Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 15 mai 2020, n° 17/07922

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, ch. soc. c, 15 mai 2020, n° 17/07922
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 17/07922
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Saint-Étienne, 24 octobre 2017, N° F16/00302;2020-304
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 17/07922 – N° Portalis DBVX-V-B7B-LK7Q

X

C/

SAS OMERIN

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de SAINT ETIENNE

du 25 Octobre 2017

RG : F16/00302

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 15 MAI 2020

APPELANT :

G X

[…]

[…]

représenté par Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON

ayant pour avocats plaidant Me Elodie LEGROS et Me Gilles LOPEZ de la SELARL UNITE DE DROIT DES AFFAIRES, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMÉE :

SAS OMERIN

[…]

[…]

[…]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON

Ayant pour avocat plaidant Me Philippe PATAUX de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 07 Février 2020

Présidée par M N-O, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de K L, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

— M N-O, président

— Laurence BERTHIER, conseiller

— Bénédicte LECHARNY, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Vu l’état d’urgence sanitaire, la décision prorogée est rendue le 15 Mai 2020

La notification du présent arrêt est opérée par tout moyen en application de l’article 10 de l’ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux

juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale, tel que précisé par l’article 2.i de la circulaire du 26 mars 2020 CIV/02/20 – C3/DP/2020030000319/FC

Signé par M N-O, Président et par K L, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat à durée indéterminée, la société OMERIN SAS a engagé Monsieur G X en qualité de directeur du site industriel de SAINT ETIENNE à compter du 2 septembre 1996.

La relation de travail était régie par la convention nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

Au dernier état de la relation de travail, la rémunération mensuelle brute s’établissait à la somme de 9153,20 €.

Le 30 septembre 2015, Monsieur X a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable à son licenciement pour le 12 octobre 2015.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 16 octobre 2015, la société OMERIN a notifié à Monsieur X son licenciement dans les termes suivants:

'Monsieur,

Nous faisons suite à l’entretien, qui s’est déroulé le 12 octobre 2015 et au cours duquel nous vous avons exposé les faits que nous vous reprochons.

Nos échanges ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation de la situation. En conséquence nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute.

Toutefois, eu égard à votre ancienneté, et à votre situation, bien que considérant que les faits qui vous sont reprochés relèvent incontestablement de la faute grave, la rupture de votre contrat de travail prendra effet à l’issue d’un préavis de 3 mois, que nous vous dispensons toutefois d’effectuer ; votre indemnité conventionnelle de licenciement vous sera versée aux termes de votre préavis.

S’agissant des motifs de votre licenciement, ils sont les suivants :

En tant que Directeur du site et président du CHSCT, une de vos missions principales voire la première de vos obligations est de veiller à la sécurité des biens et des personnes sur le site de OMERIN division silisol. Or ce que nous avons constaté sur votre site est purement et simplement inadmissible à nos yeux.

Dans un premier temps nous avons été alertés par l’aspect désastreux d’une zone de plus de 500 m2 situés à l’arrière de l’usine, sorte de décharge sauvage à ciel ouvert où sont entreposées quantités de déchets, a priori majoritairement des cartons. Mais bien plus grave, ont été retrouvés dans cette zone des fûts et des bidons directement stockés contre le mur de l’atelier des fours à enduction. Si nous n’avons pas été capables pour l’instant d’identifier toutes les substances présentes dans ces divers contenants, nous avons en revanche établi la présence de deux énormes bidons de white spirit dont l’un des deux a son couvercle corrodé et bombé. A priori ils sont là depuis plusieurs mois et ont été soumis à d’importantes variations de chaleur.

Un bref état des lieux des produits chimiques rentrés en stock depuis plus de 5 ans a permis d’identifier 31 codes articles différents parmi lesquels des vernis acryliques, des colorants laqués, de l’huile de tréfilage, des fixateurs et de très nombreux additifs dont du silane. Or sur l’ensemble de ces produits, il apparait que nous ne disposons que de 6 fiches de données sécurité. Autant dire que la situation n’est absolument pas sous contrôle et aurait pu avoir des effets désastreux.

Quelques uns de ces produits, dont certains contenants sont abîmés (fuite et trous), sont stockés dans le magasin, sans disposition particulière. Toutefois, la très grande majorité de ces articles sont des produits dangereux et sont stockés à ce titre dans un lieu dédié au stockage des matières dangereuses. Lorsque que nous avons inspecté cette zone de stockage, nous avons été particulièrement choqués et effarés par les points suivants :

Devant l’entrée du local, à l’extérieur, sont présents de nombreux bidons remplis de substances indéterminées Aucune signalétique, que ce soit à l’extérieur ou à l’intérieur de la zone de stockage, ne fait mention de la nature dangereuse des produits et des équipements spécifiques à porter pour les manipuler

A l’intérieur du local, il n’y a aucune organisation mise en place ; les produits sont juste stockés, à même le sol pour la plupart et saris bac de rétention

Les risques d’interaction éventuelle entre les produits ne sont pas pris en compte or on trouve des bidons éventrés ou présentant des fuites qui s’écoulent à même le sol et génèrent des flaques résiduelles

Il n’y a pas non plus de gestion de la durée d’utilisation et on trouve de nombreux produits très anciens dont on ne tonnait pas l’évolution dans le temps

Enfin, nous avons pu constater la présence de deux futs de 200 kg d’additif silane A-172 datant d’avant 1999,c’est-à-dire de l’époque où silisol faisait elle-même ses mélanges. Or ce produit est explosif et présente à ce titre, dans cette quantité et dans ces conditions de stockage, un véritable danger pour le site et le personnel bien entendu.

