Cour d'appel de Nîmes, 29 novembre 2016, n° 15/01240

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nîmes, 29 nov. 2016, n° 15/01240
Juridiction : Cour d'appel de Nîmes
Numéro(s) : 15/01240
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Nîmes, 22 février 2015, N° 12/371

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N°

R.G : 15/01240

JNG/CM

CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE NÎMES

23 février 2015

Section: Commerce

RG:12/371

SAS ROC-FRANCE

C/

X

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 29 NOVEMBRE 2016

APPELANTE :

SAS ROC-FRANCE,

immatriculée au RCS de PARIS sous le N° 491 077 020, prise en la personne de son représentant légal en exercice

61-69 rue de Bercy

XXX

représentée par Maître Franck BLIN, avocat au barreau de PARIS, plaidant Maître Alexandra
DUGAS, avocat au barreau de NÎMES

INTIMÉE :

Madame Y X

XXX Nizon

XXX

représentée par Maître Z A de la SCP
A/PELLEGRIN, avocat au barreau d’AVIGNON

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Monsieur Jean-Noël GAGNAUX, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l’article

945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.

Il en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Guénaël LE GALLO,
Président

Monsieur Thomas LE MONNYER, Conseiller

Monsieur Jean-Noël GAGNAUX,
Conseiller

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

à l’audience publique du 17 Mai 2016, où l’affaire a été mise en délibéré au 13 Septembre 2016, prorogé à celle de ce jour.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé et signé par Monsieur Guénaël LE
GALLO,
Président, publiquement, le 29 novembre 2016, par mise à disposition au greffe de la Cour.

RAPPEL DES FAITS ESSENTIELS ET DE LA
PROCÉDURE

Madame Y X a été embauchée dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à compter du 21/01/05 par la SARL ASB STATION SERVICE ESSO en qualité d’employée de station service pour exercer ses fonctions sur la station service ESSO de l’aire de TAVEL nord sur l’autoroute A9.

Par avenant du 06/12/07, le contrat à durée indéterminée de la salariée a été repris par la SAS
SODIGEST, à temps complet sur la base de 35 heures hebdomadaires, puis le 01/04/09 par la SARL
MISTRAL, en un nouveau contrat à durée indéterminée, pour une rémunération brute mensuelle de 1682,24 avec un horaire mensuel de 169 heures.

Le 20/04/10, la SAS ROC FRANCE a repris la gestion de la station ESSO TAVEL sur l’aire de
TAVEL nord/A9.

Le 20/04/10, la salariée a alors signé le courrier notifiant la poursuite de son contrat de travail avec reprise d’ancienneté au 21/01/05, fixant la durée du travail à 169 heures par mois, soit 39 heures hebdomadaires, pour une rémunération de base de 1 570,67 brut pour 151,67 heures outre les majorations conventionnelles applicables à partir de 151 heures 67 de travail.

Par avenant du 01/05/10, l’employeur a proposé à la salariée le poste d’adjointe au chef de station ) base de rémunération 1582 brut mensuel, proposition que par courrier du 25/05/10, elle a refusé, invoquant que cet avenant la faisait régresser en termes de rémunération et ne correspondait pas à l’accord d’entreprise relatif à la négociation annuelle des salaires pour 2010.

Peu après, 16 au 30/06/2010, Y X a été en arrêt maladie pour état anxio dépressif.

Par lettre du 13/07/10 remise en main propre le 06/08/10, la salariée après un entretien du 30/06/10 12 heures suite à une convocation du 17/06/10 a reçu notification d’une mise à pied de 2 jours à exécuter les 10 et 11/08/10.

Cette mise à pied explicitait :

' (…) Vous avez été informée, en application des dispositions de l’article 11332 2 du Code du
Travail, d’une sanction envisagée à votre égard et des causes qui la motivent lors de notre entretien du 30 juin 2010 à 32 heures.

Pour mémoire, nous avons, constaté de nombreux dysfonctionnements dans votre comportement, altérant de façon significative et négative le bon fonctionnement de l’entreprise, à savoir :

Votre comportement agressif visant à perturber le travail de votre hiérarchie et de vos collègues de travail, et ce, devant les clients.

En effet, le 15 juin dernier, un des collaborateurs de la station nous a fait part de son mécontentement du fait que tous ses collègues de travail connaissent désormais sa rémunération, En effet, ayant eu accès au bureau de la Direction, vous vous êtes permise d’ouvrir les enveloppes contenant les bulletins de paie des collaborateurs de la Station et de divulguer le montant des rémunérations de chacun à l’ensemble de l’équipe.

Vous n’aviez en aucun cas, la liberté de communiquer des informations strictement confidentielles relatives aux collaborateurs. Ce type de comportement est inacceptable, et a porté préjudice au bon climat social instauré au sein de l’établissement.

En outre, nous vous rappelons que le courrier qui est adressé à l’attention du Chef de station est confidentiel et ce dernier est la seule personne autorisée à traiter le courrier sauf demande expresse de sa part.

