Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 18 novembre 2010, n° 09/06673

  • Travail·
  • Congé·
  • Primeur·
  • Courrier·
  • Salariée·
  • Employeur·
  • Téléphone·
  • Lettre·
  • Réponse·
  • Harcèlement

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, ch. soc. sect. b, 18 nov. 2010, n° 09/06673
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 09/06673
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Bordeaux, 4 novembre 2009, N° F08/2612
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION B


ARRÊT DU : 18 NOVEMBRE 2010

(Rédacteur : Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller)

PRUD’HOMMES

N° de rôle : 09/06673

FC

La SAS DOMAINES F Q D CHÂTEAU GRAND PUY E

c/

Madame C M

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d’huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 novembre 2009 (R.G. n°F 08/2612) par le Conseil de Prud’hommes de BORDEAUX, Section Agriculture, suivant déclarations d’appel du 24 novembre 2009 et du 11 décembre 2009,

APPELANTE et intimée :

La SAS DOMAINES F Q D CHÂTEAU GRAND PUY

E agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

XXX

représentée par Maître Christophe BIAIS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE et appelante :

Madame C M

née le XXX, demeurant 44 Grand’rue – 33250 SAINT-JULIEN BEYCHEVELLE

représenté par Maître Hervé MAIRE, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 06 octobre 2010 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Benoit FRIZON DE LAMOTTE, Président,

Monsieur Jacques DEBÛ, Conseiller,

Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Florence CHANVRIT, adjoint administratif, faisant fonction de Greffier,

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

FAITS ET PROCEDURE

Suivant contrat à durée déterminée du 1er avril 1998 converti en contrat indéterminée, Madame C M a été engagée comme hôtesse d’accueil par la société J.E D.

Dans le cadre d’une restructuration de l’entreprise, le contrat de travail de la salariée a été repris à compter du 17 novembre 2003 par la société Domaines F Q D château grand Puy E (la société).

Par courrier du 29 septembre 2008, la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

Elle a saisi, le 27 novembre 2008, le conseil des prud’hommes de Bordeaux afin de voir prononcer la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur et d’obtenir le paiement d’indemnités de rupture et de rappels de primes et de congés payés.

Par jugement du 5 novembre 2009, le conseil a jugé que la rupture était imputable aux torts exclusifs de l’employeur et a condamné celui-ci au paiement des sommes suivantes :

—  4619,86 euros à titre d’indemnité de préavis,

—  461,98 euros pour les congés payés correspondants,

—  639,66 euros à titre de rappel de congés payés,

—  133,26 euros à titre de rappel de prime d’ancienneté,

—  15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

—  580 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La société a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par conclusions écrites, développées oralement à l’audience et auxquelles il convient de se référer, l’appelante sollicite de la Cour qu’elle réforme le jugement frappé d’appel, fasse produire à la prise d’acte les effets d’une démission, déboute Mme M et la condamne au paiement des sommes suivantes :

—  2.309,93 euros à titre de dommages et intérêts en raison de l’inexécution de son préavis,

—  2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour brusque rupture sur le fondement de l’article L 1237-2 du code du travail,

—  2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures, soutenues oralement à l’audience et auxquelles il convient de se référer, la salariée conclut à la confirmation du jugement en ce qu’il a prononcé la rupture aux torts de l’employeur. Sur appel incident, elle demande à la cour de condamner l’employeur à lui payer les sommes suivantes :

—  55.438,32 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  4.619,86 euros à titre d’indemnité de licenciement,

—  4.619,86 euros à titre d’indemnité de préavis,

—  461,98 euros pour les congés payés sur préavis,

—  639,66 euros à titre de reliquat sur congés payés dus au fractionnement,

—  213,22 euros à titre de reliquat de prime de fin d’année,

—  1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur l’imputabilité de la rupture

Lorsqu’un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifient, soit, dans le cas contraire, d’une démission.

En l’espèce, la lettre du 28 septembre 2008 prenant acte de la rupture est ainsi rédigée

'Il y a désormais plus d’un mois de cela, le 23 août 2008, je vous adressais une lettre recommandée qui demeure toujours sans réponse aujourd’hui.

Cette lettre faisait suite à divers échanges de correspondance, que je crois utile de rappeler ci- après dans l’ordre chronologique :

Le 14 mai 2008, alors que je me trouvais en arrêt de maladie depuis une semaine (le premier depuis plus de 8 années), vous m’avez fait délivrer, ce qui m’a grandement choquée, à mon domicile et par le Chef de Culture de l’entreprise un courrier me demandant si mon arrêt allait être prolongé et pour combien de temps.

Vous m’indiquiez également que l’activité téléphonique s’intensifiait et que vous ne pourriez pas vous organiser si vous aviez des prolongations d’arrêt de semaine en semaine.

Le 20 mai 2008, je vous adressais une réponse circonstanciée dans laquelle je vous faisais part de mon légitime étonnement tant sur le fond que sur la forme de votre courrier.

Je vous indiquais que vous pouviez tout à fait me contacter par téléphone si vous aviez à me joindre de manière urgente et que ce n’était pas la peine de déplacer ainsi le Chef de Culture à mon domicile.

Prenant également en compte le caractère très ambigu de votre missive, laquelle pouvait laisser croire que mon travail se limitait à répondre au téléphone et que mon absence rendait impossible votre organisation (et pouvait donc mettre en cause mon maintien dans l’entreprise), je saisissais l’occasion pour vous rappeler de manière détaillée le profil de mon poste et vous demandais de bien vouloir actualiser en conséquence le libellé de mon bulletin de salaire.

En effet, celui-ci portait toujours le même intitulé « Hôtesse » depuis mon embauche, alors que mes fonctions réelles et ma rémunération avaient connu des modifications et des évolutions substantielles.

Le 8 juillet 2008, je vous adressais une nouvelle lettre dans laquelle je vous demandais de bien vouloir m’indiquer mes dates de congés pour l’été.

Je vous rappelais que, depuis le 3 mars 2008, j’avais indiqué verbalement au comptable de la société que mes dates de congés étaient totalement flexibles sur les mois de juillet et août, à l’exception d’une période de 15 jours comprise entre le 28 juillet et le 10 août 2008 durant laquelle je n’avais pas la garde de mon fils.

N’ayant pas eu de réponse sur les congés que vous souhaitiez me voir prendre, je me voyais contrainte de vous formuler ma demande par lettre recommandée, non sans vous expliquer qu’il fallait désormais que je m’organise rapidement.

A cette date, vous n’aviez pas jugé utile de répondre à mon précédent courrier du 20 mai 2008.

Le 17 juillet 2008, toujours devant votre silence étonnant, je décidais de vous adresser une nouvelle lettre recommandée vous mettant en demeure de m’indiquer mes dates de congés, tout en vous rappelant les obligations légales en la matière.

Dans le même temps, je vous indiquais qu’il ne m’avait pas échappé que votre comportement et vos agissements à mon égard avaient considérablement évolués au cours des derniers mois.

Je rapportais alors quatre faits très concrets pour lesquels il était avéré que vous m’aviez, depuis le début de cette année, déchargée de nombreuses tâches importantes et valorisantes pour me confier des travaux subalternes.

Je prenais acte que ces agissements s’accompagnaient également d’éléments plus insidieux comme le fait de faire délivrer un courrier à mon domicile par le Chef de Culture ou de me faire de nombreuses remarques personnelles aussi désobligeantes que dévalorisantes.

Je relevais également que vous ne preniez pas la peine de répondre à mes courriers recommandés, quand bien même ils vous demandaient des choses aussi naturelles et essentielles que la fixation de mes dates de congés, la demande de mon contrat de travail ou la mise en conformité de la dénomination de mon poste sur mon bulletin de salaire.

Je vous informais que je considérais que la conjonction de tous ces éléments contribuait manifestement à me déstabiliser moralement et affectait mon état de santé physique et psychologique.