En somme, en dépit des règles les plus élémentaires en matière de risque chimique, vous stockez de nombreux produits toxiques, non triés, avec des substances susceptibles d’interagir entre elles, exposés à des variations de températures importantes, pour certains particulièrement anciens et pour lesquels vous rie possédez aucune fiche de données sécurité. A cet égard, vous exposez le personnel et le site tout entier à un risque chimique avéré qui pourrait avoir des conséquences dramatiques, sur le plan humain bien entendu mais aussi sur le plan environnemental, sans parler des coûts de décontamination des zones polluées qui nous incomberaient en cas d’accident.

Ces faits à eux seuls constituent à nos yeux un motif de faute grave. Ils illustrent parfaitement votre négligence, votre défaut d’organisation et votre absence de réactivité. Mais ce ne sont malheureusement pas des faits isolés et nous avons par ailleurs de nombreuses insuffisances professionnelles à vous reprocher.

Que ce soit lors de l’entretien du 9 septembre 2014 ou plus récemment le 20 juillet dernier, j’ai régulièrement eu l’occasion de vous alerter sur l’écart grandissant entre nos attentes et votre façon d’exercer la mission qui est la votre, que ce soit en matière de gestion des achats, de l’organisation de la production ou de votre implication plus générale dans la recherche d’optimisations. A l’inverse, vous avez mis toute votre énergie à faire en sorte de perpétuer une organisation obsolète et inefficace destinée à masquer votre incompétence au lieu de chercher et trouver des solutions aux problèmes du site, quitte même à menacer ceux dans vos équipes qui se plaignent de la situation et souhaitent faire avancer les choses.

En ce qui concerne les achats, vous ne cherchez pas à optimiser les coûts et vous continuez d’acheter des matières premières à des prix prohibitifs alors que des alternatives beaucoup moins chères existent et sont utilisées au sein du groupe. Par exemple, nous utilisons un fil inox écroui 0,125 mm dans un de nos joints pour porte de four pyrolyse. Nous avons commencé à utiliser ce fil fin 2013 et nous savons depuis mi 2014 que ce produit va monter en charge et nécessitera 4 000 kg à partir de 2016. Vous achetez ce fil 17,40 €/kg, alors que nous pouvons l’acheter 4,40 €/kg chez notre fournisseur habituel. Ce simple changement permettrait de dégager une économie de près de 50 K€ par an.

De même, nous utilisons sur le site de St-Etienne environ 1 200 kg par an de ruban mica, et les volumes augmentent avec la prise de nouveaux marchés dans le ferroviaire. Vous achetez aujourd’hui le ruban mica chez un fournisseur à près de 24 €/kg, alors que le site d’Ambert utilise un ruban mica d’un autre fournisseur qui coûte 8.51 euros/kg. Alors qu’aucun élément technique ne justifie l’utilisation d’un ruban à 24 €/kg et malgré mes demandes répétées d’utiliser le même ruban qu’à Ambert, vous continuez d’acheter le ruban à 24 fikg. Le simple changement de ruban permettrait de réaliser une économie annuelle de 18 000 euros.

Le 30 septembre dernier, nous avons découvert que la rupture de matière première sur le produit H I, était liée au fait que vous aviez omis d’envoyer au fournisseur la commande de deux tonnes qui était censée avoir été passée mi- septembre. Nous avons donc dû recourir à une livraison express couteuse et bien sûr nous avons désorganisé la production et généré de l’insatisfaction chez notre client du fait du retard.

Ce dernier cas n’est malheureusement pas isolé tant votre manière de gérer les achats et approvisionnement est dépassée. Vous n’utilisez pas les outils mis en place au sein du groupe qui permettent de paramétrer des points de relance et des seuils d’alerte, et vous continuez à gérer les approvisionnements à la main, ce qui n’est pas fiable et vous prend beaucoup trop de temps.

En ce qui concerne l’organisation de la production, vous êtes là aussi totalement dépassé. Alors que nous avons commencé la mise en place de stocks pré conditionnés en touret ou couronne, des articles à gros volume de notre gamme PYRISOL et PYRITEL, vous êtes incapable d’appliquer et de mettre en place la politique que nous avons décidée. Et vous ne savez pas pourquoi. En 2 jours, vous avez donné 2 explications différentes. Vous avez tout d’abord indiqué que nous n’avions pas une capacité suffisante pour faire la gomme silicone nécessaire à l’augmentation de cadence de production. Il vous a alors été suggéré de passer l’atelier de préparation de la gomme en 2 postes au lieu d'1 poste grâce à l’embauche d’une personne, afin de doubler notre capacité. Le lendemain, à l’occasion d’une réunion qualité, vous avez alors indiqué que le goulot d’étranglement se trouvait en fait au niveau du câblage des unitaires, information confirmée par les personnes du planning présentes à cette réunion. Vous avez également indiqué que nous avions une capacité maximum de 40 km par jour en fonctionnant en 3 postes et qu’une seule machine était configurée pour réaliser de manière optimale ce câblage. Bref, le problème vous semblait difficile à résoudre, sauf à acheter une nouvelle machine. J Y vous a alors demandé pourquoi nous n’augmentions pas le pas de câblage de la paire et vous avez répondu que vous aviez toujours produit avec ce pas de câblage et que vous ne connaissiez pas les conséquences techniques d’une modification de ce dernier. La réalité est que vous n’aviez surtout jamais envisagé cette possibilité. Or, il s’avère que notre ingénieur du service R&D spécialiste des câbles de données est installé dans le bureau mitoyen du vôtre et qu’une simple question auprès de lui aurait permis d’en savoir plus. Le 10 juillet dernier, notre ingénieur s’est emparé du dossier et il nous a confirmé /e 29 juillet que nous pouvions presque doubler le pas de câblage et ainsi doubler la vitesse de câblage sans aucune influence sur la qualité du câble. Ii semblait que nous avions réglé en 19 jours un problème technique que vous n’aviez jamais réglé depuis 10 ans I C’était sans compter sur votre immobilisme et votre opposition à cette modification, puisque lorsqu’il vous a été demandé si vous aviez bien fait la modification du pas de câblage début septembre, vous avez indiqué que la situation était compliquée et que vous ne pouviez pas faire la modification tout de suite. Il a donc fallu attendre le 2 octobre 2015 pour que le nouveau pas de câblage, et donc le doublement de notre capacité de production, soit mis en place, sans la moindre difficulté.

