Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 25 novembre 2010, n° 09/02778

  • Empreinte de la personnalité de l'auteur·
  • Modèle de présentoir de capsules à café·
  • Protection au titre du droit d'auteur·
  • Absence de droit privatif·
  • Vente à prix inférieur·
  • Caractère fonctionnel·
  • Concurrence déloyale·
  • Imitation du produit·
  • Protection du modèle·
  • Copie quasi-servile

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

La forme d’un objet utilitaire peut relever de la protection par le droit d’auteur dès lors que les caractéristiques de son apparence ne sont pas exclusivement imposées par sa fonction technique. Le modèle de présentoir pour capsules de café est certes fonctionnel mais ni cette circonstance, ni le fait que certaines de ses dimensions sont ainsi contraintes par ses fonctions, ne sont en soi propres à écarter toute originalité. Cependant, en l’espèce, rien ne caractérise l’empreinte de la personnalité d’un auteur. Le recours à du fil métallique plié et cintré s’inscrit dans les habitudes en matière d’objets présents dans la cuisine et ne marque aucun décalage révélant un parti pris personnel. Le modèle ne décline que l’adaptation sans originalité (à la forme particulière des capsules en question) de solutions et de principes de réalisation mis en oeuvre pour toute sorte d’autres objets à ranger et à présenter. Il s’agit donc d’une combinaison impersonnelle de formes impersonnelles, et non d’un agencement qui, en ses éléments constitutifs ou en sa composition, refléterait de façon significative la personnalité d’un auteur.

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 1re ch. civ. a, 25 nov. 2010, n° 09/02778
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 09/02778
Publication : Propriété industrielle, 6, juin 2011, p. 33-34, note de Jacques Larrieu ; PIBD 2011, 936, IIID-229
Décision précédente : Tribunal de commerce de Villefranche-Tarare, 25 mars 2009, N° 2007J153
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de commerce de Villefranche-Tarare, 26 mars 2009, 2007/00153
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Référence INPI : D20100294
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE LYON ARRET DU 25 Novembre 2010 1re chambre civile A R.G : 09/02778 Décision du tribunal de commerce de Villefranche-Tarare Au fond du 26 mars 2009 RG : 2007J153 APPELANTE : Société COMBRICHON – SAS […] 01600 TREVOUX représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour assistée de Maître Anne L, avocat au barreau de LYON

INTIMEE : Société SEFAMA INTERNATIONAL – SAS […] 69400 VILLEFRANCHE-SUR-SAONE représentée par la SCP LAFFLY-WICKY, avoués à la Cour assistée de la SCP NEMOZ & SAUNIER, avocats au barreau de LYON

Date de clôture de l’instruction : 06 Avril 2010 Date des plaidoiries tenues en audience publique : 28 Octobre 2010 Date de mise à disposition : 25 Novembre 2010

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
-Bernadette M, président
-Christine DEVALETTE, conseiller
-Philippe S, conseiller assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier A l’audience, Philippe S a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile. Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Bernadette MARTIN, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire. EXPOSÉ DU LITIGE Par assignation du 5 novembre 2007, la société Combrichon a agi à l’encontre de la société Sefama International aux fins de voir dire, au visa des articles L. 111-1 et suivants, L. 112-1 et suivants, L. 122-1 et suivants, L. 335-2 et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle, qu’en offrant et mettant sur le marché et en détenant à ces

