Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 16 septembre 2021, n° 19/05085

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, ch. 1 sect. 2, 16 sept. 2021, n° 19/05085
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 19/05085
Décision précédente : Tribunal d'instance de Lille, 30 juin 2019, N° 19/001411
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 16/09/2021

****

N° de MINUTE :

N° RG 19/05085 – N° Portalis DBVT-V-B7D-SSXI

Jugement (N° 19/001411) rendu le 1er juillet 2019

par le tribunal d’instance de Lille

APPELANTE

La SARL France Renov Express prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social, […]

59350 Saint-André lez-Lille

représentée et assistée de Me Gabriel Denecker, membre du cabinet Traits d’Union, avocat au barreau de Lille

INTIMÉS

Monsieur X-C Y

né le […] à […]

Madame Z Y

née le […] à […]

demeurant ensemble 131 rue C Brossolette

59700 Marcq-en-Baroeul

représentés et assistés de Me Sophie Eteve, avocat au barreau de Lille

DÉBATS à l’audience publique du 30 mars 2021 tenue par F G-H magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : D E

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

F G-H, président de chambre

Sophie Tuffreau, conseiller

X-François Le Pouliquen, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 16 septembre 2021 après prorogation du délibéré du 8 juillet 2021 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par F G-H, président et D E, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 23 novembre 2020

****

Vu le jugement du tribunal d’instance de Lille du 1er juillet 2019,

Vu la déclaration d’appel de la société France rénov express du 16 septembre 2019,

Vu les conclusions de la société France rénov express du 20 mai 2020 ,

Vu les conclusions de M. X- C Y et de Mme Z Y du 3 juin 2020,

Vu l’ordonnance de clôture du 23 novembre 2020.

EXPOSE DU LITIGE

M. X-C Y et Mme Z Y sont propriétaires d’un immeuble à usage d’habitation situé 131 rue C Brossolette à Marcq en Baroeul.

Par devis accepté du 11 septembre 2018, ils ont confié des travaux de rénovation de leur logement à la société France rénov express, avec un délai d’intervention estimé entre 8 et 12 semaines, moyennant un prix de 25 600 euros TTC.

Le 8 octobre 2018, M. et Mme Y ont versé un acompte de 7 680 euros, correspondant à 30% du devis.

M. et Mme Y ont, par message du 20 janvier 2019, puis par lettre recommandée avec avis de réception de leur conseil du 5 février 2019, reçue le 6 février 2019, notifié la résolution du contrat et sommé la société France rénov express de leur restituer l’acompte.

Par acte du 22 mars 2019, M. et Mme Y ont fait assigner la société France rénov express devant le tribunal d’instance de Lille afin qu’il constate et au besoin prononce la résiliation du contrat aux torts exclusifs de la société France rénov express au 20 janvier 2019 et qu’il la condamne à restituer l’acompte versé, à payer des dommages-intérêts pour résistance abusive ainsi qu’une indemnité au titre des frais irrépétibles.

Par jugement du 1er juillet 2019, le tribunal d’instance de Lille a :

— prononcé la résolution judiciaire du contrat portant sur les travaux de rénovation au sein du

logement situé 131 rue C Brossolette à Marcq-en Baroeul conclu entre

M. et Mme Y et la société France rénov express, aux torts exclusifs de celle-ci;

— condamné la société France rénov express à rembourser à M. et Mme Y la somme de 7 680 euros au titre de l’acompte versé, avec intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2019 ;

— rejeté la demande de dommages et intérêts ;

— condamné la société France rénov express à payer à M. et Mme Y la somme de 700 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné la société France rénov express aux dépens de l’instance ;

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration déposée le 16 septembre 2019, la société France rénov express a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions déposées le 20 mai 2020, la société France rénov express demande à la cour, au visa des articles 1103, 1224 et suivants du code civil, de:

— dire bien appelé, mal jugé ;

— infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

— dire et juger que la résolution du contrat de travaux conclu entre les parties suivant devis accepté le 11 septembre 2018 est prononcée à la demande de M. et Mme Y et à leurs torts exclusifs ;

— dire et juger n’y avoir lieu à restitution de l’acompte versé par M. et Mme Y lors de la signature du contrat de la société France rénov express ;

— condamner M. et Mme Y au paiement d’une somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par la société France rénov express en cause d’appel ;

— les condamner aux entiers frais et dépens en ce compris tous les frais à la charge de l’appelante en application de l’article 10 du tarif des huissiers modifié par le décret du 8 mars 2011.