Vous ne savez pas ce qui se passe dans les ateliers et vous êtes incapable de prendre les décisions appropriées à court et long terme. Au niveau du magasin par exemple, aucun cahier de relevé des quantités conditionnées n’était mis en place jusqu’à ce qu’on vous le demande en juin dernier Lors d’une discussion concernant l’organisation de l’extrusion que vous avez eu avec Monsieur Y en juillet avec le responsable de l’atelier extrusion et les agents de planning, vous vouliez organiser une production par campagne de couleur alors que nous avions dit 2 jours plus tôt que nous ne voulions surtout pas faire cela. Pire, vous ne saviez pas que nous extrudions de la gomme VARPREN en noir tous les jours !

De plus, alors que nous sommes déjà très chargé au magasin, vous laites réparer les défauts d’extrusion des câbles par les opérateurs de conditionnement au lieu de le faire faire par les opérateurs de l’extrusion. Résultat, ceux qui font les erreurs ne sont pas impactés et la productivité du magasin est très fortement dégradée (2 h pour conditionner 500 m au lieu de 10 000 m).

En ce qui concerne la gestion des effectifs, celle-ci est calamiteuse. Afin de pallier à vos problèmes d’organisation, vous embauchez des intérims à tour de bras alors que, depuis de nombreuses années, je vous demande de limiter au maximum l’intérim, ce statut devant être limité au profit d’embauches à plus long terme en CDD ou CDI.

Nous avons ainsi dû faire face à deux dossiers contentieux soldés en 2013, où nous avons dû dédommager à hauteur de près de 46 000 € au total, deux anciennes intérimaires qui avaient enchaîné les contrats d’intérim pendant plus de dix ans et réclamaient réparation du préjudice de n’avoir jamais été embauchées.

Aujourd’hui, nous faisons face à des retards de livraison de plus en plus fréquents chez nos clients. Après de multiples échanges informels, vous avez été alerté par écrit à de multiples reprises durant tous les mois de mai et juin sur des dossiers précis. Vous n’avez malheureusement pas pris la mesure de la situation et vous n’avez réglé aucun problème. Par exemple, en ce qui concerne le dossier CAF, alors que nous étions très en retard, J Y vous a demandé de regarder le dossier, mais vous ne vous en êtes pas occupé et il a du régler le problème lui-même. L’utilisation des machines n’est pas optimisée et nous sommes régulièrement en rupture de matière première. Ainsi, au 31 juillet 2015, nous avions plus de 700 km de fils et câble en retard de livraison.

Cette situation est d’autant plus regrettable que nous avons réalisé de gros investissements en machines et en bâtiments et que nous avons toujours répondu positivement à vos demandes d’investissement ou d’embauche.

En conséquence, votre maintien au sein de l’entreprise n’est plus envisageable.

Nous vous transmettrons au terme de votre préavis, par courrier séparé, le solde votre compte, l’attestation Pôle Emploi et votre certificat de travail.

Vous pourrez faire valoir à l’issue de votre contrat de travail la portabilité de vos droits en matière de prévoyance/frais de santé ; un document à cet effet vous sera transmis.

Enfin, nous vous libérons d’ores et déjà par la présente de toute obligation de non concurrence; vous êtes par conséquent libre de tout engagement à l’égard de la société.'

Le 16 juin 2016, Monsieur X a saisi le conseil de prud’hommes SAINT ETIENNE en lui demandant de déclarer son licenciement sans cause réelle et sérieuse, de condamner en conséquence la société OMERIN à lui payer des dommages-intérêts pour licenciement abusif, une indemnité compensatrice de préavis, une indemnité de licenciement, outre un rappel de salaire afférent à la période de mise à pied conservatoire.

Par jugement rendu le 25 OCTOBRE 2017 , le conseil de prud’hommes:

— constaté que la société OMERIN SILISOL a régulièrement notifié à Monsieur X son licenciement pour cause réelle et sérieuse,

— constaté que le licenciement repose bien sur une faute réelle et sérieuse,

— constaté que la société OMERIN doit à Monsieur X la somme de 2519 € au titre de l’article 83 du code général des impôts,

En conséquence

— dit que le licenciement de Monsieur X repose sur une faute réelle et sérieuse,

— déboute Monsieur X du surplus de ses demandes,

— déboute la sociéyé OMERIN SILISOL de toutes ses demandes,

— condamne la société OMERIN SILISOL à payer à Monsieur X la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— laisse les entiers dépens à la charge de la société OMERIN SILISOL.

La cour est saisie de l’appel interjeté le 13 novembre 2017 par Monsieur X.

