Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 8 décembre 2016, n° 15/01872

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, ch. 1 sect. 2, 8 déc. 2016, n° 15/01872
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 15/01872
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Lille, 11 février 2015, N° 14/00801
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Lille, 12 février 2015, 2014/00801
  • (en réquisition) Tribunal de grande instance de Montauban, 11 juillet 2017, 2017/00385 (en réquisition)
  • Cour d'appel de Toulouse, 15 janvier 2018, 2017/04072
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : LIDERFARM
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 3128059 ; 3995764
Classification internationale des marques : CL07
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Référence INPI : M20160597
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE DOUAI ARRÊT DU 08/12/2016

CHAMBRE 1 SECTION 2 N° RG : 15/01872

Jugement (N° 14/00801) rendu le 12 février 2015 par le tribunal de grande instance de Lille

APPELANTE SA Comptoir d’Outillage de Matériel Agricole et Industriel exerçant sous l’enseigne COMAI, prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social ZI du Barrouet 82100 Castelsarrasin représentée par Me Marie-Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, constituée aux lieu et place de Me Marie-Hélène Laurent, membre de la SELARL Adekwa, avocat au barreau de Douai assistée de Me Alice Denis, avocat au barreau de Montauban

INTIMÉE SARL Établissements Lemaire, prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social […] 62500 Saint Martin au Laert représentée et assistée par Me François R, avocat au barreau de Saint-Omer

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ Etienne Bech, président de chambre Christian Paul-Loubière, président de chambre Isabelle Roques, conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine Popek

DÉBATS à l’audience publique du 25 octobre 2016 Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 08 décembre 2016 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par M. Etienne Bech, président, et Claudine Popek, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 16 septembre 2016

FAITS ET PROCÉDURE La SARL Établissements Lemaire et la SA Comptoir d’Outillage de Matériel Agricole et Industriel (société COMAI) se sont associées en 2003 pour créer, à parts égales, une société de groupement d’achats indépendants, baptisée CCL. Le gérant de la société CCL en était M. Eric L, gérant de la société Établissements Lemaire.

La société Établissements Lemaire était propriétaire de la marque verbale ''Liderfarm'' qu’elle avait déposée à l’INPI le 23 octobre 2001.

Les statuts de la société CCL précisaient qu’elle n’aurait aucun droit sur ladite marque, hormis un droit de préemption en cas de cession de la marque par la société Établissements Lemaire.

Par ailleurs, la société Établissements Lemaire autorisait la société COMAI à 'utiliser la marque « Liderfarm », dans le cadre de la machine agricole et de notre société CCL, jusqu’au renouvellement de la marque le 23 octobre 2011' ainsi qu’il résulte d’une convention datée du 13 juin 2003 signée par M. Eric L, en sa qualité de gérant de la société Établissements Lemaire.

Pour sa part, la société CCL a déposé à son nom, le 28 janvier 2005, la marque semi- figurative 'Profarm'.

Le 30 juin 2011, a été votée la liquidation amiable de la société CCL.

M. Eric L a été désigné liquidateur ; la fin des opérations de liquidation est intervenue le 31 octobre 2011.

Cependant, postérieurement à cette liquidation, la société Établissements Lemaire a fait inscrire à l’INPI, le 14 janvier 2013, un acte de cession de la marque « Profarm » à son bénéfice.

Puis, par lettre recommandée en date du 6 février 2013, la société Établissements Lemaire a demandé à la société COMAI de cesser d’utiliser les marques : ''Liderfarm'' et ''Profarm''.

Le 5 avril 2013, la société COMAI a déposé à l’INPI les marques semi- figuratives ''Liderfarm'' et « Profarm ».

Par acte d’huissier en date du 16 décembre 2013, la société Établissements Lemaire a fait assigner la société COMAI devant le tribunal de grande instance de Lille en contrefaçon des marques ''Liderfarm'' et ''Profarm''.

