Cour d'appel d'Angers, Chambre a - commerciale, 23 mars 2021, n° 17/00458

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Angers, ch. a - com., 23 mars 2021, n° 17/00458
Juridiction : Cour d'appel d'Angers
Numéro(s) : 17/00458
Décision précédente : Tribunal de commerce d'Angers, 13 décembre 2016, N° 201517007
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

D’ANGERS

CHAMBRE A – COMMERCIALE

NR/IM

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 17/00458 – N° Portalis DBVP-V-B7B-ECDR

Jugement du 14 Décembre 2016

Tribunal de Commerce d’ANGERS

n° d’inscription au RG de première instance 2015 17007

ARRET DU 23 MARS 2021

APPELANT :

Monsieur A X

né le […] à […]

Centre commercial de l’Avenue C D

[…]

Représenté par Me Gora NGOM de la SELARL EUREKA AVOCATS, avocat au barreau de NANTES

INTIMEE :

SA Electricité Réseau Distribution France devenue ENEDIS

[…]

[…]

Représentée par Me Philippe RANGE, avocat au barreau d’ANGERS – N° du dossier 13701006

COMPOSITION DE LA COUR

Par avis de procédure sans audience (article 8 de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020) du 19 juin 2020, à laquelle les avocats ne se sont pas opposés, l’affaire a été mise en délibéré au 20 octobre 2020 et après prorogations au 23 mars 2021 après avis aux conseils des parties.

La Cour composée de :

Mme SOCHACKI, Présidente de chambre

Mme J, Conseiller

Mme BEUCHEE, Conseiller

a statué ainsi qu’il suit.

Greffier lors du prononcé : Mme H

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 23 mars par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Nathalie J, Conseiller, en remplacement de Geneviève SOCHACKI, Présidente de chambre, empêchée, et par Sophie H, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

[…]

FAITS ET PROCÉDURE

M. A X exploite un établissement de restauration E, sous l’enseigne 'E D', situé dans le centre commercial C D à Angers.

Le 10 mai 2012, en fin d’après-midi, un problème sur le réseau électrique alimentant son commerce a provoqué l’arrêt de tous les appareils qui se trouvaient sous tension électrique.

Le lendemain, la société Electricité Réseau Distribution France (ERDF) est intervenue pour procéder aux réparations nécessaires sur le réseau électrique.

Le 22 mai 2012, la société ERDF a écrit à M. X, E D, en indiquant que l’incident survenu le 10 mai 2012 ayant donné lieu à une intervention de dépannage était lié à un défaut sur le réseau alimentant son commerce qui a entraîné des surtensions.

M. X a déclaré le sinistre auprès de son assureur, la société Macif.

Une expertise amiable a été diligentée sur place le 25 juillet 2012, par le cabinet Polyexpert mandaté par la Macif.

Aux termes de son rapport, l’expert a confirmé que l’origine des dommages causés au matériel électrique du restaurant était un 'défaut sur le réseau ERDF ayant provoqué des surtensions’ et a évalué le préjudice de M. X à la somme globale de 2.161 euros au titre de la perte de marchandises et de la réparation ou du remplacement des appareils électriques de la cuisine endommagés.

Suivant virement du 18 septembre 2012, M. A X a été indemnisé par son assureur la Macif, au titre de la garantie dommages électriques, à hauteur de 1.490 euros, déduction faite d’une franchise de 171 euros et d’un acompte de 500 euros.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 25 juillet 2013, M. X, par l’intermédiaire de son conseil, a indiqué à la société ERDF qu’il entendait obtenir réparation par celle-ci de l’intégralité du préjudice causé par l’incident du 10 mai 2012, en ce inclus la réparation de la perte d’exploitation subie du fait de l’interruption de l’activité de son entreprise et l’a mise en demeure de lui faire part de sa position sous 15 jours concernant sa proposition de règlement amiable du litige par le versement d’une somme de 27 500 euros.

Par lettre en date du 7 octobre 2013, la société Axa Corporate Solutions, intervenant pour le compte d’ERDF, a répondu qu’elle n’entendait pas donner suite à sa demande.