Par dernières conclusions, Monsieur X demande à la Cour de :

INFIRMER le jugement du Conseil de Prud’hommes de SAINT-ETIENNE du 25 octobre 2017 en ce qu’il a :

— Constaté que la Société OMERIN a régulièrement notifié à Monsieur X son licenciement pour une cause réelle et sérieuse

Constaté que le licenciement repose bien sur une faute réelle et sérieuse

— Dit et jugé que le licenciement de Monsieur X repose sur une faute réelle et sérieuse

Débouté Monsieur X de ses demandes, sauf en ce qui concerne la somme de 2519 euros au titre de l’article 83 du CGI et la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

STATUANT A NOUVEAU, Monsieur X demande à la Cour de bien vouloir :

CONSTATER le licenciement de Monsieur X sans cause réelle et sérieuse CONSTATER l’exécution déloyale du contrat de travail par la Société OMERIN

CONDAMNER la Société OMERIN à verser à Monsieur X la somme de 220 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

CONDAMNER la Société OMERIN à verser à Monsieur X la somme de 60 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et licenciement vexatoire

CONDAMNER la Société OMERIN à verser à Monsieur X la somme de 220 000 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de droit à la retraite

CONDAMNER la Société OMERIN à verser à Monsieur X la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour ne pas avoir pu bénéficier de jours de repos du temps de travail

CONDAMNER la Société OMERIN à verser à Monsieur X la somme de 18 195 euros au titre des jours de RTT non pris outre la somme de 1819,50 euros à titre de congés payés afférents

CONDAMNER la Société OMERIN à verser à Monsieur X la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour ne pas avoir perçu ses droits à participation selon les règles légales

ENJOINDRE à la Société OMERIN, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de justifier et de régulariser l’assiette de participation et le calcul de la RSP en tenant compte des règles légales

SE RESERVER le droit de liquider l’astreinte et CONDAMNER la Société OMERIN à verser à Monsieur X ses droits de participation régularisés en conséquence

CONDAMNER la Société OMERIN à verser à Monsieur X la somme de 129 011 euros au titre de l’astreinte permanente outre la somme de 12901 euros à titre de congés payés afférents

unité de droit des affaires

CONDAMNER la Société OMERIN à verser à Monsieur X la somme de 297,77 euros au titre de différence de cotisations prélevées et le total des versements sur le décompte AG2R

CONDAMNER la Société OMERIN aux entiers dépens et à verser à Monsieur X la somme de 3146,52 euros au titre des frais d’huissier avancés

CONDAMNER la Société OMERIN à verser à Monsieur X la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel

CONFIRMER le jugement du 25 octobre 2017 en ce qu’il a condamné la Société OMERIN à verser à Monsieur X la somme de 2519 euros au titre de la de contribution article 83 déduite du salaire net ainsi que la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en 1re instance.

Aux termes de ses dernières conclusions, la Société OMERIN demande à la Cour de :

— confirmer le licenciement pour cause réelle et sérieuse,

— confirmer en tout point le jugement déféré sauf en ce qu’il ordonne le paiement de 2519 € au titre de l’article 83 du CGI,

— rejeter l’ensemble des demandes de Monsieur X,

Et en tout état de cause de :

— condamner Monsieur X à régler à la société la somme de 5000 € sur me fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner Monsieur X aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 14 janvier 2020.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions que les parties ont régulièrement notifiées pour l’exposé complet de leurs moyens.

MOTIVATION.

Sur le licenciement

Il résulte des articles L.1232-1 et L 1232-6 du code du travail que le licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse et résulte d’une lettre de licenciement qui en énonce les motifs.

En vertu de l’article 1235-1 du code du travail, le juge à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure de licenciement suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles; que si un doute subsiste, il profite au salarié.

La lettre de licenciement fixe les limites du litige.

En l’espèce, il ressort de la lettre de licenciement dont les termes ont été restitués ci-dessus que la société OMERIN a licencié Monsieur X pour cause réelle et sérieuse en reprochant au salarié :

* une atteinte à la sécurité des biens et des personnes,

* de ne pas avoir recherché une optimisation des coûts des matières premières,

* d’être totalement dépassé en ce qui concerne l’organisation de la production,

* une gestion calamiteuse des effectifs,

* des retards de livraison.

Monsieur X conteste la réalité de ces griefs et soutient qu’ils ne correspondent pas à ceux qui lui avaient été exposés lors de l’entretien et sur lesquels il avait pu s’expliquer.

Il soutient également qu’alors qu’il n’avait fait l’objet d’aucune remarque ni sanction pendant 19 ans, il a été reconduit à la porte de l’entreprise en moins d’une minute et indique que cela est intervenu car il ne cautionnait pas certaines décisions managériales, techniquement et contractuellement contestables de Monsieur Y, directeur général désigné et antérieurement directeur commercial, notamment des pratiques concernant particulièrement la sécurité, la qualité des produits fabriqués et vendus et le respect de la parole donnée aux clients.

Il ajoute que la mise à pied brutale l’a empêché de retourner dans l’entreprise à compter du 30 septembre 2015, de sorte qu’il a été contraint de solliciter une autorisation de faire procéder à des constats et remises de copies de pièces par huissier.

Cette autorisation lui ayant été accordée, l’huissier s’est transporté sur le site de la société OMERIN le 25 février 2016 et a dressé procès-verbal de constat les 25 et 29 février 2016.

