Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 17 juin 2021, n° 19/01937

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 3-1, 17 juin 2021, n° 19/01937
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 19/01937
Décision précédente : Tribunal de commerce de Marseille, 19 décembre 2018, N° 2018R00295
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 17 JUIN 2021

N° 2021/177

N° RG 19/01937 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BDXF5

SAS AIRBUS HELICOPTERS

C/

Société ALELK COMPANY FOR GENERAL TRADING LTD

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Rachel COURT-MENIGOZ

Me Benoit GRANJARD

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 20 Décembre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 2018R00295.

APPELANTE

SAS AIRBUS HELICOPTERS, dont le siège social est sis […]

représentée par Me Rachel COURT-MENIGOZ de la SCP FRANCOIS DUFLOT COURT MENIGOZ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Simon NDIAYE, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Constance PLOUCHART, avocat au barreau de PARIS, plaidant

INTIMEE

Société ALELK COMPANY FOR GENERAL TRADING LTD Société de droit irakien, représentée par Monsieur X J. Z A-B, Directeur général, dont le siège social est sis […]

représentée par Me Benoit GRANJARD, avocat au barreau de MARSEILLE, assisté de Me MICHEL RASLE, avocat au barreau de PARIS, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 12 Avril 2021 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2021.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2021,

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Le 30 août 2013 la société Airbus Helicopters (SAS), anciennement Eurocopter, fabricant d’hélicoptères, a conclu avec la société irakienne Alelk Company For General Trading LTD, un contrat dont l’objet essentiel est de constituer un bureau de liaison technique permettant à la société Airbus Helicopters (SAS) de renforcer sa position en Irak et d’accompagner au mieux les clients dans l’exploitation de leur flotte (annexe 1). Deux avenants complémentaires ont été signés, notamment afin que la société Alelk fournisse également un support technique pour la prospection en Irak.

En échanges des prestations fournies par la société Alelk la société Airbus Helicopters (SAS) était tenue au paiement d’un prix mensuel, fixé à la somme forfaitaire de 1500 euros par mois jusqu’au 31 juillet 2013, et ensuite de 2000 euros par mois.

Les 17 novembre et 7 décembre 2016 la société Alelk a sollicité le paiement de ses factures du 5 mars 2015 au 5 janvier 2017 auprès de la société Airbus Helicopters (SAS) pour un total de 46 000 euros, à raison d’une facturation mensuelle de 2000 euros.

Le 8 décembre 2016 la société Airbus Helicopters (SAS) a indiqué qu’elle mettait en attente les factures eu égard à une procédure de vérification interne en cours, relativement à la nature de leurs relations professionnelles en matière de lutte contre la corruption, et a mis fin le 22 septembre 2017 aux relations contractuelles entre les parties en indiquant qu’elle n’honorerait pas le paiement des factures.

Après diverses tentatives pour obtenir le règlement des factures la société Alelk a saisi le juge des

référés du tribunal de commerce de Marseille par acte d’assignation du 18 septembre 2018.

Par ordonnance en date du 20 décembre 2018 le juge des référés du tribunal de commerce de Marseille a :

— condamné la société Airbus Helicopters (SAS) à payer, en deniers ou quittances, les sommes provisionnelles de :

. 46 000 euros au titre des factures impayées avec intérêts au taux légal à compter du 6 décembre 2017

. 9 875,02 euros au titre du remboursement des frais exposés

— dit que les sommes ressortant des condamnations ci-dessus prononcées devront être déposées sur un compte séquestre ouvert à la Carpa de Marseille,

— subordonné l’exécution provisoire de la décision à la mise sous séquestre des sommes de 46 000 euros et 9875,02 euros sur un compte ouvert auprès de la Carpa de Marseille,

— condamné la société Airbus Helicopters (SAS) à payer à la société Alelk Company For General Trading LTD la somme provisionnelle de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre aux dépens,

— rejeté le surplus des demandes

Par déclaration en date du 1er février 2019 la société Airbus Helicopters (SAS) a interjeté appel de la décision.