fins des présentoirs destinés à accueillir des capsules de café tels que décrits dans son catalogue et dans le procès-verbal de saisie contrefaçon, cette dernière a commis des actes de contrefaçon de ses droits d’auteur, ainsi que des actes de concurrence déloyale et de parasitisme. Elle demandait qu’il soit fait interdiction à la société Sefama de les poursuivre et qu’elle soit condamnée à payer une provision sur la réparation du préjudice, à parfaire après expertise. Le tribunal a rejeté toutes ces demandes et condamné la société Combrichon à payer une somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile. Celle-ci a relevé appel le 30 avril 2009. Elle expose qu’une dessinatrice a créé pour elle en 2005 – 2006 des modèles de présentoir déclinés en plusieurs versions, qu’une enveloppe Soleau a été déposée par ses soins le 30 août 2006, qu’elle est titulaire des droits d’auteur, car l’oeuvre a été divulguée sous son nom, et cessionnaire régulière de ces droits. Elle conteste l’appréciation des premiers juges, qui ont retenu que 'de par sa qualité fonctionnelle, il ne pourrait être fait droit de qualifier cet objet comme protégeable, mais bel et bien d’un objet utilitaire', en faisant valoir:

-que son présentoir est original, son agencement n’étant pas facteur d’un but industriel mais traduisant une volonté de recherche esthétique séparable de sa fonction,
-que d’autres formes pouvant atteindre au même résultat, la sienne est protégeable par application du principe de multiplicité des formes,
-qu’il n’est pas justifié d’antériorités de toutes pièces. La société Combrichon considère que le présentoir adverse reprend le sien à l’identique, d’où suit la caractérisation de la contrefaçon.

Elle ajoute que, soit à titre complémentaire, soit à titre subsidiaire, il existe des actes de parasitisme résultant de la copie servile, sans impératif technique, des caractéristiques de son modèle, que la société Sefama vend en outre à un prix moyen très inférieur au sien, et qu’il en résulte une captation de ses investissements. La société Combrichon demande de réformer le jugement, de déclarer la contrefaçon, de condamner, également ou en tout cas, la société Sefama pour parasitisme et concurrence déloyale, et à conséquence de la condamner sous astreinte à cesser les actes incriminés, de la condamner au paiement de la somme de 50 000 euros pour préjudice commercial et moral, de celle de 30 000 euros pour avilissement et dépréciation de son modèle et de celle 30 000 euros, au titre des faits de parasitisme et concurrence déloyale.

Elle conclut en outre à la confiscation et à la destruction des produits incriminés, à des mesures de publication et à l’allocation d’une indemnité de 10 000 euros pour ses frais irrépétibles. La société Sefama objecte :

-que ce n’est pas parce qu’il existe d’autres formes possibles que le présentoir en question relève de la protection par le droit d’auteur et que la société Combrichon ne démontre en rien l’originalité de son produit,
-que ce présentoir est tout fonctionnel, ainsi qu’il résulte notamment, tant de la précision des cotes figurant dans le modèle envoyé par l’enveloppe Soleau, que des nécessités résultant des formes et tailles des capsules à présenter que de sa propre présentation dans le catalogue adverse au titre de design fonctionnel,
-qu’il n’est pas justifié d’une cession régulière par l’auteur personne physique,
-qu’il est par ailleurs licite de commercialiser des produits similaires, comme de le faire à un prix inférieur, et que la société Combrichon ne justifie d’ailleurs ni d’un investissement esthétique spécifique, ni d’une notoriété particulière,
-qu’en toute hypothèse, il n’est pas de préjudice, et qu’à tout le moins celui-ci est très faible au regard de la faible et brève diffusion de ses produits par la société Combrichon. La société Sefama conclut à la confirmation du jugement, subsidiairement au débouté des demandes indemnitaires et au paiement d’une somme de 30 000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel. Le commissaire à l’exécution du plan de continuation de la société Combrichon, désigné par jugement du 6 juillet 2007, a indiqué qu’il n’entendait pas intervenir dans cette instance engagée après cette date. MOTIFS DE LA DÉCISION Dès lors que les caractéristiques de son apparence ne sont pas exclusivement imposées par sa fonction technique, la forme d’un objet utilitaire peut relever d’une protection légale, et particulièrement de la protection par le droit d’auteur.

