Cour d'appel de Lyon, 16 décembre 2013, n° 12/03952

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 16 déc. 2013, n° 12/03952
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 12/03952
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lyon, 25 avril 2012, N° F.10/03803

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 12/03952

Société RUE DU COMMERCE

C/

Y

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 26 Avril 2012

RG : F.10/03803

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 16 DECEMBRE 2013

APPELANTE :

Société RUE DU COMMERCE

XXX

XXX

représentée par Me HILLIG POUDEVIGNE, avocat au barreau de PARIS substitué par Me LEMAITRE Sophie, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉ :

C Y

né le XXX à Macon

XXX

XXX

comparant en personne, assisté de Me Pascale REVEL de la SCP REVEL-MAHUSSIER & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 07 Octobre 2013

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Didier JOLY, Président

Mireille SEMERIVA, Conseiller

G THAUNAT, Conseiller

Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 16 Décembre 2013, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Didier JOLY, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

EXPOSE DU LITIGE :

M. C Y a été engagé par la société RUE DU COMMERCE en qualité de «'Responsable technique', sous la responsabilité hiérarchique de M. A B, directeur technique'» statut cadre, suivant contrat écrit à durée indéterminée du 28 décembre 2000 à effet au 2 janvier 2001, le lieu d’exécution du contrat étant Lyon, avec un déplacement éventuel hebdomadaire au siège social de la société . Cependant, un avenant en date du 10 août 2008, faisait référence à son embauche le 2 janvier 2001, en qualité de directeur technique. Ses dernières fonctions dans la société étaient celles de directeur technique.

Sa rémunération moyenne des six derniers mois (janvier à juin 2010) s’élève à 11.444,26 € (68.665',59€/6mois) et celle des douze derniers mois à la somme de 11.156,70€.

La société RUE DU COMMERCE a été créée le 27 avril 1999'. Son activité initiale avait pour objet de distribuer des produits informatiques et électroniques grand public par internet. Elle est cotée en bourse depuis 2005'.

Par la suite outre la distribution de produits informatiques et électroniques grand public en France incluant les offres de services (conseil avant-vente, assurances produits….) , elle propose en ligne des produits de sites marchands partenaires (La Galerie).

Au 31 mars 2010, la société RUE DU COMMERCE employait 350 salariés, répartis sur quatre sites':

-268 salariés à XXX, siège social où étaient regroupés':

*les activités historiques high-tech (offres aux particuliers (site français et espagnol), offre aux entreprises)'; les services commerciaux et animation des ventes de la galerie'; les nouvelles activité Biens Culturels'; le marketing et la régie de la société'; les services clients avant et après vente de la société'; une partie importante du service technique de la société ; les services administratifs et la direction générale de la société)';

— à Lyon, l’activité principale de l’enseigne TopAchat (société rachetée en mars 2009) comprenant son service informatique (3 personnes au 31 mars 2010), rattaché au service technique de la société. 12 salariés étant en charge de l’animation commerciale et de la production du site';

— à Aix-en-Provence, 42 salariés répartis dans trois services (service informatique'; service marchand (relations administratives avec les partenaires de la Galerie'; service de référencement naturel)';

— à Saint-Quentin-Fallavier, 25 salariés affectés à l’entrepôt logistique et au service et charge du traitement physique du SAV).

La société RUE DU COMMERCE, a envisagé en avril 2010 un premier plan de sauvegarde de l’emploi puis y a renoncé, une solution de réorganisation ayant été trouvée en interne .

La société RUE DU COMMERCE a élaboré, par la suite, un autre plan de sauvegarde pour l’emploi .

Dans ce cadre le comité d’entreprise a été consulté les 1er et 2 juin 2010'; un accord sur des départs volontaires a été signé le 14 juin 2010'. 21 salariés se sont portés candidats au départ volontaire et 11 ont été retenus.

Le comité d’entreprise a été à nouveau consulté le 17 juin 2010, avec remise des avis sur la note économique et sur le plan de sauvegarde de l’emploi.