Par jugement du 12 février 2015, ce tribunal a :

— constaté que la société Établissements Lemaire ne justifiait d’aucun droit sur la marque ''Profarm'' et d’aucune qualité à agir en contrefaçon de ladite marque, et l’a donc déclarée irrecevable à agir,
- dit que la marque n° 133995764 enregistrée par la société COMAI constituait, dans les classes 4, 7, et 31, à l’exclusion de la classe 25, une contrefaçon de la marque ''Liderfarm'' déposée sous le n° 013128059 par les Établissements Lemaire ;

- ordonné le retrait de la marque contrefaisante dans les classes précitées du Registre National des Marques,
- condamné la société COMAI à cesser tout acte de contrefaçon, sous astreinte de 350 euros par infraction constatée, un mois après la signification du jugement,
- condamné la société COMAI à payer à la société Établissements Lemaire la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice, du fait des actes de contrefaçon commis à son encontre,
- ordonné la publication du dispositif du jugement dans trois publications au choix de la société Établissements Lemaire ainsi que sur le site de la société COMAI et ce aux frais avancés de la société COMAI,
- débouté la société Établissements Lemaire du surplus de ses demandes,
- condamné la société COMAI au paiement de la somme de 8 000 euros sur le fondement de l’article 700, 1° du code de procédure civile,
- condamné la société COMAI aux entiers dépens.

La société COMAI a interjeté appel de cette décision, par déclaration reçue, par voie électronique, au greffe de la cour le 26 mars 2015.

Dans le dernier état de ses écritures récapitulatives, déposées par voie électronique le 11 mars 2016, elle demande à la cour de :

— réformer le jugement entrepris en ce qu’il a accueilli les demandes de la société Établissements Lemaire sur la marque ''Liderfarm''.

Sur ce, statuant de nouveau,

— dire et juger que la société Établissements Lemaire ne rapporte pas la preuve d’actes de contrefaçon de la marque ''Liderfarm'', telle que déposée à l’INPI sous le n°013128059,

à titre subsidiaire,

— dire et juger que la société Établissements Lemaire est déchue de son droit sur la marque « Liderfarm » pour défaut d’exploitation pendant plus de cinq ans,
- dire et juger que la société Établissements Lemaire ne saurait se prévaloir d’actes de contrefaçon et d’un préjudice y afférent pour des faits antérieurs au 9 février 2013 et pour des produits autres que les machines agricoles (classe 7),

— débouter la société Établissements Lemaire de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions. à titre infiniment subsidiaire,
- dire et juger que les demandes de la société Établissements Lemaire tenant à la condamnation de la société COMAI au paiement de la somme de 2 100 000 euros pour la période du 23 octobre 2011 au 23 octobre 2015, majoré de 175 000 euros par mois à compter de cette date jusqu’à la cessation des prétendus actes de contrefaçon, outre la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral, constituent des demandes nouvelles en cause d’appel et donc irrecevables,
- ramener la demande indemnitaire de la société Établissements Lemaire au titre du préjudice économique à de plus justes proportions,
- débouter la société Établissements Lemaire de toute demande indemnitaire en l’absence de tout préjudice moral,

en tout état de cause,
- condamner la société Établissements Lemaire à payer à la société COMAI la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700, 1° du code de procédure civile,
- condamner la société Établissements Lemaire aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de Me Marie-Hélène LAURENT, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions récapitulatives, déposées par voie électronique le 25 juillet 2016, la société Établissements Lemaire demande à la cour de :
- confirmant partiellement le jugement dont appel,
- débouter la SA COMAI de toutes ses demandes ;

— dire et juger que la marque n° 133995764 enregistrée par la SA COMAI constitue la contrefaçon de la marque ''Liderfarm'' déposée sous le n° 013128059 par la SARL Établissements Lemaire ;

- ordonner le retrait de la marque contrefaisante du Registre National des Marques dans les classes 4, 7, 25, et 31 ;

- ordonner la cessation de tous les actes de contrefaçon ainsi que le retrait de la distribution de tous matériels et produits, documentation physique ou en ligne comportant les marques contrefaites ;

- ordonner par conséquent à la SA COMAI de cesser de faire usage de tous signes distinctifs identiques ou voisins, directement ou par l’intermédiaire de tiers, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, sites en ligne inclus, en rapport avec la marque ''Liderfarm'', propriété de la SARL Établissements Lemaire, sous astreinte de 5 000 euros par jour et par infraction constatée à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ;