Les motifs contraires des premiers juges ne peuvent donc être adoptés. La protection demandée au titre du Livre I du code de la propriété intellectuelle suppose cependant l’originalité de l’objet considéré, ce critère étant seul pertinent, à l’exclusion de la nouveauté. Le produit est un présentoir destiné à être posé sur sa base. Il est en fil métallique plié et cintré plaçant, sur cette base en forme de rectangle arrondi en ses petits côtés, trois éléments verticaux composés d’un fil replié sur toute sa longueur pour former une gorge et se terminant en un évasement formant deux

pointes tournées vers l’extérieur permettant de les raccorder au sommet des éléments, identiques, voisins ; l’ensemble ainsi raccordé est relié à la base par un fil métallique plié à angle aigu soudé sur le bord de cette dernière. L’objet est certes fonctionnel, car il permet d’insérer, opercule contre opercule, deux rangées de capsules superposées, et donc de gagner de la place tout en facilitant le rangement et le service, mais ni cette circonstance, ni le fait que certaines de ses dimensions (la largeur des gorges en particulier) sont ainsi contraintes par ses fonctions, ne sont en soi propres à écarter toute originalité. Pour autant, rien ne caractérise en l’espèce l’empreinte de la personnalité d’un auteur. Le recours à du fil métallique plié et cintré s’inscrit dans les habitudes en matière d’objets présents dans la cuisine et ne marque aucun décalage révélant un parti pris personnel. Il n’existe nul élément de fantaisie, et si ce présentoir peut montrer quelques aspects arbitraires (nombre et hauteur des éléments verticaux, par exemple), ces derniers ne révèlent aucune particularité susceptible de caractériser une activité créatrice : il ne s’agit que de définir le nombre de capsules pouvant être accueillies. En son ensemble comme en ses éléments constitutifs, il ne décline que l’adaptation sans originalité à la forme particulière des capsules en question de solutions et de principes de réalisation mis en oeuvre pour toute sorte d’autres objets à ranger et à présenter tout à la fois (égouttoirs, range-couverts, range-casseroles …). Il s’agit donc d’une combinaison impersonnelle de formes impersonnelles, et non d’un agencement qui en ses éléments constitutifs ou en sa composition refléterait de façon significative la personnalité d’un auteur. Les conditions de protection par le droit d’auteur ne sont pas réunies. A défaut de droit privatif, la société Combrichon peut certes agir sur le fondement de l’article 1382 du code civil, peu important que sa demande repose sur des faits matériellement identiques à ceux ayant donné lieu à son action en contrefaçon rejetée, mais le seul fait de copier un produit dépourvu de protection n’est pas en soi un acte de concurrence déloyale ou de parasitisme et ne ressortit à de telles qualifications qu’en cas de faute. De ce point de vue, la société Combrichon fait valoir que le présentoir incriminé constitue une copie servile du sien. Ce n’est pas exact, car, quoi qu’il s’agisse là d’une différence mineure, le produit de la société Sefama compte une quatrième colonne de rangement. Quoi qu’il en soit, une telle copie n’est pas fautive en l’espèce. D’une part, en effet, le seul fait, que l’objet manifeste un savoir-faire et que son élaboration, puis sa commercialisation, supposent des investissements, ne lui

confère pas, à défaut d’autre circonstance, une valeur économique propre et protégeable en elle-même. Il n’existe, d’autre part, aucun grief pris de la création d’un risque de confusion ni d’aucune autre circonstance concrète révélatrice d’une faute liée à cette copie d’un objet non protégé. Le fait, enfin, que le prix de vente par la société Sefama soit inférieur à celui de la société Combrichon ne reflète, en l’absence de tout grief de prédation dans la fixation de ce prix, que la logique économique de cette copie, en elle-même licite, et ne caractérise pas un acte déloyal ou parasitaire. Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris. PAR CES MOTIFS :
-Confirme le jugement entrepris ;

-Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société Combrichon à payer à la société Sefama International la somme de 2 000 euros ;

- La condamne aux dépens d’appel avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Laffly -Wicky, avoué.

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