’avait pour but que la production de documents destinés à éclairer la cour sur la solution du litige et d’autre part, que la situation dont se prévaut l’URSSAF au soutien de sa demande en intervention forcée de l’association existait déjà lors de l’acte introductif d’instance de sorte qu’une mise en cause en première instance était tout à fait possible, ce que n’a pas fait l’URSSAF et qui justifie le rejet de sa demande à hauteur d’appel.

Elle oppose à l’URSSAF, qui invoque au soutien de l’intervention forcée, comme élément nouveau postérieur au jugement, un arrêt de la Cour de cassation du 21 juin 2018 par lequel, selon elle, la

Cour enjoindrait à l’URSSAF de poursuivre ces investigations auprès de l’association des utilisateurs de véhicule, que celui-ci antérieur au jugement entrepris du 22 novembre 2018, ne saurait être considéré comme un fait ou événement postérieur au jugement justifiant une intervention forcée en cause d’appel.

Elle oppose à l’URSSAF, qui invoque au soutien de l’intervention forcée, la réception par Colas de courriers adressés à l’association des utilisateurs de véhicule Midi Méditerranée, que le fait nouveau invoqué ne peut concerner que l’instance en cause ce dont elle relève que ce n’est pas le cas de courrier qui concerne un autre redressement.

Elle oppose à l’URSSAF, qui invoque au soutien de l’intervention forcée, le caractère transparent de l’association AUV, ce que ceci ne constitue pas un fait nouveau révélé postérieurement au jugement mais une motivation nouvelle dès lors que l’URSSAF disposait, dès l’origine, de tous les éléments l’ayant conduit à une telle appréciation, qu’elle aurait pu avoir dès l’origine.

Les éléments permettant de penser que l’AUV serait transparente étaient connus de l’URSSAF PACA dès le contrôle.

Elle oppose enfin à l’URSSAF, qui invoque la détention de pièces déterminantes par l’association AUV pour l’issue du litige, que l’URSSAF souhaitait obtenir ces documents dès l’origine du contrôle ce qui encore une fois ne constitue pas un fait nouveau postérieur au jugement.

Elle précise que seule l’Association des utilisateurs de véhicules Midi Méditerranée, personne morale dissoute, a été assignée à comparaître devant la Cour de céans et l’URSSAF n’a fait que délivrer une copie de cette assignation à l’Association centrale et les factures dont l’URSSAF PACA fait état ont été émises par cette seule dernière société.

La SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée soutient en second lieu, d’une part, l’irrégularité manifeste de la procédure de contrôle et la nullité de la mise en demeure, et d’autre part, le caractère injustifié des chefs de redressement n°8, 9, 10, 12 et 17.

La SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée précise à titre liminaire qu’elle ne conteste plus le chef de redressement n°16 relatif aux primes de médailles du travail.

S’agissant de l’irrégularité de la procédure de contrôle et la nullité de la mise en demeure au motif du non-respect de la procédure d’abus de droit, elle soutient, tout d’abord, la recevabilité de sa contestation.

A cet égard, elle rappelle qu’elle sollicitait, en première instance, à titre principal, l’annulation de la mise en demeure du 16 décembre 2013, que cette demande a été rejetée par le tribunal, comme cela ressort de la formulation « déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires », et qu’il ressort de sa déclaration d’appel du 20 décembre 2018, qu’elle a fait appel de ce chef de jugement.

Aussi, elle précise, au visa de l’article 565 du code de procédure civile qu’il importe peu que le fondement de cette demande qui reposait sur l’irrégularité de la composition de la commission de recours amiable, en première instance, ne soit plus identique en cause d’appel et repose désormais sur le recours implicite mais nécessaire, par l’URSSAF, à la notion d’abus de droit sans lui avoir offert les garanties qui y sont attachées.

La SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée observe que, dans ses conclusions, l’URSSAF lui reproche, implicitement, un abus de droit, sans toutefois avoir, par ailleurs, mis en oeuvre la procédure d’abus de droit.

A cet égard, elle rappelle l’identité des notions d’abus de droit entre le droit fiscal et le droit de la sécurité sociale comme des procédures d’abus de droit et soutient que cette identité doit conférer une identité de régime de sorte que là où le juge fiscal sanctionne l’administration lorsqu’elle recourt implicitement à la notion d’abus de droit tout en évitant volontairement la mise en oeuvre de la procédure d’abus de droit, laquelle confère des garanties essentielles à la personne contrôlée, le juge de la juridiction de sécurité sociale ne saurait faire différemment.

La SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée développe les éléments d’analogie entre la notion d’abus de droit en droit fiscal et en droit de la sécurité sociale.

Elle soulève tout d’abord une identité de nature en relevant en premier lieu la similitude dans la rédaction des textes soulignant l’intention du législateur d’aligner les deux régimes. Elle fait observer que dans les deux cas, il s’agit, pour l’URSSAF ou l’administration fiscale, d’écarter un acte juridiquement valide soit que cet acte est considéré comme fictif soit qu’il est considéré comme n’ayant été inspiré par aucun autre but que celui d’éviter le paiement de l’impôt ou des cotisations et contributions sociales. Dans les deux cas la sanction réside dans la majoration du redressement, en l’occurrence 20% en matière de cotisations sociales.

Elle ajoute que, depuis la loi n°2018-898 du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude, les sanctions à l’encontre des professionnels, par exemple du droit, ayant participé au montage de ces actes retenus comme des abus de droit, sont alignées qu’il s’agisse d’un abus de droit en matière fiscale ou en matière de cotisations sociales.

Elle soulève ensuite une identité de régime, en relevant la similitude des garanties offertes par la mise en oeuvre des procédures d’abus de droit.

Elle précise que, dans la mesure où le recours à la notion d’abus de droit entraîne une atteinte particulièrement importante à la sécurité juridique de la personne contrôlée en ce qu’il s’agit d’écarter un acte juridiquement valide et licite au motif qu’il n’aurait pas été inspiré par de «bons motifs», mais au contraire, dans le but d’éviter le paiement d’impôts ou de cotisations sociales, le recours à la procédure d’abus de droit s’accompagne de garanties.

Elle fait observer que ces procédures offrent, tout d’abord, une garantie relative à la personne habilitée à mettre en oeuvre cette procédure, en l’occurrence le directeur de l’organisme, et ensuite une garantie de pouvoir saisir le comité des abus de droit, lequel est composé, que ce soit en matière fiscale ou en matière de sécurité sociale, d’experts hautement qualifiés.

La SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée estime que le juge de la sécurité sociale doit, en conséquence, faire application de la théorie d’abus de droit implicite développée par le juge fiscal.

A cet égard, elle rappelle au préalable que l’abus de droit se manifeste soit, en présence d’un acte manifestement fictif, soit en présence d’un acte réel mais conclu pour des motifs constitutifs d’une fraude à la loi.