Je relevais néanmoins qu’après avoir travaillé plus de 10 ans à votre service, vous n’aviez jamais été amené à me faire de remarque quant à la qualité de mon travail ou quant à mes relations avec ma hiérarchie ou mes collègues et que la marque de votre satisfaction était patente dans les augmentations régulières de mes responsabilités et de mon salaire.

A toutes fins utiles, je vous précisais toutefois qu’il n’était pas dans mes intentions de démissionner.

Le 23 juillet 2008, vous m’adressiez – enfin – une lettre recommandée en réponse à ma lettre du 17 juillet 2008.

Cependant, et pour autant que vous faisiez directement état de cette lettre du 17 juillet 2008, vous choisissiez de ne pas y répondre et d’ignorer étonnamment l’ensemble des éléments que j’estimais pourtant constitutifs de harcèlement et qui y étaient clairement détaillés !

Vous vous contentiez de m’indiquer que les dates de congés auraient été fixées avec mon accord (') sur des tableaux mis à ma disposition ('') et même qu’un courrier m’aurait été remis en main propre le 16 juillet 2008 (''') soit la veille même de la date de ma propre lettre recommandée !!!!

Le 28 juillet 2008, je vous adressais un ultime courrier pour vous indiquer que votre missive du 23 juillet ne répondait en rien à mon courrier du 17 juillet, que je n’en comprenais absolument pas la teneur.

Je vous indiquais transmettre le dossier à mon avocat et vous communiquais ses coordonnées.

Le 6 août 2008, manifestement sous la dictée de votre propre conseil vous m’adressiez une seconde lettre de réponse à mon courrier du 17 juillet.

Le ton et la forme étaient désormais radicalement différents de ceux utilisés dans vos précédents écrits.

Pêle-mêle, vous vous déclariez étonné et déçu, tout en tentant, de m’imputer un comportement qui serait soudainement fautif depuis de nombreux mois, tant envers vous qu’envers mes collègues.

Ce faisant, vous essayiez de détourner habilement l’attention pour semer la confusion et éviter ainsi de répondre à mes affirmations.

Le 23 août 2008, je faisais réponse à votre courrier du 6 août et m’attachais, en premier lieu, à répondre aux seuls éléments concrets et tangibles que vous mettiez en avant dans cette lettre et qui n’avaient trait qu’à trois faits :

1 – la fixation de mes dates de congés,

2 – la modification des tâches qui m’étaient confiées

3 – mon contrat de travail.

1- Concernant la fixation de mes dates de congés :

Je vous invitais à relire mon précédent courrier du 8 juillet 2008 dans lequel je vous indiquais n’avoir jamais donné le moindre accord à quiconque concernant la fixation de mes dates.

Sur ce même courrier était stipulé que j’avais indiqué le 3 mars 2008 au comptable de la société « que mes dates étaient totalement flexibles sur les mois de juillet et août, à l’exception notable d’une période de 15 jours comprise entre le 28 juillet et le 10 août, pour laquelle le père de mon fils avait fait valoir son droit de garde ».

Concernant la « particulière audace » dont j’aurais fait preuve en vous rappelant vos obligations légales et en vous mettant en demeure de me fixer mes congés, je vous indiquais que je pensais, tout au contraire, avoir fait preuve d’une patience particulière puisque j’avais attendu jusqu’au 8 juillet 2008 pour vous adresser un premier courrier.

Celui-ci se voulait d’ailleurs conciliant.

Je me contentais de vous rappeler que la période estivale était déjà entamée et que, malgré mes demandes répétées, je restais toujours dans l’attente de la communication de mes dates de vacances.

Je vous rappelais que j’avais besoin de connaître mes dates afin de pouvoir m’organiser… ce qui me paraissait être une demande bien légitime !

Ce n’était finalement que le 17 juillet, devant l’urgence, et alors qu’une fois encore vous estimiez manifestement inutile de prendre la peine de me répondre, que je décidais de vous adresser un nouveau courrier recommandé.

A bout d’argument, et ne pouvant faire autrement, je me voyais contrainte de vous rappeler les obligations légales, espérant ainsi tout à la fois vous voir me donner une réponse et respecter, à minima, le Code du Travail.

A la lecture de votre lettre du 23 juillet faisant réponse à la mienne du 17 juillet je comprenais toutefois que, pour autant que vous acceptiez enfin de me donner mes dates de congés, vous n’entendiez nullement vous conformer aux obligations qui étaient pourtant les vôtres conformément à la législation.

Ainsi, vous prétendiez me « confirmer » le 23 juillet 2008 « les dates fixées initialement soit du 28/07/08 au 08/08/2008 ».

Vous indiquiez que des tableaux avaient été établis, qu’ils avaient été mis à ma disposition avec toutes les possibilités pour procéder à d’éventuelles modifications et que cela m’avait été indiqué à plusieurs reprises.

Je le contestais formellement et vous rappelais qu’il ne m’avait jamais été présenté un quelconque tableau à valider !

A titre complémentaire, je vous indiquais que la taille et l’organisation même de votre entreprise faisaient que vous ne pouviez pas invoquer raisonnablement une méconnaissance de la loi.

Je rappelais que les Domaines F-Q D avaient un effectif moyen annuel de 42 salariés, dont un comptable.

Que le chiffre d’affaires hors taxes s’était élevé de 6,5 millions d’euros en 2007 pour un résultat net, après impôts, de 1,2 million d’euros.

En conséquence je vous indiquais que vous ne pouviez vous prévaloir du statut d’entreprise individuelle ou de petite exploitation familiale afin de vous exonérer de vos obligations légales et que tous ces manquements ne pouvaient traduire qu’une volonté délibérée de votre part.

Je vous demandais alors de bien vouloir me fixer de nouvelles dates en respectant le délai de prévenance légal et non en me communiquant mes dates de congés UNE semaine avant la date à laquelle vous souhaitiez les voir débuter.

A titre complémentaire, je remarquais que la période du 28 juillet au 8 août que vous aviez choisie pour me fixer mes vacances était tout sauf anodine puisqu’elle correspondait EXACTEMENT aux dates pour lesquelles je vous avais indiqué depuis longtemps que je n’avais pas la garde de mon fils

Je relevais que cette coïncidence était révélatrice et que le simple respect du Code du Travail vous aurait permis d’éviter ce choix.

Je me trouvais normalement prioritaire compte tenu de ma situation de mère célibataire et de mon ancienneté pour solliciter toute date qui vous aurait agréée en dehors de cette période.

Je concluais que concernant la fixation de mes dates de congés, la démonstration de la volonté de me harceler était patente.

2 – Concernant la modification des tâches confiées

Dans mon courrier recommandé du 17 juillet 2008, je vous indiquais que de nombreuses tâches m’avaient été retirées depuis le début de l’année 2008 pour les confier à ma collègue A, tandis que des travaux plus subalternes, qui étaient précédemment siens m’étaient confiés.

Je citais alors, en autres, l’exemple du nouveau téléphone que vous aviez fait installer sur mon bureau et j’écrivais : « En début d’année 2008, vous avez fait installer un nouveau téléphone sur mon bureau, de sorte que tous les appels téléphoniques extérieurs sonnent non seulement sur le standard de ma collègue A mais également sur le mien. Vous m’avez indiqué qu’il m’appartenait désormais de répondre à l’ensemble des appels, alors que je n’exécutais cette mission que sporadiquement auparavant, lorsqu’il s’agissait de soulager ma collègue déjà en conversation sur une autre ligne. »

Dans votre lettre de réponse du 23 juillet 2008, votre embarras manifeste vous faisait ignorer totalement et superbement mes propos, lesquels étaient pourtant précis et ne revêtaient pas un caractère anodin.

Dans votre seconde lettre de réponse du 6 août 2008, manifestement dictée par votre conseil, vous tentiez cependant bien tardivement de vous justifier.