- faire interdiction à la SA COMAI, directement ou indirectement par toute personne physique ou morale interposée, de fabriquer, de faire fabriquer, de présenter et d’offrir à la vente, de distribuer à titre gratuit ou non, d’utiliser, d’importer ou de détenir ou diffuser de quelque façon que ce soit tout produit, matériel, document, identifiable sous la marque ''Liderfarm'', sous l’astreinte précitée ;

- autoriser la SARL Établissements Lemaire à recourir aux services de tel huissier qu’il lui plaira pour s’assurer de l’exécution des mesures précitées, aux frais de la SA COMAI au titre des dépens ;

- condamner la SA COMAI au paiement : * de la somme de 2 100 000 euros à titre de dommages et intérêts pour la période s’étendant du 23 octobre 2011 au 23 octobre 2015, à majorer de 175 000 euros par mois (2 100 000 euros / 12) à compter de cette date jusqu’au mois au cours duquel la SA COMAI justifiera avoir mis un terme aux faits de contrefaçon lui étant reprochés ; * de la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice moral subi par la SARL Établissements Lemaire ;

Subsidiairement, s’agissant de l’évaluation du préjudice après avoir jugé comme précisé aux § 1- et 2-précités,

— désigner tel expert qu’il plaira à la Cour avec mission : * d’entendre les parties et tout sachant,

* de se faire remettre par la SA COMAI tous les documents comptables et financiers, états des ventes, et toutes les pièces qu’il estimera nécessaire à l’accomplissement de sa mission, * de déterminer l’entier préjudice subi par la SARL Établissements Lemaire du fait des actes de contrefaçon dont elle est victime, en calculant le montant des redevances ou droits qui auraient été dus par la SA COMAI si cette société avait demandé l’autorisation d’utiliser les droits de la marque ''Liderfarm'' auxquels elle a porté atteinte, * de donner à la Cour tous éléments de nature à permettre à celui-ci de se prononcer sur les préjudices subis par la SARL Établissements Lemaire du fait de la contrefaçon ;

- dire qu’il sera tenu compte des faits de contrefaçon commis par la SA COMAI jusqu’à la date de cessation effective de ceux-ci pour la détermination du préjudice total subi par la SARL Établissements Lemaire ;

- dire qu’il sera tenu compte des faits de contrefaçon commis par la SA COMAI jusqu’à la date du dépôt du rapport de l’expert pour la détermination du préjudice subi par la SARL Établissements Lemaire si les faits ne cessent pas ;

- condamner la SA COMAI au paiement d’une provision de 150 000 euros à valoir sur l’indemnisation définitive du préjudice de la SARL Établissements Lemaire.

En tout état de cause.

— ordonner la publication de l’arrêt à intervenir : * dans trois publications du choix de la SARL Établissements Lemaire et aux frais de la SA COMAI, à concurrence de 12 000 euros HT par insertion, avec avance des fonds par la SARL Établissements Lemaire au besoin, la SA COMAI étant condamnée à les rembourser ; * sur le site en ligne de la SA COMAI sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, et pendant une durée de 12 mois.

- condamner la SA COMAI au paiement de la somme de 15 000 euros à titre d’indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner en tous les dépens de première instance et d’appel, en ce compris le coût du constat de Me B et le coût des vérifications de la cessation des actes de contrefaçon.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 16 septembre 2016.

SUR CE,

Attendu que la SA COMAI demande la réformation du jugement en ce qu’il a accueilli les demandes de société Établissements Lemaire en contrefaçon de la marque ''Liderfarm'' ;

Que la SARL Établissements Lemaire n’ayant pas formé appel incident du jugement s’agissant de la marque ''Profarm'', la discussion devant la cour ne porte que sur la marque ''Liderfarm'' ;

' Sur la contrefaçon ou non de la marque ''Liderfarm'' par la société COMAI :

Attendu que la société Établissements Lemaire a déposé auprès de l’INPI, en octobre 2001, renouvelée en janvier 2012, sous le n° 013128059, la marque verbale 'Liderfarm', pour les produits, dans la classe 7 de la classification de Nice : machines agricoles ;