Elle rappelle également que le juge fiscal consacre l’obligation, faite à l’administration, de se placer dans la procédure adéquate lorsqu’elle reproche un abus de droit à un contribuable en sanctionnant par la nullité les redressements opérés en évitant de mettre en oeuvre la procédure d’abus de droit.

A cet égard, elle souligne que le juge fiscal identifie l’abus de droit implicite en examinant les allégations de l’administration que ce soit lors du contrôle ou lors du contentieux qui s’ensuit.

Elle indique qu’une transposition de la jurisprudence administrative devant le juge judiciaire est

acquise lorsque les circonstances l’exigent notamment dans le cadre d’un objectif constitutionnel ou de bonne administration de la justice. Elle précise que cette théorie de l’abus de droit implicite a d’ailleurs été transposée par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lille dans un jugement du 15 mai 2018 puis dans un jugement du 4 septembre 2018.

Elle soutient que l’URSSAF n’a pas mis en oeuvre, de façon injustifiée, la procédure d’abus de droit. Elle fait observer que c’est de façon systématique que l’URSSAF refuse de mettre en oeuvre la procédure d’abus de droit. Elle demande donc que le juge judiciaire sanctionne par la nullité les redressements effectués dans un contexte d’abus de droit implicite.

La SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée soutient que le recours implicite à l’abus de droit est caractérisé en ce que l’URSSAF justifie son redressement en ayant recours tant à la notion d’acte fictif qu’à la notion de fraude à la loi. En effet, l’URSSAF soutient, d’une part, que l’association AUV serait fictive et se confondrait en réalité avec la SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée et, d’autre part, que le schéma consistant à ce que cette association mette à disposition de ses adhérents un véhicule et refacture à la société au barème kilométrique les kilomètres parcourus à titre professionnel avec ledit véhicule n’aurait été établi que dans le but d’éluder le paiement des cotisations de sécurité sociale.

Elle souligne que l’URSSAF ne saurait se retrancher derrière le fait de ne pas avoir appliqué la sanction attachée à la mise en oeuvre de la procédure d’abus de droit (la majoration de 20%) pour échapper à la sanction attachée au recours implicite à la théorie de l’abus de droit, à savoir la nullité du redressement.

S’agissant du caractère injustifié du redressement, la SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée entend critiquer les chefs de redressement n°8, 9, 10, 12 et 17.

Concernant le chef de redressement n°8 relatif aux « limites d’exonération – restauration hors locaux et hors restaurant (panier de chantier, casse croute) », la SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée rappelle qu’elle a versé à ses ouvriers travaillant sur des chantiers et contraints de prendre leur repas au restaurant des indemnités de repas à hauteur de 14 euros en 2010, 14,50 euros en 2011 et 14,80 euros en 2012. Elle rappelle également que les limites d’exonération de cotisations sociales étaient fixées à 16,80 euros en 2010 et 17,10 euros en 2011 et 2012. Elle indique que, cependant, l’URSSAF a réintégré dans l’assiette de cotisations la différence entre le montant des indemnités versées aux ouvriers et la limite d’exonération fixée pour les indemnités versées aux salariés qui ne sont pas contraints de prendre leur repas au restaurant soit 8.20 euros en 2010, 8,30 euros en 2011 et 8,40 euros en 2012.

La SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée soutient, au visa des articles 2 et 3 de l’arrêté du 20 décembre 2002, que les indemnités versées dans le cadre de l’indemnisation des frais professionnels sont déduites de l’assiette des cotisations et contributions sociales dans les limites fixées par l’arrêté et sous réserve de leur utilisation conformément à leur objet. Elle ajoute que lorsque ces indemnités sont présumées avoir été utilisées conformément à leur objet, l’employeur n’est pas tenu de produire des justificatifs. Elle rappelle ainsi qu’en matière d’indemnités de repas l’indemnité est réputée utilisée conformément à son objet pour sa fraction qui n’excède pas 15 euros quand le travailleur est en déplacement professionnel et se trouve empêché de regagner sa résidence habituelle (1°) ou son lieu de travail, 5 euros quand il est contraint de prendre une restauration sur son lieu de travail effectif (2°) ou 7,50 euros quand il est en déplacement hors des locaux de l’entreprise ou sur un chantier et que les conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu de travail habituel et qu’il n’est pas démontré que les circonstances ou les usages de la profession l’obligent à prendre ce repas au restaurant (3°). Etant observé que ces montant sont réactualisés.

Elle soutient que contrairement à ce qu’estime l’URSSAF il est d’usage que les salariés relevant de son secteur d’activité (construction routière) ne prennent pas leur repas sur les chantiers mais au restaurant permettant ainsi à celle-ci de considérer que l’indemnité qu’elle leur verse n’est pas limitée par au 3° de l’article 3 précité.

Elle précise que cet usage tient à la particularité du processus de production routière effectué sur des chantiers mobiles itinérants et de courte durée. A cet égard, l’activité de construction routière ne doit pas être confondue avec l’activité de bâtiment, plus sédentaire. Et rappelle que ces circonstances ont généré un usage dans le secteur de la construction routière qui a été souligné par la Cour de cassation dans un arrêt SCREG du 24 avril 1980, litige dans lequel l’URSSAF des Bouches-du-Rhône était partie. De plus, elle souligne que la commission de recours amiable de l’URSSAF du Nord-Pas-de-Calais l’a notamment rappelé dans plusieurs décisions rendues le 30 mars 2015 à l’égard de différents établissements de la société SCREG NORD PICARDIE apportés en 2013 à la société COLAS NORD PICARDIE, toutes deux affiliées, comme la concluante, à la société COLAS.

Elle conclut donc à l’infirmation du jugement de ce chef.

Concernant le chef de redressement n°10 relatif aux indemnités de fractionnement de congés non payés soumises à cotisations, la SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée rappelle qu’elle verse à certains de ses salariés des indemnités de fractionnement de congés payés, ces indemnités ayant pour objet d’indemniser le salarié des dépenses supplémentaires résultant du fractionnement par l’employeur de sa période de congés.

Elle oppose à la motivation du premier juge confirmant la position de l’URSSAF que son activité de revêtement routier se réalise principalement pendant la période de mai et octobre impliquant, de ce fait, qu’elle impose à ces salariés de fractionner leurs congés.

Elle soutient que les conventions collectives des Travaux Publics disposent qu’en cas de prise du congé annuel par fractions, le salarié bénéficie d’une indemnité forfaitaire de 8/100e des appointements mensuels et constitue une charge inhérente à l’emploi dès lors que les frais supplémentaires engendrés ne résultent pas de la convenance personnelle du salarié qui en bénéficie.