Sur le sujet du téléphone, vous indiquiez :« S’agissant du téléphone, dans la mesure où nous avons remplacé certains téléphones par des appareils modernes et plus confortables, nous avons souhaité vous en faire profiter en remplaçant le vôtre, à l’instar de vos collègues. »

Dans ma dernière lettre du 23 août 2008, je vous démontrais à quel point cette justification ne pouvait cependant pas être prise au sérieux.

Je vous rappelais que, depuis de nombreuses années à votre service, j’avais eu loisir de voir régulièrement évoluer les outils bureautiques et techniques que vous aviez successivement mis à ma disposition.

Que je m’étais toujours adaptée de manière à faire progresser tant mes compétences que la productivité de l’entreprise.

Que, concernant le sujet du téléphone, je n’avais nullement mis en question le remplacement de l’appareil en lui-même.

Ainsi, lorsque j’avais indiqué qu’un nouveau téléphone avait été installé sur mon bureau, je ne m’étais pas plainte pas du changement de l’appareil mais, bien du fait qu’il m’était désormais demandé de répondre à l’ensemble des appels téléphoniques alors que je n’effectuais cette mission que de manière exceptionnelle par le passée, lorsque ma collègue était déjà en conversation sur une autre ligne.

La différence étant tout de même de taille !

Je vous indiquais que cela revenait tout simplement à ramener ma fonction au rang de standardiste, ce qui correspondait bien, dans mon cas, à une technique visant à dévaloriser mon poste en me cantonnant à une tâche subalterne.

Par ailleurs, je relevais que votre réponse dans laquelle vous essayez de limiter ce problème à un simple changement de combiné était non seulement maladroite mais également erronée.

En effet, vous indiquiez dans votre lettre du 23 juillet : « S’agissant du téléphone, dans la mesure où nous avons remplacé certains téléphones par des appareils modernes et plus confortables, nous avons souhaité vous en faire profiter en remplaçant le vôtre, à l’instar de vos collègues. » ce qui est totalement faux.

Vous n’avez pas changé les appareils téléphoniques par des nouveaux plus modernes ou plus confortables mais vous avez seulement permuté les postes téléphoniques existants et vous m’avez ainsi attribué le poste précédemment utilisé par ma collègue A !!!

Ainsi, je relevais qu’à trop vouloir tenter de trouver des explications à vos agissements vous en arriviez à déformer inutilement la vérité alors que je ne mettais pas en cause le changement de mes outils de travail mais bien l’évolution des tâches qui m’étaient confiées.

Je notais également que cet élément permettait toutefois de mieux comprendre pourquoi vous ne souhaitiez pas apporter de réponse sur les autres points, pourtant très précis également, dont je faisais état dans ma lettre du 17 juillet et que je vous rappelle ci-dessous une nouvelle fois pour mémoire

Au mois d’avril 2008, vous m’avez retiré la gestion de la mise en place des ventes de vins en primeurs avec les allocations et les mises en marché pour la confier à ma collègue, sans même me donner la moindre explication, alors que je m’en occupais pourtant depuis des années.

En mai 2008, profitant de l’installation d’un nouveau système informatique, vous m’avez indiqué qu’il était désormais de ma responsabilité exclusive de traiter l’ensemble des courriels arrivant à la société, alors que ceux-ci étaient précédemment traités par les destinataires.

En juin 2008, alors que je vous demandais si je devais prévoir de m’absenter, comme l’année passée, pour représenter le domaine lors de la tournée à l’étranger d’une semaine réalisée par la maison Beyerman, vous m’avez sèchement indiqué que ma place était désormais derrière mon bureau et pas ailleurs.

3 – Concernant les modifications de mon contrat de travail

Dans votre lettre du 6 août dernier, vous indiquiez pouvoir certifier, preuves à l’appui, qu’aucun élément de mon contrat de travail n’avait été modifié.

Dans ma réponse du 23 août, je vous indiquais ne pas comprendre pourquoi, la chose semblant aussi aisée à vous lire, vous ne le faisiez pas dans aucun de vos courriers du 23 juillet et du 6 août et pourquoi, une fois encore, vous n’aviez pas jugé utile d’apporter de réponse aux points que j’évoquais dans mon courrier du 17 juillet.

Je relevais cependant qu’il vous serait très difficile de présenter les preuves d’un contrat de travail que vous n’aviez jamais voulu m’établir, malgré mes demandes répétées et au mépris de la législation du travail.

Ainsi, comme je vous l’ai déjà indiqué dans mes précédents courriers, et plus particulièrement dans celui du 23 août dernier que vous avez délibérément choisi d’ignorer, je considère que votre comportement à mon égard est constitutif de harcèlement moral.

Depuis le début de l’année 2008, vous multipliez les manoeuvres pour me déstabiliser et me contraindre à vous présenter ma démission :

En début d’année 2008, vous avez fait installer un nouveau téléphone sur mon bureau, de sorte que tous les appels téléphoniques extérieurs sonnent non seulement sur le standard de ma collègue A mais également sur le mien.

Vous m’avez indiqué qu’il m’appartenait désormais de répondre à l’ensemble des appels, alors que je n’exécutais cette mission que sporadiquement auparavant, lorsqu’il s’agissait de soulager ma collègue déjà en conversation sur une autre ligne.

Au mois d’avril 2008, vous m’avez retiré la gestion de la mise en place des ventes de vins en primeurs avec les allocations et les mises en marché pour la confier à ma collègue, sans même me donner la moindre explication et alors que je m’en occupais pourtant depuis des années.

En mai 2008, profitant de l’installation d’un nouveau système informatique, vous m’avez indiqué qu’il était désormais de ma responsabilité exclusive de traiter l’ensemble des courriels arrivant à la société, alors que ceux-ci étaient précédemment traités par les destinataires.

En mai 2008, vous tentez de m’intimider en me faisant délivrer un courrier très ambigu en mains propres à mon domicile alors que je me trouve pour la première fois depuis 8 ans en arrêt de travail

En juin 2008, alors que je vous demandais si je devais prévoir de m’absenter, comme l’année passée, pour représenter le domaine lors de la tournée à l’étranger d’une semaine réalisée par la maison Beyerman, vous m’avez sèchement indiqué que ma place était désormais derrière mon bureau et pas ailleurs.

Vous restez sourd à mes demandes légitimes concernant la rédaction d’un contrat de travail et la révision de l’intitulé de mon poste sur mes bulletins de salaire

Vous me communiquez mes dates de vacances une semaine avant leur date de commencement, au mépris complet de la législation.

Vous choisissez précisément la période du 28 juillet au 10 août 2008 pour laquelle je vous avais indiqué ne pas souhaiter les prendre, compte tenu que je n’avais justement pas la garde de mon fils durant cette même période.

Ce faisant vous faîtes fis du Code du Travail qui me désigne pourtant comme étant prioritaire dans le choix de congés eu égard à mon ancienneté dans l’entreprise et ma situation de mère célibataire.

Bien qu’à la tête d’une entreprise de 42 salariés totalisant un chiffre d’affaires hors taxes de 6,5 millions d’euros pour un bénéfice de 1,2 millions d’euros en 2007, vous agissez comme si vous pouviez ignorer les principes élémentaires du Code du Travail et vous refusez de respecter vos obligations légales en matière de fixation de mes dates de congés, malgré mes deux mises en demeure.

Dans votre courrier recommandé du 23 juillet 2008, faisant réponse à ma lettre recommandée du 17 juillet 2008, vous choisissez d’ignorer totalement les éléments précis constitutifs de harcèlement qui y étaient pourtant clairement détaillés.

Mon courrier recommandé du 23 août 2008 est, lui, totalement ignoré ! Plus d’un mois après son expédition je reste toujours dans l’attente d’une réponse aux questions pourtant précises qui y étaient posées !

Par ailleurs, et indépendamment de ces faits précis et irréfutables, je constate que les rares justifications que vous avez bien voulu apporter dans votre missive du 6 août 2008 sont, soit maladroites, soit totalement fantaisistes.

