Cour d'appel de Montpellier, 14 avril 2016, n° 14/00292

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 14 avr. 2016, n° 14/00292
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 14/00292
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Perpignan, 27 octobre 2013

Texte intégral

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

1° Chambre Section AO1

ARRÊT DU 14 AVRIL 2016

Numéro d’inscription au répertoire général : 14/00292

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 OCTOBRE 2013

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG

APPELANTS :

Monsieur AH F

XXX

XXX

représenté par Me Fernand MOLINA de la SCP DE TORRES-PY-MOLINA-BOSC-BERTOU, avocat postulant et plaidant au barreau des Pyrénées-Orientales

Madame X D

XXX

XXX

représentée par Me Fernand MOLINA de la SCP DE TORRES-PY-MOLINA-BOSC-BERTOU, avocat postulant et plaidant au barreau des Pyrénées-Orientales

INTIME :

Monsieur C F

Chez Madame B – XXX – XXX

XXX

représenté par Me C ESCALE de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE-KNOEPFFLER, avocat postulant au barreau des Pyrénées-Orientales

assisté de Me Sarah HUOT, avocat plaidant substituant la SCP VIAL, avocat

ORDONNANCE de CLOTURE du 17 FÉVRIER 2016

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure civile, l’affaire a été débattue le MERCREDI 9 MARS 2016 à 14H en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre

Madame Caroline CHICLET, Conseiller

Monsieur Thierry JOUVE, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Laurence SENDRA

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE,

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile ;

— signé par Monsieur Georges TORREGROSA, Président, et par Madame AL-Françoise COMTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

LES FAITS, LA PROCÉDURE ET LES PRÉTENTIONS :

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Perpignan en date du 28 octobre 2013 ;

Vu l’appel de Monsieur I F et de Madame X D en date du 13 janvier 2014, régulier et non contesté ;

Vu l’article 455 du code de procédure civile';

Vu les conclusions des appelants en date du 15 mai 2014';

Vu les conclusions de C F, intimé, en date du 23 avril 2014';

Vu l’ordonnance de clôture en date du 17 février 2016';

S U R C E :

Attendu qu’il n’est pas contesté que depuis l’acte authentique du 21 mars 2007, les époux C F ont vendu la seule nue-propriété de la parcelle AW 26 Madame D';

Attendu qu’il n’est pas contesté que sur cette parcelle, C F et son épouse Z avaient installé leur mobil home, en leur qualité d’usufruitiers';

Attendu que Z F est décédée en mars 2009, aucune des parties ne s’étant préoccupée de faire évaluer la valeur de l’usufruit dont restait titulaire son époux, âgé de bientôt 81 ans à l’époque, sachant que cette parcelle de 2130 m² a été évaluée en nue-propriété lors de l’acte authentique du 21 mars 2007 à 15'000 €';

Attendu qu’à admettre en matière d’échange les règles de l’article 1341 du Code civil, exigeant un acte authentique ou un acte sous seing privé, encore faut-il évaluer le montant de l’échange litigieux, étant précisé au surplus que personne ne soutient que l’usufruit concédé sur la parcelle numéro 28 selon les appelants aurait une valeur moindre';

Attendu qu’en toute hypothèse, et sur le terrain de l’article 1702 du Code civil qui gouverne l’échange, il est bien spécifié à l’article 1703 qui suit que l’échange s’opère par le seul consentement, de la même manière que la vente';

Et attendu qu’à admettre même que s’imposait l’article 1341 du Code civil, alors qu’il a été motivé supra qu’aucune discussion n’est entamée sur la somme ou la valeur qu’impliquait cet échange au sens de cet article, force est de constater les liens familiaux qui existaient entre les parties, et le contexte dans lequel est intervenu le changement de situation aujourd’hui litigieux, suite au décès de Z F';

Attendu qu’en effet, le propre constat d’huissier produit par l’intimé a constaté le mauvais état général de l’ancien mobil home, ce qui est corroboré par de nombreuse attestations régulières en la forme des appelants, A F qui atteste pour l’intimé indiquant lui-même que son père était d’accord pour changer de mobil home, la seule question litigieuse étant en réalité celle du changement de parcelle';