Elle oppose également que si les justificatifs qu’elle produit sont des attestations sur l’honneur de ses salariés, celles-ci n’en ont pas moins une valeur probante dès lors que la preuve de l’utilisation conforme à l’objet s’effectue par tous moyens.

Elle ajoute qu’une indemnité peut constituer un remboursement de frais, et non un complément de salaire, nonobstant son caractère forfaitaire et le fait que son versement ne soit soumis à la production d’aucun justificatif.

Elle conclut donc à l’infirmation du jugement de ce chef.

Concernant le chef de redressement n°12 relatif aux avantages en nature véhicule, la SA Société COLAS FRANCE, venant aux droits de la société COLAS Midi Méditerranée rappelle que l’URSSAF a réintégré dans l’assiette de cotisations sociales, un avantage en nature «véhicule» dont elle estime que les salariés auraient bénéficié.

Par conclusions déposées et reprises oralement à l’audience, l’Urssaf PACA demande :

*à l’encontre de l’association centrale des utilisateurs de véhicules et de l’association des utilisateurs de véhicules

- déclarer l’intervention forcée des associations recevable

— qu’il soit fait injonction à l’association de communiquer la liste de documents suivants :

— Les conventions signées entre l’Association et la société Colas,

— La composition des bureaux de l’Association centrale des utilisateurs de véhicule,

— Le détail des ressources assurant le fonctionnement de l’Association,

— Les contrats de mise à disposition de véhicules conclus entre les salariés et l’Association,

— Les explications relatives aux critères et conditions d’attribution des véhicules aux utilisateurs salariés (Procédure écrite éventuelle) et précisions sur le lien entre l’adhésion à l’Association et l’appartenance à la société Colas,

— Les cartes grises des véhicules mis à disposition,

— Le détail des kilomètres professionnels (lieux de déplacements et kilomètres par jour travaillé) par le biais des fiches de pointage des adhérents ou par la communication des agendas des adhérents portant mention des lieux et dates de rendez-vous,

— Tout justificatif permettant de conclure à l’utilisation effective du véhicule par l’adhérant dans

le cadre de ses déplacements professionnels (tickets de péage, de parking ou de prise de carburant),

— Les contrats de leasing ou factures d’achat des véhicules,

— Les factures d’entretien des véhicules.

— la condamnation de l’association centrale des utilisateurs de véhicules et de l’association des utilisateurs de véhicules au paiement de 2.000 euros à titre de frais irrépétibles

*à l’encontre de la société Colas

— l’infirmation du jugement rendu le 22 novembre 2018 par le Tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône, en ce qu’il a partiellement annulé le redressement opéré à la suite du contrôle portant sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012,

— statuant à nouveau, la condamnation en deniers ou quittances de la société Colas, pour son établissement de Vitrolles, au paiement de la mise en demeure du 16 décembre 2013 portant sur 22.348 euros de cotisations et majorations de retard,

— la condamnation de la société Colas à lui payer la somme de 2.000 euros à titre de frais irrépétibles,

— la condamnation de la société Colas au paiement des dépens.

Au soutien de ses prétentions de la recevabilité de l’intervention forcée, l’Urssaf rappelle les dispositions de l’article 555 du Code de procédure civile et considère que l’arrêt de la Cour de cassation rendu le 21 novembre 2018, postérieurement au prononcé du jugement le 19 janvier 2018 constitue un nouvel élément permettant d’attraire une nouvelle partie en la cause au moment de l’appel.

Elle fait valoir que les tampons d’avis de réception des courriers AR par l’AUV sont des tampons de la société Colas, que l’AUV n’a pas de boîte au lettres distincte de celle de la société Colas et qu’elle a déménagé à la faveur des déménagements du groupe Colas de sorte qu’il existe une confusion entre

l’AUV et la société Colas.

L’intervention forcée se justifie dès lors que l’AUV est une association transparente dès lors que la direction et la gestion de l’AUV ne sont pas indépendantes des sociétés Colas, que ses ressources proviennent de la société Colas et que son activité a pour seul objet la mise à disposition de véhicules pour certains salariés de la société Colas. Elle considère que ces faits démontrent que le dispositif AUV de la société Colas s’apparente à un montage juridique visant à ne plus avoir à déclarer les avantages en nature véhicule pour éviter de payer les cotisations y afférent.

L’AUV est en possession de documents qui permettraient à l’Urssaf d’étayer sa démonstration, de sorte que l’intervention forcée et la demande présentée à l’encontre de l’AUV sont justifiées.

Elle conteste recourir à la théorie de l’abus de droit mais opère une réintégration des cotisations et contributions sociales éludées par l’octroi d’un avantage en nature consenti par le biais d’une tierce personne, ce qui est inopérant.

Sur les frais professionnels : limites d’exonération – restauration hors locaux et hors restaurant, ( point 8 de la LO)l’Urssaf se fonde sur l’arrêté du 20 décembre 2002 qui fixe le montant de l’indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas exposées par le salarié en déplacement professionnel et empêché de regagner sa résidence ou le lieu habituel de travail et sur la présomption d’utilisation conforme à leur objet des indemnités forfaitaires lorsqu’elles sont inférieures aux limites d’exonération, pour faire valoir qu’au delà de la limite d’exonération, l’exonération est subordonnée à la preuve de l’utilisation de l’allocation forfaitaire conformément à son objet. Elle considère qu’à défaut pour la société Colas de rapporter la preuve que les salariés bénéficiaires des indemnités de panier d’une valeur supérieure aux limites d’exonération, se trouvent effectivement dans des conditions particulières de travail les contraignant à prendre leur repas au restaurant, la réintégration des dépassements de ces dépenses, dans l’assiette des cotisations est justifiée.

Elle répond aux arguments de la société Colas en indiquant qu’il est d’usage dans la profession que les ouvriers en déplacement emportent un panier et prennent leur repas sur le lieu du chantier et non au restaurant et que les décisions dont se prévaut la société Colas ne sont pas définitives

Sur les frais professionnels : dépassement des paniers non soumis à CSG/CRDS en cas d’application de la déduction forfaitaire spécifique ( point 9 de la LO), l’Urssaf explique que les indemnités de panier sont exclues dans leur totalité de l’assiette des cotisations et contributions sociales lorsque l’employeur n’applique pas la déduction forfaitaire spécifique de 10%, si elle est appliquée toute l’année civile, alors la société doit réintégrer les indemnités de panier dans l’assiette des cotisations. Elle ajoute que la base CSG/CRDS a été calculée en excluant la totalité des indemnités de panier alors que leur valeur forfaitaire, fixée dans l’entreprise, est systématiquement supérieure aux limites d’exonération prévues par l’arrêté du 20 décembre 2002, de sorte que la part excédentaire devait être incluse dans l’assiette CSG/CRDS.