Le 13 juin 2010, vos horaires de travail étaient de 12h à 20h. Vous êtes arrivée à 11h55 et avez demandé à votre collègue qui travaillait, de fermer sa caisse pour que vous puissiez travailler sur celle-ci. Cette dernière, a refusé de fermer sa caisse, vous l’avez poussée et insultée de 'connasse’ puis avez fermé et compté sa caisse.

Ce type de comportement, qui plus est, agressif et violent, est intolérable. Tous les collaborateurs doivent se respecter les uns envers les.
autres.

En outre, vous avez agi devant vos collègues et ainsi devant les clients, ce qui constitue un préjudice au climat social instauré et en termes d’image vis à vis de nos clients et de notre pétrolier pour lequel nous travaillons.

De plus, nous vous rappelons qu’il n’est pas prévu dans les organisations, que lorsque vous arrivez à 11h55, vous décidiez de fermer immédiatement la caisse d’un de vos collègues.

Votre non respect des normes de Sécurité :

En effet, Votre Chef de station vous a surpris le 28 mai 2010 en train de fumer dans la réserve.

Nous vous rappelons que la législation en vigueur interdit de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif. Cette interdiction que vous connaissez est d’ailleurs matérialisée par un affichage au sein de l’établissement.

En outre, le règlement intérieur stipule que le personnel est tenu de respecter les interdictions de fumer,

Vous avez enfreints ces règles et fait encourir un risque à l’entreprise et vous même en vous exposant à de graves sanctions prévues dans le Code de la
Santé Publique.

Le 09 Juin dernier, vous étiez prévue au planning de 8h à 16h, et vous avez travaillé ce jour, de 7h35 à 18h35, soit 11h de travail, Vous avez donc travaillé à la limite légale autorisée et de surcroît sans l’autorisation de votre hiérarchie.

Votre Chef de station n’était pas présent ce jour mais vous a déjà expliqué au préalable, que les heures supplémentaires étaient soumises à son approbation et que, rien ne justifiait le fait de rester en heures supplémentaires.

Vous devez respecter vos obligations contractuelles, et ainsi respecter le planning élaboré par le
Chef de station.

Durant l’entretien, vous avez nié tous les faits reprochés. Cependant, ces faits sont circonstanciés et précis, et ne peuvent être contestables.

Compte tenu de la gravité des faits reprochés , et de votre obstination à ne pas prendre en compte les remarques qui vous sont faites, nous avens décidé de vous notifier par la présente une mise à pied disciplinaire de deux jours.

Cette mise à pied se déroulera les 10 et 11 août 2010 inclus, avec retenue sur salaire correspondante. Vous reprendrez votre travail le 13 août 2010, à 14 heures.

Nous espérons que ces journées de mise à pied vous ferons prendre conscience de la nécessité de redresser au plus vite votre comportement qui perturbe l’organisation du travail de l’équipe et pénalise fortement notre entreprise.

Nous vous Informons que dans le cas contraire, nous serions amenés à prendre toutes les dispositions qui s’imposent afin d’assurer la bonne marche de notre entreprise….'

Par lettre du 13/08/10, Y
X a contesté les griefs reprochés , alors qu’elle était en arrêt de travail pour dépression réactionnelle du 10/08/10 au 15/08/10.

Le 29/10/10, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à une mesure disciplinaire fixé au 10/11/10, cette procédure initiée mais restée sans suite.

Le 12/01/ 11, la salariée a été entendue par un agent de la CPAM du Gard, dans le cadre d’une enquête administrative car elle se plaignait d’être mal traitée par 3 salariés et le nouveau gérant de la station.

Elle a été placée en arrêt de travail pour dépression du 14/01/11 au 31/05/11, tous certificats étant établis par un médecin psychiatre hospitalier.

Le médecin du travail, lors de la visite de reprise du 06/06/11, après cet arrêt, a formulé les conclusions suivantes :

« Apte avec adaptation de poste reprise à l’essai 1 mois à revoir le 15 et le 30/07/11

Doit pouvoir s’asseoir pendant le temps de pause ou si station statique prolongée

Pas d’activité nécessitant de plier les genoux de manière répétée" ;

Le CHSCT a déposé le 01/07/11 un rapport d’enquête après audition des 3 salariés mis en cause par la salariée et la salariée elle même, mettant en définitive en cause la seule Y
X pour harcèlement.

Y X a été placée en arrêt maladie, pour état dépressif réactionnel du 29/06/11 au 31/07/11.

Par lettre recommandée du 07/07/11, pendant en conséquence cette période d’arrêt, elle a été convoquée à un entretien préalable à son éventuel licenciement fixé au 16/07/2011.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 25/07/11 reproduite ici in extenso pour l’essentiel,
Y X a été licenciée pour faute grave.

'Dans le cadre des dispositions des articles L.1232-2 à L.1232-5 et R.1232-1 à R.1232-3 du code du travail et suite à l’entretien préalable à licenciement du samedi 16 juillet 2011, auquel vous ne vous êtes pas présentée, nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour faute grave liée aux motifs suivants :

Tout d’abord, votre comportement tend à détériorer les relations de travail sur le site de Tavel, à troubler le bon fonctionnement de l’entreprise, à créer une tension permanente et à perturber le travail de l’équipe. Votre comportement a conduit certains salariés de l’entreprise à adresser une plainte à la direction à votre encontre pour harcèlement.