En effet, et comme cela a été indiqué précédemment, les appareils téléphoniques n’ont pas été remplacés mais seulement permutés. Il est vous également bien difficile de justifier soudainement, près de 3 mois après avoir reçu mon premier courrier recommandé, que mon comportement aurait changé tant envers vous qu’envers mes collègues de travail… précisément depuis le mois de mai dernier !

Vous n’hésitez pas à écrire dans votre courrier du 23 août dernier : « Nous ne pouvons accepter que des problèmes inhérents à votre vie privée et personnelle rejaillissent en permanence sur votre vie professionnelle, et par conséquent sur votre employeur et le personnel qui vous côtoie » ou « Sachez que l’attitude que vous observez depuis plusieurs mois tant vis-à-vis de votre hiérarchie que de certains collègues de travail déstabilise profondément le service et crée un climat délétère qui obère le bon fonctionnement de la société ».

Depuis désormais plus de 10 ans que je travaille à votre service, vous n’avez jamais été amené à me faire de remarques concernant la qualité de mon travail, mes relations avec ma hiérarchie ou mes collègues.

Gage de votre satisfaction, me semble t-il, vous m’avez régulièrement augmentée et confié toujours de plus en plus de responsabilités.

Contrairement à ce que vous affirmez, ma vie privée est tout à fait sereine.

Pour autant, vous comprendrez que je ne puisse tolérer plus longtemps de tels agissements de votre part, lesquels visent manifestement à me déstabiliser moralement et psychologiquement.

Dans ce contexte et concernant le harcèlement moral dont je suis l’objet, il m’est également difficile de croire, comme vous l’affirmez maladroitement dans votre courrier du 6 août dernier : « nous en prenons bonne note et diligenterons, dès votre retour, toute mesure nécessaire en vue de prévenir de tels agissements et de dissiper tout malentendu au visa des dispositions de l’article L1152-4 du Code du Travail. »

Il m’est difficile de croire que vous pourriez ainsi respecter cet article du Code du Travail.

En effet, depuis plus de trois années, vous refusez de mettre en place les élections des délégués du personnel et de la représentation syndicale à l’intérieur de l’entreprise qui compte pourtant, je le rappelle 42 salariés.

Ce faisant, je ne peux solliciter aucune aide ou médiation.

Cependant, je n’entends nullement démissionner de mes fonctions et ie prends donc acte de la rupture de mon contrat de travail, qui vous est totalement imputable pour l’ensemble des griefs ci-dessus évoqués qui caractérisent au surplus un véritable harcèlement moral.

Conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, cette rupture interviendra à réception de la présente soit le 30 septembre 2008.

Je vous saurai donc gré de bien vouloir me faire parvenir les documents légaux, à savoir mon certificat de travail, mon dernier bulletin de paye et mon attestation Assedic.

En parallèle, je vous informe que je dépose une procédure auprès du Conseil des Prud’hommes de Bordeaux pour obtenir la juste indemnisation du préjudice par moi subi.

J’informe l’Inspection du Travail de votre refus de respecter le Code du Travail, tout particulièrement en ce qui concerne la législation des congés payés ainsi que la représentation syndicale et des délégués du personnel.

Comme je vous l’avais déjà indiqué, j’ai parfaitement conscience qu’en m’opposant ainsi à vous et en envisageant l’éventualité d’une longue procédure contentieuse, je me prive de la faculté de pouvoir postuler à l’avenir pour un quelconque poste dans une propriété classée du Médoc.

Le milieu viticole médocain est un cercle fermé, dans lequel votre influence est trop importante, pour que mon CV ne soit pas systématiquement écarté à l’avenir.

Pour autant, je choisi de défendre mon honneur.'

Il y a lieu d’examiner si les griefs allégués sont établis et suffisamment graves pour justifier la rupture aux torts de l’employeur ainsi que l’a décidé le conseil des prud’hommes.

En premier lieu, Mme M reproche à l’employeur d’avoir mandaté le chef de culture du domaine viticole pour lui rendre visite, le 14 mai 2008, pendant un arrêt maladie et lui remettre la lettre suivante :

' C, nous venons de recevoir votre arrêt maladie qui prolonge l’arrêt jusqu’au 18 mai 2008. Cependant, cet arrêt ne donne aucune indication quant à sa prolongation éventuelle. Or, en cette période de primeur, l’activité, notamment téléphonique, s’intensifie et on ne pourra pas s’organiser si vous avez des prolongations de l’arrêt de semaines en semaines. Comme vous n’avez pas donné beaucoup de détails au téléphone à A, nous souhaiterions savoir si votre maladie risque de se prolonger au delà du 18 mai et pour combien de temps.'

La salariée a répondu à ce courrier , le 20 mai 2008, en ces termes :

' Monsieur D, je fais suite à la missive qui m’a été remise, en mains propres et à mon domicile, par le chef de culture, le mercredi 14 mai, alors que j’étais en arrêt maladie. A réception de ce courrier, je vous ai immédiatement téléphoné afin de tenter de vous donner les précisions que vous réclamiez quant à l’évaluation de mon état de santé. Toutefois, je me permets de revenir vers vous aujourd’hui afin de vous faire part des interrogations que cette lettre n’a pas manqué de susciter en moi tant sur la forme que sur le fond. Sur la forme, vous avez demandé à monsieur F G avec lequel j’entretiens des relations fonctionnelles mais non hiérarchiques, de rédiger un courrier dans lequel vous relevez que mon arrêt de travail ne donne aucune indication quant à son éventuelle prolongation. Vous indiquiez également que vous souhaitiez savoir si ma maladie risque de se prolonger et pour combien de temps. N’ayant pas l’habitude de vous adresser des arrêts maladie, le dernier en date remontant à la période de mon accouchement, soit il y a plus de huit ans, je n’ai jamais porté une attention particulière à la manière dont ce document est établi. Il apparaît, cependant, qu’il s’agit effectivement d’un formulaire administratif qui ne prévoit pas d’indication quant à son éventuelle reconduction. Interrogé à ce propos, mon médecin traitant m’a indiqué qu’il lui serait bien difficile de spécifier pareille information, les maladies étant par nature évolutives et leurs formes et temps de traitement différents d’un patient à l’autre. En conséquence et sauf à s’agir d’arrêt de travail de complaisance, vous conviendrez qu’il est impossible de déterminer à l’avance le nombre et la durée des éventuelles prorogations. Z qui n’avait certes pas l’habitude de traiter un arrêt de travail me concernant pourra, toutefois, vous le confirmer lui même puisqu’il reçoit à intervalles réguliers des arrêts de travail émanant des 30 salariés de la propriété. Vous indiquez également que je n’ai pas donné beaucoup de détails à ma collègue A au téléphone. Je crois comprendre qu’il ne vous a pas été rapporté que j’ai tenté à trois reprises de vous joindre au téléphone afin de vous faire part directement de mon arrêt tant par courtoisie que par conscience professionnelle et ce le matin même de sa survenance afin que vous puissiez vous organiser. Vous comprendrez cependant que, pour autant que j’entretienne des rapports cordiaux avec l’ensemble de mes collègues, je ne tiens à leur faire part de mes problèmes de santé lesquels relèvent strictement de ma vie privée…'

L’employeur explique d’une part, qu’il a fait porter le courrier incriminé pour des simples raisons d’efficacité et d’organisation permettant de prendre des dispositions pour procéder à un remplacement s’il y avait lieu, et d’autre part, qu’il n’a pas demandé à la salariée des précisions sur sa maladie.

Toutefois, la salariée a, pu considérer, à juste titre, que le fait de demander au chef de culture de porter à son domicile pendant un arrêt maladie un courrier lui demandant avec insistance si une prolongation était envisagée, constituait de la part de l’employeur une démarche anormale visant à faire pression sur Mme M pour accélérer la reprise du travail alors même qu’elle avait joint téléphoniquement l’entreprise pour signaler son absence et que les arrêts de travail avaient été transmis dans les délais et selon les formes légales.

La Cour estime, en conséquence, que l’employeur a fait preuve d’un comportement déloyal et que le grief est établi.

