Cour d'appel de Caen, 2e chambre civile, 28 avril 2022, n° 20/00254

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Caen, 2e ch. civ., 28 avr. 2022, n° 20/00254
Juridiction : Cour d'appel de Caen
Numéro(s) : 20/00254
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de commerce d'Alençon, 20 janvier 2020, N° 19/001465
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 29 septembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE : N° RG 20/00254 -

N° Portalis DBVC-V-B7E-GPQZ

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : DECISION du Tribunal de Commerce d’ALENCON en date du 21 Janvier 2020

RG n° 19/001465

COUR D’APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 28 AVRIL 2022

APPELANTE :

SAS GEODIS D&E LOIRET venant aux droits de la SAS CALBERSON LOIRET

N° SIRET : 780 060 711

[Adresse 1]

[Adresse 1]

prise en la personne de son représentant légal

représentée par Me Franck THILL, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me François VACCARO, avocat au barreau de TOURS

INTIMEE :

SARL MEGABLEU

N° SIRET : 398 393 520

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

prise en la personne de son représentant légal

représentée par Me Gaël BALAVOINE, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me Emmanuelle DE BARNIER, avocat au barreau de PARIS

DEBATS : A l’audience publique du 14 février 2022, sans opposition du ou des avocats, Madame EMILY, Président de Chambre, a entendu seule les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme LE GALL, greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme EMILY, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

M. GANCE, Conseiller,

ARRÊT prononcé publiquement le 28 avril 2022 à 14h00 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier

* * *

Suivant acte sous seing privé du 12 octobre 2015, la SARL Megableu a signé une charte de collaboration avec la SAS Calberson Loiret, exerçant sous l’enseigne Geodis une activité de transporteur spécialisé agréé par la société Amazon.

Par lettre recommandée datée du 6 février 2019, la SAS Calberson Loiret a mis la SARL Megableu en demeure de lui régler la somme de 3.708,24 euros en principal au titre des factures impayées outre les indemnités forfaitaires et les pénalités de retard.

Par ordonnance du 26 mars 2019 signifiée le 16 avril 2019, le président du tribunal de commerce d’Alençon a enjoint à la SARL Megableu de payer à la SAS Calberson Loiret la somme de 3.708,24 euros au titre des factures impayées, les intérêts au taux légal, la somme de 90 euros au titre des frais irrépétibles et la somme de 35,21 euros au titre des dépens.

Par lettre du 14 mai 2019, la SARL Megableu a formé opposition à l’ordonnance portant injonction de payer.

Par jugement du 21 janvier 2020, le tribunal de commerce d’Alençon a :

— déclaré l’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer recevable ;

— mis à néant l’ordonnance ;

— condamné la SARL Megableu à payer à la SAS Calberson Loiret la somme de 3.708,24 euros au titre des factures impayées, la somme de 240 euros au titre des indemnités forfaitaires de recouvrement et la somme de 71,65 euros au titre des pénalités de retard ;

— condamné la SAS Calberson Loiret à payer à la SARL Megableu la somme de 4.973,23 euros au titre du remboursement des pénalités de retard infligées par la société Amazon à la SARL Megableu ;

— condamné par compensation la SAS Calberson Loiret à payer à la SARL Megableu la somme de 953,34 euros augmentée des intérêts de droit à compter du jugement ;

— condamné la SAS Calberson Loiret à payer à la SARL Megableu la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

— débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

— condamné la SAS Calberson Loiret aux dépens ;

— dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— ordonné l’exécution provisoire de la décision.

Par déclaration en date du 30 janvier 2020, la SAS Calberson Loiret a relevé appel de cette décision.

Par dernières conclusions reçues le 21 septembre 2020, la SAS Calberson Loiret a demandé à la cour de :

— confirmer le jugement rendu en ce qu’il a condamné la société Megableu à lui payer la somme de 3.708,24 euros TTC au titre des factures impayées, la somme de 240 euros au titre des indemnités forfaitaires de recouvrement et la somme de 71,65 euros au titre des pénalités de retard ;

— infirmer le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau

— dire et juger la société Megableu irrecevable et en tout état de cause infondée dans son opposition ;

— débouter la société Megableu de ses demandes ;

— condamner la société Megableu à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la société Megableu aux dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de la SELARL Thill Langeard.