Attendu que s’agissant toujours du changement de mobil home, il existe une incertitude sur le financement du nouveau mobil home, puisque l’intimé produit une facture (pièce 6) ne portant aucune mention d’un acquit et ne précisant pas les caractéristiques du chèque qui aurait servi à payer, tandis que les appelants produisent en pièce 33 une attestation régulière en la forme d’Y R qui indique qu’en sa qualité d’ancien gérant de la Sarl mobile loisirs, il a vendu à X D un mobil home I.R.M. super mercure, pour C F, payé par Madame D';

Attendu que dans ce contexte familial, à l’époque du décès et la volonté de changer de mobil home à tout le moins étant démontrée, la mésentente familiale décrite n’intervenant que postérieurement fin juin 2009 (pièce 11 de l’intimé, attestation Besset), le changement consistait simplement à poser le nouveau mobil home de la parcelle 26 sur la parcelle 28 qui est voisine';

Attendu que la cour estime que contrairement à l’importance que revêtait la vente de la nue-propriété en mars 2007, les circonstances familiales en mars 2009 (perte de la mère), et la volonté démontrée à tout le moins de changer de mobil home pour le père ont expliqué l’impossibilité morale (article 1348 du Code civil) de dresser à nouveau un acte authentique, ou un acte de sous seing privé, l’analyse des attestations produites par les appelants qui va suivre ne faisant que corroborer cette impossibilité';

Attendu qu’en conclusion sur le fondement juridique de l’action, la cour estime que les critères d’application de l’article 1341 ne sont pas réunis, principalement à cause de l’absence d’évaluation de l’usufruit en jeu et de l’absence de mésentente familiale au moment de l’opération litigieuse, ce qui permet de démontrer par toute voie dont celle testimoniale le consentement requis par l’article 1703 du Code civil, pour démontrer l’échange';

Et attendu qu’à cet égard, les appelants produisent plusieurs dizaines d’attestations, qui n’ont pas toutes la même portée s’agissant stricto

sensu du consentement à l’échange, mais dont la cour retiendra':

— Attestation Boils': «' C m’a montré les travaux auxquels il a participé avec son fils A pour le futur logement de Mlle D, il m’a également montré son nouveau mobil home à son nouveau emplacement il était très content car son ancien mobile home était dans un état pitoyable. » ;

— Attestation Revelat : « j’ai pu constater que l’ancien mobil home de C était insalubre avec une odeur insoutenable et que C avait demandé à plusieurs reprises à son fils I de changer le mobil home. Après le décès de Z nous avons eu l’occasion à plusieurs reprises de revenir alors C qui nous a fait visiter son nouveau mobil home ' Et de son emplacement car il pouvait faire une plus grande terrasse ce qu’il avait commencé avec l’aide des enfants et des salariés de I.. De plus C a participé à la transformation de la salle en appartement avec son accord … » ;

— Attestation Picard : «' Après le décès de Z, C m’a fait visiter son nouveau mobil home avec joie et fierté ' » ;

— Attestation Augen : « ce que j’ai pu constater, c’est que C était très content de pouvoir changer de mobil home et d’emplacement après le décès de Z. .. À savoir aussi que C m’a fait la visite de son nouveau mobil home et que j’ai moi-même nettoyé le mobil home pour qu’il puisse s’installer car il était pressé d’y entrer pour y vivre’ » ;

— Attestation Gobet : « à l’occasion de l’anniversaire de son fils I, à plusieurs reprises, il a fait visiter son mobil home duquel il était content ' » ;

— Attestation E F : « je peux dire que mon père C était content même ravi de pouvoir changer de mobil home et de place après le décès de ma mère Z’ » ;

— Attestation Pot : «' Monsieur C était très content de sa nouvelle habitation et parlait de faire une terrasse devant son nouvel emplacement », cet attestant précisant bien qu’il a transporté deux mobil home, dont l’un a été choisi par C et I, avec la présence de Monsieur Y R, ce qui recoupe l’attestation de ce dernier précitée';

