Cour d'appel de Nancy, 3 mars 2016, n° 15/01240

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nancy, 3 mars 2016, n° 15/01240
Juridiction : Cour d'appel de Nancy
Numéro(s) : 15/01240
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Épinal, 2 février 2015, N° 12/00547

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D’APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT N° /16 DU 3 MARS 2016

Numéro d’inscription au répertoire général : 15/01240

Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Grande Instance d’EPINAL, R.G. n° 12/00547, en date du 3 février 2015,

APPELANTE :

Madame Z X divorcée Y

née le XXX à ETIVAL-CLAIREFONTAINE (88480), demeurant 37 rue Poincaré – 88210 SENONES

représentée par Me Alain BEGEL substitué par Me JUREK de la SCP BEGEL GUIDOT BERNARD JUREK, avocats au barreau d’EPINAL

INTIMÉE :

SA CREDIT FONCIER ET COMMUNAL D’ALSACE ET DE A, prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège XXX – XXX, inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de Strasbourg sous le numéro B 568 501 282

représentée par Me Ludovic VIAL de la SCP CRC, avocat au barreau d’EPINAL

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 21 Janvier 2016, en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre,

Monsieur Francis MARTIN, Conseiller,

Madame Sandrine GUIOT-MLYNARCZYK, Conseiller, qui a fait le rapport

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Monsieur H I;

A l’issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 3 Mars 2016, en application du deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 03 Mars 2016, par Monsieur H I, Greffier, conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

signé par Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre et par Monsieur H I, greffier ;


Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à


FAITS ET PROCEDURE

Par acte authentique du 27 septembre 2007, la SA CFCAL-Banque (Crédit Foncier et Communal d’Alsace et de A-Banque) a consenti à Mme Z X un prêt d’un montant de 92.300 euros remboursable en 300 mensualités avec intérêt au taux révisable sur la base Euribor 3 mois.

J X et D E épouse X se sont portés caution hypothécaire du prêt.

La SA CFCAL-Banque a assigné Mme Z X, J X et D E épouse X par actes d’huissier du 21 février 2012 devant le tribunal de grande instance d’Epinal aux fins de voir prononcer la déchéance du terme et condamner solidairement les défendeurs à lui verser 94.078,74 euros avec capitalisation des intérêt et une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

J X et D E épouse X sont décédés en cours de procédure et par acte du 18 mars 2014, la banque a fait assigner en intervention forcée M. L-M X pris en sa qualité d’héritier, au même titre que Mme Z X déjà dans la cause.

Mme Z X a conclu au rejet des demandes et a sollicité la condamnation de la SA CFCAL-Banque à lui verser des dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1147 du code civil outre une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

M. L-M X n’a pas constitué avocat.

Par jugement du 3 février 2015, le tribunal a :

— prononcé la résiliation du prêt

— condamné Mme Z X à verser à la SA CFCAL-Banque la somme de 94.078,74 euros avec intérêt au taux légal à compter du jugement et capitalisation des intérêts à la même date

— débouté la SA CFCAL-Banque de sa demande de condamnation solidaire de M. L-M X

— déclaré le jugement commun à M. L-M X

— débouté Mme Z X de sa demande de dommages et intérêts

— débouté la SA CFCAL-Banque du surplus de ses demandes

— condamné Mme Z X à verser à la SA Crédit Foncier et Communal d’Alsace et de A-Banque la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Le tribunal a considéré au vu des pièces produites par le prêteur qu’il justifiait de la réalité et du montant de sa créance. Il a dit que le cautionnement souscrit par J X et D E épouse X était un cautionnement hypothécaire et non un engagement personnel de sorte que M. L-M X en sa qualité d’héritier ne pouvait être condamné solidairement avec la débitrice principale. Sur la demande de dommages et intérêts, le tribunal a considéré que Mme Z X n’avait pas la qualité d’emprunteur averti, que le prêt avait été consenti pour solder plusieurs autres prêts à la consommation et dettes et que la mensualité de 764,94 euros représentant un endettement de 34,69 % n’était pas disproportionné aux revenus de Mme Z X qui s’élevaient à 2.205 euros mensuels. Il a ajouté que ce nouveau crédit avait permis le réaménagement de prêts plus anciens à des conditions plus favorables de sorte qu’il n’a pas aggravé la situation de l’emprunteur et que la banque n’était pas tenue à un devoir de mise en garde.

Mme Z X a régulièrement interjeté appel de cette décision et conclut à l’infirmation du jugement sauf en ce qui concerne sa condamnation à verser 94.078,74 euros à la SA CFCAL-Banque avec intérêt au taux légal. Elle sollicite :

— le rejet de la demande au titre de l’article 1154 du code civil

— la condamnation de la SA CFCAL-Banque à lui verser 100.000 euros de dommages et intérêts pour les fautes commises en lui accordant un prêt qui a eu pour effet d’aggraver sa situation de surendettement

— la compensation entre les créances

— la condamnation de la SA CFCAL-Banque à lui verser 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Elle ne conteste pas la somme due au titre du prêt mais seulement la capitalisation des intérêts en raison du comportement fautif de la banque. Elle estime que la banque a manqué son devoir de mise en garde et conclut à la confirmation du jugement qui a retenu qu’elle était non avertie, précisant qu’elle n’avait été qu’un prête-nom pour son ex-mari et ses sociétés. Elle ajoute qu’au moment de la souscription du prêt, elle était divorcée depuis 10 ans, qu’elle était en invalidité et âgée de 56 ans, qu’il était prévisible que ses revenus allaient diminuer avec sa mise à la retraite et que la banque a failli à ses obligations puisque le prêt a accru son endettement.