Attendu que la SA COMAI a déposé en avril 2013 la marque semi figurative : ''Liderfarm'', pour les produits de la classe 4 : Huiles et graisses industrielles ; lubrifiants et autres’, de la classe 7 : Machines- outils, moteurs, machines agricoles et autres, de la classe 25 : Vêtements’ et de la classe 31: Produits agricoles’ ;

Attendu que la société COMAI oppose que la contrefaçon ne serait pas caractérisée et, subsidiairement, que celle-ci a cessé tout usage sérieux de sa marque depuis 2006, encourant ainsi les effets de sa déchéance ;

Que, cependant, la question de la déchéance de la marque litigieuse sera examinée en premier lieu en ce qu’elle conditionne les droits de son titulaire, la société Établissements Lemaire, et sa recevabilité à agir en contrefaçon contre la société COMAI ;

- Sur le moyen tiré de la déchéance de la marque litigieuse :

Attendu, selon la société COMAI, que la société Établissements Lemaire ne dispose de droit sur la marque ''Liderfarm'' que pour les machines agricoles et qu’elle a décidé de cesser toute commercialisation des machines agricoles en 2006 ;

Que si elle commercialise, sous ladite marque des tondeuses à gazon et des tarières, relevant de la classe 8, des tracteurs tondeuses, des broyeurs à végétaux et des malaxeurs à béton, relevant d’une catégorie propre de la classe 7, des fendeuses à bois, rentrant dans la catégorie 'machine à travailler le bois', et des chargeurs et girobroyeurs, relevant de la catégorie des 'instruments agricoles

autres que ceux actionnés manuellement', il ne s’agit pas des produits rentrant dans la catégorie des machines agricoles ;

Que, toujours selon elle, le premier juge ne pouvait retenir la commercialisation des remorques agricoles, des faneurs andaineurs et du broyeur pour considérer que la société Établissements Lemaire avait fait un usage sérieux de la marque ''Liderfarm'' dans la catégorie 'machines agricoles, alors que ces matériels ne relèvent pas de cette catégorie de la classe 7 ;

Mais attendu que la preuve de l’exploitation de la marque qui incombe au propriétaire de la marque dont la déchéance est demandée peut être apportée par tous moyens ;

Qu’ainsi la preuve de l’exploitation peut être fournie au travers des ventes faites par des tiers, dont des filiales, avec l’accord du titulaire ;

Que les éléments versés aux débats par la société Établissements Lemaire, essentiellement les attestations comptables des années 2009 à 2014, les prospectus et autres documents publicitaires et commerciaux, diffusés aux fins de promotion et de ventes de ses produits et machines entre 2003 et 2014, établissent que les sociétés du groupe Lemaire vendent en effet du matériel agricole sous la marque litigieuse depuis des années, sans que le délai de cinq ans, prévu par l’article L 714-5 du code de la propriété intellectuelle, ait couru pour fonder la déchéance ;

Que certains de ces matériels, tels les remorques agricoles de 14 et 16 tonnes, les faneurs andaineurs, déchaumeurs ou girobroyeurs, commercialisés sous la marque ''Liderfarm'', entre 2009 et 2014, même s’ils sont susceptibles de relever de plusieurs catégories dans une même classe, relèvent à l’évidence de la catégorie machines agricoles';

Qu’adoptant par ailleurs les motifs des premiers juges, la cour ne peut que confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société COMAI de sa demande de déchéance des droits de la société Établissements Lemaire sur la marque litigieuse ;

- Sur la contrefaçon de la marque « Liderman » :

Attendu que, selon la SA COMAI, l’action en contrefaçon de société Établissements Lemaire serait infondée en l’absence de reproduction à l’identique ou de risque de confusion du signe invoqué ;

Mais attendu que le signe 'Liderfarm'' ne peut être qualifié de banal comme relevant du simple langage commun ;

Qu’il est, en effet, le résultat de la combinaison de deux mots issus de langues différentes :

- le mot castillan : « lider », phonétiquement identique au mot : « leader » de langue anglaise, superlatif synonyme de chef, qui évoque notamment l’autorité et le ralliement, pour une communauté comme pour un produit phare lancé sur un marché commercial ;

- le mot : « farm », issu du vocabulaire anglo-saxon, qui induit la notion d’exploitation agricole et s’adresse à une clientèle rurale professionnelle ;