M. C Y a été convoqué à un entretien d’information fixé au 29 juin 2010'.

Lors de cet entretien lui ont été remis':

— une présentation de la réorganisation de la de la société et de ses conséquences,

— un formulaire de convention de reclassement personnalisé,

— la liste des postes disponibles dans la société,

— une description des postes proposés personnellement à M. Y

Quatre postes lui ont alors proposés :

— développeur senior back office,

— ingénieur informatique expert E-Com

— ingénieur informatique expert en moteur de recherche,

— production back office.

Par courrier en date du 13 juillet 2010, M. C Y a refusé ces offres de reclassement.

Le 19 juillet 2010, M. C Y a accepté la convention de reclassement personnalisée. Le contrat de travail a donc pris fin le 20 juillet 2010'.

Par courrier en date du 26 juillet 2010, la société RUE DU COMMERCE a notifié à

M. C Y la rupture de son contrat de travail d’un commun accord pour motif économique, et lui a adressé son certificat de travail, son attestation Pôle emploi et son bulletin de salaire.

Le 3 septembre 2010, M. C Y a adressé à la société RUE DU COMMERCE un courrier par lequel il contestait la rupture de son contrat de travail et sollicitait la communication de «'critères ayant présidés à sa désignation'».

La société RUE DU COMMERCE lui a répondu que cette dernière demande formée hors délai était irrecevable.

M. C Y a saisi le 1er octobre 2010, le Conseil de prud’hommes de Lyon, section encadrement qui, par jugement du 26 avril 2012 , a :

Dit et Jugé que le licenciement de M. C Y ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse';

en conséquence ,

Condamné la société RUE DU COMMERCE à lui payer':

— la somme de 100.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse';

— la somme de 23.000 € au titre du non-respect par la société RUE DU COMMERCE des critères présidant à l’ordre des licenciements (sic)';

— la somme de 1.400 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile';

Débouté les parties de l’intégralité de leurs demandes plus amples et contraires';

Dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire du présent jugement';

Condamné la société RUE DU COMMERCE aux entiers dépens de la présente instance et des éventuels frais d’exécution forcée.

Le dit jugement est affecté d’une erreur matérielle en ce qu’il est indiqué au dispositif que la somme de 23.000€ correspond à des dommages-intérêts pour «'non respect par la société RUE DU COMMERCE des critères présidant à l’ordre des licenciements'»', alors que le conseil des prud’hommes dans les motifs de cette décision rejette cette demande et accorde la somme de 23.000€ à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la priorité de réembauchage.

La société RUE DU COMMERCE a interjeté appel de cette décision par déclaration du 22 mai 2012 .

Aux termes de ses conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 7 octobre 2013, la société RUE DU COMMERCE demande à la Cour de :

Vu les articles 1233-3 et suivants du Code du travail, Vu les articles 1134 et 1382 du Code civil,

Infirmer le jugement rendu le 26 avril 2012 par le Conseil de Prud’hommes de LYON en ce qu’il a jugé que :

— le poste occupé par Monsieur Y n’aurait pas été effectivement supprimé, la priorité de réembauchage n’aurait pas été respectée,

Et statuant à nouveau

Dire et juger que le poste de Monsieur Y a bien été supprimé,

Dire et juger que la Société Rue Du Commerce a respecté l’obligation de réembauchage,

Confirmer le jugement rendu le 26 avril 2012 par le Conseil de Prud’hommes de LYON en ce qu’il a jugé que :

— le licenciement repose sur un motif économique réel et sérieux

— la Société a respecté ses obligations en termes de reclassement

— la Société a respecté ses obligations en matière de fixation de l’ordre des licenciements

En toute hypothèse

Dire et juger que le motif économique de la rupture est incontestable,

Dire et juger que la Société Rue Du Commerce a exécuté loyalement son obligation de reclassement,

Dire et juger que la Société Rue Du Commerce a respecté les obligations légales en matière d’élaboration des catégories professionnelles et d’application des critères d’ordre,

Dire et juger que la rupture du contrat de travail de Monsieur Y repose bien sur une cause réelle et sérieuse,

Débouter purement et simplement Monsieur Y de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Débouter Monsieur Y de sa demande au titre de l’absence de bénéficie des temps de rétablissement car non fondée

En tout état de cause

— Condamner Monsieur Y à payer à la Société Rue Du Commerce une somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

Dans ses écritures régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 7 octobre 2013, C Y conclut ainsi :

À titre principal.