En juin 2010, nous avions été alertés par deux de vos collègues sur votre comportement agressif à leur égard et nous vous avions reçu en entretien. Vous aviez alors été sanctionnée par deux journées de mise en à pied.

En novembre 2010, nous avons de nouveau été alertés, cette fois par la quasi totalité de l’équipe présente sur le site, au sujet de votre comportement agressif à leur égard.

Depuis votre reprise de travail, le 1er juin 2011, nous avons de nouveau été alertés par les salariés de l’entreprise concernant votre comportement à leur égard. A chacune de vos prises de poste, vous tapez fortement sur votre caisse avec un stylo et ce de manière effrénée et à longueur de journée.
Ce bruit est qualifié « d’infernal » et de « quotidien » par l’adjointe au Chef de Station. De plus, vous claquez les portes volontairement et ce de manière systématique. Vous parlez à l’adjointe au Chef de
Station de manière agressive et ce dès qu’elle essaie de vous parler et vous ne lui répondez pas quand elle vous dit bonjour. Vous refusez également d’effectuer ses consignes. Vous lui avez à plusieurs reprises dit que vous faisiez ce que vous vouliez quand vous le vouliez. Vous l’avez menacé presque quotidiennement d’aller voir l’Inspection du travail, le médecin du travail ou d’écrire au siège, et ce sans motif légitime.

Une de vos collègues témoigne également de bruits volontaires de votre part, des portes que vous faites claquer, des propos grossiers à son égard, de vos agressions verbales et de votre manque de respect.

A chaque fois que votre manager a souhaité s’entretenir avec vous au sujet de votre comportement, vous vous êtes immédiatement énervée l’empêchant ainsi de pouvoir communiquer avec vous. Ce dernier nous a également fait part de votre comportement agressif à son égard.

Le 13 juin 2011, vous étiez de nouveau en train de taper avec votre stylo sur la caisse au moment où l’adjointe au Chef de Station était présente sur le site.
Elle fait état de votre regard « soutenu, froid et méchant ». Alors qu’elle est venue vous saluer, vous l’avez agressé verbalement au sujet d’un

problème avec des clients. Vous avez alors fait une « crise d’hystérie », crié alors que vous étiez en poste et que des clients étaient présents dans la boutique. Ne sachant que faire, elle a préféré vous laisser vous calmer. Cependant, vous l’avez appelé au bureau afin qu’elle vienne vous relayer pour prendre votre pause et au moment où elle est venue vous lui avez de nouveau crié « j’en ai rien à foutre, je fais ce que je veux, vous n’avez pas le droit de m’imposer quoi que ce soit, je prends ma pause ». Vous l’avez alors menacé d’aller voir le médecin du travail.

L’adjointe au Chef de Station n’en pouvant plus de subir quotidiennement vos provocations, agressivité et menaces dès qu’elle doit vous donnez une consigne, a appelé le Chef de Station qui était en repos. L’adjointe au Chef de Station était à bout de nerf au point de ne pas arriver à faire son travail correctement. Elle qualifie votre comportement à son égard de « violence morale répétée », à laquelle elle ne peut plus faire face.

De même, une de vos collègues vient travailler avec « une boule au ventre » et est dans un état dépressif du fait de votre comportement à son égard.
Cette dernière ne peut plus supporter votre agressivité, vos colères et vos provocations quotidiennes qui persistent depuis plusieurs années et s’aggravent.

De plus, d’autres salariés du site ont également témoigné de votre agressivité à leur égard.

Devant l’état psychologique de vos deux collègues, le manager a organisé une visite avec le médecin du travail, qui a alors préconisé votre éloignement du site dans l’attente d’une seconde visite initialement prévue le 11 juillet 2011 et de prévenir la
Direction des Ressources Humaines afin d’actionner une cellule sur les risques psychosociaux.

Nous avons déclenché une enquête du CHSCT et de la Direction. Les conclusions de l’enquête du
CHSCT font état de situations de « mal être au travail, d’anxiété et d’état de stress » dans lesquelles se trouvent vos collègues de travail suite à votre comportement agressif, menaçant et irrespectueux à leur égard. Le CHSCT atteste de l’existence d’une situation de harcèlement due à votre comportement et de votre incapacité à prendre toutes dispositions pour faire cesser cette situation.

En outre, nous vous reprochons de quitter votre poste de travail de manière intempestive et de ne pas accepter les consignes de votre hiérarchie que vous remettez en cause violemment. Votre comportement porte préjudice au bon fonctionnement de l’entreprise et est contraire aux règles en vigueur.

Pour exemples, nous avons constaté à plusieurs reprises que vous quittiez votre poste de travail sans prévenir, laissant ainsi la caisse et la boutique sans surveillance.

L’adjointe au Chef de Station témoigne qu’à plusieurs reprises depuis le 1er juin 2011, elle a été dérangée par des clients qui ne trouvaient personne pour les servir alors que vous étiez sensée tenir la caisse. En effet, vous vous absentez régulièrement de votre poste de travail sans prévenir. Ce comportement nuit à notre image commerciale dans la mesure où les clients ne peuvent pas être servis rapidement et porte atteinte à la sécurité de l’entreprise dans la mesure où la boutique reste sans surveillance.