Qu’ainsi la jonction des deux termes, pour constituer la marque « Liderfarm », signifie que les matériels et machines vendus sous cette marque représentent ce qu’il y a de mieux sur ce marché, trouvant ici son caractère distinctif en dehors du sens commun d’origine ;

Que le moyen invoqué par la société COMAI et tiré de l’existence d’une marque communautaire ''Farmlider'' est inopérant alors qu’elle concerne des produits et services très différents des classes 9 et 42 relatives notamment aux instruments et services scientifiques ;

Et attendu, comme l’ont justement relevé les premiers juges, que la marque 'Liderfarm’ étant une marque purement verbale, l’appréciation de l’existence éventuelle d’une contrefaçon repose sur une comparaison des lettres qui composent chacune des deux marques en présence ;

Qu’il est patent que la marque, alléguée comme contrefaisante, semi-figurative en couleurs : ''Liderfarm'' et pourvue d’un épi de céréales, constitue la reproduction à l’identique des lettres qui composent la marque verbale : 'Liderfarm’ ;

Attendu aussi, comme il a été développé plus haut, que certains matériels tels que : remorques agricoles, faneur andaineur et broyeur d’accotement, dont la commercialisation sous la marque ''Liderfarm’ entre 2009 et 2014 est justifiée par la société Établissements Lemaire, sont susceptibles de relever à la fois des 'instruments agricoles autres que ceux actionnés manuellement’ que des 'engins agricoles’ au sein de la classe 7 de la classification de Nice ;

Que l’utilisation du signe litigieux crée ainsi, pour le moins, une confusion dans l’esprit du public composé d’acheteurs de matériels et de machines agricoles ;

Qu’en effet, et alors que la fonction essentielle de la marque est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service qu’elle désigne, les acquéreurs de machines agricoles ou de pièces détachées et autres produits similaires,

proposés par la société COMAI sous la marque ''Liderfarm'', pensent acheter les produits proposés par la société Établissements Lemaire, alors qu’il s’agit en réalité de produits et matériels d’origines différentes ;

Attendu enfin que la société COMAI ne justifie aucunement d’un consentement à cet usage de ladite marque qui aurait été accordé par la société Établissements Lemaire au-delà du 23 octobre 2011 ;

Qu’il se déduit de ces constatations et développement que la société COMAI s’est livrée sciemment à la contrefaçon de la marque ''Liderfarm'', antérieurement déposée par la société Établissements Lemaire en classe 7 catégorie 'Engins agricoles', à compter du 23 octobre 2011 ;

Attendu, par ailleurs, que la contrefaçon ici caractérisée s’est trouvée étendue aux produits des classes 4 et 31 de la classification de Nice puisque qu’au nombre des produits de la classe 4 figurent les huiles et graisses industrielles, accessoires indispensables des machines agricoles de la classe 7 ;

Que l’acheteur d’une machine sous la marque ''Liderfarm'' fera naturellement le lien avec ce type de produits, dont il pensera qu’ils complètent la gamme de produits d’entretien des engins et matériels offerts par la société Établissements Lemaire à ses clients ;

Que, s’agissant des produits de la classe 31 où figurent les semences et céréales en grains non travaillés, et plus généralement les produits agricoles, que les produits et matériels de la classe 7, servent à produire, leur commercialisation sous la marque litigieuse engendre un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle concernée ;

Qu’enfin, certains des produits relevant de la classe 25 : vêtements, chaussures, vêtements de travail et autres textiles utilisés par les utilisateurs de machines agricoles, commercialisés sous le signe litigieux induit, ici encore chez le client professionnel ou rural, une confusion sur l’origine desdits produits dont il pensera qu’ils proviennent de la même société et que la société COMAI a cherché, par cet artifice, à s’attacher ;

Qu’il y a lieu en conséquence d’étendre les actes de contrefaçon de la marque ''Liderfarm'', imputables à la société COMAI, à l’ensemble des produits et machines relevant des classes 7, 4, 31 et 25 de la classification de Nice, compte tenu, notamment, de la complémentarité attachée à ces produits en ce qu’ils sont accessoires à la notion d’engins et matériels agricoles ;

Attendu, en conséquence, que sera ordonné le retrait de la marque contrefaisante dans les classes 4, 7, 25 et 31 du Registre National des Marque ;

