Cour d'appel de Paris, 31 octobre 2013, n° 09/02527

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 31 oct. 2013, n° 09/02527
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 09/02527
Décision précédente : Tribunal de commerce de Créteil, 26 janvier 2009, N° 2005F00196

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5

ARRÊT DU 31 OCTOBRE 2013

(n° , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 09/02527

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 janvier 2009 – Tribunal de Commerce de CRETEIL – 2e CHAMBRE – RG n° 2005F00196

PARTIE INTERVENANTE et comme telle APPELANTE

XXX venant aux droits de la société GESTRANS agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Ayant son siège social

XXX

XXX

Représentée par Me Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090

Assistée de Me Cécile PION de la SCP GOBERT & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Maître A-B X, Mandataire Judiciaire ès qualités de Liquidateur judiciaire de la SA COMPUTECH

XXX

XXX

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Assistée de Me Ariane ROURE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0363, plaidant pour Me A-Claude AZAN BERGHEIMER, avocat au barreau de PARIS, toque : E0769

SA EURIBAIL agissant poursuites et diligences prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Ayant son siège social

XXX

XXX

Représentée par Me Anne-Laure GERIGNY de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 juillet 2013, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Madame Colette PERRIN, Présidente, chargée d’instruire l’affaire et Madame D E-F, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente

Madame D E-F, Conseillère

Madame Y Z, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY, Greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS ET PROCEDURE

En décembre 2000, la société Gestrans et la société Computech ont convenu d’accords portant sur des contrats de location de matériels informatiques, notamment des cartes mémoires et des disques durs, la société Computech faisant l’acquisition des matériels et les louant ensuite à la société Gestrans.

Les deux parties ont ainsi signé un contrat n°CPT 00/10/001/PB, non daté, pour une durée de 24 mois moyennant un loyer mensuel de 871,09€HT.

Par un avenant complémentaire du 18 décembre 2000, il a été prévu le financement d’une carte supplémentaire, portant le loyer mensuel exigible à la somme de 6 165 FHT par mois soit par 3 372,18€ par trimestre.

Le matériel loué a été livré le 26 février 2001 de sorte que la location devait arriver à son terme le 25 février 2003.

A cette date, la société Gestrans a poursuivi les paiements qui faisaient l’objet de prélèvements automatiques.

La société Computech a fait l’objet d’un jugement de redressement judiciaire du tribunal de commerce de Paris en date du 3 novembre 2003, qui a été converti en liquidation judiciaire par jugement du 4 octobre 2004, Me X ayant été désignée en qualité de liquidateur.

La société Euribail s’est alors prévalue de la cession du contrat de location par acte du 30 octobre 2003 et a revendiqué le paiement du loyer du 4e trimestre 2004 selon une facture du 17 septembre 2004.

Par courrier du 26 novembre 2004, Me X, ès-qualités, a informé la société Gestrans de ce qu’elle n’avait pas eu connaissance de la cession du contrat de location.

La société Gestrans a saisi le juge des référés d’une demande de séquestre des loyers ; par ordonnance du 19 janvier 2005, a été désigné M. le Bâtonnier de l’ordre des avocats du Barreau de Créteil avec pour mission de recevoir le loyer du 4e trimestre 2004 et les loyers suivants ; puis elle a assigné Me X, ès-qualités et la société Euribail devant le tribunal de commerce de Créteil d’une demande tendant à juger qu’elle était locataire du matériel, et à fixer au passif de la société Computech une créance de 21.299,31€ en remboursement de loyers. Par jugement du 17 janvier 2009, la société Egetra venant aux droits de la société Gestrans a été déboutée de ses demandes et, le 6 février 2009, a interjeté appel de cette décision.

Par exploit du 9 décembre 2009, Me X, ès-qualités, a assigné les sociétés Gestrans et Euribail devant le tribunal de commerce de Paris afin que soit prononcée la nullité du contrat de cession du contrat de location conclu en période suspecte. Par jugement du 30 mai 2012, le tribunal a fait droit à cette demande ; le 12 juillet 2012, la société Euribail a interjeté appel de cette décision.

Les deux procédures ont fait l’objet d’une ordonnance de jonction en date du 14 mars 2013.

Par jugement du 27 janvier 2009, le tribunal de commerce de Créteil a :

— débouté Me X ès-qualités et la société Gestrans de leur demande de nullité

— dit que le matériel est la propriété de la société Euribail, cessionnaire du contrat et déboute la société Gestrans de ce chef

— condamné la société Gestrans à payer à la société Euribail :

. 37 092,00€TTC pour les loyers restant dus à compter du 4e trimestre 2004 jusqu’à parfait paiement

. 15 156,62€ au titre des pénalités de retard prévues par l’article 3.4 du contrat de location

— débouté la société Gestrans et Me X ès-qualités de leurs demandes plus amples ou contraires

— ordonné le versement au profit de la société Euribail des sommes que la société Gestrans a consignées ce pour un montant de 16 860,85€ qui s’imputeront sur la condamnation ci-dessus

