Cour d'appel de Bordeaux, 10 février 2015, n° 14/00587

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 10 févr. 2015, n° 14/00587
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 14/00587
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Périgueux, 16 décembre 2013, N° 12/01722

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

SIXIÈME CHAMBRE CIVILE


ARRÊT DU : 10 FEVRIER 2015

(Rédacteur : Franck LAFOSSAS, Président)

N° de rôle : 14/00587

P Z épouse A

c/

B A

SA CAISSE NATIONALE DE PREVOYANCE ASSURANCE

SA LA BANQUE POSTALE

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 décembre 2013 par le tribunal de grande instance de Périgueux (RG n° 12/01722) suivant déclarations d’appel des 30 janvier et 24 mars 2014

APPELANTE :

P Z épouse A

née le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

représentée par Me Caroline VERGNE, avocat au barreau de PERIGUEUX

INTIMÉS :

B A

de nationalité Française

XXX

représenté par Me Michel LABROUE de l’ASSOCIATION LABROUE, avocat au barreau de PERIGUEUX

SA CAISSE NATIONALE DE PREVOYANCE ASSURANCE

représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

XXX – XXX

représentée par Me Bernard LARUE, avocat au barreau de PERIGUEUX

SA LA BANQUE POSTALE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social

XXX – XXX

représentée par Me LACAVE substituant Me Albin TASTE du Cabinet LEXIA, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 912 du cpc, l’affaire a été débattue le 16 décembre 2014 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Franck LAFOSSAS, Président chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Président : Franck LAFOSSAS

Conseiller : Anne-Marie LEGRAS

Conseiller : F G

Greffier lors des débats : Audrey COLLIN

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 al. 2 du code de procédure civile.

*

Faits et procédure antérieure :

AC E est décédé le XXX à XXX et sans enfant, ne laissant pour seule famille que sa soeur D E épouse A et ses deux neveux B et X A, fils de sa soeur, le dernier nommé étant marié à Mme P Z.

AC E avait été placé sous le régime de la curatelle renforcée le 14 février 2007.

D’une part, il avait institué Mme P Z en qualité de légataire universel de sa succession aux termes d’un testament authentique du 28 juillet 2009. D’autre part, il avait souscrit des contrats d’assurance-vie au profit de B A.

Suivant acte d’huissier du 11 octobre 2012, Mme Z a fait assigner la société CNP Assurances devant le tribunal de grande instance de Périgueux sur le fondement de l’article 464 du code civil afin de voir prononcer la nullité des contrats 'Resolys obsèques financement’ et 'GMO poste avenir’ passés auprès de la CNP Assurances le 14 juin 2006 par AC E au bénéfice de M. B A et ordonner la restitution des sommes versées en vertu des dits contrats à la succession de ce dernier.

La SA Banque Postale est intervenue volontairement à la cause et la SA CNP Assurances a appelé en la cause M. B A.

Par jugement du 17 décembre 2013, le tribunal de grande instance de Périgueux a :

.déclaré la Banque postale recevable en son intervention volontaire,

.déclaré Mme Z recevable en ses demandes tant en ce qui concerne les parties à la cause que sa qualité à agir et l’absence de prescription de l’action fondée sur l’article 464 du code civil,

.débouté Mme Z de toutes ses demandes,

.donné acte à M. B A de ce qu’il accepte la clause le désignant en qualité de bénéficiaire des contrats d’assurance vie souscrits par AC E et qu’il sollicite le versement des capitaux disponibles à son profit,

.débouté M. B A de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive,

.condamné Mme Z à payer à M. B A la somme de 1.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile et à la Banque postale ainsi qu’à la CNP Assurances la somme de 1.000 € à chacune en application de ce même article.

Procédure d’appel :

Par déclaration du 30 janvier 2014, Mme Z, se présentant comme épouse A, a relevé appel non limité de la décision en dirigeant son recours contre M. B A et la SA Banque Postale. Un dossier a été ouvert sous n° 14/00587.

Par déclaration du 24 mars 2014, Mme Z, ne signalant pas de mariage avec M. X A, a relevé à nouveau appel non limité de cette même décision en dirigeant cette fois son recours contre M. B A et la SA CNP Assurances. Un dossier a été ouvert sous le n° 14/01717.