Lorsque l’adjointe au Chef de Station vous a demandé de l’informer lorsque vous souhaitiez prendre une pause, vous lui avez reproché de vous harceler alors que cette dernière ne fait que son travail.

Le 13 Juin 2011, prenant en compte les remarques de votre hiérarchie, vous avez demandé à l’adjointe au Chef de Station qui était dans le bureau de la direction de venir vous relayer en caisse car vous souhaitiez prendre une pause. Lorsque l’adjointe est arrivée, vous étiez déjà partie de votre poste de travail, elle vous a alors demandé où vous alliez et vous lui avez répondu « j’en ai rien à foutre, je fais ce que je veux, vous n’avez pas le droit de m’imposer quoi que ce soit, je prends ma

pause », remettant ainsi en cause ses prérogatives.

Nous ne pouvons accepter un tel comportement et ce d’autant plus que ce n’est pas la première fois que nous vous reprochons de quitter votre poste et de ne pas écouter vos supérieurs. En effet, votre chef de station vous l’a dit à plusieurs reprises et vos collègues s’étaient également déjà plaints en novembre 2010 de ce comportement.

Votre attitude est incompatible avec la bonne marche de l’entreprise et ne peut être tolérée. De plus, malgré nos nombreux rappels à l’ordre verbaux et la mise à pied disciplinaire qui vous a été notifiée en juillet 2010, vous persistez dans votre comportement qui est récurrent et systématique.

De fait, vous démontrez votre incapacité à reconnaître les faits et votre manque de volonté à vouloir changer votre comportement.

Ce comportement portant atteinte d’une part à l’intégrité physique et psychologique des salariés et d’autre part au bon fonctionnement de l’entreprise, nous nous voyons dans l’obligation de mettre fin au contrat de travail vous liant à notre entreprise. Votre licenciement sans indemnité ni préavis, prendra effet à la date de notification de ce courrier, date à laquelle vous cesserez de faire partie de nos effectifs….' .

Y X a saisi le Conseil de prud’hommes de
Nîmes , sollicitant in fine essentiellement que le licenciement soit jugé sans cause réelle et sérieuse et que lui soient en conséquence payés le préavis, l’indemnité de licenciement, des dommages-intérêts 20 000 , outre l’annulation de la mise à pied disciplinaire notifiée le 13 juillet 2010.

Le Conseil de prud’hommes de Nîmes, en formation de départageet par jugement en date du 23/02/2015, a jugé :

PRONONCE l’annulation de la mise à pied du 13/07/10 ;

DIT le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la SAS ROC FRANCE à payer à Madame Y X :

' à titre d’indemnité compensatrice de préavis : 3141,38

' au titre des congés payés sur préavis :
314,13

' à titre d’indemnité de licenciement :
2041,89

à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 14 130

' au titre de l’annulation de la mise à pied disciplinaire notifiée le 13/07/10 165,70

' au titre du solde des congés payés acquis en 2010 : 363,83

' au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile : 1500

ORDONNE à la SAS ROC FRANCE de remettre à Madame Y X les bulletins de paie correspondant au préavis

CONDAMNE la SAS ROC FRANCE aux dépens ;

ORDONNE l’exécution provisoire du jugement à concurrence de 50 % du montant des

condamnations prononcées.'

La S.A.S 'ROC FRANCE ' – appelante – demande à la
Cour in fine en ses conclusions oralement soutenues à l’audience de la Cour :

'CONSTATER que les agissements de Madame X ont eu des répercutions négatives sur les conditions de travail de ses collègues ;

CONSTATER que les agissements de Madame X étaient constitutifs d’une faute grave ;

CONSTATER l’absence d’agissements de harcèlement moral à l’encontre de Madame X ;

En conséquence :

INFIRMER le jugement de première instance, et, le réformant :

DIRE ET JUGER que le licenciement de Madame X repose sur une faute grave ;

DEBOUTER Madame X de l’ensemble de ses demandes ;

CONDAMNER Madame X au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du NCPC ;

CONDAMNER Madame X aux entiers dépens ;

ORDONNER le remboursement des sommes versées à Madame X dans le cadre de l’exécution provisoire ordonnée par le Conseil de prud’hommes de Nîmes.'

La société employeur appelante fait essentiellement valoir qu’en fait il résulte du dossier :

que Y X avait une « attitude négative et menaçante à l’égard de ses collègues, se manifestant par voie d’insultes et poussant ces derniers à la dépression »

qu’il n’existait au préalable aucun comportement de l’employeur pouvant expliquer réellement l’état dépressif à l’origine des difficultés de comportement de la salariée depuis qu’elle se plaignait d’une proposition d’évolution professionnelle qu’elle avait jugé à tort dévalorisante

que ce comportement négatif était déjà à l’origine de la mise à pied disciplinaire du 13/07/2010 qui est totalement justifiée

que l’enquête du CHSCT mené du 17/06/2011 au 29/11/2011 a établi les agissement « hostiles » de
Y X contre d’autres salariés

qu’il n’y avait aucun harcèlement moral de sa part, les faits invoqués à cet égard étant inexacts et ne permettant nullement une telle interprétation

qu’il n’a jamais manqué à son obligation de résultat en matière de santé.