Au motif que l’indemnisation reçue de la Macif ne couvrait pas l’intégralité du préjudice causé par le sinistre survenu le 10 mai 2012, M. A X a, par acte d’huissier du 26 novembre 2015, fait assigner la société ERDF devant le tribunal de commerce d’Angers, aux fins de la voir déclarer responsable de ce sinistre sur le fondement de l’article 1147 du code civil, de voir dire qu’elle se trouve en conséquence tenue de réparer l’entier préjudice subi et de la voir condamner à lui payer la somme globale de 21 607 euros à titre de dommages intérêts, outre une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l’article 1382 du code civil pour résistance abusive et une indemnité de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 14 décembre 2016, le tribunal de commerce d’Angers a :

— dit M. A X recevable en sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice subi,

— dit que la société ERDF a commis des fautes dans l’exécution du contrat de fourniture d’électricité engageant sa responsabilité contractuelle à l’égard de M. A X,

— dit que M. A X est mal fondé en sa demande de dommages et intérêts au titre des dommages matériels pour la somme de 942 euros et qu’il est débouté de sa demande,

— dit que M. A X est mal fondé en sa demande de dommages et intérêts au titre de la perte d’exploitation pour la somme de 9.665 euros et qu’il est débouté de sa demande,

— dit que M. A X est mal fondé en sa demande de dommages et intérêts au titre de la réparation du préjudice d’image subi pour la somme de 10.000 euros, et qu’il est débouté de sa demande,

— dit que M. A X est mal fondé en sa demande de dommages et intérêts au titre de la réparation du préjudice moral pour la somme de 1.000 euros et qu’il est débouté de sa demande,

— dit que M. A X est mal fondé en sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive pour la somme de 1.500 euros et qu’il est débouté de sa demande,

— dit que la société ERDF est bien fondée en sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive pour la somme de 1.000 euros et condamné M. A X à payer à la société ERDF la somme de 1.000 euros au titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,

— condamné M. A X à payer à la société ERDF la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné M. A X aux entiers dépens dont les frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 82,08 euros.

Par déclaration reçue au greffe le 27 février 2017, M. A X a interjeté appel total de cette décision, intimant la SA ERDF.

M. A X et la société ERDF devenue ENEDIS ont conclu.

Une ordonnance du 11 mai 2020 a clôturé l’instruction de l’affaire.

Le 19 juin 2020, les parties ont été avisées de ce qu’en raison de la situation sanitaire actuelle, par

décision de M. le premier président de la cour d’appel d’Angers en date du 15 mai 2020, l’audience du 15 juin 2020 ayant été annulée, l’affaire avait été orientée vers la procédure sans audience par application des dispositions de l’article 8 de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété.

A défaut d’opposition expresse de leur part au plus tard dans les 15 jours de l’avis, exclusivement par message via le r.p.v.a., les parties ont été invitées à déposer l’ensemble de leurs conclusions et pièces à la cour d’appel d’Angers le 3 juillet 2020 et informées que l’affaire serait mise en délibéré au 20 octobre 2020 par mise à disposition au greffe.

Les parties ont déposé leurs dossiers.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe:

— le 14 juin 2017 pour M. A X,

— le 17 avril 2019 pour la SA ERDF devenue ENEDIS,

aux termes desquelles les parties forment les demandes suivantes :

M. F X demande à la cour, au visa des articles 1147 et 1382 du code civil, de :

— le déclarer recevable en son appel et l’y disant bien fondé,

y faisant droit,

— confirmer le jugement du tribunal de commerce d’Angers en date du 14 décembre 2016 en ce qu’il a dit que la société ERDF a commis des fautes dans l’exécution du contrat de fourniture d’électricité engageant sa responsabilité contractuelle à son égard,

— infirmer le jugement du tribunal de commerce d’Angers en date du 14 décembre 2016 en ce qu’il l’a débouté de l’intégralité de ses demandes indemnitaires et en ce qu’il l’a condamné à payer la somme de 1.000 euros pour résistance abusive à ERDF,

— condamner en conséquence la société ERDF à lui verser la somme de 21.607 euros, à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1147 du code civil,

— condamner la société ERDF à lui verser la somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1382 du code civil,

— condamner la société ERDF au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de frais irrépétibles engagés pour sa défense tant en première instance qu’en appel en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société ERDF aux entiers dépens.