La société OMERIN soutient que :

* les motifs invoqués dans la lettre de licenciement sont à la fois réels et précis, sérieux et objectifs,

* les faits visés dans la lettre de licenciement ont été constatés pae voie d’huissier révélant :

— sur la zone d’entreposage, une véritable décharge à ciel ouvert de plus de 500 M2,

— la présence de fûts et de bidons contre le mur de l’atelier des fours,

— des fiches de données de sécurité non tenues ou incomplètes,

— un local de produit dangereux désorganisé et contenant de nombreux produits très anciens,

* la société OMERIN a pris des mesures de nettoyage et de rangement en urgence pour réduire les premiers risques et a fait faire un audit complet du stock de produits dangereux et des actions à mettre en place pour assurer la sécurité des personnes et du site,

* contrairement à ce que soutient Monsieur X, il a fait l’objet de recadrages oraux et par emails en 2013, 2014 et 2015,

* les griefs allégués concernant la gestion des achats et la qualification de nouveaux fournisseurs sont avérés , ainsi qu’en ce qui concerne la qualité des essais réalisés et l’organisation de la production, mais également en matière de gestion des effectifs et les retards de livraison.

Sur l’atteinte à la sécurité des biens et des personnes.

Dans la lettre de licenciement, il est fait grief à Monsieur X comme directeur du site et président du CHSCT de ne pas avoir veillé à la sécurité des biens et des personnes et il lui est ainsi reproché :

* l’aspect désastreux d’une zone de plus de 500 M2 à l’arrière de l’usine, sorte de décharge sauvage à ciel ouvert où sont entreprosés des déchets, à priori majoraitairement des cartons mais également des fûts et bidons directement stockés contre le mur de l’atelier des fours à induction, la présence de deux énormes bidons de white spirit dont l’un des deux a son couvercle corrodé et bombé : le constat

d’huissier réalisé par la société OMERIN le 14 octobre 2015 décrit que la zone à l’arrière de l’usine est tenue de manière anarchique; or, Monsieur X vient démontrer au moyen des attestations de Messieurs Z et A que cette zone était depuis 10 ans, destinée à entreproser les cartons avant collecte et évacuation pour retraitement par une usine spécialisée, par ailleurs, elle accueillait les déchets industriels non recyclables et les déchets industriels banals.

De plus, Monsieur X démontre au moyen du constat effectué le 25 février 2016, à sa demande, que les fûts marqués white spirit contiennent des colorants et de l’eau, comme cela était déjà le cas en 2015, puisque les fûts en question étaient toujours présents en 2016.

A cet égard et en ce qui concerne le stockage des produits chimiques, il apparaît que la note réalisée en janvier 2016 par la société KAYA ENVIRONNEMENT, ne fait que commenter les photos prises par l’huissier à la demande de la société OMERIN, sans caractériser véritablement et sur site le danger allégué en ce qui concerne le stockage des déchets alors que Monsieur X a au contraire démontré que les cartons comme les déchets non valorisables étaient évacués régulièrement, de sorte que les constatations apparaissent avoir été faites alors que ces déchets n’avaient pas encore été évacués et alors que Monsieur X avait été mis à pied, sans que soit ainsi caractérisé qu’il s’agissait d’un site d’entreprosage non géré,

* en ce qui concerne les fiches de données de sécurité, l’huissier requis par la société OMERIN a constaté sur les affirmations de Monsieur Y que sur l’ensemble des produits en stock, seules 6 fiches de données de sécurité ont été établies. Cependant, l’attestation de Monsieur B met en évidence que la durée d’utilisation des produits était non gérée, ce qui avait été relevé dans un audit de la société IRIS en 2014, rendant nécessaire l’évolution de l’outil informatique, de sorte qu’il est ainsi démontré que l’enregistrement informatique était en cours,

* en ce qui concerne le local produits dangereux, il résulte du constat produit par Monsieur X ainsi que des attestations C et Z que ces produits étaient stockés dans la zone dédiée à cet effet qui était la plus tempérée de l’usine et exempte de variations de températures importantes.

Cela n’est pas sérieusement contredit par l’employeur ni au moyen de son constat ni au moyen de l’audit réalisé par la société KAYA ENVIRONNEMENT.Par ailleurs, le fait que les personnes ayant attesté au profit de Monsieur X soient d’anciens salariés de la société OMERIN, ne permet pas de douter de la sincérité de leur témoignages.

Au surplus, il n’est démontré par aucune pièce de l’employeur, qu’il existerait des produits stockés présentant des risques d’interaction dangereuse entre eux.

Le grief relatif à la défaillance de Monsieur X dans son obligation de sécurité concernant tant les biens et les personnes n’est donc pas établi.

Sur la gestion des achats .

— la société OMERIN reproche à Monsieur X d’être responsable de la rupture de matière première concernant le produit H I, fait découvert en septembre 2015 et qui s’était déjà produit, au regard de la non- utilisation des outils mis en place qui permettent de paramétrer des points de relance et de seuils d’alerte .

Monsieur X soutient que c’est sur le site d’Ambert qu’une rupture de stock a été détectée le 28 ou le 29 septembre 2015 et expose donc qu’il a édité la commande papier pour la transmettre à la société FAINPLAST avec copie à Monsieur D, directeur des achats du site d’Ambert.

La commande est du reste transmise par la société OMERIN en pièce 42 et ne vient pas contredire

les explications de Monsieur X outre qu’en tout état de cause, l’affirmation générale d’inadaptation du salarié aux outils mis en place n’est pas établie pas plus que la récurrence de difficultés sur ce point .

— la société OMERIN reproche encore à Monsieur X d’acheter des matières premières à des prix prohibitifs alors que des alternatives existent et donne l’exemple du fil inox et du ruban mica : cependant, Monsieur X vient démontrer pour contredire les affirmations de la société OMERIN que concernant le fil inox, le volume du produit n’a été décidé qu’entre août et septembre 2015 et non depuis mi 2014, puisque concernant le courriel invoqué, Monsieur X n’en a pas été destinataire.

