Cour d'appel de Metz, 3ème chambre, 24 février 2022, n° 20/02192

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Sur la décision

Référence :
CA Metz, 3e ch., 24 févr. 2022, n° 20/02192
Juridiction : Cour d'appel de Metz
Numéro(s) : 20/02192
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 20/02192 – N° Portalis DBVS-V-B7E-FMIV

Minute n° 22/00066


Y, Association ACTIVE


C/


E.P.I.C. OPH DE METZ METROPOLE


Jugement Au fond, origine Juge des contentieux de la protection de METZ, décision attaquée en date du 09


Novembre 2020, enregistrée sous le n° 11.19.608

COUR D’APPEL DE METZ

3ème CHAMBRE – TI

ARRÊT DU 24 FEVRIER 2022

APPELANTES :

Madame X Y

[…]

[…]


Représentée par Me François RIGO, avocat au barreau de METZ

Association ACTIVE, es qualités de tuteur de Madame Y X

[…]

[…]


Représentée par Me François RIGO, avocat au barreau de METZ

INTIMÉE :

METZ HABITAT TERRITOIRE

[…]

[…]


Représentée par Me Arnaud ZUCK, avocat au barreau de METZ

DATE DES DÉBATS : A l’audience publique du 25 novembre 2021 tenue par Madame


GUIOT-MLYNARCZYK et Monsieur MICHEL Magistrats rapporteurs qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés et en ont rendu compte à la cour dans leur délibéré pour l’arrêt être rendu le 27 janvier 2022 à cette date le délibéré a été prorogé au 24 février 2022


GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Madame GUIMARAES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :


PRÉSIDENT : Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre


ASSESSEURS : Madame GIZARD, Conseiller

Monsieur MICHEL, Conseiller

FAITS ET PROCEDURE


Par acte sous seing privé du 6 mai 2010, l’EPIC Metz Habitat Territoire a consenti un bail à Mme X


Y portant sur un local d’habitation situé […] à Metz.


Par actes d’huissier du 15 avril 2019, il a fait assigner la locataire devant le tribunal d’instance de Metz et le 23 mai 2019, l’UDAF de la Moselle ès qualités de curateur renforcé de Mme Y. Il a demandé au tribunal de prononcer la résiliation du bail, ordonner l’évacuation de la locataire, la condamner au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation de 444,42 euros révisable, ordonner la suppression du délai de 2 mois de

l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution, condamner Mme Y au paiement d’une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile et rejeter les demandes reconventionnelles.

Mme Y et l’UDAF de la Moselle ès qualités de curateur, ont demandé au tribunal de déclarer nulles les deux assignations et condamner le bailleur à verser à l’UDAF une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile, à titre subsidiaire, le débouter de ses prétentions et à titre infiniment subsidiaire, ordonner une expertise.


Par jugement du 9 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Metz a':


- prononcé la résiliation de la location consentie par Metz Habitat Territoire à Mme Y


- ordonné l’évacuation de Mme Y de l’appartement qu’elle occupe ainsi que de tous occupants s’y trouvant de son chef, au besoin avec le concours de la force publique, dit qu’il sera procédé en tant que de besoin à

l’enlèvement des meubles et objets mobiliers se trouvant dans les lieux et à leur séquestration dans un garde-meubles aux risques et périls de la locataire


- condamné Mme Y à payer à Metz Habitat Territoire une indemnité mensuelle d’occupation de 444,42 euros jusqu’à la libération effective des lieux, tout mois commencé étant dû en totalité et chaque indemnité étant augmentée des intérêts au taux légal à compter de chaque terme impayé, dit que cette indemnité

d’occupation sera révisée conformément aux augmentations qui seront décidées dans le cadre de la législation applicable aux organismes H.L.M et par le conseil d’administration de Metz Habitat Territoire et qu’elle sera payable dans les mêmes conditions que l’était le loyer


- condamné Mme Y à payer au demandeur une somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens


- rejeté le surplus des prétentions de Metz Habitat Territoire.


Par déclaration d’appel déposée au greffe de la cour le 1er décembre 2020, Mme Y a interjeté appel de cette décision en ce qu’elle a prononcé la résiliation du contrat de bail, ordonné son évacuation, l’a condamnée

à payer à Metz Habitat Territoire une indemnité mensuelle d’occupation de 444,42 euros jusqu’à libération des lieux, la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens. Mme Y a été placée sous tutelle par jugement du tribunal judiciaire de Metz du 18 février 2021 et

l’association Active, ès qualités de tuteur, est intervenue volontairement à l’instance.


L’appelante conclut à l’infirmation du jugement déféré et demande à la cour de débouter l’intimé de l’ensemble de ses demandes, subsidiairement d’ordonner une expertise et en tout état de cause le condamner au paiement

d’une somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.


Sur l’irrecevabilité de ses conclusions, elle expose que l’association Active a été désignée en qualité de tuteur le 5 février 2021, que son mandataire ignorait cette décision au jour du dépôt des conclusions justificatives

d’appel, que ses conclusions sont parfaitement valables dans la mesure où elle dispose d’un droit propre lui permettant d’agir en dehors de l’intervention de son tuteur et que par son intervention l’association Active a repris à son compte ses conclusions.