CONFIRMER le jugement en ce qu’il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’INFIRMER pour le surplus.

CONDAMNER la société RUE DU COMMERCE à la somme de 250 000 € nets de CSG et de CRDS à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, subsidiairement pour non respect des critères d’ordre de licenciement

CONDAMNER la Société RUE DU COMMERCE à payer à Monsieur Y les sommes suivantes :

—  11.443 € nets à titre de dommages et intérêts pour défaut d’information sur les critères ayant présidé à l’ordre des licenciements.

—  40 000,00 € nets à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la priorité de réembauchage.

—  31 850,87 € à titre d’indemnité pour absence de bénéfice du temps de rétablissement

A titre subsidiaire

CONFIRMER le jugement dans son intégralité.

En toute hypothèse,

CONDAMNER la Société RUE DU COMMERCE à payer à Monsieur Y la somme de 3 000,00 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

CONDAMNER la société RUE DU COMMERCE aux entiers dépens d’instance.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la régularité de la procédure de rupture du contrat pour motif économique

L’Article L 1233-3 du Code du travail dispose :« Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. (…)»

Il est constant que lorsque le licenciement est prononcé pour motif économique, la lettre de licenciement doit énoncer à la fois les raisons économiques de celui-ci et leur incidence sur l’emploi ou le contrat de travail.

Par ailleurs, il est également, constant que lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l’acceptation par le salarié d’une convention de reclassement personnalisée, l’employeur doit en énoncer le motif économique dans le document écrit d’information sur la convention de reclassement personnalisé remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, et en toute hypothèse avant l’expiration du délai ouvert pour accepter ladite convention.

En conséquence, l’employeur ne peut faire connaître au salarié le motif économique de la rupture du contrat de travail par un document postérieur à l’issue du délai de réflexion pour accepter la convention de reclassement personnalisée

Par ailleurs, il résulte de la combinaison des règles sus-visées que l’écrit remis au salarié dans les conditions ci-dessus énoncées doit préciser l’incidence des difficultés économiques alléguées sur l’emploi du salarié concerné.

La sanction d’un manquement à ces règles est que la rupture du contrat est dépourvue de cause réelle et sérieuse.

'

Dans ces conditions, il convient de rechercher si la lettre de convocation à l’entretien préalable qui informait le salarié de la mise en oeuvre d’une procédure de licenciement pour motif économique avec proposition d’une convention de reclassement personnalisée contient l’énonciation d’un motif économique et si l’écrit remis au salarié précise l’incidence des difficultés économiques alléguées sur son emploi.

En l’espèce, il n’est pas été contesté que M. C Y a été convoqué à un entretien préalable et qu’il lui a été alors adressé un document dactylographié intitulé «'document de présentation de la réorganisation de la société RUE DU COMMERCE et de ses conséquences'» en date du 29 juin 2010'.

Le début de ce texte était rédigé de la façon suivante':'«'en application des critères prévus au PSE, nous avons le regret de vous informer que nous sommes amenés à envisager votre licenciement dans le cadre d’un licenciement collectif, sous réserve des éventuels départs ou possibilités de reclassements. C’est donc dans ce contexte que le présent entretien a été organisé afin de vous expliquer le motif économique, la procédure d’information des représentants du personnel, les mesures de reclassement et afin de vous remettre une convocation de reclassement personnalisé'(').'» La suite du texte était divisée en trois parties intitulées':' «'A -les raisons économiques de la mise en place de la nouvelle réorganisation «'; «'B-Procédure d’information-consultation des représentants du personnel'»'; «'C-les mesures de reclassement'».