Sur les indemnités de fractionnement de congés payés non soumises à cotisations (point 10 dans la LO) l’Urssaf fait valoir qu’en cas de prise de congés annuel par fractions, la convention collective des entreprises de travaux publics fait bénéficier le salarié de 2 jours ouvrables supplémentaires et d’une indemnité forfaitaire de 8/100e des appointements mensuels et explique que cette indemnité peut être exclue de l’assiette des cotisations sous réserve pour l’employeur de rapporter la preuve que le salarié bénéficiaire a été contraint d’interrompre ses vacances, cela ne devant pas résulter de convenances personnelles mais bien de nécessités de service ou de la bonne marche de l’entreprise et de démontrer que le montant des frais supplémentaires engagés est au moins équivalent à celui de l’indemnité versée, étant précisé qu’à défaut la différence est réintégrée dans l’assiette des cotisations et contributions.

Elle considère que l’échantillon d’attestations de salariés produit par la société ne permet pas de justifier d’éventuels frais supplémentaires engagés du fait de fractionnement et ne permet pas de démontrer l’utilisation de ces indemnités conformément à leur objet, dans la mesure où les attestations ne font qu’établir l’existence de frais de vacances pour les salariés sans démontrer qu’ils ont été contraints d’engager des dépenses supplémentaires résultant du fractionnement de leurs congés pour nécessité de service.

Sur les avantages en nature véhicule, principe et évaluation – hors cas des constructeurs et concessionnaires (point 12 de la LO), l’Urssaf fait d’abord valoir que le tribunal a inversé la charge de la preuve en jugeant qu’il lui appartient de rapporter la preuve que les salariés bénéficiaires des services de l’AUV bénéficient d’un avantage en nature dans l’utilisation des véhicules pour leurs besoins privés.

Puis, elle explique, sur le fondement d’arrêts de la cour de cassation, que l’absence de justificatif établissant que le véhicule à usage exclusivement professionnel, l’économie de frais réalisée par le salarié doit donner lieu à réintégration dans l’assiette de cotisations d’un avantage en nature et il est indifférent que celui-ci soit octroyé directement ou par l’intermédiaire d’un tiers dès lors que cet octroi est opéré en considération de l’appartenance du salarié à l’entreprise concernée.

Elle rappelle qu’il a été constaté lors du contrôle que des salariés bénéficiaient en permanence de l’usage d’un véhicule mis à disposition par l’AUV, que la société Colas réglait chaque mois des factures à l’AUV à titre de 'redevance KM professionnels', censées correspondre à la prise en charge de l’utilisation professionnelle des véhicules, qu’en contrepartie certains des salariés concernés par cette mise à disposition règlent une cotisation annuelle dont le montant est fonction de la catégorie du véhicule, et qu’avec ses ressources l’association règle les factures de location ou d’achat, les factures de carburant, d’entretien et réparation des véhicules mis à disposition.

Dès lors que les frais d’adhésion à l’association ne couvrent pas les frais liés à une utilisation non professionnelle des véhicules mis à disposition par la société sous couvert de l’AUV, la différence doit être qualifiée d’avantage en nature.

Elle précise que l’évaluation de l’avantage en nature a été effectuée sur la base des éléments fournis pendant le contrôle et permettant une évaluation forfaitaire, qui ne doit pas se confondre avec une taxation forfaitaire.

Sur la Loi TEPA : réduction salariale et déduction forfaitaire patronale heures structurelles – absences non ou partiellement rémunérées (point 17 de la LO), l’Urssaf explique que la loi du 21 août 2007 tend à favoriser l’accomplissement d’heures supplémentaires ou complémentaires de travail, par l’application de réduction de cotisations salariales de sécurité sociale à la rémunération des heures supplémentaires ou complémentaires. Elle précise que les contreparties obligatoires en repos et jours de congés pour événements familiaux sont assimilés à des jours de travail effectif pour le calcul des droits du salarié, mais que les autres périodes d’absence (congés maladie, congés payés, congés maternité etc.) ne sont pas assimilées à du temps de travail effectif. Elle détaille les modalités pour décompter les heures supplémentaires et le calcul des réductions et fait valoir que la société a majoré à tort les réductions salariales et patronales en décomptant des périodes non considérées comme étant équivalent à du travail effectif, notamment les périodes d’absence avec maintien partiel de rémunération comme les congés payés.

Elle considère que la tolérance ministérielle dont se prévaut la société Colas relativement aux heures structurelles n’a pas à s’appliquer dans la mesure où l’absence pour congés n’est pas rémunérée par l’entreprise mais par la caisse des congés payés, de sorte que le cotisant ne saurait obtenir une exonération de cotisations là où il n’en paie pas.

L’association centrale des utilisateurs de véhicules, intervenante volontaire, reprenant ses conclusions

déposées à l’audience, demande à la cour de :

— à titre liminaire, de constater la recevabilité de l’intervention volontaire de l’Association centrale des utilisateurs de véhicules,

— à principal, de prononcer la nullité de l’assignation délivrée par l’Urssaf Provence-Alpes-Côte d’Azur à l’Association des utilisateurs de véhicules Midi-Méditerranée, pour défaut de capacité d’ester en justice de cette dernière,

— à titre subsidiaire, de prononcer l’irrecevabilité des demandes formulées par l’Urssaf Provence-Alpes-Côte d’Azur à l’encontre de l’Association des utilisateurs de véhicules Midi-Méditerranée, pour défaut du droit à agir de cette dernière,

— à titre infiniment subsidiaire, de prononcer l’irrecevabilité de l’intervention forcée formulée par l’Urssaf Provence-Alpes-Côte d’Azur à l’encontre de l’Association des utilisateurs de véhicules Midi-Méditerranée en raison de :

— son objet, qui est uniquement d’obtenir la communication de pièces en relation avec

le litige l’opposant à la société Colas Midi-Méditerranée,

— l’absence de circonstances de droit ou de fait nouvelles et,

— l’absence d’évolution du litige,

— en tout état de cause, de :

— rejeter la demande de condamnation formulée au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

— condamner l’Urssaf à verser à l’Association centrale des utilisateurs de véhicules la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile avec intérêt au taux légal à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir, ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle fait valoir que :

— elle intervient en lieu et place de l’association des utilisateurs de véhicules Midi-Méditerranée dépourvue de la personnalité morale,

— l’AUV Midi-Méditerranée, dissoute en décembre 2010, est dépourvue de personnalité juridique en sorte que sa mise en cause est affectée d’une nullité de fond,

— la dissolution de l’AUV Midi-Méditerranée a été publiée au Journal Officiel du 15 janvier 2011en sorte qu’elle ne disposait pas du droit d’agir lorsqu’elle a été assignée par l’Urssaf, les demandes formulées à son encontre sont irrecevables,