Y X – intimée et appelante incidente – est appelante incidente et demande à la Cour in fine en ses conclusions oralement soutenues à l’audience de la Cour :

'Vu les faits de harcèlement et de pression psychologique

Recevoir l’appel de la Société ROC
FRANCE

Le dire mal fondé en la forme et au fond,

En conséquence,

CONFIRMER le jugement de départage rendu par le Conseil de Prud’hommes de Nîmes en date du 23 février 2015,

EN CONSEQUENCE :

Dire et juger que la rupture du contrat de travail a été provoquée par des faits de harcèlement et de pression,

Dire et juger en conséquence que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

En conséquence, condamner l’employeur au paiement des sommes suivantes :

3141,38 au titre de l’indemnité sur préavis,

314,13 au titre de congés payés y afférents,

2041,89 au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement,

20 000 au titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

165,70 au titre de l’annulation de la mise à pied disciplinaire notifiée le 13 juillet 2010,

363,83 au titre des congés payés acquis au cours de l’année 2010.

Ordonner la remise des bulletins de paie des mois de juillet et août 2010,

Condamner la société ROC FRANCE au paiement de la somme de 2 500 au titre de l’article 700 du
CPC outre les entiers dépens.'

La salariée fait essentiellement valoir :

que sa situation dans l’entreprise s’est dégradée du fait de l’attitude du gérant Mr B nouvellement arrivé qui lui a proposé une modification anormale de son contrat de travail , lui a notifié une mise à pied disciplinaire et a organisé son isolement

que cette dégradation est à l’origine de ses graves problèmes de santé et d’arrêts maladie réitérés pour dépression

que la société appelante s’en tient devant la Cour à la même argumentation et les mêmes pièces qu’en première instance

qu’elle a été victime de harcèlement moral ayant eu des effets nocifs sur son état de santé, mise à pied disciplinaire , « pressions psychologiques visant à dégrader les relations du travail », horaires lourds et obligation de tenir debout faute de siège, multiplications des visites et contre-visites du médecin du travail, surveillance constante et propos désobligeants, [étant remarqué que le premier juge n’a pas statué sur harcèlement moral, que la salariée demande la confirmation du jugement et n’a jamais formulé de demandé spécifique de ce chef ]

que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat au sens de l’article L.4121-1 du
Code du travail ]même remarque sur supra sur le harcèlement moral,

que le licenciement n’est fondé ni sur une faute grave n sur une cause réelle et sérieuse

— que notamment les accusations portées contre elle par l’employeur sont contraires à la vérité, artificiellement montées et présentées

MOTIVATION

Comme le fait remarquer la salariée , l’employeur s’en tient très essentiellement à son argumentation de première instance et aux mêmes pièces.

Sur l’annulation de la mise à pied

Le texte de cette sanction disciplinaire a été énoncé supra in extenso dans l’exposé des faits de la présente affaire pour en garder une présentation complète linéaire.

A son propos le premier juge a justement analysé et jugé, en des termes que la Cour approuve :

« Au visa des articles L.1333-1 et L.1333-2 du Code du
Travail le premier juge a retenu :

Au XXXXXXXXX

1. D’avoir ouvert les enveloppes contenant les bulletins de paie des collaborateurs et divulgué le montant des rémunérations de chacun à l’ensemble de l’équipe

2. D’avoir poussé et insulté une collègue de travail devant les clients le 13 juin 2010 à 11 heures 55

3. D’avoir enfreint les normes de sécurité le 28/05/10 en fumant dans la réserve

4. D’avoir travaillé le 09/06/10 de 7 heures 35 à 18 heures 35 sans respecter le planning qui fixait son travail de 8 heures à 16 heures

Le premier grief ne repose sur aucun élément probant et n’apparait pas fondé étant observé qu’il ressort des débats et des explications de la salariée que sous la direction des précédents gérants, elle les remplaçait souvent,- exerçait de fait des fonctions d’adjoint et avait connaissance du salaire des collaborateurs ;

Le deuxième grief est pris d’une altercation entre Madame Y X et Madame C ;

Il ressort des débats et des témoignages de Madame C et Mademoiselle D que cette altercation a eu lieu le 13/06/10 à 12 heures de la prise de service de Madame Y
X et avait pour origine le refus de Madame C de fermer sa caisse à la demande de Madame Y X qui devait travailler sur celle-ci ;

Le planning produit fait apparaitre l’affectation de Madame Y X à la caisse de 12 heures à 20 heures 13/06/10 ;

Les auditions effectuées dans le cadre de l’enquête administrative de la CPAM et par le CHSCT révèlent un climat d’incompréhension et d’hostilité entre Madame Y
X, Madame C et Mademoiselle D qui permet de douter des circonstances et de la gravité de l’incident relatées par les témoignages de celles-ci et de leur imputabilité exclusive Madame Y
X ;