Les deux affaires ont été jointes sous le premier numéro.

Par ses conclusions du 10 avril 2014, Mme Z, ne signalant pas de mariage avec M. X A, demande à la cour de :

.infirmer le jugement déféré,

.déclarer recevable et bien fondée l’action de Mme Z,

.dire et juger que les contrats litigieux passés par AC E auprès de CNP Assurances le 14 juin 2006 doivent être annulés,

.ordonner la restitution des sommes versées en vertu des dits contrats entre les mains du notaire chargé de la succession,

.débouter les défendeurs de l’intégralité de leurs demandes fins et conclusions,

.condamner la SA CNP Assurances, M. B A, au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

.condamner les défendeurs aux entiers dépens,

.ordonner l’exécution provisoire.

A cet effet, elle fait valoir notamment que :

.AC E était illettré et incapable de mesurer la portée de ses engagements,

.cet état d’incapacité était notoire et antérieur à l’ouverture de la mesure de protection,

.le préjudice visé par le deuxième alinéa de l’article 464 du code civil est caractérisé par le fait que les actes litigieux bafouent la volonté du défunt, lequel entendait gratifier Mme Z de l’intégralité de ses économies en l’instituant légataire universelle,

.par ailleurs, en application de l’article L132-4-1 du code des assurances, le contrat d’assurance sur la vie peut être annulé dans les mêmes conditions mais sur la seule preuve que l’incapacité était notoire ou connue du cocontractant sans qu’il soit nécessaire de caractériser un préjudice.

Par ses conclusions du 19 mai 2014, la SA CNP Assurances demande à la cour de :

.donner acte à la SA CNP Assurances qu’elle s’en remet à justice sur les mérites de la demande en nullité des contrats d’assurance vie,

.débouter Mme Z de sa demande au titre des frais irrépétibles,

.condamner la partie qui succombe à payer à la SA CNP Assurances la somme de 1.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction en application de l’article 699 du code de procédure civile.

A cet effet, elle fait valoir notamment que :

.la preuve de l’insanité d’esprit au moment de l’acte n’est pas rapportée,

.l’insanité d’esprit est même douteuse au regard du fait que l’état d’AC E n’a pas empêché ce dernier d’accomplir son testament le 28 juillet 2009, soit trois années après la souscription des actes litigieux,

.en tout état de cause Mme Z s’abstient de démontrer le caractère anormal de l’acte et le dommage en résultant.

Par ses conclusions du 26 mai 2014, M. B A demande à la cour de :

.dire tant irrecevable que mal fondée Mme Z dans son action,

.la débouter en conséquence et dire que la mise en cause formulée par la SA CNP à l’encontre du concluant est sans objet,

.donner acte au concluant de ce qu’il accepte la teneur de la clause le désignant en qualité de bénéficiaire des contrats d’assurance vie souscrits par AC E et qu’il sollicite le versement des capitaux disponibles à son profit,

.porter à la somme de 3.000 € l’indemnité de l’article 700 à la charge de Mme Z,

.la condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel.

A cet effet, il fait valoir notamment que :

.AC E avait une soeur et deux neveux visés en qualité de bénéficiaires d’une convention de transmission, Mme Z n’étant que la concubine de l’un de ces neveux,

.les assurances vie paraissent tout à fait raisonnables puisqu’elles tendent à gratifier les membres de la famille du souscripteur,

.les attestations versées au débat par Mme Z ne rendent compte que du dernier état physique et psychique d’AC E et non de son discernement au moment de l’accomplissement des actes litigieux,

.les discussions relatives au discernement d’AC E de son vivant devraient conduire à remettre en cause la validité du testament accompli postérieurement à l’ouverture de la mesure de protection.