La SA ERDF devenue ENEDIS demande à la cour, au vu des articles 1147 et 1382 du code civil, 9 du code de procédure civile et 1315 du code civil, de :

— déclarer M. A X irrecevable en ses demandes, fins et conclusions ; l’en débouter intégralement,

— confirmer le jugement du tribunal de commerce d’Angers en date du 14 décembre 2016 en toutes ses dispositions,

en toute hypothèse, y ajoutant,

— condamner M. A X à lui payer une indemnité de 2.500 euros à titre de dommages-intérêts,

— condamner M. F X à lui payer une indemnité de 4.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

— condamner M. F X aux entiers dépens de la première instance et de l’instance d’appel.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

À titre liminaire, il y a lieu de préciser qu’il sera fait application des dispositions du code civil dans leur version antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve de l’obligation.

- Sur la responsabilité de la société ERDF devenue ENEDIS dans le sinistre du 10 mai 2012 :

La société ERDF devenue ENEDIS ne conteste pas qu’elle était chargée de distribuer l’électricité au commerce de restauration E exploité par M. A X sous l’enseigne 'E D', situé dans le centre commercial C D à Angers et donc d’assurer à son client une fourniture de qualité d’électricité, conformément à la réglementation en vigueur.

Un procès-verbal de constatations relatives aux causes et circonstances du sinistre du 10 mai 2012 et à l’évaluation des dommages a été établi suite à une visite sur site le 25 juillet 2012 par le cabinet Polyexpert missionné par la Macif, assureur de M. A X.

Les causes et circonstances du sinistre y sont décrites ainsi : 'à la suite d’un défaut sur le réseau ERDF, des surtensions ont entraîné des dommages au matériel électrique du restaurant'.

Elles sont confirmées et précisés par le rapport d’expertise du cabinet Cunningham et Lindsey, mandaté par ERDF, qui a organisé une réunion le 18 décembre 2012, examiné les matériels endommagés et étudié le rapport technique de ERDF et qui conclut que les matériels ont subi des dommages provoqués par des variations rapides de tension générées par une avarie sur un câble d’alimentation du distributeur d’énergie, desservant le local commercial.

La société ERDF devenue ENEDIS ne remet pas en cause les conclusions des experts amiables sur les circonstances et causes du sinistre du 10 mai 2012.

Elle ne conteste pas sa responsabilité dans la survenance des dommages causés aux appareils électriques installés dans l’établissement de M. A X.

Le jugement critiqué sera en conséquence confirmé en ce qu’il a dit que la société ERDF devenue ENEDIS engage sa responsabilité contractuelle à l’égard de M. A X.

La société ERDF devenue ENEDIS se trouve en conséquence tenue de réparer l’entier préjudice subi par M. A X.

- Sur l’indemnisation des préjudices subis par M. X du fait du sinistre du 10 mai 2012 :

* Sur les dommages matériels :

M. X fait valoir que tous les appareils électriques essentiels à l’activité de restauration se sont retrouvés hors service le 10 mai 2012, nécessitant leur réparation ou leur remplacement.

Il indique avoir reçu de son assurance une indemnité de 1 990 euros en réparation de son préjudice matériel, dont 331 euros au titre de la réparation de l’appareil kebab à gaz, tel qu’évalué par l’expert mandaté par l’assurance.

Il prétend que cette indemnité ne couvre pas entièrement le préjudice subi, en affirmant que le grill kebab s’est révélé irréparable en raison de l’impossibilité de trouver des pièces de rechange sur ce type d’appareil de fabrication artisanale turque, de sorte qu’il a été contraint de souscrire un contrat de location avec option d’achat auprès de la société Locam, portant sur un appareil grill kebab neuf d’une valeur de 1 102 euros.