La première partie (A) rappelait que «'le marché des produits informatiques et électroniques grand public a enregistré, un niveau mondial, un recul de 2'% de ses ventes en 2009'»'; qu’en «'France la récession mondiale a bien entendu impacté le marché mondial. Ainsi, les ventes ont connu une croissance négatives en 2008, avec une baisse de 3'% en valeur'; «'que les prévisions en 2010 sont également pessimistes': une nouvelle baisse est attendue avec des ventes évaluées à 17,3 milliards d’euros'»'; qu’en ce qui concerne la société «'les résultats qui ont été présentés au marché en juin 2010 font apparaître une nouvelle dégradation sensible des résultats de l’entreprise et les premières projections sur l’exercice 2010/2011 risquent de confirmer cette tendance'»'; que la société «'est directement impactée par cette baisse des marges'»'; que de plus «'les entreprises sur internet sont soumises à une autre contrainte': l’augmentation des frais logistiques'»'; que «' la baisse continue de l’euro par rapport au dollar est très critique pour le marché des composantes informatiques et devrait se traduire par une remontée des prix, freinant le consommateur final sans toutefois réduire la pression de la concurrence'; que cette tendance doit être prise en compte par la société dans un soucis de sauvegarder sa compétitivité'; qu’en effet la dégradation continue de l’activité historique met désormais en danger la société si des mesures correctrices n’étaient pas mises rapidement en 'uvre'; que «' pour répondre à la réalité du marché (concurrence exacerbée et absence de nouveautés technologiques entraînant une pression sur les prix, hausse des frais logistiques et crise financière qui impacte clairement la consommation des ménages etc…)', la société doit se réorganiser afin d’améliorer sa compétitivité et pérenniser son activité.'»

La cour relève que ce document si il énonce des motifs économiques et la nécessité de réorganiser la société afin d’améliorer sa compétitivité ne précise, en revanche pas l’incidence des difficultés économiques alléguées sur l’emploi de M. C Y'.

La société RUE DU COMMERCE , ne conteste d’ailleurs pas ce point. Elle se contente de soutenir qu’elle n’avait pour obligation que de porter à la connaissance du salarié les motifs économiques de la rupture et non l’incidence de la réorganisation sur l’emploi du salarié.

La cour considère que dès lors qu’il est constant que lorsque le licenciement est prononcé pour motif économique, la lettre de licenciement doit énoncer à la fois les raisons économiques de celui-ci et leur incidence sur l’emploi ou le contrat de travail'; il en va de même en ce qui concerne la rupture par acception d’une convention de reclassement personnalisée, par transposition des règles applicables et qu’une information écrite doit être donnée au salarié, antérieurement à la rupture non seulement sur les motifs économiques mais également sur leur incidence sur le contrat de travail du salarié concerné.

Dès lors, si le document remis au salarié le 29 juin 2010, indique bien les motifs économiques du licenciement, il ne précise pas quelle incidence la réorganisation de l’entreprise aura sur le poste de M. C Y'.

La société RUE DU COMMERCE soutient encore, que la suppression du poste de

M. C Y est clairement indiquée dans le courrier qui lui a été adressé le 26 juillet 2010'.

La cour constate que le courrier du 26 juillet 2010, intitulé en objet':'«'acceptation de CRP-rupture d’un commun accord'»', qui reprend les données économiques figurant dans la note du 29 juin 2009 précise’ que:'«'dans la mesure où vous appartenez à la catégorie professionnelle visée par le PSE, en raison de la suppression de votre poste et en application des critères, nous vous avons remis une convocation en date du 28 juin 2010 afin de vous rencontrer dans le cadre d’un entretien d’information'», ce courrier rappelant en outre que le «'contrat de travail a donc été rompu d’un commun accord à l’expiration du délai de réflexion, soit le 20 juillet 2010'».

Dès lors, il est établi que la suppression du poste de M. C Y n’étant énoncée que dans un document remis au salarié postérieurement à la rupture de son contrat de travail, l’information qui lui a été donnée est tardive et ne peut avoir aucun effet, sur la régularité de la rupture.