En second lieu, il est reproché à l’employeur de ne pas avoir fixé en temps utile les congés de la salariée.

La salariée fait valoir qu’elle a rédigé, le 8 juillet 2008, le courrier suivant :

'Le 3 mars 2008, j’ai indiqué verbalement à Monsieur F G, le comptable de notre société, les dates auxquelles je souhaitais bénéficier de mes congés pour cet été. La communication de ces dates était faite à sa demande expresse, selon le même mode opératoire que les années précédentes. Il m’indiquait que je ne pouvais prendre qu’un congé de 15 jours consécutifs au maximum sur août, après validation par vos soins.

A cette occasion, je précisais à Monsieur F G que mes dates étaient totalement flexibles sur les mois de juillet à août, à l’exception notable d’une période de 15 jours comprise entre le 28 juillet et le 10 août 2008 pour laquelle le père de mon fils avait déjà fait valoir son droit de garde. Je lui rappelais également ma situation personnelle de mère célibataire avec un enfant à charge en garde alternée et mon ancienneté de 10 ans dans l’entreprise.

Je suis aujourd’hui surprise, malgré mes demandes répétées formulées au comptable, de n’avoir toujours pas eu de réponse de votre part concernant ces congés d’été. Je vous demande donc instamment de bien vouloir m’indiquer la période de 15 jours consécutifs que vous voudrez bien m’accorder cette année.

La période estivale étant maintenant largement entamée, vous comprendrez qu’il me faut prendre de nombreuses dispositions, tant pour mon fils que pour moi, et que je ne peux attendre plus longtemps afin de m’organiser.

Dans l’attente de vous lire, je vous prie de croire, Monsieur D, en l’assurance de ma parfaite considération.'

En l’absence de réponse de la part de l’employeur, elle a réitéré sa demande par une lettre du 17 juillet rédigée en ces termes :

' dans mon courrier du 8 juillet dernier, je vous demandais de m’indiquer les 15 jours consécutifs que vous pouviez m’accorder pour cet été, tout en vous rappelant ma situation familiale et mon ancienneté. A ce jour, cette lettre demeure toujours sans réponse de votre part et je me vois donc contrainte de vous rappeler vos obligations légales en matière de fixation des congés payés. Plus particulièrement, je vous indique qu’il vous appartient de déterminer l’ordre des départs en congés de l’ensemble de vos personnels en respectant:

— la situation familiale des salariés et leur ancienneté

— l’obligation d’informer les salariés au moins un mois avant la date de départ fixée

— l’affichage obligatoire

— l’accord des salariés pour tout fractionnement de la durée du congé principal sur une durée inférieure à 24 jours ouvrables.

Une nouvelle fois, je vous demande donc instamment de bien vouloir m’indiquer les dates auxquelles vous souhaitez me voir prendre mes congés annuels et je vous prie désormais de bien vouloir le faire sous huitaine, la présente valant mise en demeure…'

L’employeur avait, toutefois, répondu, le 16 juillet, au premier courrier de la salariée, comme suit :

'Suite à votre lettre recommandée du 08 juillet 2008, vous me demandez de vous préciser vos dates de congé de cet été.

Je vous rappelle que dans la première quinzaine de février nous avons demandé à l’ensemble des salariés du chai et du bureau les prévisions et souhaits de dates de congé pour la période allant de Mars à Août.

Dans l’attente d’une proposition de votre part, nous avons fixé provisoirement avec votre accord les dates sur la base des dates des congés pris les années précédentes :

Soit du 28/07/08 au 08/08/08.

Ce n’est que par la suite que vous nous avez indiqué que vous aviez un problème avec le père de votre enfant qui avait retenu unilatéralement ses propres dates de congé. A titre de compromis, je vous ai alors proposé les possibilités suivantes :du 21/07/08 au 01/08/08 ou du 04/08/08 au 15/08108.

Si ces dates ne vous convenez pas, Il paraissait possible, dans un bureau de trois personnes de m’en parler directement. Je crois que cela vous a été indiqué à plusieurs reprises au cours du semestre écoulé.

En tout état de cause en l’absence de décisions et de réactions « normales » de votre part les dates restent fixées du 28/07/08 au 08/08/08.

Je vous rappelle que la fixation des dates de congé est du ressort exclusif de l’employeur et que j’ai montré suffisamment de souplesse par le passé pour qu’une discussion puisse s’engager. Cependant, ce n’est pas à moi de m’adapter au planning de garde de votre fils, mais peut-être à son père de tenir compte de vos contraintes.

Enfin, vous devriez comprendre qu’il ne peut être longtemps admissible que vous ne communiquiez avec moi que par lettre et qui plus est en recommandée en présentant des arguments mettant en cause les collaborateurs du bureau sur la base de faits erronés voire mensongers.

Il me semble nécessaire que très vite vous vous posiez réellement des questions sur vous-même et votre comportement au bureau, que pour une fois vous vous remettiez en cause, au lieu de constamment interpréter les faits à votre manière, comme cela vous arrange, mettant en cause les uns ou les autres, en créant ainsi des tensions désagréables et inutiles pour tout le monde.

Je reste à votre disposition pour en parler directement ensemble si vous le souhaitez.

Je vous prie de croire, Mademoiselle, à l’assurance de mes sentiments les meilleurs.'

Il a répliqué au deuxième courrier de la salariée par la correspondance suivante :

'Depuis mars 2008, date à laquelle les congés ont été fixés en total accord avec vous, vous ignorez délibérément les réponse que je vous ai faite directement ou indirectement sur ce sujet.

Les tableaux que l’on établit pour valider les périodes de congés posées par les salariés ont été à votre disposition comme chaque année avec toutes possibilités pour procéder à d’éventuelles modifications comme cela vous a été indiqué à plusieurs reprises.

Suite à votre demande, nous vous avons également remis en main propre un courrier le 16/07/08 vous reprécisant les périodes retenues et les possibilités d’aménagement que nous avions laissé à votre disposition depuis mars.

Vous ignorez également cette réponse dans votre courrier du 17/07/2008. Je vous confirme, à nouveau, les dates fixées initialement soit :

du 28/07/2008 au 08/08/2008

et qui correspondront donc à la période de vos congés d’été de cette année.

Par ailleurs, vous voudrez bien, comme la loi vous y oblige également, m’apporter la justification de votre absence depuis le Vendredi 18 juillet 2008 à 12h.

Le responsable administratif de la société, Z, atteste, de son côté, que la demande de congés de Mme M pour l’été 2008 s’est ainsi déroulée :

' début février, j’ai demandé à tous les salariés des chais et du bureau de me donner leur projet de dates de congés

— avoir rappelé cette date à Mme M à plusieurs reprises,

— lui avoir indiqué fin février que j’avais obtenu les demandes des autres salariés et que je ne pouvais différer plus longtemps la présentation de ces demandes à M. D aux motifs qu’elle ne m’avait fourni aucune date

— lui avoir demandé son accord pour fixer des dates provisoires que je lui avais suggéré identiques à celle de l’année précédente compte tenu de ses obligations professionnelles et des contraintes inhérentes à ses autres collègues de bureau

— lui avoir proposé, en conséquence, les dates du 28 juillet au 8 août 2008 et qu’en aucun cas, M. D n’est intervenu dans la fixation de ces dates

— l’avoir informé au cours de cette discussion que dés lors que M. D aurait validé l’ensemble de ces dates, il faudrait voir directement avec lui pour les modifier

— avoir appris une semaine à dix jours plus tard, soit début mars après validation par M. D que le père de l’enfant avait retenu exactement les mêmes dates

— avoir malgré tout soumis cette contrainte à M. D qui a alors proposé un compromis dont on voit la marque sur le tableau de congés que j’ai édité le 7 avril 2008

— avoir soumis à Mme M la proposition de compromis en lui rappelant que si elle souhaitait une autre date, elle devait en parler directement avec M. D.