Le troisième grief n’apparaît pas démontré étant ici rappelé que la salariée a précisé sans que cela soit objectivement contredit qu’elle avait fumé avec Mademoiselle
D sur le seuil d’accès à la réserve, les 2 battants ouverts ;

Le quatrième grief n’apparaît pas sérieux ; la salariée a indiqué quant au 09/06, vous m’avez appelé à mon domicile durant ma journée de repos le 08/06 pour me demander de m’organiser pour faire les commandes et que j’avais le libre arbitre de mon arrivée en raison de votre absence pour un séminaire ; cette explication apparaît sincère ; de plus, en admettant même que la salariée ait mal interprété la demande de l’employeur et ait effectué un travail supplémentaire non autorisé, ce fait ne revêt pas en l’espèce un caractère fautif justifiant le prononcé d’une mise à pied ;

La mise à pied du 13/07/10 notifiée à Madame Y X apparaît donc injustifiée et en tout état de cause excessive eu égard à son ancienneté, à l’absence d’incidents antérieurs et à son état de santé '

La Cour observe que les personnes en conflit avec la salariée en 2010 lors de la mise à pied sont les mêmes que celles qui témoignent un an plus tard pour le licenciement contre la salariée.

Sur le licenciement

En résumé les parties s’opposent en deux thèses contradictoires : la salariée prétend être victime d’actes d’agression psychologique qui explique et excuse sur fond de dépression et d’organisation du travail mal gérée certaines réactions conflictuelles avec certaines salariées , alors que l’employeur qu’il n’a commis aucune faute et que le comportement de la salariée est pour lui inexplicable et au terme d’une spirale négative non maitrisable il a été obligé de licencier.

A ce propos le premier juge a justement analysé et jugé , en des termes que la Cour approuve :

« La lettre de licenciement pour faute grave du 25/07/11 reproche à Madame Y X son comportement envers sa hiérarchie et ses collègues depuis juin 2010 ;

Or, pendant la période de juin 2010 à la date du licenciement le 25/07/11, il ressort des pièces produites que Madame Y X a été placée en arrêt maladie pour cause de dépression

' du 16 au 30/06/10 , du 10 au 15/08/10

' du 14/01/11 au 31/05/11, du 29/06/11 au 31/07/11

Que la gravité de son état a nécessité une hospitalisation en clinique psychiatrique ; que le médecin du travail n’a autorisé sa reprise le 06/06/11 qu’à l’essai pour un mois avec nécessité de la revoir entre le 15/07 et le 30107/11 ;

Dans ces conditions, le comportement anormal d’agressivité les réactions excessives et inappropriées invoquées pour justifier le licenciement de la salariée apparaissent en rapport avec son état dépressif ; l’employeur ne rapporte donc pas la preuve de la faute grave invoquée et ne pouvait licencier Madame Y X sans constatation préalable de son inaptitude par le médecin du travail, étant ici rappelé que la discrimination liée à l’état de santé est prohibée par les dispositions de l’article
L.1132-4 du Code du Travail ;

Le licenciement doit en conséquence être jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse .
»

La Cour ajoute qu’il est essentiel de réintégrer aussi dans l’analyse de la situation une importante correspondance de la médecine du travail qui apporte un éclaircissement important sur la situation conflictuelle dans l’entreprise en juin 2011, à l’origine directe du licenciement de la salariée.

Il faut rappeler que Y
X a été en arrêt et reprend le 6/06/2011, le médecin du travail la déclarant apte avec pour seule restriction un problème de position debout à limiter, ce dont on ne peut déduire utilement qu’il n’y avait aucun autre problème.

En tout état de cause il existait déjà de nombreux arrêts maladie de la salariée pour « état anxio dépressif » le 16/06/2010, « dépression réactionnelle » le 10/08/2010, « dépression » le 11/03/2011 et le 25/03/2011[ deux documents émanant d’un psychiatre exerçant en hôpital psychiatrique ] , « état anxio-dépressif sévère suivi en psychiatrie » le 15/04/2011 , « état dépressif sévère » le 29/04/2011.

Il est patent que la situation ne cesse de s’aggraver , au point d’aboutir même à des hospitalisations psychiatriques, ce que l’employeur peut suivre avec les avis d’arrêt maladie.

L’employeur fait grand cas que le problème psychologique de la salariée n’est mentionné par le médecin du travail lors de l’avis de reprise du 6/06/2011 pour nier une réalité déjà acquise et très apparente alors.

La lettre du médecin du travail du 20/06/2011 émane du même médecin que l’avis d’aptitude du 6/06/2011.

Elle doit être citée ici in extenso et commentée.

«

Monsieur B gérant du site de Tavel m’a contacté téléphoniquement mardi 14 juin 2011 en

raison des difficultés qu’il rencontrait avec l’équipe suite au retour de congé maladie de Madame X.

Il décrivait une agressivité verbale de Madame X vers ses collègues de travail dont certains menaçaient de se mettre en maladie si elles devaient à nouveau travailler en binôme avec elle.