Par ses conclusions du 6 juin 2014, la SA Banque postale demande à la cour de :

.à titre principal,

.constater que Mme Z ne peut se prévaloir des dispositions de l’article 464 du code civil nouveau,

.dire et juger que les demandes de Mme Z sont irrecevables et juridiquement mal fondées,

.débouter Mme Z de toutes ses demandes, fins et prétentions,

.à titre subsidiaire,

.dire et juger que l’action de Mme Z est prescrite,

.débouter Mme Z de toutes ses demandes, fins et prétentions,

.à titre infiniment subsidiaire,

.dire et juger Mme Z mal fondée en ses demandes en raison de l’absence de démonstration du préjudice subi par AC E et l’en débouter,

.confirmer le jugement entrepris et débouter Mme Z de toutes ses demandes, fins et prétentions.

A cet effet, elle fait valoir que :

.l’article 464 du code civil n’a vocation à s’appliquer qu’aux actes juridiques accomplis postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007, soit le 1er janvier 2009, or, Mme Z n’a pas qualité pour agir en application de l’article 510-1 ancien,

.même s’il est jugé que l’article 464 est applicable en l’espèce, l’action demeure prescrite en application du dernier alinéa de cet article,

.sur le fond, Mme Z ne caractérise pas le préjudice subi par AC E, ni même son inaptitude à consentir aux différents placements.

Sur quoi, la cour :

1) sur la recevabilité de l’action :

Mme P Z, qui se présente parfois comme épouse A et dont M. B A affirme sans démenti qu’elle est la concubine de son frère X, et dont il n’est pas discuté qu’elle bénéficie d’un testament du défunt la désignant comme sa légataire universelle, est directement, personnellement, et légalement intéressée à voir la succession devant lui revenir être la plus importante possible.

Or, par l’effet des dispositions du code des assurances, le capital ou la rente stipulés payables lors du décès de l’assuré à un bénéficiaire déterminé ou à ses héritiers ne font pas partie de la succession de l’assuré, et le bénéficiaire, quelles que soient la forme et la date de sa désignation, est réputé y avoir eu seul droit à partir du jour du contrat, même si son acceptation est postérieure à la mort de l’assuré. Par ailleurs, le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant.

Elle est donc directement intéressée à voir annuler ces contrats d’assurance-vie qui profitent à un autre qu’elle-même.

De plus, comme les règles sus citées ne s’appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n’aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés, elle a intérêt direct, personnel et légal à faire juger leur caractère manifestement exagéré.

Son action est donc recevable, tant en ce qu’elle cherche à démontrer un vice dans la conclusion des contrats d’assurance-vie, qu’en ce qu’elle cherche à prouver que les sommes versées présentaient un caractère manifestement exagéré.

Et la décision déférée, qui a déclaré son action recevable, sera confirmée de ce chef.

2) sur la capacité de conclure les contrats :

Il appartient à l’appelante, qui soutient qu’AC E était illettré, prodigue, incapable de remplir un formulaire, et devait nécessairement être accompagné dans les actes de la vie courante, de le prouver et de prouver que ces handicaps ont altéré son discernement au point de nuire à la validité des contrats d’assurance-vie en cause.

D’abord, la cour ne découvre aucune anomalie manifeste dans le comportement d’un homme qui va mourir sans descendance mais avec deux neveux et qui favorise les deux, l’un par des contrats d’assurance-vie à son nom, et l’autre par un testament en faveur de son épouse, ou concubine selon les versions. La conclusion de ces contrats d’assurance-vie en faveur de l’un est, au contraire, cohérente et rationnelle puisqu’elle balance l’avantage consenti par le testament en faveur d’un proche de l’autre.

Ensuite, l’appelante cite plusieurs témoignages :

— en pièce n°4, Mme Y I, sur un morceau de papier non accompagné de documents d’identité ni de prise de connaissance de la gravité d’un témoignage judiciaire, 'certifie qu’il était illettré, qu’il confondait les francs et les euros’ mais elle n’indique pas comment elle le savait et ne relate aucun fait auquel elle aurait assisté, de nature à lui avoir permis de le déduire.

— en pièce n° 5, Mme L M, qui a joint un extrait de l’acte de mariage de M. H I et de Mme Y Mortessagne dont la cour ne comprend pas l’intérêt aux débats, mais qui n’a pas déclaré avoir pris connaissance de la gravité d’un témoignage judiciaire, 'certifie qu’il était illettré'. Mais elle n’indique pas comment elle le savait et ne relate aucun fait auquel elle aurait personnellement assisté, de nature à lui avoir permis de le déduire.