Que la société COMAI sera condamnée à cesser tout acte de contrefaçon notamment:

— en retirant de la distribution tous matériels et produits, documentation physique ou en ligne dans les classes 4, 7, 25 et 31 comportant la marque 'Liderfarm’ ;

— en cessant tout usage du signe : ''Liderfarm', pour des produits dans les classes 4, 7, 25 et 31 directement ou par l’intermédiaire de tiers, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, sous astreinte de 350 euros par infraction constatée, 1 mois après la signification du présent arrêt ;

- en s’abstenant de fabriquer, de faire fabriquer, de présenter et d’offrir à la vente, de distribuer à titre gratuit ou non, d’utiliser, d’importer ou de détenir directement ou indirectement par toute personne physique ou morale interposée, tout produit matériel, document, identifiable sous la marques 'Liderfarm’ dans les classes 4, 7, 25 et 31 sous l’astreinte précitée ;

Que le jugement déféré sera réformé en ce sens ;

' Sur les dommages et intérêts demandés par la société Établissements Lemaire :

Attendu qu’en application des principes édictés par l’article L 716-14 du code de la propriété intellectuelle, 'Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;

3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.

Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral cause à la partie lésée ' ;

Que par application du dernier alinéa du texte sus-énoncé, la société Établissements Lemaire réclame une somme de 2 100 000 euros à

majorer de 175 000 euros par mois, du 1er octobre 2015 jusqu’au mois au cours duquel la SA COMAI justifiera avoir mis un terme aux faits de contrefaçon lui étant reprochés ;

Qu’elle sollicite en outre la réparation de son préjudice moral à hauteur de 300 000 euros ;

Attendu que les demandes de dommages et intérêts formées en appel par la société Établissements Lemaire ne constituent pas des demandes nouvelles alors que, conformément aux dispositions de l’article 565 du code de procédure civile, ces prétentions tendent à la même indemnisation du préjudice subi mais actualisée ;

Mais attendu qu’eu égard au mode de distribution des engins et matériels et autres produits agricoles par les deux sociétés concurrentes, notamment pas Internet, sans possibilité pour le consommateur d’attention moyenne de distinguer l’origine des produits, ainsi que l’atteste le procès-verbal de constat d’huissier versé aux débats par société Établissements Lemaire ;

Que compte tenu des chiffres d’affaires hors taxes, dont justifie la société Établissements Lemaire, réalisés grâce aux marchandises vendues sous la marque 'Liderfarm’ au cours des années 2009 (148 461 euros), 2010 (127 822 euros), 2011 (361 621 euros), 2012 (294 233 euros), 2013 (277 594 euros) 2014 (301 227 euros) et 2015 (292 623 euros), soit une moyenne annuelle de 257 650 euros par an, et de la part du chiffre d’affaires représenté par ces ventes rapporté au chiffre d’affaires global de la société ;

Que comparaison faite avec le chiffre d’affaires connus de la société COMAI et pour les seules années 2012 à 2015 incluses, soit de 14 591 000 euros HT, 14 342 000 euros HT, 13 643 000 euros HT et 13 184 000 euros HT ;

Qu’appliquant enfin un taux de redevance moyenne, il y a lieu de condamner la société COMAI à payer à la société Établissements Lemaire – à titre forfaitaire – la somme de 70 000 euros à titre de dommages-intérêts, en réparation de son préjudice commercial du fait des actes de contrefaçon de la marque ''Liderfarm'' commis pour tous les produits des classes 4, 7, 25 et 31 de la classification de Nice ;

Attendu que sa demande présentée au titre de son préjudice moral, nouvelle en cause d’appel, sera déclarée irrecevable en application de l’article 564 du code de procédure civile ;

Que la demande subsidiaire aux fins d’expertise n’est pas justifiée ;

' Sur les frais irrépétibles de procédure et les dépens :

Attendu qu’il résulte des dispositions cumulées des articles 696 et 700 du civile que, sauf dispositions contraires motivées sur l’équité, la partie perdante est condamnée aux dépens de la procédure et doit en outre supporter les frais irrépétibles, tels que les frais d’avocat, avancés par son adversaire pour les besoins de sa défense en justice ;