Par dernières conclusions reçues le 7 mai 2021, la SARL Megableu a demandé à la cour de :

— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a déclaré recevable l’opposition à l’ordonnance portant injonction de payer, mis à néant l’ordonnance, condamné la société Megableu à payer à la société Calberson Loiret la somme de 3.708,24 euros au titre des factures impayées et condamné la société Calberson Loiret au paiement de la somme de 4.973,23 euros au titre du remboursement des pénalités de retard et aux dépens ;

— le réformer pour le surplus ;

Statuant à nouveau dans cette limite

— débouter la société Calberson Loiret de ses demandes ;

— condamner la société Calberson Loiret à lui payer les intérêts de droit sur la somme de 4.973,23 euros à compter du 5 mars 2018, date de la mise en demeure ;

— condamner la société Calberson Loiret à lui payer la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de l’interruption des relations contractuelles ;

— condamner la société Calberson Loiret à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société Calberson Loiret aux dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de la SELARL Balavoine et David.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 mai 2021.

Par un arrêt en date du 14 octobre 2021, la cour d’appel de Caen a :

— confirmé le jugement rendu le 21 janvier 2020 par le tribunal de commerce d’Alençon dans ses dispositions ayant déclaré recevable l’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer,

mis à néant cette ordonnance, condamné la SARL Megableu à payer à la SAS Calberson Loiret la somme de 3.708,24 euros TTC au titre des factures impayées, la somme de 240 euros au titre des indemnités forfaitaires de recouvrement et la somme de 71,65 euros au titre des pénalités de retard et dans ses dispositions ayant rejeté les demandes formées au titre des frais irrépétibles ;

— infirmé le jugement dans ses dispositions ayant condamné la SAS Calberson Loiret à payer à la SARL Megableu la somme de 4.973,23 euros au titre du remboursement des pénalités de retard infligées par la société Amazon à la SARL Megableu, ordonné la compensation entre les sommes dues et condamné la SAS Calberson Loiret à payer à la SARL Megableu la somme de 953,34 euros augmentée des intérêts de droit à compter du jugement ;

Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées et y ajoutant,

— déclaré irrecevable comme étant prescrite la demande de la SARL Megableu tendant au remboursement de la somme de 4.973,23 euros au titre des pénalités de retard infligées par la société Amazon ;

— ordonné la réouverture des débats et le renvoi de l’affaire à l’audience du lundi 14 février 2022 à 14h15 et invité la SARL Megableu à préciser le fondement juridique de sa demande de dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales et les parties à faire valoir leurs observations sur le défaut de pouvoir juridictionnel du tribunal de commerce de Caen et de la cour d’appel à sa suite pour statuer sur la demande formée

en application des dispositions de l’article L. 442-1 II du code de commerce et sur l’irrecevabilité de la demande formée à ce titre ;

— Sursis à statuer sur les frais et dépens.

Dans ses dernières conclusions du 16 décembre 2021, prises après la réouverture des débats, la société Geodis D&E Loiret, venant aux lieux et place de la société Calberson Loiret, demande à la cour d’appel de :

— déclarer irrecevable la demande de dommages et intérêts de la société Megableu au titre d’une prétendue rupture brutale des relations commerciales ;

En conséquence,

— débouter la Société Megableu de sa demande de dommages et intérêts ;

— condamner la Société Megableu à payer à la Société Geodis D&E Loiret venant aux lieu et place de la société Calberson Loiret la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

— condamner la Société Megableu aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction est requise au profit de la Selarl THILL-LANGEARD & Associés, avocat aux offres de droit.

Dans ses dernières conclusions du 11 février 2022, la société Megableu demande à la cour d’appel de :

— déclarer la Société Geodis D&E Loiret venant aux lieux et place de la société Calberson Loiret mal fondée en son appel,

— recevoir la société Megableu en son appel incident et l’y déclarer bien fondée,

— en conséquence, confirmer le jugement rendu le 21 janvier 2020 par le tribunal de commerce d’Alençon en ce qu’il a :

— condamné la société Calberson Loiret aux entiers dépens de l’instance,

— réformer le jugement entrepris pour le surplus, à savoir en ce qu’il a :

— condamné la société Calberson Loirte à payer à la société Megableu la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi,

— débouté la société Megableu du surplus de ses demandes, fins et prétentions,

— dit qu’il n’y a pas lieu à faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant,

— débouter la Société Geodis D&E Loiret venant aux lieux et place de la société Calberson Loiret du surplus de ses demandes ;

— condamner la Société Geodis D&E Loiret à payer à la Société Megableu une somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de l’interruption abusive des relations contractuelles par la Société Calberson Loiret ;

— à titre subsidiaire, faisant application des articles L.442-1 II. et R.422-3 du code de commerce, se déclarer incompétente au profite de la cour d’appel de Paris et renvoyer l’instance à la Cour d’Appel de Paris ;

En tout état de cause,

— condamner la Société Geodis D&E Loiret venant aux lieux et place de la société Calberson Loiret à régler à la Société Megableu la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la Société Geodis D&E Loiret venant aux lieux et place de la société Calberson Loiret en tous les dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de la SELARL BALAVOINE et DAVID Avocats.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.