Il ajoute qu’il est fondé à réclamer le remboursement de la franchise de 171 euros qui lui a été appliquée par son assureur.

Il s’estime en conséquence fondé à solliciter la condamnation de la société ERDF à lui payer la somme de 942 euros (771 euros + 171 euros) en réparation du préjudice matériel non pris en charge par son assureur.

La société ERDF devenue ENEDIS relève que M. X a accepté le règlement par son assureur de la somme de 1 990 euros au titre de son préjudice matériel, soit 2 161 euros tel qu’évalué par l’expert amiable, moins la franchise contractuelle de 171 euros, sans émettre la moindre réserve.

Elle fait valoir que ses affirmations, selon lesquelles l’indemnisation reçue au titre du grill kebab était insuffisante dés lors qu’il aurait été contraint d’acquérir un appareil dont le coût était supérieur à la valeur à dire d’expert, ne sont pas démontrées.

Le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime, aux dépens du responsable, dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit.

Par suite, la réparation intégrale d’un dommage causé à une chose, qui ne peut excéder le montant du préjudice sans perte ni profit pour aucune des parties, n’est assurée que par le remboursement des frais de remise en état de la chose ou par le paiement d’une somme d’argent représentant la valeur de son remplacement.

La valeur de remplacement d’un bien sinistré correspond au prix de rachat d’un objet présentant les mêmes caractéristiques et les mêmes performances techniques que celui endommagé et dans un état semblable.

En l’espèce, le procès-verbal d’évaluation des dommages matériels établi par l’expert mandaté par la Macif et le détail de l’indemnité globale de 1990 euros versée par l’assureur qui figure dans la lettre adressée le 19 septembre 2012 à M. Y mentionnent une valeur de remplacement du grill kebab de 331 euros.

Au vu du rapport du cabinet Cunningham et Lindsey mandaté par elle, la société ERDF n’a pas offert d’indemniser M. X à hauteur d’une somme supérieure à 331 euros au titre de la valeur de remplacement du grill kebab.

Il appartient à M. X, qui sollicite le paiement d’une somme de 1 202 euros représentant la valeur à neuf du grill kebab suivant facture du 14 août 2012 qu’il verse aux débats, dont à déduire l’indemnité reçue de son assureur, de prouver que la somme perçue au titre de la valeur de remplacement du grill kebab ne lui permettait pas de se procurer un matériel présentant les mêmes caractéristiques et les mêmes performances que celui qui a été endommagé.

M. X se contente d’affirmer, sans l’établir, que l’appareil endommagé était de fabrication artisanale turque et qu’il ne pouvait faire l’objet d’une réparation, non qu’il ne pouvait être remplacé par un appareil présentant les mêmes caractéristiques et dans un état semblable.

Au vu des pièces versées aux débats, à savoir les rapports d’expertises amiables, et à défaut d’éléments apportés par l’appelant pour démontrer que la valeur de remplacement du grill kebab est supérieure à celle retenue par les experts amiables ou qu’il était impossible de remplacer l’appareil autrement que par un grill neuf d’une valeur de 1 202 euros, la valeur de remplacement du grill kebab sera fixée à la somme de 331 euros.

En revanche, lorsque la responsabilité d’un tiers dans un sinistre a été établie, à l’exclusion de celle de l’assuré, ce dernier est en droit de solliciter le paiement par le tiers responsable du montant de la franchise dont il s’est acquitté en application des termes de son contrat d’assurance.

En l’espèce , la responsabilité civile contractuelle de droit commun de la société ERDF devenue ENEDIS ayant été reconnue comme pleine et entière dans le sinistre survenu le 10 mai 2012 qui a endommagé les appareils électriques du restaurant exploité par M. X, c’est à tort que le tribunal de commerce d’Angers a considéré que M. X ayant accepté l’application de la franchise prévue par les dispositions contractuelles entre son assureur et lui, il ne pouvait en demander le remboursement à la société ERDF et a rejeté en conséquence sa demande en paiement de la somme de 171 euros au titre de la franchise.