J’ai donc proposé à monsieur B de m’adresser en consultation deux salariés le jour même afin d’évaluer la situation. Je me suis ensuite rendue sur le site vendredi 17/06 afin d’y rencontrer 2 autres salariés.

J’ai également conseillé à monsieur
B de se rapprocher de la DRH France de l’entreprise afin de les informer et d’actionner cellule sur les risques psychosociaux. En effet le chef d’entreprise est garant de la santé physique et mentale des salariés, loi de modernisation sociale de 2002, transcrite dans le code du travail art L.1152-11 à 1154-2 et dans le code pénal art .222-33-2. A ce titre, les risques psychosociaux font partie intégrante des risques de l’entreprise dans le cadre du Document unique d’Evaluation des Risques et doivent être pris en compte dans ce type de situation.

Devant le malaise et la réactivité émotionnelle de certains salariés préjudiciable aux conditions de travail, j’ai demandé à monsieur B de revoir l’organisation de travail en proposant un nouveau planning puisque tous les salariés ne semblent pas rencontrer les mêmes difficultés.

D’autre part, la situation étant particulièrement tendue, j’ai évoqué la possibilité de proposer des congés annuels, si la modification de planning ne suffisait pas à rétablir des conditions de travail satisfaisantes, ceci le temps que la hiérarchie ROC France fasse une évaluation de la situation et apporte des mesures correctives et en attendant la prochaine visite médicale du travail de madame
Bleier qui était déjà prévue le 11/07/ 2011) visite à la demande du médecin du travail à un mois de la reprise.

J’espère que ce courrier retiendra votre attention et sera pour vous une aide (')»

Il résulte de cette lettre du 20/06/2011 que :

— lors d’une conversation téléphonique du 14/06/2011 l’employeur a appelé le médecin et a discuté de la situation d’ensemble relative à Y X,

— que le médecin est donc intervenu le 14/06/2011 [ « le jour même » ] et a rencontré à son bureau deux salariés envoyés par l’employeur qui les a autorisés , puis le 17/06/2011 deux autres salariés dans l’entreprise même [« sur site » ] , sans que l’on sache les salariés concernés mais que l’employeur seul connait

— que le médecin a conseillé de faire intervenir la
DRH France, en rappelant à l’employeur ses obligations légales

— qu’il a suggéré une dédramatisation de la situation (aménagement possible du travail), en l’attente des « mesures correctives » attendues de la
DRH

— qu’il a rappelé que lui même devait faire le point médical avec Y X le 11/07/2011.

Or il est patent que l’employeur a pris l’option non de suivre les recommandations et le calendrier ainsi proposé, mais d’accélérer au contraire un processus visant et exclusivement au licenciement de la salariée.

Le 17/06/2011 deux témoignages sont établis par des salariés contre Y X , s’ajoutant à un troisième établi le 2/07/2011 [ documents transités par fax le 17/06/2011 selon des mentions en marge] ' alors que ces mêmes personnes sont en conflit avec la salariée depuis 2010 et ont été entendus déjà par le médecin du travail et doivent l’être par le CHSCT, ce qui signifie que l’employeur prépare d’ores et déjà un licenciement

Le 17/06/2011 le CHSCT lance sa procédure et convoque
Y X pour le 29/06/2011.

Le 29 /06/2011, Y X se voit prescrire un arrêt maladie de 1 mois pour « Etat dépressif réactionnel au pressions morales durant le travail » alors qu’entretemps elle a été entendue par le
CHASCT, terminant sa déposition en des termes selon le procès- verbal

« Ils font tout pour me sortir , je n’en peux plus, je veux partir, je veux me soigner'»

L’employeur ne tient pas compte de l’avis du médecin du travail qui lui demande de temporiser mais au contraire aggrave la tension de façon considérable au détriment de la salariée déjà en grave souffrance personnelle.

Il est à relever d’ailleurs que lors du CHSCT , il a été discuté de la proposition de modification de travail refusée par la salariée, et qui serait à l’origine du conflit. L’employeur ne cesse en la procédure et encore en cause d’appel devant la Cour de soutenir que l’avenant refusé n’avait aucun incidence négative pour la salariée mais devant le CHSCT il a tenu un discours sensiblement différent en énonçant quand il est interpellé sur ce problème : «une erreur a été relevée dans la proposition et nous devions revenir vers vous pour renouveler cette proposition, chose que vous n’avez même pas voulu « entendre », propos curieux car il ne s’agit pas d’audition et l’employeur aurait pu rectifier son « erreur » en écrivant sa réelle proposition , ce qu’il n’a pas fait : le procès- verbal note la réponse de la salariée : « c’est faux (') on ne lui a jamais rien reproposé (')»

Le 29/06/2011 la salariée est sortie en grande souffrance de la confrontation au CHSCT, étant remarqué encore que l’employeur détient à l’évidence avant même cette réunion et dès la mise en place de la procédure le 17/06/2011 les attestations de salariés qui vont être entendus et dont il peut se servir pour son projet de licenciement .

Le 29/06/2011 aucune procédure d’apaisement n’a été mise en place par l’employeur qui bien au

contraire , et alors qu’il sait que Y X est en arrêt maladie depuis le 29/06/ 2011 pour au moins un mois [ en réalité plusieurs mois avec des avis successifs], engage une procédure de licenciement.