— Attestation Dalle : «' Suite au décès de Z, I et X ont proposé à C de remplacer le mobil home insalubre dans lequel il vivait avec son épouse, par un autre mobil home propre et dans un état neuf. C avait l’air enthousiaste à l’idée de changer de résidence’ » ;

— Attestation Tournier : «' J’ai pu discuter avec C qui m’a fait connaître qu’il était très content de son mobil home neuf, et qu’il allait pouvoir installer sa terrasse, à laquelle je l’ai aidé’ » ;

— Attestation Guillaume F : « … Je certifie avoir démoli la terrasse mon grand-père, qui était dans le tractopelle, et moi qui ai pris la relève dans le tractopelle par la suite’ » ;

— Attestation Oller qui confirme la précédente ;

— Attestation Dierstein : « j’ai pu constater par ma présence ce jour-là que C a participé à la destruction de la terrasse qui se trouve devant son vieux mobil home. C dirige la destruction de la terrasse auquel mon ex compagnon (Prat Cédric) participe’ » ;

— Attestation F A : « … Avoir travaillé à la transformation de l’ancienne salle en appartement pour le compte de Mlle D, étant son salarié’ J’ai travaillé quatre mois dans la salle. Durant les travaux C était souvent présent sur le chantier et conscient des transformations qui étaient destinées à faire l’appartement pour Mlle D ' »';

Attendu que cette attestation est essentielle à deux titres, puisqu’elle démontre bien que C F n’a pu ignorer les travaux de transformation de l’ancien bâti sur la parcelle dont il revendique l’usufruit, ces travaux étant logiquement le corollaire du déplacement de son nouveau mobil home sur la parcelle 28';

Qu’au surplus, le même A a attesté pour son père (pièce 9 de l’intimé) que ce dernier est d’accord pour changer de mobil home, « mais voulait rester sur son emplacement car il se trouvait à l’ombre », affirmation fort peu convaincante puisque C F a non seulement participé à la destruction de l’ancienne terrasse, mais n’a pu ignorer pendant quatre mois les transformations rendues possibles par le transfert de son mobil home';

— Attestation Brazillet : « lors de l’aménagement de la salle en appartement auquel j’ai participé gracieusement à de petits travaux, C a participé à ces travaux sans parler de frais ni de loyer. Par la suite C m’a fait visiter les travaux qu’il exécutait dans son nouveau mobil home, pose de chauffage électrique, télévision, et le commencement de sa terrasse. Un beau matin, vers la mi-juin, il est parti chez sa fille en laissant tout en plan et en oubliant son chien’ » ;

— Attestation Dierstein, qui relate la visite du nouveau mobil home et la fierté de C s’agissant de sa nouvelle installation ;

— Attestation Asni et Tammaro démontrant la participation de C à la destruction de la terrasse avec un tractopelle';

— Attestation Mis démontrant la satisfaction de C s’agissant de sa nouvelle installation ;

— Attestation F E : « .. Je souhaite préciser encore une fois que mon père était content de changer de mobil home et de place’ » ;

— Attestation Montalat démontrant que C V aux travaux et qu’il était au courant';

— Attestation Sorbiers : «' En novembre 2007, je me suis rendu chez I’ C’est à ce moment que celui-ci m’a présenté son père. J’ai donc constaté qu’ils effectuaient des travaux ensemble à l’intérieur de l’ancienne salle en vue d’un appartement pour Mlle D et lui-même’ » ;

— Attestation Tournier : «' Je certifie avoir constaté le jour de la mise en place du mobil home de Monsieur C, étaient présents AD, A, I, Cyril B ainsi que M. AA C ' » ;

Attendu qu’il est pour le moins étonnant que le même Cyril B atteste pour l’intimé que son grand-père n’était pas là ce jour-là, étant pour le moins évident qu’en toute hypothèse ce dernier n’a pu ignorer l’emplacement du nouveau mobil home, et que de multiples attestations témoignent de sa satisfaction':