— lui avoir rappelé, à plusieurs reprises entre avril et juin notamment lors de la remise des bulletins que j’attendais une réponse définitive pour rééditer mon tableau de congés soit par rapport au compromis proposé soit par rapport à une discussion négociation directe avec M. D et n’avoir eu aucune réaction à chaque rappel y compris d’éventuelles réactions négatives.'

Dés lors que la salariée reconnaît dans le courrier du 8 juillet qu’elle a fait part à Z de ses souhaits de période de congés au mois de mars 2008, qu’elle ne produit aucun élément de preuve de nature à contester le témoignage de Z et que l’employeur verse aux débats les tableaux de congés édités en mars et avril 2008, la cour estime que les allégations de Mme M selon lesquelles l’employeur n’avait pas fixé les congés dans les délais légaux, ne sont pas fondées et qu’en conséquence, le grief n’est pas caractérisé.

Le fait que l’employeur n’ait pas donné entièrement satisfaction à Mme M sur les dates de congés relève de son pouvoir de direction.

En troisième lieu, la salariée accuse l’employeur d’avoir modifié ses attributions et de lui avoir confié des tâches subalternes.

Cette doléance a été formulée dans le courrier du 20 mai 2008 en ces termes:

'Sur le fond

Votre courrier indique que l’activité, notamment téléphonique, s’intensifie en période de primeur et que vous ne pourrez pas vous organiser en cas de prolongations de mon arrêt de semaines en semaines.

Je suis flattée de constater que ma présence semble à ce point importante pour assurer la bonne marche de l’activité téléphonique de l’entreprise. Pour autant, je vous rappellerai que l’éventail des taches qui me sont régulièrement confiées est sensiblement plus large que cette simple fonction de « standardiste », laquelle me semble bien réductrice en regard de mon profil de poste réel, dont je vous rappelle ci-après le détail.

Partie assistanat de direction :

Relationnel avec les courtiers et négociants de Bordeaux,

Mise ne place de la vente des vins en primeurs pour la place de Bordeaux (allocations et mise en marché),

Saisie des commandes, gestions des instructions de mise en bouteille et facturation ,

Suivi de la traçabilité des vins depuis le parcellaire jusqu’à la mise en bouteille,

Partie relations publiques :

Mise en place et présentation des dégustations des vins primeurs à la propriété, pour les journalistes et les professionnels,

Organisation des manifestations à caractère réceptif sur la propriété,

Gestion des visites de la propriété (particuliers, professionnels, journalistes) Elaboration et mise à jour des revues de presse,

Représentation lors des voyages de promotion pour les différentes marques, tant en France qu’à l’étranger.

J’ai donc tendance à penser qu’il s’agit d’une erreur de formulation de votre part. En effet, le détail de mes déplacements, tant en France qu’en Europe au cours des 18 derniers mois pour représenter seule et en totale autonomie les différents vins des propriétés, montre que mes absences sur des périodes parfois égales à une semaine sont parfaitement gérées sur le plan de l’activité téléphonique.

Pour mémoire, je vous rappellerai que j’ai, depuis le ler janvier 2007, successivement assuré la représentation et la promotion des produits des différentes propriétés aux endroits suivants

Londres, janvier 2007, 3 jours, dégustation de la maison Richards Walford Paris, mars 2007, XXX

Suisse, avril 2007, semaine promotionnelle à Bad Ragaz

XXX, Stockholm, septembre 2007, une semaine, tournée promotionnelle avec la maison Beyerman

Londres, octobre 2007, soirée de présentation des bordeaux du magasin Harrods

Paris, mars 2008, XXX

A titre complémentaire, je relève aujourd’hui que le titre de la fonction figurant sur mon bulletin de paye sous l’intitulé « Hôtesse » ne reflète en rien mon profil de poste réel et demeure inchangé depuis mon embauche initiale il y a plus de 10 années, alors que mes :fonctions et ma rémunération ont connu des évolutions et des modifications substantielles sur la même période.

Je pense qu’il s’agit d’un simple oubli de votre part et je saisi ici l’occasion pour vous demander de bien vouloir faire le nécessaire pour l’actualiser afin de le rendre plus conforme A la réalité.

Sachez enfin que je suis touchée que vous preniez ainsi la peine de déplacer, sur ses heures de travail, notre Chef de Culture pour me remettre un courrier en mains propres à mon domicile durant mon arrêt maladie. Toutefois, si d’aventure vous deviez avoir un besoin urgent de me – joindre A l’avenir, et ce même en dehors de mes heures de travail, je vous invite à me contacter directement et simplement par téléphone.

Souhaitant ainsi avoir dissipé tout éventuel malentendu, je vous prie de croire, Monsieur D, en l’assurance de nia parfaite considération.

Puis, dans une lettre du 17 juillet, elle a précisé les éléments suivants :

' … vous m’avez progressivement retiré de nombreuses tâches pour les confier à ma collègue A alors même que les travaux les plus subalternes qui étaient précédemment siens m’étaient successivement attribués : en début d’année 2008, vous m’avez fait installer un nouveau téléphone de sorte que tous les appels extérieurs sonnent non seulement sur le standard de ma collègue A. Vous m’avez indiqué qu’il m’appartenait, désormais, de répondre à l’ensemble des appels alors que je n’exécutais cette mission que sporadiquement auparavant, lorsqu’il s’agissait de soulager ma collègue déjà en conversation sur une autre ligne. Au mois d’avril 2008, vous m’avez retiré la gestion de la mise en place des ventes de vins en primeurs avec les allocations et les mises en marché pour la confier à ma collègue sans même me donner la moindre explication et alors que je m’en occupais depuis des années. En mai 2008, profitant de l’installation d’un nouveau système informatique, vous m’avez indiqué qu’il était, désormais de ma responsabilité exclusive de traiter l’ensemble des courriels arrivant à la société alors que ceux-ci étaient précédemment traités par les destinataires. En juin 2008, alors que je vous demandais si je devais prévoir de m’absenter, comme l’année passée, pour représenter le domaine lors d’une tournée à l’étranger d’une semaine réalisée par la maison Beyerman, vous m’avez sèchement indiqué que ma place était désormais derrière mon bureau et pas ailleurs….'

L’employeur a répondu aux réclamations de la salariée sur la modification de ses attributions par trois courriers :

Sa lettre du 16 juillet 2008 est, ainsi, rédigée : ' … vous devriez comprendre qu’il ne peut être longtemps admissible que vous ne communiquiez avec moi que par lettre et qui plus est en recommandé en présentant des arguments mettant en cause les collaborateurs du bureau sur la base de faits erronés, voire mensongers. Il me semble nécessaire que très vite vous vous posiez des questions sur vous-même et votre comportement au bureau que pour une fois vous vous remettiez en cause au lieu d’interpréter les faits à votre manière comme cela vous arrange mettant en cause les uns et les autres, en créant aussi des tensions désagréables et inutiles pour tout le monde. Je reste à votre disposition pour en parler directement ensemble si vous le souhaitez'

Le 6 août, il a envoyé la lettre suivante :