Par conclusions enregistrées le 23 décembre 2019, et auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Airbus Helicopters (SAS) fait valoir que :

— il existe des contestations sérieuses dans la mesure où les factures et les frais demandés ne sont pas justifiés puisque la société Airbus Helicopters (SAS) n’a accepté aucun des services dont la société Alelk Company For General Trading LTD demande le paiement et que cette dernière ne prouve pas la réalité des services exécutés,

— un audit interne initié par le groupe Airbus en matière de lutte anti-corruption et une enquête préliminaire du Parquet national Financier permettent de s’interroger sur la légalité des pratiques de la société Alelk Company For General Trading LTD au regard de la législation française et internationale en matière de lutte anti-corruption, ce qui a conduit la société Airbus Helicopters (SAS) à cesser ses relations avec son interlocuteur

Ainsi la société Airbus Helicopters (SAS) demande à la cour de réformer l’ordonnance rendue et de débouter la société Alelk Company For General Trading LTD de ses demandes en paiement des sommes de 46 000 euros et 9875,02 euros et de la condamner au paiement de la somme de 15 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens.

Par conclusions enregistrées le 11 mai 2020, et auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Alelk Company For General Trading LTD fait valoir que :

— la société Airbus Helicopters (SAS) a cessé brutalement de s’acquitter des factures sans avertissement préalable et sans invoquer de grief à son encontre, alors que la société Alelk Company

For General Trading LTD a parfaitement exécuté le contrat,

— la société Alelk Company For General Trading LTD a exécuté les prestations facturées et la société Airbus Helicopters (SAS) l’a remerciée à plusieurs reprises pour son travail,

— elle ne peut être privée du paiement de prestations effectuées pour une raison qui est indépendante de son comportement et qui tient en réalité au changement d’orientation stratégique et politique de la société Airbus,

— le remboursement des frais était prévu à l’avenant n°2 et n’a jamais été contesté à réception des justificatifs,

— la société Airbus Helicopters (SAS) est elle-même à l’origine des contrats conclus et ne peut dès lors se prévaloir de sa propre turpitude, d’autant que l’enquête pénale dont elle se prévaut concerne des avions et ne vise pas l’Irak, et est sans lien avec les relations contractuelles liant les parties

La société Alelk Company For General Trading LTD demande ainsi à la cour de :

— confirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions et de l’autoriser à se faire remettre les sommes séquestrées à la Carpa en exécution de l’ordonnance,

— en conséquence, débouter la société Airbus Helicopters (SAS) de l’ensemble de ses demandes,

— condamner la société Airbus Helicopters (SAS) à lui payer la somme de 50 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel outre les entiers dépens dont distraction

La clôture de l’instruction, initialement fixée au 16 décembre 2019, a été reportée au 18 mai 2020.

MOTIFS

Sur la révocation de l’ordonnance de clôture :

Au visa des articles 907, 802 et 803 du code de procédure civile, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats postérieurement à l’ordonnance de clôture, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office, à l’exception des demandes en intervention volontaire, des conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu’à l’ouverture des débats, et à l’exception également des demandes de révocation de l’ordonnance de clôture et des conclusions qui tendent à la reprise de l’instance en l’état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption.

Par ailleurs, l’ordonnance de clôture peut être révoquée s’il se révèle une cause grave depuis qu’elle a été rendue.

En l’espèce, la nature des demandes formulées par conclusions de la société Airbus Helicopters (SAS) en date du 29 mars 2021, soit postérieurement à l’ordonnance de clôture rendue le 18 mai 2020, tendant à la libération des sommes mises sous séquestre sur un compte ouvert auprès de la Carpa de Marseille, ne constitue pas un cas excepté autorisant la révocation de l’ordonnance de clôture.

En outre, la demande nouvelle ne constitue pas une cause grave, étant relevé que cette demande pouvait être sollicitée avant l’ordonnance de clôture.