Ainsi, en définitive, le jugement critiqué sera infirmé en ce qu’il a débouté M. X de sa demande indemnitaire au titre des dommages matériels et statuant à nouveau, la société ERDF devenue ENEDIS sera condamnée à payer à M. X la somme de 171 euros au titre de la franchise qu’il a dû supporter.

* Sur l’indemnisation de la perte d’exploitation :

M. X soutient que l’ensemble du matériel électrique de la cuisine de son restaurant, essentiel à l’exercice de son activité, s’étant trouvé hors service à la suite d’un défaut sur le réseau électrique alimentant son commerce qui a entraîné des surtensions, il s’est vu contraint de fermer temporairement son établissement.

Il prétend n’avoir été en mesure de rouvrir son restaurant qu’à partir de la date de remplacement du grill kebab, soit le 17 août 2012, ainsi qu’il en justifie par la facture de location Locam.

Il fait valoir qu’au vu du chiffre d’affaire de l’exercice précédent réalisé sur la même période de l’année (mai à août ) et compte tenu d’une marge de 61,08 %, tel que cela ressort de l’évaluation de son expert comptable, la perte d’exploitation imputable au sinistre du 10 mai 2012 s’établit à 9 665 euros.

Il affirme que le changement de cellule commerciale n’est nullement à l’origine de la fermeture de son établissement sur la période considérée du 10 mai 2012 au 17 août 2012, alors que le nouveau bail a commencé à courir à compter du 3 août 2012 et qu’à cette date, il n’était toujours pas en mesure, faute de réparation ou de remplacement de tout le matériel nécessaire à son activité, de ré-ouvrir son restaurant et précise que ce n’est qu’après le 17 août 2012 qu’il a effectivement déménagé son restaurant.

Il ajoute que le fait qu’il n’ait pas fait état d’un préjudice d’exploitation au titre de l’interruption de son activité, lors des opérations d’expertise amiable diligentées par le cabinet Polyexpert, ne l’empêche pas de réclamer son indemnisation à la société ERDF au titre des conséquences dommageables du sinistre du 10 mai 2012 dont il justifie par les pièces versées aux débats.

Il souligne qu’à la date de l’expertise menée par le cabinet Polyexpert, soit le 25 juillet 2012, il se trouvait dans l’incapacité de chiffrer l’étendue de son préjudice de perte d’exploitation.

Il relève que, dans son rapport établi le jour de son intervention, le technicien d’ERDF a mentionné l’existence d’une perte d’exploitation à prévoir et affirme que le rapport de l’expert mandaté par ERDF ne lui a été communiqué qu’en première instance.

La société ERDF devenue ENEDIS s’oppose à la demande en soutenant que M. X ne verse aux débats aucune pièce de nature à étayer ses allégations.

Elle souligne que les montants réclamés ont varié en fonction de la date des demandes, que le bilan 2012 n’est pas produit et que la simple évaluation par un comptable, de surcroît non datée, est insuffisante à rapporter la preuve du préjudice allégué.

Elle relève encore que ce n’est que 15 mois après le sinistre que M. X a invoqué une perte d’exploitation dont il n’avait nullement fait état lors des opérations d’expertise amiable.

Elle ajoute que durant la période considérée, M. X a transféré son activité dans une autre cellule du même centre commercial, de sorte que la suspension de son activité n’est pas due selon elle aux conséquences du sinistre du 10 mai 2012, mais au transfert programmé de l’activité commerciale dans des nouveaux locaux.

Il est établi par les éléments de la procédure que le 10 mai 2012, en fin d’après-midi, suite au signalement par un salarié de M. X d’anomalies concernant l’alimentation en électricité du restaurant, M. X a été contraint de fermer l’établissement et de faire appel aux services d’ERDF qui ont dépêché sur place des techniciens, lesquels ont diagnostiqué un problème sur le câble sous terrain d’alimentation électrique desservant le commerce de M. X.

L’intervention des techniciens pour rétablir l’alimentation électrique du local, consistant en l’installation d’un câble aérien provisoire, s’est déroulée sur toute la journée du 11 mai 2012.