— la demande d’intervention formulée par l’Urssaf poursuit un seul et unique objectif, celui

d’obtenir la communication de documents par l’AUV, en relation avec le litige qui l’oppose à la société Colas Midi-Méditerranée, et pour lequel le tribunal des affaires de sécurité sociale a tranché en faveur de la société, il ne s’agit ni d’une mise en cause aux fins d’obtenir une condamnation, ni d’une mise en cause aux fins de déclaration de jugement commun contrairement aux prévisions de l’article 331 du code de procédure civile,

— aucune évolution du litige ne justifie cette mise en cause dès lors que l’URSSAF PACA avait

parfaitement connaissance du rôle de l’AUV depuis le début de cette affaire et la Cour de cassation s’est déjà prononcée à plusieurs reprises sur la qualification à donner à cette mise à disposition par l’AUV de véhicules aux salariés de Colas, et a toujours justifié le rejet de la qualification d’avantage en nature par l’existence de l’AUV,

— l’arrêt du 21 juin 2018 auquel se réfère l’Urssaf est antérieur à l’audience de plaidoirie de première instance qui s’est tenue dans ce dossier le 27 septembre 2018 et n’apporte aucun élément nouveau, tous les éléments étaient connus de l’URSSAF PACA lors du contrôle,

— enfin, les éléments avancé par l’URSSAF PACA ne constituent pas une modification des données juridiques du litige.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et soutenues oralement lors de l’audience.

MOTIFS

Sur l’intervention forcée de l’association des Utilisateurs de véhicules Midi Méditerranée

Par acte du 17 février 2020 l’URSSAF PACA a fait délivrer une assignation à l’encontre de l’association des Utilisateurs de Véhicules Midi Méditerranée afin de comparaître par devant la présente cour aux fins de communiquer divers documents. Par une maladresse de rédaction, le dispositif de cette assignation indiquait « de déclarer recevable le présent appel en cause et l’intervention à la procédure de l’association loi 1901 Association Centrale des Utilisateurs de véhicules » alors que cette assignation a bien été délivrée au siège de l’association des Utilisateurs de Véhicules Midi Méditerranée au 855 Rue Descartes à Aix-en-Provence.

Il est justifié de la dissolution de l’association des Utilisateurs de Véhicules Midi Méditerranée par la publication qui en a été faite le 15 janvier 2011 au Journal Officiel bien que l’assignation sus visée ait été remise à M. B C se déclarant habilité à recevoir l’acte.

L’assignation de cette association est affectée d’une nullité de fond pour avoir été délivrée à une entité dépourvue de la personnalité juridique et partant, insusceptible de présenter la capacité de se défendre en justice.

Cette assignation a été dénoncée le 14 février 2020 à l’association Centrale des Utilisateurs de Véhicules sans pour autant que cette dénonce entraîne une quelconque intervention forcée.

Il convient d’annuler l’assignation délivrée à l’encontre de l’association des Utilisateurs de véhicules Midi Méditerranée.

Sur les effets de l’intervention volontaire de l’association Centrale des Utilisateurs de Véhicules

L’association Centrale des Utilisateurs de Véhicules est intervenue volontairement à la présente instance lors de l’audience du 8 octobre 2020 et a pris des conclusions d’intervention volontaire.

Dans le cadre de cette intervention, l’URSSAF PACA a pris des conclusions soutenues à l’audience tendant à lui faire injonction de communiquer divers documents et à lui demander le paiement d’une somme de 2.000,00 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

• L’article 554 du code de procédure civile prévoit que «peuvent intervenir en cause d’appel dès lors qu’elles y ont intérêt les personnes qui n’ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité».

La recevabilité de l’intervention de l’association centrale des Utilisateurs de véhicules n’est critiquée par personne.

Interpellées à l’audience par la cour sur cette particularité procédurale, aucune des parties n’a contesté la possibilité pour l’une des parties en la cause de formuler des demandes à l’encontre d’une partie intervenante volontaire étant observé qu’en application de l’article 66 du code de procédure civile «constitue une intervention la demande dont l’objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires» et qu’en sa qualité de partie au procès l’intervenant volontaire s’expose à ce qu’une demande soit formulée à son encontre.

Il sera par ailleurs constaté que pas plus dans ses écritures que lors de l’audience l’association Centrale des Utilisateurs de Véhicules ne s’est prononcée sur les demandes formulées à son encontre par l’URSSAF PACA.

Sur l’abus de droit

L’URSSAF PACA se défend en l’espèce d’avoir invoqué un quelconque abus de droit se manifestant par des actes ayant un caractère fictif ou des actes ayant pour objectif d’éluder ou d’atténuer les contributions et cotisation sociales d’origine légale ou conventionnelle auxquelles le cotisant est normalement tenu.

Parallèlement, l’URSSAF PACA fait état d’un montage juridique permettant d’échapper aux règles relatives à l’avantage en nature soutenant que la société a souhaité « externaliser » ses frais liés à la gestion de sa flotte automobile et les avantages en nature qu’elle doit décompter ; ces choix peuvent s’analyser en une volonté d’optimisation sociale.

Dès lors que l’URSSAF PACA renonce expressément à se prévaloir d’un abus de droit, elle n’est pas recevable à invoquer l’existence d’un montage juridique faisant appel à des associations dites «transparentes» ce qui ferait immanquablement appel à la notion d’abus de droit implicite.

En effet, l’URSSAF PACA ne peut simultanément recourir à l’existence d’un montage juridique frauduleux destiné à éluder les cotisations et contributions sociales pour exiger un rappel de cotisations et se défendre de recourir à la notion d’abus de droit pour se prémunir des conséquences attachées au non respect de la procédure particulière prévue en cette matière, inobservation qui ne fait l’objet d’aucune discussion.

Il n’y a donc pas lieu d’annuler le contrôle de ce chef.

Sur le chef de redressement n° 8 : frais professionnels : limites d’exonération '

Restauration hors locaux et hors restaurant (Panier de chantier, Casse croute)

Selon l’article L.242-1 du code de la sécurité sociale, tout avantage en espèces ou en nature versé en contrepartie ou à l’occasion du travail doit être soumis à cotisations à l’exclusion des sommes représentatives de frais professionnels, dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel.

Les conditions d’exonération des remboursements de frais professionnels sont fixées par l’arrêté du 20 décembre 2002.

Les frais professionnels s’entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l’emploi du travail salarié ou assimilé que celui-ci supporte au titre de l’accomplissement de ses missions.

En matière de frais de nourriture, l’indemnisation peut être effectuée sous la forme de remboursement des dépenses réelles ou d’allocations forfaitaires.