Que compte tenu tant de l’importance du litige, de sa durée, des diligences accomplies et de l’équité que du sens de l’arrêt, il apparaît justifié de confirmer le jugement sur les dépens et l’application qui y a été équitablement faite des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que tant l’équité et la situation économique des parties que le sens de l’arrêt justifient de condamner la société COMAI, qui a succombé, à payer, à la société Établissements Lemaire la somme de 8 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Que la demande faite, au même titre, par l’appelante sera rejetée ;

Attendu que le sens de l’arrêt justifie de condamner la société COMAI aux dépens d’appel ; PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a : Dit que la marque n°13 3 995 764 enregistrée par la société COMAI constitue, dans les classes 4, 7 et 31, à l’exclusion de la classe 25, la contrefaçon de la marque 'Liderfarm', déposée sous le n° 01 3 128 059, par la société Établissements Lemaire ;

Ordonné le retrait de la marque contrefaisante dans les classes 4, 7 et 31 du Registre National des Marques ;

Condamné la société COMAI à cesser tout acte de contrefaçon notamment :

— en retirant de la distribution tous matériels et produits, documentation physique ou en ligne dans les classes 4, 7 et 31 comportant la marque 'Liderfarm';

— en cessant tout usage du signe 'Liderfarm’ pour des produits dans les classes 4,7 et 31, directement ou par l’intermédiaire de tiers, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, sous astreinte de

350 euros par infraction constatée, un mois après la signification du présent jugement.

- en s’abstenant de fabriquer, de faire fabriquer, de présenter et d’offrir h la vente, de distribuer à titre gratuit ou non, d’utiliser, d’importer ou de détenir directement ou indirectement par toute personne physique ou morale interposée, tout produit matériel, document, identifiable sous la marques ''Liderfarm’ dans les classes 4, 7 et 31, sous l’astreinte précitée ;

Condamné la société COMAI à payer à la société Établissements Lemaire la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, du fait des actes de contrefaçon commis à son encontre ;

Statuant à nouveau sur les seuls chefs réformés,

Dit que la marque n° 13 3 995 764 enregistrée par la société COMAI constitue, dans les classes 4, 7, 25 et 31 la contrefaçon de la marque ''Liderfarm’ déposée, sous le n° 01 3 128 059, par la société Établissements Lemaire ;

Ordonne le retrait de la marque contrefaisante dans les classes 4, 7, 25 et 31 du Registre National des Marques ;

Condamne la société COMAI à cesser tout acte de contrefaçon notamment :

- en retirant de la distribution tous matériels et produits, documentation physique ou en ligne dans les classes 4, 7, 25 et 31 comportant la marque 'Liderfarm';

- en cessant tout usage du signe 'Liderfarm’ pour des produits dans les classes 4, 7, 25 et 31, directement ou par l’intermédiaire de tiers, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, sous astreinte de 350 euros par infraction constatée, un mois après la signification du présent arrêt ;

- en s’abstenant de fabriquer, de faire fabriquer, de présenter et d’offrir à la vente, de distribuer à titre gratuit ou non, d’utiliser, d’importer ou de détenir directement ou indirectement par toute personne physique ou morale interposée, tout produit matériel, document, identifiable sous la marques 'Liderfarm’ dans les classes 4, 7, 25 et 31, sous l’astreinte précitée ;

Condamne la société COMAI à payer à la société Établissements Lemaire la somme de 70 000 euros à titre de dommages-intérêts, en réparation de son préjudice du fait des actes de contrefaçon commis à son encontre ;

Y ajoutant,

Ordonne la publication du dispositif du présent arrêt dans trois publications du choix de la société Établissements Lemaire et aux frais de la société COMAI, pour un montant global maximal de 5 000 euros TTC, ainsi que sur le site en ligne de la SA COMAI, sur sa page d’accueil, dans le délai de 15 jours après la signification du présent arrêt et sous astreinte 350 euros par jour de retard constaté à compter de la signification du présent arrêt ;

Condamne la société COMAI à payer la somme de 8 000 euros à la société Établissements Lemaire, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens d’appel ;

Déboute les parties de toutes demandes, fins ou prétentions, plus amples ou contraires.

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Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 8 décembre 2016, n° 15/01872