Dans ces conditions, la rupture du contrat de travail de M. C Y est dépourvue de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences pécuniaires

Le caractère dépourvu de cause réelle et sérieuse de la rupture du contrat de travail de

M. C Y ouvre droit au profit de M. C Y à réparations.

La société RUE DU COMMERCE fait valoir que M. C Y a crée une nouvelle structure. M. C Y, verse aux débats une attestation de la société d’expertise comptable «'Audit conseil comptabilité «' en date du 14 décembre 2012, aux termes de laquelle cette société atteste en sa qualité d’expert comptable que la SAS FASTERIZE «'à (sa) connaissance et compte tenu des éléments en (sa) possession, M. C Y président de la SAS FASTRIZE n’a perçu aucun revenu de la société depuis sa création le 16 juillet 2011';'»

M. C Y justifie par la production d’un avis du 2 octobre 2013 qu’il était inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi en catégorie 1 depuis le 24 juillet 2011'.

Compte tenu des documents versés aux débats, la cour évalue à la somme de 70.000 € le préjudice subi par M. C Y'.

En application de l’article L1235-4 du code du travail, il y a lieu d’ordonner le remboursement par l’employeur aux organismes concernées, des indemnités de chômage qu’ils ont versées au salarié licencié du jour de son licenciement à concurrence de six mois de d’indemnités chômage versées.

Sur le non respect des critères d’ordre de licenciement

Cette demande est formée à titre subsidiaire dans les motivations des conclusions de

M. C Y, cependant le caractère subsidiaire de cette demande n’est pas repris au dispositif des dites conclusions et il est demandé à ce titre le versement de la somme de 11.443 € net à titre de dommages-intérêts pour défaut d’information sur les critères ayant présidé à l’ordre des licenciements.

La rupture du contrat de travail de M. C Y ayant été déclarée sans cause réelle et sérieuse, l’examen de ce grief devient sans objet.

Sur la priorité de réembauche

M. C Y a fait valoir le 3 septembre 2010 sa priorité de réembauche'. Il indique qu’il résulte du registre du personnel que des salariés ont été embauchés, sans que ces postes lui soit proposé.

L’article L1233-45 du code du travail dispose que «'le salarié licencié pour motif économique bénéficie d’une priorité de réembauche durant un délai d’un an à compter de la date de la rupture de son contrat s’il en fait la demande au cours de ce même délai (').

Il est constant que seule doit être prise en considération la période écoulée entre la demande du salarié et le terme d’un an par rapport à la rupture. En l’espèce, la période d’embauche est donc comprise entre le 3 septembre 2010 et le 20 juillet 2011'.

La cour observe qu’il résulte de l’examen du registre d’entrée et de sortie du personnel versé aux débats, pour la période du 1er février 2010 au 6 décembre 2010 que la société RUE DU COMMERCE a procédé':

— le 24 septembre 2010 à l’embauche de M. Z Davy comme «'chef de produit sénior'» statut cadre et le 2 novembre 2010,

— le 11 octobre 2010 à l’embauche de Mme G H en qualité de directeur des opérations, statut cadre.

— de M. E F en qualité de «'ingénieur système et réseau'» statut cadre.

En ce qui concerne le premier poste, la société RUE DU COMMERCE relève que ce poste avait été proposé à M. C Y dans le cadre de l’obligation de reclassement et que M. C Y ne l’a pas accepté. La société RUE DU COMMERCE ne s’explique pas sur les deuxièmes et troisième embauches.

La cour constate que la société RUE DU COMMERCE a procédé le 1er juillet 2010 à l’embauche de M. K X en qualité de «'directeur des opérations'» , mais qu’il résulte du livre d’entrée et sortie du personnel que celui-ci est sorti des effectifs de l’entreprise le 28 août 2010 avec l’observation suivante':'«'salarié mis fin à la période d’essai le 31 août 2010'»'. La société RUE DU COMMERCE qui explique qu’elle ne pouvait pas proposer à M. C Y le poste de «'directeur des opérations'» le 29 juin 2010, car le processus d’embauche de M. X pour ce poste était engagé depuis de longs mois, et qu’en conséquence ce poste n’était alors pas disponible, ne s’explique pas des raisons qui l’ont conduit à embaucher le 11 octobre 2010, pour ce poste, devenu disponible en raison du départ de l’entreprise de M. X, sans le proposer à M. C Y., alors que celui-ci avait manifesté la volonté de bénéficier de son droit à être réembaucher dans l’entreprise.