— en pièce n°6, Mme D A, soeur du défunt, témoigne en faveur de sa belle-fille et contre l’intérêt de son fils en attestant que son frère était illettré et confondait les euros et les francs, ayant besoin d’une aide régulière, ménagère ou infirmière. Elle non plus n’a pas indiqué avoir pris connaissance de la gravité d’un témoignage en justice.

— en pièce n°7, l’auxiliaire de vie du défunt, à son service depuis le 1er janvier 2007, témoigne de ce qu’il était illettré et ne connaissait pas la valeur de l’argent, ayant du mal à s’exprimer, confondant les noms des personnes de son entourage, souffrant de troubles mentaux et comportementaux. Elle non plus n’a pas indiqué avoir pris connaissance de la gravité d’un témoignage en justice.

— en pièce n° 8, M. AA AB 'certifie que ce dernier était complètement illettré'. Mais il n’a pas déclaré avoir pris connaissance de la gravité d’un témoignage judiciaire et n’indique pas comment il le savait et ne relate aucun fait auquel il aurait personnellement assisté, de nature à lui avoir permis de le déduire.

L’appelante produit également une pièce n° 9, surprenante attestation médicale signée de façon illisible par deux ronds, rédigée au nom du docteur AE AF, témoignant de son illettrisme en rapportant au temps du conditionnel la rumeur selon laquelle 'il n’aurait jamais eu son certificat d’étude car il n’aurait jamais réussi à apprendre à lire'. Cette rumeur rapportée se double d’une erreur de fait 'il a été placé sous tutelle en 2006 lorsque sa soeur n’a plus pu s’occuper de lui', erreur de fait facilement identifiable puisque le de cujus n’a jamais été placé sous tutelle mais sous curatelle et que c’était en 2007. La force probante d’une telle attestation est donc particulièrement faible, ce qui nuit aux autres propos contenus, selon lesquels le de cujus 'a toujours présenté une altération de ses facultés mentales'. Par ailleurs, aucune pièce d’identité n’est fournie et le témoin ne déclare pas avoir pris connaissance de la gravité d’un témoignage judiciaire.

La cour n’est en conséquence pas convaincue par cet ensemble d’attestations, ignorant les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile, notamment faute de respect des formes garantes de leur sincérité et de l’identité de leur auteur, attestations affirmant généralement un état physique et mental mais ne permettant pas à la cour de savoir comment l’auteur en avait connaissance et ne citant pas de fait auquel cet auteur avait assisté. Cette dernière remarque ne vaut pas pour les attestations de la soeur du défunt et du médecin, dont la cour admet que la parenté et les soins apportés en sont cause. Quant à l’attestation de l’auxiliaire de vie, elle reconnaît avoir connu le de cujus après la période considérée, 1er janvier 2007 alors que les opérations relatives aux contrats datent de juin et juillet précédent.

Enfin, la chronologie démontre que le de cujus a effectué les placements d’assurance-vie en faveur du premier Z plusieurs mois (juin et juillet 2006) avant d’être placé sous curatelle renforcée le 14 février 2007, et que c’est plus de deux ans après cette mesure de protection qu’il effectuera un testament en faveur d’un proche du second Z (juillet 2009). Or, l’appelante ne critique pas les facultés de discernement du défunt lors de la rédaction de son testament. La cour ne découvre pas pourquoi son libre choix, et plus généralement ses capacités de discernement, auraient été de meilleure qualité alors qu’il était plus âgé et qu’une mesure de protection avait été, entre-temps, jugée nécessaire.

L’appelante ne prouve donc pas l’altération des facultés mentales d’AC E lors de la conclusion des contrats d’assurance-vie en faveur du premier Z.

Par ailleurs, l’illettrisme n’est pas une maladie mentale et ne peut signaler à lui-seul une telle pathologie. Et une personne illettrée peut se faire aider dans les actes de la vie courante nécessitant un écrit, écrivain public, particulier bénévole, sans qu’il puisse en être tiré la suspicion d’une fraude.