— Attestation Tournier : «' J’ai pu constater lors de ma présence dans l’appartement où j’ai effectué des travaux (plaquo joint) que C est venu à plusieurs reprises me

voir et voir l’avancement des travaux, j’ai donc pu discuter avec lui à plusieurs reprises. Il était parfaitement au courant du fait que l’appartement était destiné à son fils I et Mlle D. De plus C m’a fait visiter son nouveau mobil home, il était très fier de l’état pratiquement neuf et de son emplacement, il avait l’air très heureux et de plus je l’avais aidé à monter le store sur sa nouvelle véranda’ » ;

Attendu que la mise en perspective de l’ensemble de ces attestations démontre de façon certaine qu’à la suite du décès de son épouse, C F a été parfaitement d’accord pour changer de mobil home, le premier étant en très mauvais état sinon insalubre, ainsi que d’emplacement, puisque qu’il n’a pu ignorer le changement opéré, qu’il en était très satisfait, et qu’il a même participé au corollaire logique de sa nouvelle installation, c’est-à-dire la transformation de l’ancienne salle en un appartement destiné à son fils I et à sa compagne';

Attendu que le constat d’huissier qu’il produit démontre qu’il a récupéré ses affaires dans le nouveau mobil home, ce qui prouve qu’il y a vécu, sans protestation aucune, bien au contraire puisqu’il était très satisfait ;

Attendu qu’à cet égard, il est inconcevable que l’intimé ait pu ignorer les travaux de transformation, les attestations numéro 71 à 82 et les photos produites de fête de famille, n’étant ni commentées ni a fortiori contestées, dont il résulte un accord certain de sa part';

Attendu que les attestations produites par l’intimé sont avant tout révélatrices de mésententes avec une partie de la famille (Y et W AA ), mais les faits énoncés sont soit sans rapport direct avec le litige (problème du remboursement des prêts), soit pour le moins contestables ainsi qu’il a été motivé supra pour B Cyril et A F';

Attendu que s’agissant de AL-AM B, qui était intéressée par les parcelles achetées par X D ( cf attestations des appelants Augen et F E ) et qui est à l’origine du départ de son père le 19 juin 2009 (cf attestation Besset de l’intimé), elle n’apporte strictement rien s’agissant de la question soumise à la cour qui est celle du consentement à l’échange';

Attendu qu’enfin , et s’agissant de AD F, ses affirmations sur l’attitude alléguée de violente des appelants envers son père ne sont pas datées quant à la survenance des faits décrits, et se trouvent largement contre battues par les nombreuses attestations adverses faisant état d’un climat familial normal jusqu’au départ subit du père qui a surpris tout le monde';

Attendu qu’en conclusion, la cour estime que la preuve est suffisamment rapportée du consentement de Monsieur C F à échanger l’usufruit dont il disposait sur la parcelle 26, contre un usufruit sur la parcelle 28 où il a accepté l’installation d’un nouveau mobil home et l’aménagement de ses abords, dont il était très satisfait, tandis qu’il a participé au corollaire logique de ce transfert, à savoir les travaux de transformation de l’ancienne salle en un appartement pour son fils I et sa compagne ;

Attendu que sur le strict plan de l’équité, la cour n’estime pas devoir faire application de l’article 700 du code de procédure civile, eu égard au contexte familial sur lequel il a été sinon suffisamment du moins implicitement motivé, la véritable question étant celle de l’attrait des parcelles litigieuses pour tel ou tel membre de la famille';

PAR CES MOTIFS, LA COUR statuant contradictoirement :

Déclare l’appel fondé ;

Infirme le jugement de premier ressort dans toutes ses dispositions';

Statuant à nouveau,

Dit et juge que Monsieur C F a consenti à l’échange de l’usufruit qu’il possédait sur la parcelle AW 26, en acceptant le transfert de son mobil home sur la parcelle AW 28, et la transformation de l’ancienne salle qui existait en un appartement destiné à son fils I et à sa compagne X D';

Déboute en conséquence C F de l’ensemble de ses demandes';

Le condamne aux entiers dépens, qui seront recouvrés au bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

GT

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