Dans ces conditions, le jugement du conseil des prud’hommes doit être confirmé en ce qu’il a jugé que la priorité de réembauche n’avait pas été respectée.

Il en est résulté par M. Y un préjudice, qui sera réparé par l’octroi d’une somme de 23.000 €.

Sur l’absence de bénéfice des temps de rétablissement

L’avenant en date du 10 janvier 2008 versé aux débats est rédigé de la manière suivante :'Vous avez été embauché le 02/01/2001 en qualité de Directeur Technique, au sein du service informatique.

Notre activité de commerce en ligne rend indispensable la mise en place d’astreintes au sein du département Informatique puisqu’il est vital que notre système d’information soit constamment opérationnel tant en interne qu’en externe, étant précisé que nous souhaitons formaliser par la présente les modalités de mise en oeuvre et d’indemnisation des astreintes qui sont consécutives à vos fonctions et que vous avez acceptées.

Il a été donc été convenu ce qui suit.

Article 1 : Définition de l’astreinte

« Une période d’astreinte est une période qui se situant en dehors de la période normale de travail pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition immédiate et permanente de son employeur, doit être en mesure d’effectuer les interventions que ce dernier requiert, que ce soit à la suite d’un déplacement physique, depuis son domicile selon un décompte effectué au sein de chaque entreprise. »

Article 2 : Fréquence et durée des astreintes du service technique

Les périodes d’astreinte de Monsieur C Y s’effectueront sur la base exclusive du volontariat et prendront effet le lundi soir à 19 heures, pour s’achever le lundi soir suivant à 19 heures, étant précisé que cette période d’astreinte hebdomadaire et les interventions du service Informatique seront planifiées au moins 15 jours à l’avance par l’émargement du cahier des plannings prévisionnels.

Ce planning peut être modifié en fonction des besoins du service sous réserve que Monsieur C Y soit informé de cette modification dans un délai préalable de 15 jours, sauf cas d’urgence autorisant la réduction du délai de prévenance à un jour franc.

Article 3 : Rémunération et compensation des astreintes

3.1 Indemnisation du temps d’intervention pendant l’astreinte : Il est décompté au titre du temps de travail et rémunéré comme tel, en sus de l’indemnisation de l’astreinte, au taux normal auquel s’ajoutera les éventuelles majorations résultant des conditions spécifiques de l’intervention (heures de nuit, de dimanche, supplémentaires). Il est précisé que le temps de déplacement occasionné par les interventions ont également la nature de temps de travail effectif dans la limite du trajet estimé domicile/lieu de travail et rémunéré selon les conditions en vigueur au sein de l’entreprise.

3.2 Contrepartie de l’astreinte : A défaut d’accord collectif et, après consultation et information du comité d’entreprise, l’astreinte est indemnisée selon les modalités suivante :

Le salarié sous astreinte reçoit, par semaine d’astreinte, une prime d’astreinte de 300 (trois cents) euros bruts.

Les temps de déplacement occasionnés par les interventions ont également la nature de temps de travail effectif et rentrent donc dans la durée d’intervention.

Toute heure d’intervention compte pour une heure pleine de travail effectif.

Chaque heure d’intervention sera rémunérée à deux fois le taux horaire normal de l’intervenant, cette majoration incluant toutes majorations dues pour le travail de nuit, jour férié, dimanche ou heures supplémentaires.

3.3 Temps de rétablissement : En cas d’intervention pendant la période d’astreinte, un temps de rétablissement, c’est-à-dire un temps de repos d’une demie journée suivant l’intervention sera accordé à la personne d’astreinte. Pendant ce temps de rétablissement, l’astreinte reste effective.