Dans ces conditions, il apparaît ainsi établi que dès lors que l’employeur avait parfaite connaissance du prix du fil inox chez le fournisseur habituel et avait décidé de lancer une qualification d’un fournisseur indien devant être moins cher, il ne peut venir reprocher à Monsieur X un manque de recherche pour optimiser les coûts des matières premières, s’agissant au surplus de faits prescrits, puisque connus depuis 2 mois avant l’engagement de la procédure.

Concernant le ruban mica, il est également établi qu’aucun fait fautif ne peut être reproché à Monsieur X qui a recherché un fournisseur chinois, à la demande de l’employeur dès le 12 mai 2015 et a été informé le 24 septembre 2015 que le produit chinois avait été déclaré non conforme, ce qui démontre que l’économie que l’employeur reproche à Monsieur X d’avoir manquée n’a jamais existé.

Sur l’organisation de la production.

La société OMERIN soutient que Monsieur X était totalement dépassé sur ce point, ce que ce dernier conteste.

L’employeur fait état d’abord de sa volonté d’augmenter le pas de câblage PYRITEL 1 paire.

Sur ce point, il est établi que Monsieur X ayant suggéré d’évaluer les conséquences techniques de la modification envisagée, le service de recherche et développement a été saisi et a répondu en juillet 2015 que les caractéristiques étaient peu impactées du point de vue uniquement électriques.

Concernant les caractéristiques feu, il n’apparaît pas que la société OMERIN puisse reprocher à Monsieur X d’avoir mis en avant la nécessité de se conformer aux normes de modification ou d’extension édictées à l’article 4.3.4 de la norme NF conducteurs et câbles électriques, s’agissant d’une question de sécurité impliquant des tests longs et coûteux.

Si l’employeur a en effet pris la décision de mettre en place le nouveau câblage dès octobre 2015, il ne peut toutefois reprocher à son salarié d’avoir commandé le câblage non modifié. Du reste, le test produit par l’employeur porte sur les caratéristiques électriques et non sur celles 'feu'.

La société OMERIN a ensuite reproché à Monsieur X de ne pas avoir mis en place un cahier de relevé des quantités conditionnées jusqu’à ce que cela lui soit demandé en juin 2015.

Force est de relever, comme le souligne Monsieur X qu’il s’agit d’un fait que l’employeur ne pouvait plus invoquer au soutien du licenciement notifié le 16 octobre 2015, à raison de la prescription empêchant d’invoquer des faits fautifs au-delà d’un délai de deux mois à compter de la date à laquelle l’employeur en a eu connaissance ;

La société OMERIN reproche enfin à Monsieur X de faire réparer les défauts d’extrusion des câbles par les opérateurs au lieu de le faire faire par les opérateurs de l’extrusion.

Or, ce grief n’apparaît pas démontré, outre que Monsieur X affirme, sans être contredit que les réparations des câbles ont lieu depuis 1996, en magasin.

Sur la gestion des effectifs.

L’employeur reproche à Monsieur X d’avoir embauché des intérimaires à tour de bras, afin de pallier ses problèmes d’organisation et cela alors qu’il lui avait été demandé de limiter ces embauches au maxmum. Il lui est reproché d’être à l’origine, de ce fait, de deux dossiers de contentieux soldés en 2013, ayant coûté 46 000 € en tout.

Il n’est cependant pas contesté par l’employeur que, ainsi que le soulève Monsieur X, le tableau des intérimaires était géré par le service RH de la direction générale, qui l’adressait chaque mois à la direction d’usine, et vérifiait ainsi le respect d’une période maximale d’intérim de deux mois.

Si la direction a pu recadrer Monsieur X en 2013, sur le recours abusif à intérim, il n’apparaît pas établi que d’autres difficultés sur ce point puissent être reprochées à Monsieur X au vu d’un seul exemple concernant l’embauche d’un cariste en juin 2015 et au sujet duquel, il apparaît que la prolongation du contrat d’intérim a été rendue nécessaire du fait du refus du salarié de basculer sur un CDD.

Sur la gestion financière.

L’employeur impute à Monsieur X une gestion calamiteuse au vu d’un rapport de gestion KPMG du dernier semestre 2014 et portant notamment sur la gestion des effectifs comparée entre le site de SAINT ETIENNE et celui D’AMBERT.

Or, si la masse salariale de SAINT ETIENNE est supérieure à celle d’AMBERT, il résulte toutefois de l’examen des chiffres qu’elle est en constante baisse sur le site géré par Monsieur X entre 2012 et 2014, par ailleurs, le rapport KPMG met en évidence que l’ensemble des postes de charges d’exploitation est bien maîtrisé sur ce site et que le résultat courant au 31 décembre 2014 s’établit à 8 millions d’euros en hausse de 1 million par rapport à l’exercice précédent.

Dans ces conditions, le fait que les frais de personnel outre le recours à intérimaire ait baissé entre le 31/12/2015 et le 31/12/2016 ne marque pas de manière évidente une gestion calamiteuse de Monsieur X.

Sur les retards de livraison et l’absence d’optimisation des machines.

L’employeur soutient que les retards de livraison étaient nombreux et récurrents, malgré les moyens à disposition de Monsieur X et malgré les alertes sui lui avaient été faites sur ces dérives et retards à de nombreuses reprises depuis mars 2015 puis par courriel du 15 juin 2015; il est notamment fait état du fait que la société CAF client réalisant un chiffre d’affaires de plus de 3 millions d’euros était en rupture du fait d’un retard de plus de 7 semaines et que Monsieur X ne s’était pas occupé du dossier reportant la faute sur le responsable de planning, Monsieur E, enfin Monsieur Y a fait remarquer qu’il avait pu débloquer la situation en 5 minutes.