Si la démonstration n’est pas établie que le salarié est exposé à des frais supplémentaires de repas, les indemnités doivent être réintégrées dans l’assiette des cotisations en application de l’article L.242-1 du code de la sécurité sociale.

En application du 1° de l’article 3 de l’arrêté du 20 décembre 2002, lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement professionnel et empêché de regagner sa résidence ou lieu habituel de travail, l’indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée conformément à son objet pour la fraction qui n’excède pas :

16,80 euros pour l’année 2010,

17,10 euros pour l’année 2011.

En application du 3° de l’article 3 de l’arrêté du 20 décembre 2002, lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement hors des locaux de l’entreprise ou sur un chantier, et lorsque les conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu habituel de travail pour le repas et qu’il n’est pas démontré que les circonstances ou les usages de la profession l’obligent à prendre ce repas au restaurant, l’indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n’excède pas :

—  8,20 euros à compter du 1er janvier 2010,

—  8,30 euros à compter du 1er janvier 2011,

—  8,40 euros à compter du 1er janvier 2012.

En l’espèces les inspecteurs du recouvrement ont constaté que la société a attribué des indemnités de panier aux salariés occupés sur des chantiers afin de les rembourser de leur repas pris hors des locaux de l’établissement.

Ces indemnités de panier, d’un montant forfaitaire fixé par l’employeur, sont attribuées suivant le barème unitaire suivant :

— Année 2010 : 14,00 euros,

— Année 2011 : 14,50 euros,

— Année 2012 : 14,80 euros.

Les inspecteurs du recouvrement ont noté que la société ne produisait aucun élément permettant de constater que le dépassement ( indemnité forfaitaire – indemnité réglementaire) a été utilisé conformément à son objet en sorte que ce dépassement a été réintégré dans l’assiette des cotisations et contributions sociales.

La société se réfère à l’article 3 de l’arrêté du 20 décembre 2002 qui énonce :

« Les indemnités liées à des circonstances de fait qui entraînent des dépenses supplémentaires de nourriture sont réputées utilisées conformément à leur objet pour la fraction qui n’excède pas les montants suivants :

1° Indemnité de repas :

Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement professionnel et empêché de regagner sa résidence ou lieu habituel de travail, l’indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n’excède pas 15 EUR par repas ;

2° Indemnité de restauration sur le lieu de travail :

Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est contraint de prendre une restauration sur son lieu effectif de travail, en raison de conditions particulières d’organisation ou d’horaires de travail, telles que travail en équipe, travail posté, travail continu, travail en horaire décalé ou travail de nuit, l’indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de restauration est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n’excède pas 5 EUR ;

3° Indemnité de repas ou de restauration hors des locaux de l’entreprise :

Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement hors des locaux de l’entreprise ou sur un chantier, et lorsque les conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu habituel de travail pour le repas et qu’il n’est pas démontré que les circonstances ou les usages de la profession l’obligent à prendre ce repas au restaurant, l’indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n’excède pas 7,5 EUR ».

Cette dernière indemnité a été réévaluée comme précisé plus avant.

La société estime donc que si les circonstances de fait (telles que des conditions particulières de travail) ou les usages de la profession imposent aux salariés de prendre leur repas au restaurant, l’indemnité allouée par l’employeur échappe aux cotisations et contributions sociales dans la limite des montants fixés à l’article 3 (1°) de l’arrêté du 20 décembre 2002, sans que l’employeur n’ait à produire de justificatifs des frais engagés.

La société fait valoir que ses chantiers sont par définition itinérants s’agissant de construction, entretien et réfection de voies de circulation, que pour le confort des salariés, étant observé que l’article R.4228-19 du code du travail prohibe la prise de repas sur le lieu de travail, il n’est pas possible d’installer des commodités pour la prise de repas dans des conditions d’hygiène et de salubrité acceptables.

Si la société ne produit aucun justificatif de prise de repas en restaurant, il est produit une jurisprudence ancienne et versé de nombreuses attestations tant de salariés de l’entreprise que de salariés d’entreprises exerçant la même activité que la société appelante confirmant qu’il est d’usage dans la profession de prendre ses repas en restaurant.

N’étant pas contesté que les salariés sont amenés à prendre leurs repas hors de l’entreprise en déplacement sur des chantiers et étant démontré l’existence d’un usage de la profession les obligeant à prendre leur repas au restaurant, dès lors que les indemnités versées n’excédaient pas le montant fixé à l’article 3 – 1emt de l’arrêté susvisé, il n’y a pas lieu à réintégration dans l’assiette des cotisations et contributions sociales de la part excédant le montant de l’indemnisation fixée à l’article 3 -3e.

Ce chef de redressement sera donc annulé.

Sur le chef de redressement n°9 dans l’ordre de la lettre d’observations : frais professionnels : dépassement des paniers non soumis à CSG/CRDS en cas d’application déduction forfaitaire spécifique.

Il convient pour les mêmes raisons que celles qui précèdent d’annuler ce chef de redressement dès lors qu’il a été jugé que les indemnités versées aux salariés n’étaient pas supérieures aux limites d’exonération.

Sur le chef de redressement n°10 dans l’ordre de la lettre d’observations : indemnités de fractionnement de congés payés non soumises à cotisations

En cas de prise du congé annuel par fractions, la convention collective des entreprises de travaux publics fait bénéficier le salarié de deux jours ouvrables supplémentaires et d’une indemnité forfaitaire de 8/100e des appointements mensuels.

Cette indemnité constitue, selon la jurisprudence, une charge spéciale inhérente à l’emploi, recouvrant ainsi la nature de frais professionnels.

En tant que telle, elle peut être exclue de l’assiette des cotisations sous réserve de respecter les prescriptions de l’arrêté du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale.

L’URSSAF PACA estime que l’employeur ne rapporte pas la preuve que les salariés ont été exposés à des dépenses supplémentaires pour se rendre deux fois ou plus sur leur lieu de vacances, elle avance également l’absence de justificatifs correspondant au montant de l’indemnité versée.

La société appelante verse aux débats 10 attestations de salariés indiquant en des termes identiques que le fractionnement des congés payés a généré des frais supplémentaires sans justifier ni même identifier les frais en question. En effet, contrairement à ce que soutient la société appelante dans ses conclusions, sa pièce n°10 ne contient aucun «échantillon de notes de frais de salariés bénéficiant de l’indemnité de fractionnement et relatives aux frais supplémentaires engendrés par le fractionnement».

Ce chef de redressement sera donc maintenu.

Sur le chef de redressement n°12 dans l’ordre de la lettre d’observations : avantages en nature véhicule : principe et évaluation ' Hors cas des constructeurs et concessionnaires

L’URSSAF PACA, au motif que par le truchement d’une association d’utilisateurs de véhicule dépendante statutairement et économiquement du groupe Colas la société mettrait à la disposition de ses salariés des véhicules, a estimé réintégrer pour partie cet avantage en nature. Elle avance qu’en application de l’article 3 de l’arrêté du 10 décembre 2002, l’avantage en nature résulte de l’usage privé par le salarié d’un véhicule pour lequel il bénéficie d’une « mise à disposition permanente ».