Elle soutient notamment que:

— les parties étaient d’accord sur la nature des travaux, sur leur coût et sur le délai prévisible d’intervention mais les difficultés sont nées de l’intervention de la fille des époux Y, architecte, qui a sollicité des aménagements et des modifications;

— les époux Y n’ont pas permis à l’entreprise d’intervenir dans les délais ;

— l’entreprise n’a commis aucune faute; les époux Y ont entendu renégocier le devis ; ils n’ont pas mis en demeure l’entreprise de démarrer le chantier.

Aux termes de leurs conclusions déposées au greffe le 3 juin 2020, M. X-C Y et Mme Z Y demandent à la cour, au visa des articles L.216-1 et suivants, L. 216-2 et L. 216-3 du code de la consommation, des articles L.241-1 du code des assurances, 1103, 1193 et 1224 du code civil de :

— déclarer M. et Mme Y recevables et bien fondés en leurs demandes ;

— confirmer en son principe le jugement rendu par le tribunal d’instance de Lille du 1er juillet 2019 ;

En conséquence,

— prononcer la résiliation du contrat régularisé entre les parties le 11 septembre 2018 aux torts exclusifs de la société France rénov express au 20 janvier 2019 ;

— condamner la société France rénov express au paiement de la somme de 7 680 euros au titre de la restitution de l’acompte versé, assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2019 ;

— condamner la société France rénov express au paiement de la somme de 700 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— infirmer le jugement rendu par le tribunal d’instance de Lille le 1er juillet 2019 pour le surplus et, en conséquence,

— condamner la société France rénov express au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

— condamner la société France rénov express au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

— condamner la société France rénov express aux entiers frais et dépens de première instance et d’appel.

Ils font valoir notamment que:

— l’entreprise ne rapporte pas la preuve de ses allégations;

— ils ont réglé l’acompte et deux mois après ce règlement, l’entreprise n’était toujours pas intervenue;

— le délai d’intervention constituait une condition essentielle du contrat et engageait la société France rénov express aux termes de ses propres conditions de vente;

— l’entreprise n’est jamais intervenue chez eux;

— elle ne s’est jamais manifestée ni après la lettre de mise en demeure du 5 février 2019, ni après l’assignation;

— le comportement de l’entreprise démontre sa mauvaise foi justifiant la demande de dommages-intérêts.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions déposées, soutenues à l’audience et rappelées ci-dessus.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 novembre 2020.

Par message en date du 16 juillet 2021, il a été demandé aux conseils de parties de bien vouloir produire une version lisible des conditions de vente de la société France rénov express.

Par message du même jour, le conseil des consorts Y a adressé une version scannée des

conditions de vente, aussi peu lisible que celle versée aux débats.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient aux parties de produire des pièces exploitables. En l’espèce, les conditions de vente figurant au dos du devis de la société France rénov express, pièce produite par les intimés, sont difficilement lisibles.

L’appelante n’a pas cru devoir produire le devis qu’elle a cependant établi, contenant les conditions de vente.

Aucune des parties ne fait référence à ces conditions de vente de la société France rénov express dans les motifs de leurs écritures.

1- sur la résolution du contrat liant les parties

Aux termes du 1er alinéa de l’article L.216-1 du code de la consommation, 'le professionnel livre le bien ou fournit le service à la date ou dans le délai indiqué au consommateur, conformément au 3° de l’article L. 111-1, sauf si les parties en ont convenu autrement'.

L.216-2 dudit code dispose: 'en cas de manquement du professionnel à son obligation de livraison du bien ou de fourniture du service à la date ou à l’expiration du délai prévus au premier alinéa de l’article L. 216-1 ou, à défaut, au plus tard trente jours après la conclusion du contrat, le consommateur peut résoudre le contrat, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par un écrit sur un autre support durable, si, après avoir enjoint, selon les mêmes modalités, le professionnel d’effectuer la livraison ou de fournir le service dans un délai supplémentaire raisonnable, ce dernier ne s’est pas exécuté dans ce délai.

Le contrat est considéré comme résolu à la réception par le professionnel de la lettre ou de l’écrit l’informant de cette résolution, à moins que le professionnel ne se soit exécuté entre-temps.

Le consommateur peut immédiatement résoudre le contrat lorsque le professionnel refuse de livrer le bien ou de fournir le service ou lorsqu’il n’exécute pas son obligation de livraison du bien ou de fourniture du service à la date ou à l’expiration du délai prévu au premier alinéa de l’article L. 216-1 et que cette date ou ce délai constitue pour le consommateur une condition essentielle du contrat. Cette condition essentielle résulte des circonstances qui entourent la conclusion du contrat ou d’une demande expresse du consommateur avant la conclusion du contrat.'