Il est également établi qu’après remise sous tension, il a été constaté que les équipements électriques qui étaient installés dans la cuisine, à savoir la friteuse, le four à pizza, deux tours gastro, une armoire froide et un grill kebab, tous équipements indispensables à l’exercice de l’activité de restauration E, étaient hors service, de sorte qu’il était nécessaire de procéder à leur réparation ou à leur remplacement.

Il en résulte que l’activité de restauration E exercée par M. X, dans les locaux auxquels ERDF distribuait l’électricité, a dû être interrompue le 10 mai 2012 à 17h30, puis pendant les réparations et jusqu’à ce que M. Z dispose à nouveau d’équipements en état de fonctionner.

Il convient de relever que dans le rapport technique d’intervention qui se trouve annexé au rapport d’expertise amiable de l’expert mandaté par ERDF, le technicien d’ERDF a coché dans la liste des dommages constatés la case 'pertes d’exploitation’ en sus de celle de 'pertes de marchandises’ et de 'pertes de matériels'.

M. X n’a pas déjà été indemnisé par son assureur au titre d’une perte d’exploitation résultant de l’arrêt de son activité.

Et, contrairement à ce qui a été retenu par le tribunal de première instance, le fait que M. X n’ait pas fait état d’un préjudice d’exploitation lors de l’expertise amiable menée le 25 juillet 2012 par l’expert mandaté par son assurance, puis lors de celle menée en décembre 2012 par l’expert mandaté par ERDF, qui se sont déroulées en sa présence, n’est pas de nature à exclure toute indemnisation à ce titre par la société ERDF devenue ENEDIS qui a été reconnue responsable du sinistre survenu le 10 mai 2012 et qui se trouve tenue de réparer l’entier préjudice subi par la victime.

Ainsi, il n’est nullement établi au vu des seules pièces de la procédure que M. X aurait renoncé à tout recours contre le tiers responsable au titre d’un préjudice pour perte d’exploitation.

Il appartient à M. X, qui réclame l’allocation à ce titre d’une somme de 9 665 euros, d’établir la preuve d’un préjudice d’exploitation à hauteur de ce montant.

M. X évalue son préjudice pour une période du 10 mai 2012 au 17 août 2012, date à laquelle il affirme avoir été en mesure d’utiliser à nouveau tous les équipements qui fonctionnaient au moment de l’incident sur le réseau électrique d’alimentation de son commerce, précisant que le grill kebab, élément essentiel de son activité, a été pris en location longue durée auprès de Locam à cette date.

Au soutien de ses dires, il verse aux débats (pièces 12 et 13) une facture d’achat par Locam d’un grill Kebab au gaz au prix de 1 102 euros le 14 août 2012 et une facture de loyers émise par Locam le 20 août 2012 portant sur du matériel acquis auprès de la société Metro dont 'kebab', portant la référence 'dossier du 17 août 2012 M. X A, 29 avenue C D'.

Il en résulte qu’il a disposé d’un nouvel appareil de kebab le 17 août 2012.

Il n’est pas démontré par d’autres éléments de la procédure que M. X se serait trouvé en capacité avant cette date d’exercer son activité dans les mêmes conditions qu’avant la survenance de l’incident sur le réseau électrique, que ce soit dans le local où s’est produit le sinistre ou dans les nouveaux locaux pris à bail à compter du 3 août 2012, étant rappelé que l’expert de la Macif a effectué ses opérations le 25 juillet 2012 et que le solde de l’indemnité de 1490 euros sur un total de 1990 euros a été réglé à M. X le 18 septembre 2012.

Ainsi, il n’est pas établi qu’il aurait bénéficié d’un prêt ou d’une location d’équipements dans l’attente de leur réparation ou de leur remplacement, qui aurait permis une reprise de l’activité dans les mêmes conditions qu’avant le sinistre, avant le 17 août 2012.