SUR CE, LA COUR

La société Geodis D&E Loiret fait valoir que la demande indemnitaire présentée par la société Megableu et tendant à la réparation d’un préjudice qui résulterait d’une rupture brutale des relations contractuelles relève des dispositions de l’article L442-1 II du code de commerce et donc de la compétence exclusive de la cour d’appel de Paris, la cour d’appel de Caen devant dès lors relever d’office la fin de non recevoir tirée de l’inobservation de la règle de compétence exclusive instaurée au bénéfice de la cour d’appel de Paris.

La société Megableu soutient que son action est fondée sur la rupture abusive du contrat et non sur la rupture brutale des relations commerciales établies par un flux d’affaires récurrent régi par l’article L 442-1 II du code du commerce.

La société Megableu indique fonder son action sur les articles 1231 et 1231-7 du code civil comme indiqué dans ses conclusions du 7 mai 2021, ces articles étant 'complétés par les articles 1101 et suivants du code civil'.

Les actes de commerce accomplis par deux sociétés commerciales sont régis par les dispositions du code de commerce et non par les dispositions du code civil sur les contrats, la loi spéciale dérogeant à la loi générale.

L’article L442-6 I 5° devenu l’article L442-1 II du code de commerce édicte que :

« Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, en l’absence d’un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels. »

Cet article qui fait partie du livre IV du code du commerce sur la liberté des prix et de la concurrence, titre IV, chapitre II, section I (des pratiques restrictives de concurrence), s’applique en l’espèce puisque la société Megableu faisait état dans ses conclusions du 7 mai 2021 d’une 'interruption brutale des relations contractuelles avec la société Geodis Calberson’ intervenue en juillet 2018. Les deux sociétés qui étaient en relation d’affaires depuis octobre 2015 étaient bien dans une relation commerciale établie.

L’article L442-6 III devenu l’article L442-4 III du code du commerce dispose que les litiges relatifs notamment à l’application de l’article L 442-1 sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret.

L’annexe 4-2-1 de l’article D 442-3 du code de commerce attribue en l’espèce compétence exclusive au tribunal de commerce de Rennes pour connaître de la demande.

L’article D 442-3 alinéa 2 du code de commerce dispose en outre que la cour d’appel compétente pour connaître des décisions rendues par les juridictions spécialisées est celle de Paris.

Dès lors, le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a condamné la société Calberson Loiret à payer à la société Megableu la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts.

La demande de dommages et intérêts formée par la société Megableu doit être jugée irrecevable. (Com., 29 mars 2017, pourvoi n° 15-17.659)

La société Megableu, qui est condamnée à paiement, supportera ses frais irrépétibles.

Il serait inéquitable que la société Geodis D§E Loiret supporte ses frais irrépétibles.

La société Megableu sera condamnée à lui payer la somme de 2000 euros à ce titre en cause d’appel.

Le jugement déféré sera infirmé sur la condamnation aux dépens.

La société Megableu sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel avec distraction au profit de la Selarl THILL-LANGEARD et Associés par application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe ;

Vu l’arrêt de la présente cour du 14 octobre 2021 ordonnant la réouverture des débats ;

INFIRME le jugement déféré en ce qu’il a condamné la société Calberson Loiret, aux droits de laquelle vient la société Geodis D&E Loiret, à payer à la société Megableu la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts et sur la condamnation aux dépens ;

Statuant à nouveau sur ces points ;

JUGE irrecevable la demande de dommages et intérêts formée par la société Megableu ;

CONDAMNE la société Megableu aux dépens de première instance avec distraction au profit de la Selarl THILL-LANGEARD et Associés ;

Ajoutant au jugement ;

CONDAMNE la société Megableu à payer à la société Geodis D§E Loiret, qui vient aux droits de la société Calberson Loiret, la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

CONDAMNE la société Megableu aux dépens d’appel avec distraction au profit de la Selarl THILL-LANGEARD et Associés ;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

N. LE GALLF. EMILY

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Cour d'appel de Caen, 2e chambre civile, 28 avril 2022, n° 20/00254