Il résulte des termes du devis en date du 4 septembre 2018 acceptés le 11 septembre 2018 par les consorts Y que le délai d’intervention 'estimé’ des travaux était de 8 à 12 semaines, soit début du mois de décembre 2018 à compter de l’acceptation du devis, soit début janvier 2019 à compter du règlement de l’acompte de 30% à la commande intervenu le 10 octobre 2018.

En l’espèce, il s’agissait bien d’une estimation, les époux Y ne justifiant pas d’éléments permettant d’établir qu’il s’agissait d’une condition essentielle du contrat; notamment les photographies produites par les époux Y d’un démontage des éléments de cuisine dans l’attente des travaux ne sont pas datées et n’établissent pas que le délai prévu était impératif pour les intimés.

En outre, la teneur des échanges de messages électroniques entre les parties via Mme A Y, fille des époux Y, exerçant la profesion d’architecte, ne démontre pas que l’éventuel retard dans l’exécution des travaux était le sujet abordé entre les parties.

En effet, le message du 5 décembre 2018 de M. M’B de la société France rénov express adressé

à Mme A Y, mentionne des doléances faites par cette dernière au cours d’une conversation téléphonique et sollicite des éclaircissements sur ces doléances.

Il n’est pas établi que les consorts Y ou leur fille aient répondu à ce message en explicitant leurs doléances.

Le message de Mme A Y du 26 décembre 2018 est également sybillin puisqu’elle indique 'mes parents rencontrent actuellement des difficultés, pouvons-nous organiser le rendez-vous d’aujourd’hui à 18 heures au sein de vos locaux ''.

Son message du 7 janvier 2019 rappelle le rendez-vous du 26 décembre fixé finalement chez ses parents, a priori non honoré par l’entreprise, 'pour faire un état des lieux du devis en cours' et indique 'restant dans nos besoins d’éclaircissements' propose à nouveau une rencontre.

La teneur de ces messages accrédite la thèse de la société France rénov express selon laquelle les difficultés résultaient de la nature des travaux à exécuter, voire la qualification Qualibat RGE de certains d’entre eux ou d’une assurance responsabilité décennale valide selon la lettre de mise en demeure du 5 février 2019 du conseil des époux Y.

Enfin, le message de ces derniers du 20 janvier 2019 constate être sans nouvelles de l’entreprise, indique que le délai d’intervention du début des travaux est dépassé et 'comme l’indique l’article L.114 du code de la consommation le devis est caduc', réclame la restitution de l’acompte versé.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que d’une part, les époux Y n’ont pas mis en demeure préalablement la société France rénov express d’exécuter les travaux comme le prévoit le 1er alinéa de l’article L.216-2 précité, d’autre part n’établissent pas que le délai d’intervention estimé était impératif leur permettant de se prévaloir du dernier alinéa de l’article L.216-2.

Le premier juge a donc, à juste titre, considéré que les époux Y ne pouvaient se prévaloir de ces dispositions pour constater la résolution du contrat les liant à la société France rénov express.

En revanche, aux termes de l’article 1224 du code civil, la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.

En l’espèce, il résulte des échanges de messages que la société France rénov express n’a pas répondu aux demandes de rendez-vous proposées à deux reprises par les époux Y, n’a plus donné de nouvelles, n’a pas exécuté les travaux ou signifié d’une quelconque façon les raisons pour lesquelles elle ne les exécutait pas, ne serait-ce qu’en contestant les demandes des consorts Y si elle estimait celles-ci contraires au devis accepté.

C’est donc à juste titre que le premier juge a considéré que la société France rénov express avait manqué gravement à ses obligations contractuelles justifiant la résolution du contrat à ses torts exclusifs, et l’a condamnée à restituer l’acompte de 7 680 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de l’assignation soit le 22 mars 2019.

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

2- sur la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive

L’exercice d’une action en justice de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus de droit que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente au dol ou de légèreté blâmable.

L’appréciation inexacte qu’une partie fait de ses droits n’est pas en soi constitutive d’une faute.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de dommages-intérêts des époux Y.

3- sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs.

L’équité commande qu’il soit fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel.

La société France rénov express qui succombe en son appel, sera condamnée à payer aux époux Y la somme de 1 300 euros à ce titre.

Elle sera déboutée de sa demande à ce même titre.

Elle sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt mis à la disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement,

Y ajoutant,

Condamne la société France rénov express à payer à M. X-C Y et Mme Z Y la somme de 1 300 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel,

Déboute la société France rénov express de sa demande à ce titre,

Condamne la société France rénov express aux dépens d’appel.

Le Greffier Le Président

D E F G-H

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