Il a été rappelé plus avant que l’URSSAF PACA n’entendait pas faire état d’un montage juridique frauduleux destiné à se soustraire au paiement des cotisations et contributions sociales dans la mesure où elle n’entendait pas recourir à la procédure d’abus de droit.

Dès lors, sa demande tendant à exiger de l’association Centrale des Utilisateurs de Véhicules la délivrance de documents dont le but serait d’établir une connivence entre cette association et les sociétés du groupe Colas n’aurait d’autre finalité que de démontrer une organisation destinée à éluder pour partie les cotisations et contributions sociales via une association «transparente» ou «écran» dont l’objet serait de concéder aux seuls salariés du groupe Colas un tel avantage en nature.

Il n’est pas discuté que la société Colas verse à l’association Centrale des Utilisateurs de Véhicules, qui les facture, les frais professionnels engagés par les salariés du groupe. Aucun redressement n’est intervenu sur ce point.

Toutefois, l’URSSAF PACA a procédé à une réintégration des frais inhérents à l’utilisation supposée personnelle des salariés.

Pour cela , elle avance que :

— les factures établies par l’association comportent les informations suivantes :

— l’identité du collaborateur,

— son n° d’adhérent,

— l’immatriculation du véhicule,

— la marque et le type du véhicule,

— le nombre de kilomètres professionnels mensuels retenus,

— la valeur unitaire de l’indemnité kilométrique,

— le décompte TTC.

— un grand nombre de ces factures, dont l’entête est au nom de l’A.U.V. Midi Méditerranée, est établie par MM. X et Y, employés respectivement par la société COLAS Midi Méditerranée, en qualité de directeur administratif et directeur du matériel pour le contrôle portant sur les années 2010, 2011 et 2012.

— en contrepartie, certains des salariés concernés par la mise à disposition d’un véhicule règlent une cotisation annuelle, dont le montant est fonction de la catégorie de véhicule mis à leur disposition, qu’en 2010, 2011 et 2012, la redevance est comprise entre 810 euros et 1656 euros par an pour une année complète d’utilisation,

— les ressources de l’association sont principalement constituées par l’ensemble des indemnités kilométriques versées par les entreprises qui emploient les utilisateurs de véhicules, chaque fois que ces véhicules sont utilisés à des fins professionnelles.

— la redevance annuelle acquittée par les utilisateurs contribue au financement de l’association dans une moindre mesure et l’association, lorsqu’un salarié quitte la société, lui rembourse un prorata de sa contribution annuelle et le salarié ne peut conserver ledit véhicule,

— le salarié qui quitte la société doit restituer le véhicule.

— à l’aide de ces ressources, l’association règle les factures de location ou d’achat et les différentes factures de carburant, d’huiles, d’entretien et de réparation des véhicules mis à la disposition de ses membres,

— l’unique activité de l’association consiste à faire bénéficier ses adhérents de l’avantage constitué par la mise à disposition d’un véhicule de tourisme de façon permanente, leur permettant de faire ainsi l’économie de dépenses qu’ils auraient dû normalement supporter,

— la société COLAS Midi Méditerranée a effectué auprès de l’administration fiscale une déclaration TVS n° 2855 (Taxe due sur les Véhicules de Sociétés) au titre des véhicules de tourisme possédés ou loués par l’association,

— les informations habituellement portées sur la déclaration pour permettre aux entreprises d’acquitter

la taxe ont été renseignées par la société COLAS Midi Méditerranée.

Pour autant il n’est pas établi que les salariés bénéficient d’un avantage résultant d’une prise en charge de l’usage privé des véhicules par la société Colas.

La société appelante rappelle à juste titre, ce qui est par ailleurs établi, que :

— il s’agit de véhicules fournis à ses sociétaires – pour certains également salariés de la société – par une association loi de 1901 dont ils sont membres, dénommée Association des Utilisateurs de Véhicules (AUV) et déclarée en préfecture,

— cette association, a été créée par des salariés afin d’optimiser leur utilisation d’un véhicule, la

gestion qui en découle et, plus généralement, d’assurer la défense de leurs intérêts en tant que

conducteurs,

— l’association est propriétaire d’un important parc de véhicules de tourisme dont elle assume notamment les frais d’entretien, elle met des véhicules de tourisme à la disposition de ses sociétaires, ces derniers versant eux-mêmes dans ce cadre une cotisation annuelle à l’association, – le montant de cette cotisation est fixé par l’Association en fonction de la puissance fiscale du véhicule qu’elle leur fournit.

— les sociétaires peuvent utiliser le véhicule mis à leur disposition à des fins tant personnelles que professionnelles.

— la société n’est pour sa part ni propriétaire, ni locataire des véhicules en question.

Enfin, le fait que la société s’acquitte de la taxe sur les véhicules des sociétés n’est d’aucun emport en l’espèce, les adhérents de l’association n’étant pas soumis à une telle taxe, la société ayant décidé d’assujettir à la TVS ceux pour lesquels la part d’utilisation professionnelle est prépondérante ( 85 %).

Il en résulte que l’URSSAF PACA échoue à démontrer que l’avantage en nature litigieux est consentie par la société appelante ne serait-ce que par l’intermédiaire d’un tiers.

Ce chef de redressement sera donc annulé.

Sur le chef de redressement n° 17 dans l’ordre de la lettre d’observations sur la loi TEPA : réduction salariale et déduction forfaitaire Patronale heures structurelles ' absences non ou partiellement Rémunérées

Les inspecteurs du recouvrement ont constaté que les salariés relevant de la catégorie ETAM bénéficiaient soit d’une convention en forfait heures fixée à 162, 50 heures par mois, soit d’une convention fixée à 166.67 heures et qu’en cas d’absence du salarié (congés payés sans maintien, maladie, etc..) les heures supplémentaires structurelles ne faisaient pas l’objet d’un prorata pour déterminer le montant de la réduction de cotisations salariales et de la déduction patronale.

L’URSSAF PACA explique qu’une loi du 21 août 2007 a prévu une réduction des cotisations et contributions sociales sous certaines conditions au profit des heures supplémentaires ou complémentaires, que certaines périodes, telles les absences pour congés payés, maladie, maternité, ne sont pas assimilées à du travail effectif et ne sont donc pas prises en compte pour le décompte des heures supplémentaires et qu’il convient, en cas de maintien de salaire, de proratiser le montant les heures supplémentaires habituellement rémunérées pour tenir compte de la retenue sur salaire ce

mois-ci.