Sur la résiliation, elle soutient que n’est pas rapportée la preuve d’un motif suffisamment grave justifiant la résiliation du bail, qu’elle a des problèmes psychiatriques entraînant des propos incohérents, que son état de santé ne peut justifier la résiliation du bail, qu’elle subit un harcèlement des voisins, que les plaintes de ces derniers ne sont pas fondées et ne justifient pas la résiliation alors que les faits reprochés sont directement liés

à des nuisances qu’elle subit dans le cadre de l’occupation du logement. Elle ajoute qu’elle est victime de vibrations et de bruits en provenance de l’installation électrique non conforme, que l’isolation phonique du logement est insuffisante, qu’une expertise s’impose concernant la cause de ces nuisances et qu’elle subit un trouble de jouissance par la mise en place de caméras à l’intérieur de la copropriété.


L’EPIC Metz Habitat Territoire demande à la cour de:


- déclarer l’appel irrecevable et mal fondé et débouter Mme Y de toutes ses demandes


- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,


- l’infirmer pour le surplus et statuant sur appel incident,


- condamner Mme Y à lui payer une indemnité mensuelle d’occupation de 460,16 euros à compter du 1er avril 2021 jusqu’à libération effective des lieux, tout mois commencé étant dû en totalité et chaque indemnité étant augmentée des intérêts au taux légal à compter de chaque terme impayé


- dire que cette indemnité d’occupation sera révisée conformément aux augmentations qui seront décidées dans le cadre de la législation applicable aux organismes H.L.M et par le conseil d’administration de Metz


Habitat Territoire


- dire que cette indemnité sera payable dans les mêmes conditions que l’était le loyer et les acomptes sur charges


- dire qu’il pourra régulariser les charges comme si le bail n’avait pas été résilié


- condamner Mme Y à lui verser la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.


Il soutient que Mme Y n’est pas représentée en appel par son tuteur alors qu’elle a été placée sous tutelle par jugement du 18 février 2021, de sorte que l’appel est irrecevable.


Sur le fond, l’intimé expose que Mme Y ne respecte pas l’obligation de jouissance paisible des lieux loués, qu’il s’agit d’un trouble grave justifiant la résiliation du bail et son expulsion, que tous ses voisins se plaignent de façon récurrente de ses agissements depuis 2018 et que ces troubles perdurent, que la présence de caméras

a été régulièrement déclarée à la CNIL et les résidents avisés de ce système de surveillance, que le rapport

d’expertise du 3 janvier 2017 confirme le respect des valeurs limites d’expositions électromagnétique fixées par la réglementation et que la société Paselec n’a relevé aucune anomalie lors de son intervention du 8 mars

2017. Elle conclut ainsi à la confirmation du jugement et sollicite l’actualisation du montant de l’indemnité mensuelle d’occupation.

MOTIFS DE LA DECISION


Vu les écritures déposées au greffe le 1er septembre 2021 par Metz Habitat Territoire et le 24 septembre 2021 par Mme Y et l’association Active, auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens';


Vu l’ordonnance de clôture en date du 14 octobre 2021';

Sur la recevabilité de l’appel


Il résulte de l’article 475 du code civil que la personne en tutelle est représentée en justice par le tuteur. Aux termes de l’article 117 du code de procédure civile, constituent des irrégularité de fond affectant la validité de

l’acte le défaut de capacité d’ester en justice. Et selon l’article 121 du même code, dans le cas où elle est susceptible d’être couverte, la nullité ne sera pas prononcée si la cause a disparu au moment où le juge statue.


En l’espèce, si Mme Y a fait l’objet d’une mesure de tutelle prononcée par jugement du tribunal judiciaire de Metz en date du 18 février 2021, l’Association Active, désignée en qualité de tuteur, est intervenue volontairement à l’instance par conclusions du 24 septembre 2021, de sorte que la cause de l’irrégularité a disparu au jour où la cour statue, étant en outre observé que Mme Y n’était plus sous curatelle renforcée au jour de sa déclaration d’appel du 1er décembre 2020.


En conséquence, l’appel est recevable.

Sur la résiliation du bail


En application des dispositions des articles 1728 du code civil et 7 b) de la loi du 6 juillet 1989, il appartient au locataire d’user paisiblement des locaux loués suivant la désignation qui leur a été donnée par le contrat de location. En cas de manquement par le locataire à ses obligations, le bailleur peut solliciter, en application des articles 1217 et 1224 du code civil, la résiliation du contrat de location, dès lors qu’il considère que le manquement relevé est d’un degré de gravité tel qu’il est de nature à empêcher la continuation du contrat, la charge de la preuve de la gravité du manquement du locataire à ses obligations incombant au bailleur.