Or, Monsieur X vient justifier, sans être contredit, que le retard allégué a été minime, c’est-à-dire moins de deux jours, ce qui n’apparaît pas un grief sérieux au soutien du licenciement, d’autant plus que ne sont produits aucuns éléments sur d’autres retards de livraison, la pièce 28 visée dans les conclusions de la société OMERIN ne correspondant pas à un listing des retards de livraisons.

Au surplus, les échanges de courriels produits aux débats concernant l’incident CAF révèlent que

Monsieur X avait anticipé les process sur les livraisons avec Monsieur E.

Au regard de l’ensemble de ces éléments il est donc établi que les griefs allégués par la société OMERIN dans la lettre de licenciement ne sont pas établis ou ne sont pas sérieux au regard de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise ou encore sont prescrits .

Il s’ensuit que le licenciement de Monsieur X est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris doit être infirmé de ce chef.

Sur les dommages et intérêts

En application des articles L 1235-3 et L 1235-5 du code du travail, Monsieur X ayant eu une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise occupant habituellement 11 salariés au moins, peut prétendre, en l’absence de réintégration dans l’entreprise, à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

En effet, les dispositions issues du nouvel article L 1235-3 du code du travail dans sa rédaction issue des ordonnances dites Macron , sont ici inapplicables, au regard de la date du licenciement,

Compte tenu de l’effectif de l’entreprise, des circonstances de la rupture qui apparaissent avoir été vexatoire et humiliantes, du montant de la rémunération versée à Monsieur X âgé de 50 ans lors de la rupture, de son ancienneté de plus de 19 années, de ce qu’il n’a retrouvé un nouvel emploi que deux années après la rupture, la cour estime que le préjudice résultant pour ce dernier de la rupture doit être indemnisé par la somme de 165 000 euros .

Sur la perte des droits à retraite.

Monsieur X soutient que du fait du licenciement, il va perdre 14 000 € par an de droits à retraite avec la retraite complémentaire et demande donc la somme de 220 000 € de ce chef.

Il expose en effet que, compte-tenu du contexte rappelé et de son âge, il sera nécessairement impacté s’agissant de la consitution de ses droits à retraite, tant concernant les régiles de base que complémentaires, aussi bien sur le pla de la durée de l’assurance que du salaire servant d’assitette aux cotisations de retraite.

La société OMERIN s’oppose à cette demande.

En l’espèce, il apparaît que Monsieur X qui produit un tableau aux fins de démontrer la perte de ses droits à retraite s’il était resté dans l’entreprise, ne produit toutefois aucun élément ni sur sa situation professionnelle actuelle ni sur la date effective de son embauche dans son nouveau travail, de sorte qu’il ne vient pas démontrer le préjudice allégué au titre des droits à retraite et sera en conséquence débouté de sa demande, par confirmation de la décision déférée.

Sur les demandes relatives aux RTT .

Monsieur X soutient d’abord n’avoir pu bénéficier de ses jours RTT : il expose qu’il était soumis au régime du forfait annuel en jours mais que la société OMERIN n’a jamais respecté l’avenant du 31 mars 2000 prévoyant un décompte annuel en jours d’un maximum de 217 par an, un suivi avec le responsable hiérarchique et le DRH et la mise en place d’une commission vérifiant les conditions d’application de ce dispositif.

Il ajoute que eu égard à la convention collective, il devait bénéficier de 3 jours de congés supplémentaires ayant plus de 35 ans et plus de deux ans d’ancienneté.

Il demande donc 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat par l’employeur et en outre demande la somme de 18 195,34 € représentant le paiement des 43 jours de RTT non pris de 2011 à 2015.

La société OMERIN s’oppose à ces demandes faisant valoir que le forfait jours était parfaitement respecté, entre les jours de repos effectivement pris et les jours valorisés au titre de la retraite supplémentaire.

En l’espèce, en ce qui concerne le temps de travail dans le cadre du forfait jours applicable à Monsieur X, il apparaît que la preuve du nombre de jours travaillés est partagée entre le salarié et l’employeur.

Il est constant que le forfait jours concernant Monsieur X était de 217 jours.

Monsieur X produit un tableau en pièce 39 , aux termes duquel il vient indiquer avoir travaillé 227 jours en 2011, 224 en 2012, 228 en 2013, 224,5 en 2014 et 2015.

La société OMERIN produit de son côté en pièce 50 un tableau concernant Monsieur X portant les jours travaillés, les jours de congés et le solde négatif de -13,75 jours , étant précisé qu’en 2015, il a travaillé 154 jours sur 162,75 jours forfait.

Ainsi, Monsieur X a travaillé, selon ce tableau 221,5 en 2012, 228 jours en 2013 et 220 jours en 2014 mais n’a pas travaillé l’intégalité des jours forfait en 2015, de sorte qu’il en résulte que, contrairement à ce qu’il avance, il ne s’est pas vu privé de ses jours de RTT sur l’ensemble de la période visée et ne peut donc réclamer ni dommages et intérêts pour exécution déloyale ni paiement des jours de RTT.

Sur l’absence d’entretien forfait jours.

Monsieur X soutient n’avoir jamais bénéficié d’entretien individuel forfait jours et demande la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts.

Or, la société OMERIN, qui conteste cette demande, produit des grilles d’appréciation individuelle de 2013 à 2014, que Monsieur X nie avoir signé et qui ont été, selon lui, fabriquées.