'… Nous ne pouvons accepter que vous inversiez les rôles en matière d’évolution comportementale et d’agissements entre les parties au cour des derniers mois. Aussi, nous ne pouvons que réitérer la même question que nous nous posions légitimement sur les questions de votre changement de comportement et d’attitude tant à l’égard de votre employeur que de vos collègues de travail et, ce, depuis le mois de mai 2008. Nous ne pouvons accepter, en effet, que les problèmes inhérents à votre vie privée et personnelle rejaillissent en permanence sur votre vie professionnelle et par conséquent sur votre employeur et sur le personnel qui vous côtoie. Nous avons fait preuve, au cours de ces derniers mois, d’un esprit de compréhension très développé en acceptant de mettre sur le compte de difficultés personnelles que vous rencontriez certaines de vos réactions intempestives et désagréables pour le reste du personnel sur les lieux du travail. Vous comprendrez, dés lors, notre irritation quand nous constatons que vous laissez croire que c’est notre comportement à votre égard qui a changé alors que vous savez qu’il n’en est rien et que rares sont les sociétés dont les dirigeants font preuve d’autant de souplesse et de compréhension face à des réactions négatives incessantes. Nous pouvons vous certifier, preuves à l’appui, qu’aucun élément de votre contrat de travail n’a été modifié et que seules quelques conditions de travail ont évolué dans l’intérêt même des salariés pour leur assurer un confort dans l’exécution de leurs prestations de travail, notamment dans leurs communications extérieures. Il est, en effet, facétieux de soutenir que nombre de tâches vous auraient été retirées pour les confier à votre collègue A et que les travaux les plus subalternes qui étaient précédemment les siens vous étaient successivement attribués. Face à de telles allégations privées de tout élément de démonstration, je ne prendrai qu’un seul exemple, que vous citez, pour mettre en relief son caractère erroné et surtout, l’inanité de telles supputations. S’agissant du téléphone, dans la mesure où nous avons souhaité vous en faire profiter en remplaçant le votre à l’instar de vos collègues. S’agissant des autres allégations, point n’est besoin de vous répondre dés lors que vous savez pertinemment qu’elles ne reflètent nullement la réalité et qu’elles ont pour but de jeter l’opprobre sur la société et son fonctionnement.

Enfin vous n’hésitez pas à dépasser les limites de l’acceptable en prêtant à votre employeur des réflexions qu’il n’a jamais prononcées. Il est tellement facile de présenter une version des faits suffisamment précise et fallacieuse à seule fin d’accréditer une thèse qui manque singulièrement de fondement, de sincérité, de dignité et de sérieux. Sachez que l’attitude que vous observez depuis plusieurs mois tant vis à vis de votre hiérarchie que de certains collègues de travail déstabilise profondément le service et crée un climat délétère qui obère le bon fonctionnement de la société. Pour être complets, dans la mesure où le conseil qui vous a épaulé dans la construction de ce courrier fait état peu ou prou de la définition de harcèlement moral nous en prenons bonne note et diligenterons, dés votre retour, toute mesure en vue de prévenir de tels agissements et de dissiper tout malentendu au visa des dispositions de l’article L 1152-4 du code du travail. Nous vous demandons également de ne plus faire état de manière insidieuse de tous vos problèmes inhérents à votre vie privée au cours de vos relations professionnelles avec vos collègues de travail ou avec votre hiérarchie. Nous sommes bien évidemment prêts à vous épauler dans cette démarche tout en vous assurant

de notre volonté de vous voir perdurer parmi les effectifs de notre société car vos aptitudes et vos connaissances sont en adéquation avec le poste que vous occupez, nous espérons en conclusion que ce courrier vous permettra de faire table rase du passé et de partir sur des bases nouvelles…'

Le 26 septembre 2008, il a répondu au courrier de la salariée en date du 23 août comme suit :

'S’agissant des tâches qui vous sont confiées :

Vous persistez à prétendre que nous aurions modifié de manière discriminatoire vos tâches en les confiant à d’autres, « vidant ainsi comme une peau de chagrin » votre poste de travail.

Nous sommes contraints de réfuter de telles assertions et de vous rappeler les origines de votre contrat de travail.

Vous avez été embauchée par la Société JE D SA le 1er avril 1998 en tant qu’hôtesse chargée de l’accueil.

Votre travail a toujours consisté à assurer les visites, le standard téléphonique et ultérieurement les nouvelles communications par Internet.

Il vous incombait également de tenir à jour les fichiers des négociants, de leurs clients et autres visiteurs et amateurs de vins.

A l’époque, F-Q D gérait les deux sociétés JE D SA, votre employeur et les Domaines F-Q D dont la structure administrative, y compris l’hôtesse, était commune à ces deux sociétés et regroupée en un seul bureau au Château DucruBeaucaillou.

Dans le prolongement d’une restructuration des sociétés du groupe familial D en janvier 2003, les deux sociétés se sont séparées et ont été gérées dès lors de façon indépendante.

Vous avez conservé votre poste dans la société JE D jusqu’à votre démission en raison de votre très mauvaise entente avec la nouvelle direction. Vous avez alors pris contact avec F-Q D pour proposer vos services. Les Domaines F-Q D vous ont embauché à partir du 17 novembre 2003, avec maintien de votre ancienneté et des éléments essentiels de votre contrat de travail.

Naturellement à votre arrivée, votre travail a été de facto allégé car le nombre de visites a été beaucoup plus faible puisque les Domaines F-Q D ne géraient plus que 75 hectares.

Il a été alors convenu, au titre de la bonne foi contractuelle, que pendant les périodes plus calmes en termes de visites, vous aideriez vos collègues dans leurs tâches administratives.

Vous n’avez alors émis aucune protestation à. ce titre.

A cette époque. Mme X Y. aujourd’hui partie à la retraite, avait comme fonction d-assister la comptabilité pour la saisie des factures clients et fournisseurs, d’assurer le suivi des stocks. d’établir les documents de douane.

En février 2007, dans la perspective de son départ à la retraite, au 1er juillet suivant, nous avons embauché Mme A K afin qu’elle reprenne les fonctions de Mme Y mais aussi qu’elle apporte une plus-value à son poste de travail notamment, par rapport à l’utilisation des outils informatiques.

C’est la raison pour laquelle certaines des tâches qui vous avaient été très ponctuellement confiées pour épauler Madame Y ont été menées par Mme A K

Ainsi, nous n’avons fait que modifier très légèrement vos conditions de travail en vous restituant l’intégralité de vos fonctions originaires.

Nous vous rappelons que l’employeur est parfaitement en droit au regard de son pouvoir de direction, de modifier les conditions de travail de ses salariés de manière à ce que les missions qui sont dévolues à chacun se fassent en cohérence et en bonne intelligence.

Aussi, nous vous rappelons que vous devez toujours vous occuper de l’accueil tant sur le plan des visites que des communications téléphoniques ou internet, tâches que vous avez toujours accomplies par le passé.

En revanche, il n’a jamais été question que vos collègues répondent prioritairement au téléphone ou sur intemet et il est tout-à-fait inexact de dire que les courriels étaient traités par chaque destinataire, puisque les mails arrivent sur le seul poste connecté en permanence, à savoir le vôtre.

Par ailleurs, nous sommes particulièrement choqués que vous considériez que répondre au téléphone ou via intemet puisse être qualifiés de travaux « subalternes ».

En effet, les exigences de notre profession nous obligent à maintenir un niveau de relations publiques de qualité dans lequel les communications téléphoniques et dorénavant les messages internet ont toutes leurs importances.

Vous avez une place de choix et stratégique dans notre structure qui ne saurait être dénigrée par quiconque.

Il est alors regrettable que vous ayez pu croire à un moment donné que vous pouviez vous dispenser de répondre aux appels extérieurs ou aux messages internet alors que cela correspond parfaitement aux missions principales inhérentes à votre contrat de travail qu’il soit ou min formalisé par écrit.

Soit dit en passant, vous n’avez jamais exigé la rédaction d’un contrat de travail mais vous n’êtes apparemment pas à une contradiction près.

Par ailleurs, nous n’avons pas la même analyse des responsabilités dont vous souhaitez vous affubler.

Nous vous rappelons que vous n’avez jamais eu la moindre autonomie dans tous les travaux administratifs que vous avez eu à exécuter.

Ceci étant. nous avons toujours souhaité, au regard de notre devoir d’adaptation de notre personnel. une certaine polyvalence et c’est la raison pour laquelle nous vous avons ponctuellement (exceptionnellement serait plus juste) confié quelques missions liées à la gestion des ventes de vins de primeur, ces travaux ayant été fait sous la supervision directe de la direction.

Au même titre, nous avons confié ce travail à A K de manière à lui montrer le déroulement d’une campagne primeur, ce travail étant au demeurant en parfaite cohérence avec la définition de son poste.