Et, les affirmations de la société ERDF devenue ENENDIS, selon lesquelles la suspension de l’activité ne serait pas due au sinistre mais au transfert programmé de l’activité commerciale dans une nouvelle cellule du centre commercial à compter du mois d’août 2012, ne sont étayées par aucun élément versé aux débats ; la seule production d’un contrat de bail commercial à compter du 3 août 2012, ne suffisant pas à établir cette preuve.

Au soutien de sa demande à hauteur de 9 665 euros, M. X produit un document établi par le CER France Maine et Loire, expert comptable, estimant la perte d’exploitation du 10 mai 2012 au 24 septembre 2012 liée au litige avec ERDF 'au minimum à 12 215 euros', sur la base du chiffre d’affaire détaillé réalisé en 2011 sur cette même période et compte tenu du taux de marge de 61,08%, ainsi que le compte de résultat de l’exercice clos au 31 mars 2013 qui contient les éléments comparatifs de l’exercice clos au 31 mars 2012.

La société ERDF devenue ENEDIS n’indique pas en quoi le document établi par CER France Maine et Loire, émanant d’un professionnel expert comptable, pourrait ne pas être sincère dans les éléments chiffrés qui y sont rapportés concernant le chiffre d’affaire et le taux de marge et ne produit aucun élément de nature à combattre ces chiffres, étant observé qu’ils apparaissent cohérents au regard des

éléments figurant dans le compte de résultat de l’exercice clos au 31 mars 2013 versé par M. X.

Ainsi en définitive, au vu des pièces versées aux débats, la perte d’exploitation subie par M. X du fait du sinistre survenu le 10 mai 2012, pour lequel la responsabilité contractuelle de ERDF devenue ENEDIS se trouve engagée, sera évaluée à la somme de 9 665 euros.

Le jugement critiqué sera en conséquence infirmé en ce qu’il a rejeté la demande de M. X au titre du préjudice d’exploitation et, statuant à nouveau, la société ERDF devenue ENEDIS sera condamnée à payer à M. X la somme de 9 665 euros.

* Sur le préjudice d’image :

M. X prétend que la fermeture soudaine de son restaurant a porté atteinte à l’image de qualité de son exploitation à l’égard de sa clientèle, en faisant valoir qu’après réouverture à seulement quelques mètres de l’ancien local, dans la même galerie commerciale, il a accusé une baisse de sa clientèle et a mis plusieurs semaines avant de retrouver toute la confiance de sa clientèle habituelle.

Il s’estime fondé à solliciter l’allocation à ce titre de la somme de 10 000 euros.

La société ERDF devenue ENEDIS s’oppose à la demande en soutenant que la preuve du préjudice allégué n’est nullement apportée par M. X et en faisant observer que, si baisse de la fréquentation de son établissement il y a eu à sa réouverture, elle ne saurait être liée au sinistre du 10 mai 2012 mais au déménagement de l’entreprise dans un autre local.

C’est à juste titre que le tribunal de commerce d’Angers a considéré que M. X, auquel il incombait de rapporter la preuve de son préjudice en lien de causalité avec les manquements de la société ERDF devenue ENEDIS, procédait par pure affirmation concernant l’existence d’une atteinte à l’image de son restaurant causée par la fermeture temporaire de celui-ci suite à l’incident sur le réseau électrique du 10 mai 2012, non étayées par des pièces et l’a en conséquence débouté de sa demande à ce titre.

Le jugement critiqué sera donc confirmé sur ce point.

* Sur le préjudice moral :

M. X prétend qu’il a subi un préjudice moral en lien avec le sinistre du 10 mai 2012, en faisant valoir qu’il a légitimement craint pour la survie de son activité mise en péril par la fermeture temporaire de celle-ci et que tant que les problèmes tenant au sinistre n’ont pas été résolus, il n’a pu se consacrer par ailleurs pleinement à son activité principale de gérant d’une entreprise de transport.

La société ERDF devenue ENEDIS s’oppose à la demande non justifiée par les éléments de la procédure.

Le préjudice moral allégué par M. X n’étant pas établi par les seuls éléments versés aux débats par celui-ci, le jugement critiqué sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande à ce titre.