Lorsque, le 18 juillet 2006, AC E donne l’instruction écrite à son banquier de modifier la clause bénéficiaire de ses contrats d’assurance-vie, alors qu’il ne fait l’objet d’aucune mesure de protection, seule compte la question de savoir non pas s’il a rédigé le courrier, dont il n’est pas contesté qu’il n’est pas le rédacteur, mais s’il l’a dicté, s’il correspond à l’expression de sa libre volonté, et s’il l’a signé en manifestation ostensible de son accord sur son contenu.

Or, sa signature n’est pas contestée et ce courrier du 18 juillet 2006 fait suite à celui que lui avait envoyé ce même banquier le 14 juin 2006, sollicitant ses instructions. Dans ce courrier, ce banquier envoyait un projet de réponse qu’il suffisait de signer. Au lieu d’opter pour cette facilité, le de cujus a fait rédiger la lettre sus citée et l’a signée.

La cour y trouve la preuve d’une expression de volonté non équivoque et qui doit être respectée.

3) sur le caractère manifestement exagéré :

L’appelante affirme que les contrats d’assurance-vie en question étaient contraires à l’intérêt d’AC E car les placements 'dépassent largement les facultés pécuniaires du défunt’ alors qu’il 'aurait bien eu besoin de cet argent pour son confort personnel', qu’il 'ne disposait plus d’aucune économie pour faire face à ses dépenses’ et que 'les conventions souscrites n’étaient absolument pas adaptées à la situation', notamment parce que 'le capital versé dépassait largement les facultés du souscripteur'. Il doit en être déduit qu’elle reproche en l’espèce le caractère manifestement exagéré des primes eu égard à ses facultés.

La charge de la preuve pèse sur l’appelante, demanderesse. Or, elle reconnaît dans ses écritures qu’à côté de ces placements mobiliers, AC E disposait d’un capital immobilier puisqu’en 2008, un an après sa mise sous curatelle, plusieurs terrains lui appartenant ont été vendus pour 14.000 €, terrains sur lesquels elle disposait d’un droit de fermage et donc d’un droit de priorité d’achat. Cela établit donc que, lors de la conclusions des contrats litigieux en faveur du premier Z, AC E savait que sa fortune personnelle comportait des terres en fermage au profit de l’épouse de son second Z pour un capital d’un montant bien supérieur aux primes d’assurance-vie de 9.210 € et 2.500 €.

Cette vente de terres ne le dépossédait pas de tous biens immobiliers puisque la déclaration de succession fait état de parcelles diverses pour un total évalué à 15.000 €. Il lui restait également diverses disponibilités bancaires puisque le même document les référencie pour 333,16 € en compte épargne logement, 420,81 € en compte sur livret, 1.968,08 € en compte CCP, le tout dans un actif brut de 17.922,05 €. Le montant du solde du compte CCP dément par ailleurs l’affirmation de l’appelante sur l’absence de disponibilités.

Cette analyse permet de juger que les primes, soient 9.210 € et 2.500 €, n’ont pas présenté un caractère manifestement exagéré. Au contraire, elles étaient proportionnées à la situation de fortune et aux disponibilités.

La décision déférée sera en conséquence confirmée.

4) sur les frais et dépens :

Mme P Z perd son appel et en supportera les dépens, outre ceux de première instance.

Cet appel a généré pour M. B A des frais injustes non compris aux dépens qu’une somme de 1.800 € viendra indemniser en sus de celle de 1.500 € déjà allouée en première instance.

Il a également généré des frais injustes non compris aux dépens pour la SA Caisse nationale de prévoyance et pour la SA Banque postale, qu’une somme de 1.500 € viendra indemniser pour chacune, en sus de la somme allouée en première instance.

Par ces motifs :

Confirme la décision déférée,

Condamne Mme P Z à payer à M. B A la somme de 1.800 € (mille huit cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile, pour les frais d’appel,

La condamne à payer à la SA Caisse nationale de prévoyance et à la SA Banque postale, chacune, la somme de 1.500 € (mille cinq cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile, pour les frais d’appel,

La condamne aux entiers dépens.

L’arrêt a été signé par le président Franck Lafossas et par Audrey Collin, greffier auquel il a remis la minute signée de la décision.

le greffier le président

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Cour d'appel de Bordeaux, 10 février 2015, n° 14/00587