Par ailleurs, vous prétendez que vous occupez un poste ne correspondant plus au titre porté sur votre bulletin de paie, c’est-à-dire hôtesse d’accueil puisque vous avez bénéficié de plusieurs augmentations.

Encore une assertion fantaisiste de votre part !

Notre politique, sur ce point là, a toujours été d’assurer à l’ensemble des salariés une augmentation annuelle couvrant au moins l’inflation voire un peu plus si possible et ce quelque soit les récoltes et le déroulement des campagnes primeurs.

Vous en avez, dès lors, bénéficié avec la même régularité que les autres salariés.

En aucun cas, nous n’avons récompensé de prétendues responsabilités puisque le montant de votre salaire correspond largement aux tâches que vous devez accomplir.

Enfin, nous n’estimons pas que le procédé ait été cavalier que d’envoyer une lettre afin de demander des précisions quant à la durée de votre arrêt maladie en mai 2008.

En effet, cette lettre avait pour objet d’organiser votre absence à une période où la campagne primeurs pouvait être déclenchée à tout moment.

Nous voulions impérativement savoir s’il convenait de vous remplacer à titre provisoire pendant votre arrêt maladie ou si vous estimiez pouvoir revenir sur votre poste de travail rapidement

En aucun cas, le procédé n’a été vexatoire mais seulement lié à la bonne réorganisation du service.

Forts de toutes ces observations, nous vous confirmons que nous ne violons ni légèrement ni gravement nos obligations à votre égard.

Nous avons toujours appliqué de toute bonne foi votre contrat de travail et nous vous confirmons qu’à votre retour, que nous espérons prochain, vous retrouverez votre poste de travail.

En revanche, il relève de notre pouvoir de direction et de management d’organiser les différents services et de procéder à quelques réaménagements des conditions de travail pour que celles-ci soient propices à une efficacité dans le travail et à une bonne ambiance parmi les effectifs.

Nous espérons que vous reviendrez à de meilleures intentions et naturellement, nous n’attendons ni de démission de votre part et ni que cette éventuelle décision ne nous soit imputable.'

Il résulte de ces correspondances que l’employeur a répondu, point par point, avant la prise d’acte, aux demandes de la salariée.

La Cour estime que le fait que les communications téléphoniques puissent, à la suite d’un changement de matériel, être prises, aussi, à partir du poste de Mme M ne signifie pas pour autant qu’elle soit chargée à titre exclusif de cette tâche. En effet, il n’est pas démontré que la collègue de Mme M ait été déchargée de cette attribution qu’elle exerçait à titre principal.

S’agissant du retrait de la gestion de mise en place des ventes de vins en primeur, la salariée ne fournit aucun élément de nature à étayer cette allégation. Si l’employeur admet avoir également associé l’autre salariée du bureau nommée en 2007 à ces activités, rien ne permet d’établir que cela s’est traduit par une éviction de Mme M.

Par ailleurs, l’employeur reconnaît que l’ensemble des courriels destinés à la société transite par le poste de la salariée. Mais, eu égard à ses fonctions d’hôtesse d’accueil, cette attribution entre dans les qualifications de la salariée.

En tout état de cause, il incombe à l’employeur de fixer les conditions de travail des salariés. En outre, l’employeur s’est expliqué sur la réorganisation du service à la suite du départ en retraite de l’une des employées, ce qui n’est pas contesté par Mme M.

Quant aux déplacements à l’étranger qui auraient été supprimés, la salariée ne fournit pas d’éléments de preuve sur ce point d’autant qu’entre le mois de mai et le mois de septembre 2008, elle était très peu présente dans l’entreprise du fait de ses congés et arrêts maladie.

D’où il suit que ce grief n’est pas établi.

En quatrième lieu, la salariée soutient que la classification d’hôtesse d’accueil mentionnée à son contrat initial dans la précédente société J.E D ne correspondait plus aux fonctions réellement exercées ni à sa rémunération et que son contrat de travail initial n’avait fait l’objet d’aucun avenant afin de traduire dans un nouveau contrat l’évolution de ses fonctions.

Sur ce point, la salariée convient que l’employeur a repris son contrat de travail initial au sein de la société JE D.

Si Mme M percevait une rémunération de 2.310 euros brut qui est, effectivement, élevée par rapport à ses qualifications initiales, il ressort, cependant, du tableau des salaires versés au sein de l’entreprise que ce montant est identique à celui des rémunérations des autres salariés et en particulier des collègues directs de Mme M.

Il ne peut, donc, être déduit de ce seul argument qu’elle exerçait des fonctions justifiant une qualification supérieure.

De même, comme indiqué ci-dessus, la salariée ne démontre pas qu’elle n’assurait plus ses missions d’hôtesse d’accueil comprenant, notamment, l’accueil à la propriété, les visites et la préparation des dégustations y compris à l’étranger.

Le fait de se voir confier, ponctuellement, dans une optique de polyvalence, des tâches administratives ou commerciales comme, par exemple, la mise en place de la gestion des primeurs ne constitue pas, dans une équipe composée de trois personnes, une modification substantielle du contrat du travail.

La cour considère, en conséquence, que ce grief n’est fondé.

Le cinquième grief a trait à des faits de harcèlement moral.

Aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les

agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Et en application de l’article L. 1154-1 du même code, Lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Mme M s’est plainte dans les courriers adressés à l’employeur de faits de harcèlement : la lettre notifiant la prise d’acte reprend cette accusation de façon succincte. La salariée indique que la conjonction de tous les éléments ci-dessus évoqués avaient 0contribué à la déstabiliser moralement et affectait son état de santé physique et psychologique.

Il y a lieu d’examiner si les griefs allégués par la salariée et retenus par la cour laissent présumer l’existence d’un harcèlement.

A cet égard, l’attitude de l’employeur pendant l’arrêt maladie de Mme M constitue un agissement de nature à porter atteinte aux droits du salarié en matière de protection des salariés malades.

Tel n’est pas le cas, en revanche, des autres griefs dont la Cour a dit qu’ils n’étaient pas fondés.

A défaut d’établir d’autres faits et en l’absence d’agissements répétés, la Cour estime que le harcèlement n’est pas caractérisé.

Il apparaît, en définitive, qu’un seul grief est caractérisé. Dés lors qu’il s’agit d’un fait isolé et n’ayant pas eu d’incidence directe sur les conditions de travail de la salariée, la Cour considère qu’il n’est pas suffisamment grave pour justifier, à lui seul, une prise d’acte aux torts de l’employeur.

La prise d’acte s’analyse, donc, comme une démission.

Le jugement sera, en conséquence, réformé sur ce point et la salariée sera déboutée de ses demandes indemnitaires.

Sur les demandes de rappels de salaires et de congés payés

Il sera fait droit à la demande de Mme M au titre des congés payés et de la prime d’ancienneté au vu des éléments produits aux débats non sérieusement contestés par l’employeur.

Sur les demandes reconventionnelles de l’employeur

L’employeur n’ayant pas exigé l’exécution du préavis dont l’effectivité n’était pas acquise compte tenu de l’état de santé de la salariée, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande d’indemnité au titre du préavis non exécuté.

Les circonstances de la rupture ne justifient pas, non plus, l’octroi à l’employeur de dommages et intérêts pour brusque rupture.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Dit que la prise d’acte de la rupture de Mme C M s’analyse en démission.

Déboute Mme M de ses demandes indemnitaires liées à la rupture du contrat de travail.

Condamne la société Domaines F Q D à payer à Mme M les sommes suivantes :

—  639,66 euros à titre de reliquat sur congés payés dû au fractionnement,

—  213,22 euros à titre de reliquat d’indemnité d’ancienneté,

—  212,50 euros au titre de reliquat de prime de fin d’année

Déboute la société Domaines F Q D du surplus de ses demandes.

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne Mme M aux dépens.

Signé par Benoît FRIZON DE LAMOTTE, Président, et par Chantal TAMISIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. TAMISIER B. FRIZON DE LAMOTTE

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 18 novembre 2010, n° 09/06673