— Sur la demande de dommages intérêts formée par M. X pour résistance abusive :

M. X prétend qu’il est fondé à solliciter la condamnation de la société ERDF à lui payer une indemnité de 1 500 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi du fait de sa résistance abusive, en soutenant que l’intimée a fait preuve d’une particulière mauvaise foi dans sa défense à l’action en indemnisation, en n’hésitant pas à faire une présentation erronée des pièces dans le but de se soustraire à ses obligations.

La résistance à une action en justice ne dégénère en abus de droit pouvant donner lieu à des dommages intérêts que si le défendeur a agi avec une légèreté blâmable ou a commis une erreur équivalente au dol.

En l’espèce, au vu des éléments de la procéude, M. X de caractérise pas ce type de comportement de la société ERDF devenue ENEDIS.

En conséquence, le jugement critiqué en ce qu’il a rejeté la demande de dommages intérêts pour résistance abusive de la société ERDF devenue ENEDIS.

— Sur la demande reconventionnelle de dommages intérêts pour procédure abusive :

La société ERDF devenue ENEDIS soutient qu’elle est fondée à solliciter l’allocation d’une indemnité en réparation du préjudice subi du fait du comportement de M. X qui, en dépit du fait qu’il se trouvait manifestement rempli de ses droits à raison des conséquences préjudiciables du sinistre du 10 mai 2012 suite à l’indemnisation à laquelle il a été procédé telle qu’arrêtée par les experts des compagnies d’assurance, a introduit une instance à son encontre.

M. X s’oppose à la demande en faisant valoir qu’en introduisant sa procédure il était de parfaite bonne foi.

Il souligne qu’à l’époque de la procédure d’indemnisation par sa compagnie d’assurance, il ne disposait pas encore de tous les éléments nécessaires pour évaluer son entier préjudice et qu’il n’a pas été en mesure de contester l’estimation du rapport de l’expert mandaté par la société ERDF qui ne lui a été communiqué que lors de la procédure devant le tribunal de commerce.

L’exercice d’une action en justice ne dégénère en faute pouvant donner lieu à des dommages et intérêts que si le demandeur a agi de mauvaise foi, dans l’intention de nuire à la partie adverse ou avec une légèreté blâmable, tous faits non caractérisés en l’espèce à l’encontre de l’appelante au regard des solutions adoptées dans le litige entre les parties.

Ainsi, le jugement critiqué sera infirmé en ce qu’il a condamné M. X à verser à la société ERDF une indemnité de 1 000 euros pour procédure abusive.

Statuant à nouveau, la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par la société ERDF devenue ENENDIS sera rejetée.

— Sur les autres demandes :

Le jugement critiqué sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles.

Partie perdante, la société ERDF devenue ENEDIS sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

Il n’apparaît pas néanmoins inéquitable de laisser aux parties la charge de leurs frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement du tribunal de commerce d’Angers du 14 décembre 2016 en ce qu’il a dit que la société Electricité Réseau Distribution France a commis des fautes dans l’exécution du contrat de fourniture d’électricité engageant sa responsabilité contractuelle à l’égard de M. A X et en ce qu’il a rejeté les demandes de M. A X de dommages intérêts en

réparation du préjudice d’image, du préjudice moral et pour résistance abusive ;

L’INFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la société Electricité Réseau Distribution France devenue ENEDIS à payer à M. A X :

— la somme de 171 euros en remboursement de la franchise qu’il a dû supporter,

— la somme de 9 665 euros en réparation du préjudice d’exploitation consécutive au sinistre survenu le 10 mai 2012 ;

DEBOUTE la société Electricité Réseau Distribution France devenue ENEDIS de sa demande de dommages intérêts pour procédure abusive ;

CONDAMNE la société Electricité Réseau Distribution France devenue ENEDIS aux dépens de première instance et d’appel ;

REJETTE les demandes fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIER, P/LE PRESIDENT EMPECHE,

S. H N. J

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel d'Angers, Chambre a - commerciale, 23 mars 2021, n° 17/00458