En l’espèce, il est relevé qu’aux termes du règlement intérieur visé au contrat de bail signé par Mme Y, le locataire doit user et jouir des locaux en bon père de famille et que par note signée par la locataire le 6 juin

2010, il lui a été rappelé l’ensemble de ses obligations contractuelles, comprenant celle de préserver la tranquillité de ses voisins.


Le bailleur produit aux débats les nombreux courriers adressés à Mme Y en novembre et décembre 2018 faisant état de plaintes de ses voisins et la rappelant à l’ordre ou lui demandant de se présenter à des rendez-vous pour évoquer les difficultés rencontrées, les très nombreux courriers et mails adressés par les voisins de la locataire, M. Z et Mme A, de novembre 2018 à mars 2019 décrivant les nuisances subies (insultes, agressions verbales et physiques, affiches accusant ses voisins apposées sur sa porte, crainte pour eux-mêmes et leurs enfants, tapages nocturnes et diurnes), une pétition du 8 mars 2019, une plainte pour diffamation déposée par M. Z le 3 décembre 2018 et des mains courantes les 3 décembre 2018, 4 décembre 2018 et 8 mars 2019. Il ressort de ces pièces que le comportement de Mme Y crée de nombreuses nuisances à l’ensemble de son voisinage, en tapant à toute heure du jour ou de la nuit sur les murs, sols et plafonds de son logement, en insultant et agressant les autres résidents de l’immeuble lorsqu’elle les croise y compris lorsque leurs enfants sont présents, en les accusant verbalement ou par des affiches collées sur sa porte de divers trafics et que, malgré les multiples rappels à l’ordre, mises en demeure et tentatives de médiation du bailleur, ce comportement a perduré, les derniers courriels relatant les mêmes nuisances en octobre 2020 sans interruption depuis les premiers signalements.


C’est à juste titre que le premier juge a considéré que ces faits en raison de leur nature, de leur gravité, de leur durée et de l’insécurité générée auprès des autres habitants caractérisent des manquements graves et répétés de

Mme Y à son obligation légale et contractuelle d’user paisiblement de la chose louée et constituent un motif légitime et sérieux de résiliation du contrat de bail.


Si l’appelante fait état de problèmes psychiatriques, elle n’établit pas que son état de santé serait à l’origine de son comportement, qui perdure depuis des années alors que les mesures de protection sont récentes. De la même manière, elle ne démontre par aucune pièce être victime de harcèlement de la part de ses voisins comme allégué, ni subir un préjudice de jouissance lié à des dysfonctionnements électriques, de sorte que le tribunal a à juste titre rejeté la demande d’expertise judiciaire, étant précisé que le dispositif du jugement ne comprenant aucune mention du rejet de cette demande, il appartient à la cour de statuer.


Enfin, outre le fait que l’appelante ne tire aucun conséquence juridique de ses observations sur la présence de caméras de surveillance, l’intimé établit par les pièces produites que l’installation d’un système de vidéo-surveillance respecte les prescriptions légales.


En conséquence, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a prononcé la résiliation du bail et ordonné

l’expulsion de Mme Y. Sur l’indemnité d’occupation, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande

d’actualisation du montant puisque le jugement, dont il est demandé confirmation, prévoit que cette indemnité

d’occupation est révisable conformément aux augmentations décidées par le bailleur. En outre les demandes de 'dire que’ ne visant pas à la reconnaissance d’un droit mais à une constatation qui ne constitue pas une prétention au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile, la cour n’a pas à statuer de ce chef.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens


Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.

Mme Y, partie perdante, devra supporter les dépens d’appel. Il n’y a pas lieu en équité de faire application de l’article 700 du du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

DÉCLARE l’appel recevable';

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a prononcé la résiliation de la location consentie par l’EPIC Metz


Habitat Territoire à Mme X Y, ordonné l’évacuation de Mme X Y de l’appartement qu’elle occupe ainsi que de tous occupants s’y trouvant de son chef, au besoin avec le concours de la force publique, dit qu’il sera procédé en tant que de besoin à l’enlèvement des meubles et objets mobiliers se trouvant dans les lieux et à leur séquestration dans un garde-meubles aux risques et périls de la locataire, condamné Mme


X Y à payer à payer à l’EPIC Metz Habitat Territoire une indemnité mensuelle d’occupation de

444,42 euros jusqu’à la libération effective des lieux, tout mois commencé étant dû en totalité et chaque indemnité étant augmentée des intérêts au taux légal à compter de chaque terme impayé, dit que cette indemnité d’occupation sera révisée conformément aux augmentations qui seront décidées dans le cadre de la législation applicable aux organismes H.L.M et par le conseil d’administration de Metz Habitat Territoire et qu’elle sera payable dans les mêmes conditions que l’était le loyer, et une somme de 800 euros au titre de

l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;


Y ajoutant, DEBOUTE Mme Y de sa demande d’expertise judiciaire ;

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme X Y aux dépens d’appel.


Le présent arrêt a été signé par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de chambre à la Cour d’Appel de METZ et par Madame GUIMARAES, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


LE GREFFIER LE PRESIDENT
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