La lettre de convocation à l’entretien préalable au licenciement est datée du 7/07/2011 pour une audition le 16 /07/2011, avant même le jour théorique de la fin de son arrêt maladie et alors même que la salariée devra être hospitalisée entretemps le 19/07/2011 dans un hôpital psychiatrique et que l’employeur sait aussi que le médecin du travail devait en principe la rencontrer le 17/07/2011.

Il apparaît bien que l’employeur délibérément fait abstraction des recommandations du médecin du travail et manifeste la volonté d’empêcher le médecin du travail de mettre en 'uvre une alternative évitant le licenciement. L’entretien au licenciement a été fixé la veille de la visite de la salariée chez le médecin du travail.

La salariée ne s’étant pas rendue à l’entretien préalable le 16/07/2011, l’employeur ne se pose aucune question particulière et procède immédiatement à un licenciement, de plus pour faute grave, alors que la salariée est en arrêt pour dépression avec une hospitalisation psychiatrique, et alors qu’il n’y a aucune urgence à mener cette procédure à son terme contre une salariée absente de l’entreprise. Il ne peut raisonnablement ignorer l’impact considérable d’une telle mesure et d’un tel motif sur la santé psychique de Y X déjà fragilisée.

Il est singulier enfin a fortiori de convoquer délibérément pour un licenciement un salarié pendant un arrêt pour dépression en relation avec le travail et dans des circonstances difficiles dont le médecin du travail a été informé , celui-ci ayant mené une enquête particulièrement diligente avant d’une part d’attirer l’attention de l’employeur sur ses obligations notamment de prudence et le caractère très délicat de la situation , d’autre part de lui demander de prendre le temps de rechercher les moyens d’y mettre fin, l’hypothèse d’un licenciement n’étant pas même envisagée par lui.

Il résultait de ce contexte que l’on ne pouvait imputer à faute , et a fortiori à faute grave et exclusivement à sa charge, le comportement de Madame X qui ne permettait pas même de considérer qu’il existait en l’état une cause réelle et sérieuse de licenciement . L’employeur le savait nécessairement lors de la lettre de licenciement .

Pour l’ensemble de ces raisons qui s’ajoutent à ce qu’a dit justement déjà le conseil de prud’hommes il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a dit le licenciement non justifié par une faute grave de la salariée et même dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur le montant de l’indemnisation de la salariée pour licenciement

En droit, en application de l’article L.1235- 3 du
Code du travail, si licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse et à défaut de réintégration , l’indemnité à la charge de l’employeur ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois , disposition non applicable néanmoins selon l’article L.1235-5 du Code du travail au licenciement d’un salarié de moins de deux ans d’ancienneté dans l’entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés . Il appartient alors au salarié de rapporter la preuve de son préjudice.

La salariée s’en tient sur ce point à demander la confirmation du jugement entrepris sauf sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse [ appel incident à 20 000 au lieu de 14 130 alloués ], et l’employeur ne conteste pas le quantum des sommes déjà allouées, même subsidiairement.

Le premier juge a pris en compte l’âge de la salariée (55 ans), un salaire mensuel de 1570,69 , une ancienneté de 6 ans 6 mois , le fait qu’elle était désormais en affection de longue durée et même en

invalidité, sans travail au jour où il statuait en 2015.

Il est à relever qu’il est constant que la salariée est selon les plannings dans une entreprise d’au moins 14 salariés au jour de son licenciement et que l’article
L.1235-3 du Code du travail doit s’appliquer.

Sur le quantum de l’indemnisation de la salariée pour licenciement, la preuve d’un préjudice au-delà de la somme déjà allouée incombe à Y X sur son appel incident.

Elle invoque en appel un « préjudice moral » particulier en relation avec sa dépression et un « préjudice financier » car elle se retrouverait en une situation difficile , ne pouvant rechercher un nouveau travail et bénéficier des allocations chômage.

Il n’est fourni aucune explication complémentaire ni aucune justification de cette situation , le seul document produit étant la page 1 ( sur 2) selon lequel elle percevrait une pension d’invalidité, pour une cause inconnue et avec le bénéfice provisoire d’une pension d’invalidité d’un montant inconnu.

Le jugement sera en conséquence confirmé aussi sur ce point et ainsi en définitive en toutes ses dispositions ,sauf ce qui est dit infra au dispositif sur les documents à remettre conformément à la demande de la salariée et en exécution des dispositions du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud’homale et en dernier ressort

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions

Y ajoutant, dit que la S.A.S 'ROC FRANCE ' doit remettre à Y X un bulletin de paye pour juillet et août 2010 en conformité au présent arrêt,

Déboute les parties de leurs autres ou plus amples prétentions,

Condamne la S.A.S 'ROC FRANCE ' à payer à Y X la somme de 1000 au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la S.A.S 'ROC FRANCE ' aux dépens d’appel.

Arrêt signé par Monsieur LE GALLO, Président et par Madame OLLMANN, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Cour d'appel de Nîmes, 29 novembre 2016, n° 15/01240