La SA CFCAL-Banque conclut à la confirmation du jugement de première instance, sollicitant en outre la condamnation de Mme Z X à lui verser 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Elle expose que Mme Z X ne conteste pas sa dette à son égard et relève que l’anatocisme de l’article 1154 du code civil ne peut être écarté que si la dette n’a pu être liquidée qu’en raison de la faute du prêteur, ce qui n’est pas démontré en l’espèce.

Sur la demande de dommages et intérêts, l’intimée fait valoir que Mme Z X est un emprunteur averti puisqu’elle a exercé entre 1990 et 1996 les fonctions de gérant puis de président du conseil d’administration d’une SA et qu’elle ne justifie pas de ses allégations sur le fait d’avoir été un simple prête-nom pour son mari. Si la cour retenait qu’elle était profane, la banque estime qu’elle n’était tenue à aucun devoir de mise en garde alors que les prêts de Mme Z X représentaient une mensualité de 1.098 euros et un taux d’endettement de 52,49 euros sans compter les dettes personnelles et que le prêt souscrit le 27 septembre 2007 a servi à racheter l’ensemble des dettes de l’appelante avec une mensualité de 634,80 euros et un taux d’endettement de 30,64% soit une amélioration de sa situation et de son endettement. Elle conclut à la confirmation du jugement ayant débouté Mme Z X de sa demande.

MOTIFS DE LA DECISION :

Vu les écritures déposées le 24juillet 2015 par Mme Z X et le 15 septembre 2015 par la SA Crédit Foncier et Communal d’Alsace et de A-Banque, auxquelles la Cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens ;

Vu l’ordonnance de clôture en date du 25 novembre 2015 ;

Sur la demande en paiement

Attendu que Mme Z X ne conteste pas le montant de sa dette fixée à 94.078,74 euros par le tribunal mais uniquement la capitalisation des intérêts ;

Attendu qu’en application de l’article 1154 du code civil, les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts à condition qu’il s’agisse d’intérêts dus au moins pour une année entière ; que les dispositions de cet article étant d’ordre public, le tribunal a à juste titre fait droit à la demande de la SA CFCAL- Banque à compter de la signification du jugement ; que le jugement déféré est confirmé ;

Sur le devoir de mise en garde

Attendu que lors de la conclusion du contrat, le banquier dispensateur de crédit est tenu à l’égard de l’emprunteur non averti d’un devoir de mise en garde à raison de l’inadaptation du prêt aux capacités financières de l’emprunteur et du risque d’endettement excessif né de l’octroi du prêt ;

Qu’il appartient à l’emprunteur qui invoque le manquement du prêteur à son obligation de mise en garde de justifier au préalable de la disproportion du prêt à ses capacités financières ou du risque d’endettement né de l’octroi du crédit ;

Qu’en l’espèce, le tribunal a exactement relevé que Mme Z X n’avait pas la qualité d’emprunteur averti, le fait qu’elle ait été la gérante entre 1990 et 1996 d’une société dirigée par son époux étant insuffisant pour établir sa qualité d’emprunteur averti ;

Attendu que c’est à juste titre et par des motifs pertinents que la Cour adopte, que les premiers juges ont dit que la SA CFCAL-Banque n’était pas tenue à un devoir de mise en garde alors qu’il s’agissait d’un prêt de refinancement de plusieurs prêts et dettes ; qu’en effet, il résulte des pièces produites que Mme Z X devait faire face au remboursement de sept prêts à la consommation pour un montant mensuel de 1.098 euros outre plusieurs autres dettes familiales et fiscale soit un endettement de 52,49 % et qu’avec le prêt de refinancement, la mensualité de remboursement est passée à 634,80 euros soit une nette amélioration de son seuil d’endettement qui est passé à 30,64 % ; que faute pour l’appelante de démontrer que le prêt souscrit le 27 septembre 2007 avait aggravé sa situation économique et accru son endettement, elle doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts et le jugement confirmé ;

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Attendu que Mme Z X, partie perdante, devra supporter les dépens et qu’il est équitable qu’elle soit condamnée à verser à la SA CFCAL- Banque la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme déjà allouée en première instance ; qu’il convient en outre de la débouter de sa propre demande de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a :

— prononcé la résiliation du prêt

— condamné Mme Z X à verser à la SA CFCAL-Banque la somme de quatre vingt quatorze mille soixante dix huit euros et soixante quatorze centimes (94.078,74 €) avec intérêt au taux légal à compter du jugement et capitalisation des intérêts à la même date

— débouté la SA CFCAL-Banque de sa demande de condamnation solidaire de M. L-M X

— déclaré le jugement commun à M. L-M X

— débouté Mme Z X de sa demande de dommages et intérêts

— débouté la SA CFCAL-Banque du surplus de ses demandes

— condamné Mme Z X à verser à la SA CFCAL-Banque la somme de mille euros (1.000 €) au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens ;

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme Z X à verser à la SA CFCAL-Banque la somme de mille cinq cents euros (1.500 €) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE Mme Z X de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme Z X aux dépens et autorise la SCP CRC à faire application de l’article 699 du code de procédure civile ;

Le présent arrêt a été signé par Madame CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre à la Cour d’Appel de NANCY, et par Monsieur I, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Minute en six pages.

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Nancy, 3 mars 2016, n° 15/01240