L’article 3 de la loi de finances rectificative pour 2012 n°2012-958 du 16 août 2012 a supprimé la réduction de cotisations salariales au titre de la rémunération des heures supplémentaires et complémentaires effectuées depuis le 1er septembre 2012 pour tous les salariés, du privé comme pour les agents publics, et ce quelle que soit la taille de l’entreprise.

La divergence existant entre l’URSSAF PACA et la société consiste à déterminer si les absences pour congés payés sont des absences rémunérées ou non.

La lettre circulaire n°2007-130 du 7 décembre 2007 à laquelle se réfère l’URSSAF PACA précisait ceci :

«La loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat a instauré une réduction de cotisations salariales et une déduction forfaitaire des cotisations patronales de Sécurité sociale, liées à l’accomplissement d’heures supplémentaires ou complémentaires ou à la renonciation des jours de repos. La lettre interministérielle du 19 octobre 2007 précisait selon quelles modalités les heures supplémentaires mensualisées devaient faire l’objet d’un abattement en cas d’absence du salarié au cours d’un mois. Le document questions-réponses ministériel du 27 novembre a précisé que les heures supplémentaires qui résultent d’une durée collective de travail supérieure à la durée légale ou d’une convention de forfait intégrant déjà un certain nombre d’heures supplémentaires, ouvrent intégralement droit à exonération fiscale et sociale, y compris encas d’absence du salarié donnant lieu à maintien de salaire (jours fériés chômés, congés payés, congés maladie…).

Ceci remet en cause les modalités d’abattement des heures supplémentaires en cas d’absence du salarié au cours d’un mois. Vous trouverez ci-joint la lettre interministérielle du 27 novembre 2007 qui précise que la lettre du 19 octobre 2007 adresséeau Directeur de l’ACOSS est rapportée»

Ainsi, les heures supplémentaires structurelles ( heures excédant la durée légale ou conventionnelle du travail prévues par le contrat de travail) ouvrent droit intégralement à exonération sociale en cas d’absence du salarié donnant lieu à maintien de salaire. Etaient notamment visés les congés payés.

Pour la société, si les salariés du secteur du bâtiment perçoivent leurs indemnités de congés payés de la Caisse Nationale des Entrepreneurs de Travaux Publics ( CNETP), il n’en demeure pas moins que cette contribution provient de l’employeur en sorte que le salarié prenant ses congés est rémunéré par la CNETP qui verse les indemnités de congés payés au nom et pour le compte de l’employeur. Dès lors elle estime ne pas devoir proratiser en fonction des absences du salarié.

Or, l’URSSAF PACA précise sans être utilement contredite que l’assiette des cotisations déclarée par l’entreprise à l’Urssaf correspond au salaire brut du salarié duquel est déduite l’absence pour congés et que les cotisations sociales (salariales et patronales) afférentes à l’indemnité de congés payés sont réglées à l’Urssaf par la caisse des congés payés. Aussi, si la CNETP satisfait pour le compte de l’employeur au paiement de l’indemnité de congés payés acquise du fait du travail accompli au sein de l’entreprise employeur, l’URSSAF PACA fait justement observer que le salaire brut soumis à cotisations dans les déclarations sociales de l’entreprise étant minoré de cette absence, il en résulte que les périodes de congés payés constituent bien des absences non rémunérées par l’employeur.

Ce chef de redressement sera donc maintenu à hauteur de 1.212,00 euros hors majorations de retard.

L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en l’espèce.

La société Colas France supportera les dépens de l’instance, étant précisé que l’article R 144-10 du

code de la sécurité sociale a été abrogé par le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 relatif au contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale, dont l’article 17 III prévoit que les dispositions relatives à la procédure devant les juridictions sont applicables aux instances en cours.

PAR CES MOTIFS,

Par arrêt contradictoire,

— Dit nulle et de nul effet l’assignation délivrée à l’association des Utilisateurs de véhicules Midi Méditerranée dissoute,

— Dit recevable l’intervention volontaire de l’association centrale des Utilisateurs de véhicules,

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a :

— rejeté avant dire droit les demandes présentées par la SA COLAS Midi Méditerranée en phase contentieuse du litige, aux fins d’injonction de versement sous astreinte aux débats les délibérations du conseil d’administration de l’URSSAF des Bouches-Rhône et de l’URSSAF PACA désignant pour les années 2013 et 2014 les membres de la commission de recours amiable de l’URSSAF des Bouches du Rhône et de Provence-Alpes-Côte-d’Azur, et de sursis à statuer dans l’attente de la production de ces pièces ;

— débouté la SA COLAS Midi Méditerranée prise en son établissement de Vitrolles de sa contestation de la décision adoptée le 25 janvier 2017 par la commission de recours amiable de l’URSSAF PACA avant d’être notifiée le 11 avril 2017 à l’issue de la procédure de contrôle diligentée par l’URSSAF des Bouches du Rhône pour la période écoulée du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012 ayant donné lieu à la lettre d’observations du 30 septembre 2013 portant initialement sur six chefs de redressement opérés et s’étant traduite par la mise en demeure du 16 décembre 2013, en ce qui concerne les chefs de redressement demeurant contestés correspondant dans l’ordre de la lettre d’observations du 30 septembre 2013 aux numéros 10 et 17, et portant respectivement sur les indemnités de fractionnement de congés payés non soumises à cotisations et la déduction forfaitaire patronale TEPA des heures supplémentaires structurelles qu’aurait effectuées le salarié s’il n’avait été absent de l’entreprise pour congés payés ;

— fait droit à sa contestation de la position de la commission de recours amiable de l’URSSAF PACA adoptée le 25 janvier 2017 correspondant au numéro 12 [ et non 17 comme indiqué à tort dans le jugement] dans l’ordre de la lettre d’observations du 30 septembre 2013, et portant sur la réintégration dans l’assiette des cotisations d’un montant correspondant à l’utilisation de véhicules fournis et facturés par une association des utilisateurs de véhicules ;

— dit que cette décision avait pour effet de ne pas confirmer la position de la commission de recours amiable adoptée le 11 décembre 2014 dans le litige opposant la SA COLAS Midi Méditerranée à l’URSSAF des Bouches du Rhône devenue l’URSSAF PACA ;

— débouté les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires ;

— renvoyé les parties à nouveau calcul contradictoire du montant des cotisations et contributions sociales tenant compte de la présente décision ;

— dit n’y avoir lieu à statuer sur les dépens et à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

— Réforme pour le surplus et annule les chefs de redressement portant les n° 8 et 9 dans l’ordre de la lettre d’observations,

— Déboute la société Colas France pour le surplus,

— Dit n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamne la société Colas France aux éventuels dépens de l’instance.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 16 avril 2021, n° 18/20208