Cependant, ces éléments, portent la signature de l’évaluateur ainsi que celle du salarié qui correspond, nonobstant la mauvaise qualité de la copie, à celle figurant sur le contrat de travail établi entre les parties, de sorte, que cela démontre que Monsieur X a bien eu des entretiens individuels en septembre 2013 et septembre 2014.

Il convient en conséquence de débouter Monsieur X de sa demande de dommages et intérêts de ce chef.

Sur l’épargne salariale.

Monsieur X soutient ne pas avoir perçu son épargne salariale selon les règles légales et demande la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale.

Il indique en effet que ses droits à participation ont été bafoués depuis la clôture de l’exercice 2011 dans la mesure où la société OMERIN a omis de prendre en considération la somme de 11 564 089 € nets d’impôts dans l’assiette de participation et du calcul de la réserve spéciale de participation.

La société OMERIN considère que Monsieur X n’apporte aucune preuve de ce qu’il avance.

En l’espèce, il apparaît démontré par Monsieur X que la participation des salariés à fin 2011 a été calculé sans prendre en considération une somme de plus de 11 millions d’euros à intégrer dans l’assiette de participation et de calcul de la réserve spéciale de participation, suite à une correction d’erreur relative à l’évaluation des postes matières premières en cours de production et de produits finis pour un montant de 17 636 382 €.

Il apparaît en outre que concernant cette correction qui a permis l’augmentation de plus de 11 millions du résultat exceptionnel de la société OMERIN, le commissaire aux comptes avait attiré l’attention de la société.

Cependant, Monsieur X ne produit aucun élément sur le moment auquel il a perçu son épargne salariale, de nature à démontrer qu’elle aurait été effectivement calculée sur un montant erroné, de sorte qu’il doit être débouté de sa demande de ce chef, par confirmation de la décision déférée.

Sur l’indemnité d’astreinte permanente.

Monsieur X allègue que dès lors qu’il devait être à la disposition permanente et immédiate de la société OMERIN pour assurer si nécessaire une intervention sur le site, il aurait dû bénéficier d’une indemnité d’astreintes accomplies et sollicite à ce titre la somme de 129 011 € outre congés payés afférents, représentant une indemnisation pour la période de 2011 à 2015, sur la base d’un taux de 10 % du salaire.

La société OMERIN s’oppose à cette demande en estimant que Monsieur X ne démontre aucunement l’existence d’une astreinte .

En l’espèce, il appartient à Monsieur X de démontrer qu’il était en permanence à la disposition de son employeur à son domicile ou à proximité afin d’intervenir pour effectuer un travail.

Or, il ne produit aucun élément sur ce point, à l’exclusion de l’incident survenu le mai 205 ( fuite importante dans l’entreprise) dans le cadre duquel, Monsieur Y lui a demandé de l’informer de ce genre d’évènements .

En tout état de cause, Monsieur X qui était le directeur de l’usine de SAINT ETIENNE et percevait une rémunération importante avait , de par ses fonctions, la responsabilité de répondre à la société de sécurité en cas de problème grave.

Sur la quote-part de contribution au titre de l’article 83 du code général des impôts.

Monsieur X affirme que deux irrégularités affectent la mise en ouevre du contrat article 83 par la société OMERIN :

* il existe une différence de 297,77 € entre les sommes prélevées par la société OMERIN pour être versées sur les contrats AG2R à son bénéfice ,

* il apparaît à la lecture de son dernier bulletin de salaire qu’un prélèvement de monétarisation des jours de RTT pour la somme de 2519 euros apparaît en rubrique salariale en janvier 2016, or la contribution résulte exclusivement des cotisations salariales.

La société OMERIN reconnaît que la somme de 2519 €a été saisie à tort à la charge du salarié mais s’oppose concernant la somme de 297,77 €, le défaut de cotisations n’étant pas, selo elle, établi.

En l’espèce, Monsieur X ne démontre pas le défaut de cotisation qu’il allègue et sera débouté

de sa demande concernant la somme de 297,77 €, la décision déférée étant en revanche confirmée concernant la somme de 2519 €.

Sur le remboursement des indemnités de chômage

En application de l’article 1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner d’office le remboursement par l’employeur aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de trois mois d’indemnisation.

Sur les demandes accessoires

Il convient de confirmer la décision déférée en ce qu’elle a condamné la société OMERIN à payer à Monsieur X la somme de 1000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens de première instance;

Il n’apparaît pas inéquitable de débouter la société OMERIN de ses demandes formulées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et de la condamner de ce chef à payer à Monsieur X la somme de 3000 € ainsi qu’aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS,

REFORME la décision déférée en ce qu’elle a dit que le licenciement intervenu reposait sur une faute réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau de ce chef ,

DIT que le licenciement de Monsieur G X se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE en conséquence la société OMERIN à payer à Monsieur G X la somme de 165 000 € à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour circonstances vexatoires du licenciement,

CONFIRME la décision déférée pour le surplus des dispositions, y compris en ce qu’elle a condamné la société OMERIN au paiement de la somme de 1000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de première instance,

Y ajoutant,

ORDONNE d’office à la société OMERIN le remboursement à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à Monsieur G X dans la limite de 3 mois d’indemnisation,

RAPPELLE que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, les autres sommes portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

CONDAMNE la société OMERIN à payer Monsieur G X la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en cause d’appel,

LA DEBOUTE de sa demande de ce chef,

CONDAMNE la société OMERIN aux dépens d’appel.

La Greffière La Présidente

K L M N-O

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Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 15 mai 2020, n° 17/07922