(…)'

M. C Y fait valoir que la société RUE DU COMMERCE n’a pas respecté les termes de l’avenant signé le 10 janvier 2008 et qu’il n’a jamais bénéficié de ce temps de rétablissement', alors qu’il est intervenu 167 fois pendant deux ans et aurait dû avoir 167/2=83,5 jours de repos'. Il demande en conséquence la condamnation de la société RUE DU COMMERCE à une réparation calculée de la façon suivante': 11.443,43 €/30x83,5

=31.850,87 euros. . La société RUE DU COMMERCE s’oppose à cette demande au motif qu’elle est tardive et que M. C Y occupant un poste de directeur appartenant au comité de direction ne justifiait pas de son temps et s’organisait comme il le souhaitait et prenait donc régulièrement ses jours de rétablissement sans formalisme, dans le cas contraire la société lui réglait les heures non prises', ainsi que cela résulte du bulletin de paye établi pour le mois de mai 2009.

La cour relève qu’il résulte notamment du bulletin de paye de M. C Y établi pour le mois de mai 2009, que celui-ci a perçu la somme de 2.281',08 € bruts au titre de l’astreinte et 221,43€ au titre de «'absence autorisée payée heure de récupération'», le salaire étant par ailleurs calculé sur une base de':'»151,67heures'».

Dans ces conditions, la preuve n’est pas rapportée que M. C Y était un cadre dirigeant rémunéré au forfait et il est bien fondé à demander dans le cadre de la présente pocédure le paiement de ses jours de récupération', même s’il n’en a pas la fait la demande précédemment auprès de son employeur.

Il résulte du tableau détaillé qu’il a versé aux débats et qui n’est pas contesté par l’employeur qu’il est intervenu à 167 reprises pendant ses heures d’astreinte entre le 1er janvier 2008 et le 2 mai 2010.

Par ailleurs, l’examen des bulletins de salaires pour cette période fait apparaître sur le bulletin de paie du mois de mai 2009': la mention «'abs autor payée heures récupération -3,5'; retenue 221,43€ et heures de récupération , 3,5'; gain': 221,43€'»'; et le bulletin de paie établi pour le mois d’avril 2010 la mention «'abs autor payée heures récupération -7'; retenue 422,73€ et heures de récupération , 7'; gain': 422,73€'»

Il en résulte qu’il n’a pas bénéficié, en dehors de ces deux mois, des demi-journées de récupération prévues à l’avenant.

Dans ces conditions, M. C Y est bien fondé à solliciter la condamnation de la société RUE DU COMMERCE à lui payer la somme de 31.850,87 euros -(221,43+422,73€) =31.206,71€.

Sur les autres demandes

La société RUE DU COMMERCE succombant dans ses prétentions doit être condamnée aux entiers dépens, et l’équité commande d’accorder à M. C Y une indemnité de 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a :

— dit que la rupture n’était pas fondée sur une cause réelle et sérieuse,

— dit que la priorité de réembauche n’avait pas été respectée et les temps de rétablissements pas indemnisés ;

— débouté les parties du surplus de leurs demandes

— condamné la société RUE DU COMMERCE aux dépens.

Infirme sur le quantum des réparations,

statuant à nouveau,

Condamne la société RUE DU COMMERCE à payer à M. C Y la somme de 70.000 € à titre de dommages-intérêts,

Condamne la société RUE DU COMMERCE à payer à M. C Y la somme de 23.000 € à titre de dommages-intérêts pour non respect de la priorité de réembauche';

Condamne la société RUE DU COMMERCE à payer à M. C Y la somme de 31.206,71€ au titre des temps de rétablissements ;

y ajoutant,

Condamne la société RUE DU COMMERCE à rembourser à Pôle Emploi de son lieu d’affiliation les indemnités de chômage versées à M. Y dans la limite de six mois d’indemnités chômage versées ;

Condamne la société RUE DU COMMERCE à payer à M. C Y la somme de 2000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société RUE DU COMMERCE aux dépens.

Le greffier Le Président

S. MASCRIER D. JOLY

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Cour d'appel de Lyon, 16 décembre 2013, n° 12/03952