Il n’y a donc pas lieu à révocation de l’ordonnance de clôture rendue le 18 mai 2020. En

conséquence, sont irrecevables les conclusions de la société Airbus Helicopters (SAS) enregistrées le 29 mars 2021.

Sur les demandes de la société Alelk Company For General Trading LTD :

Aux termes des articles 872 et suivants du code de procédure civile le président du tribunal de commerce, dans les limites de sa compétence, peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

Le président peut, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans tous les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En l’espèce, et sans préjuger de l’appréciation des juges du fond, la société Airbus Helicopters (SAS) ne justifie d’aucune contestation sérieuse de nature à faire échec à la compétence du juge des référés au visa de l’article 872 du code de procédure civile.

Ainsi, il apparaît que la nature de la contrepartie attendue de la part de la société Alelk Company For General Trading LTD n’est pas strictement définie et circonscrite à la lecture des conventions liant les parties, sauf à faciliter l’introduction et l’implantation de la société Airbus Helicopters (SAS), anciennement Eurocopter, sur le marché irakien et à lui permettre de procéder à la vente de ses appareils (hélicoptères).

Il n’est pas davantage contestable que la recherche de parts de marché a pu s’accompagner de pratiques ayant justifié en 2016 l’ouverture par le Parquet Financier Français (PNF) ainsi que par le Serious Fraud Office anglais (SFO) et le Department of Justice américain (DOJ) de procédures pénales visant des faits de fraude et de corruption au sein du groupe Airbus.

Il n’en demeure pas moins qu’en l’état des éléments communiqués, il n’est pas démontré que ces enquêtes visent expressément les relations contractuelles ayant existé entre la société Airbus Helicopters (SAS) et la société Alelk Company For General Trading LTD.

Par ailleurs, la société Airbus Helicopters (SAS) est malvenue à émettre a posteriori une contestation sur les modalités d’exécution d’un contrat dont elle est elle-même l’instigatrice, qu’elle a exécuté de 2013 à 2015 sans mention, à quelque moment que ce soit, d’un différend quant aux obligations réciproques des parties, et dont elle ne conteste pas les bénéfices économiques générés à son profit.

Enfin, si le choix de la société Airbus Helicopters (SAS) de se démarquer d’anciennes pratiques est légitime au regard de l’enquête pénale dont elle a fait l’objet, il lui appartenait de procéder à la résiliation du contrat la liant à la société Alelk Company For General Trading LTD dans les conditions prévues aux conventions sans pouvoir se dispenser unilatéralement d’exécuter les obligations mises à sa charge jusqu’à la date de la résiliation, sauf à justifier devant les juges du fond de motifs autorisant une inexécution, ce qui ne peut être déduit des moyens invoqués en l’état devant la juridiction des référés.

En conséquence, il y a lieu de confirmer l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions.

Sur la libération des sommes séquestrées sur un compte ouvert auprès de la Carpa :

En l’état des motifs adoptés il convient d’ordonner la libération des sommes séquestrées sur un

compte Carpa ouvert à Marseille en exécution de la décision du juge des référés et ce, au profit de la société Alelk Company For General Trading LTD.

Sur les frais et dépens :

La société Airbus Helicopters (SAS), partie succombante, conservera la charge des entiers dépens de l’appel, recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

En outre, la société Airbus Helicopters (SAS) sera tenue de payer à la société Alelk Company For General Trading LTD la somme de 8000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de l’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare irrecevables les conclusions de la société Airbus Helicopters (SAS) enregistrées le 29 mars 2021, soit postérieurement à l’ordonnance de clôture rendue le 18 mai 2020,

Confirme l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Ordonne la libération des sommes séquestrées sur un compte Carpa ouvert à Marseille en exécution de la décision du juge des référés et ce, au profit de la société Alelk Company For General Trading LTD,

Condamne la société Airbus Helicopters (SAS) aux entiers dépens de la procédure d’appel, recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile,

Condamne la société Airbus Helicopters (SAS) à payer à la société Alelk Company For General Trading LTD la somme de 8000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de l’appel.

Le GREFFIER Le PRÉSIDENT

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