— condamné la société Gestrans à payer à la société Euribail la somme de 1 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens

Par jugement du 30 mai 2012 le tribunal de commerce de Paris a :

— prononcé la nullité de la cession par la société Computech à la société Euribail en date du 30 octobre 2003 du contrat de location conclu entre la société Computech et la société Gestrans

— débouté le société Gestrans et la société Euribail de leur demande au titre de l’article 32 du code de procédure civile

— condamné la société Euribail à payer à Me X ès-qualités la somme de 3 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— condamné la société Euribail à payer à la société Gestrans la somme de 3 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Vu l’acte du 6 février par lequel la société Egetra venant aux droits de la société Gestrans a interjeté appel du jugement du 27 janvier 2009

Vu l’acte du 12 juillet 2012 par lequel la société Euribail a interjeté appel du jugement du 30 mai 2012.

Vu l’ordonnance de jonction en date du 14 mars 2013 de ces deux procédures.

Vu les dernières conclusions en date du 5 juin 2013 par lesquelles Me X ès-qualités demande à la cour de :

sur le jugement du 30 mai 3012 :

— la dire recevable et bien fondée en son appel

— constater que le contrat de cession du 30 octobre 2003 a été conclu en période suspecte

— constater qu’il ne prévoit aucun prix mais une compensation avec une créance non identifiée et dire que le paiement par compensation en période suspecte est nul

— dire que le contrat de location et le matériel y afférent ont été cédés gratuitement,

— en conséquence, prononcer la nullité du contrat et débouter la société Euribail de toutes ses demandes,

Y ajoutant

— condamner la société Euribail à verser 3 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile à la SELARL X Yang-Tin prise en la personne de Me X ès-qualités

sur le jugement du 27 janvier 2009 :

— l’infirmer en toutes ses dispositions

et statuant à nouveau,

— débouter les sociétés Egetra venant aux droits de la société Gestrans et Euribail de l’ensemble de leurs demandes

— ordonner la déconsignation des sommes séquestrées à son profit

— condamner la société Egetra venant aux droits de la société Gestrans à lui payer la somme de 4 500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Me X ès-qualités fait valoir que le transfert du contrat de location, effectué en période suspecte, n’a pas prévu de prix de cession et qu’un paiement par compensation constitue un mode anormal de paiement et conclut à la nullité de celui-ci et au rejet des demandes de la société Euribail.

Elle soutient que la société Egetra n’a pas produit au passif de la société Computech au titre de loyers qu’elle aurait indument versés de sorte qu’elle doit être déboutée et que le contrat de location s’est poursuivi dans le cadre d’un nouveau contrat à durée indéterminée moyennant un loyer identique de sorte qu’elle est fondée à demander le versement entre ses mains des sommes consignées.

Vu les dernières conclusions en date du 12 octobre 2012 par lesquelles la société Euribail demande à la cour de :

— débouter Me X ès-qualités de l’intégralité de ses demandes

A titre reconventionnel,

— condamner Me X ès-qualités à lui verser :

. la somme de 19 559,21€ au titre du remboursement du contrat fournisseur

. la somme de 3 194,58€ au titre des loyers avancés au profit de la société Computech

. la somme de 2 000€ au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile

. la somme de 2 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Euribail prétend être devenue régulièrement propriétaire du matériel dont elle a payé le prix par compensation avec une dette de la société Computech et prétend de ce fait à une créance au titre des loyers versés par la société Egetra.

Vu les dernières conclusions en date du 20 juin 2013 par lesquelles la société Egetra venant aux droits de la société Gestrans demande à la cour de :

sur le jugement du tribunal de commerce de Paris du 30 mai 2012 :

— le confirmer en toutes ses dispositions

sur le jugement du tribunal de commerce de Créteil du 27 janvier 2009 :

— l’infirmer en toutes ses dispositions

Au principal,

— dire et juger que le contrat de location financière a pris fin le 25 février 2003

— fixer la créance de la société Egetra venant aux droits de la société Gestrans au passif de la société Computech à la somme de 21 357,07€ (somme payée du 26.02.2003 au 04.10.2004 à Computech)

— ordonner la libération de la somme de 16 860,85€ actuellement consignée

— débouter Me X ès-qualités et la société Euribail de toutes leurs demandes, fins et conclusions

A titre subsidiaire,

— dire et juger que le contrat de location financière reconduit tacitement le 26 février 2003 est nul en l’absence de cause

— fixer la créance de la société Egetra venant aux droits de la société Gestrans au passif de la société Computech à la somme de 21 357,07€ (somme payée du 26.02.2003 au 04.10.2004 à Computech)

— ordonner la libération de la somme de 16 860,85€ actuellement consignée

— débouter Me X ès-qualités et la société Euribail de toutes leurs demandes, fins et conclusions

A titre infiniment subsidiaire,

— dire et juger que le contrat de location financière s’est reconduit tacitement le 26 février 2003 moyennant un loyer de 30,49€

— dire et juger que la société Egetra venant aux droits de la société Gestrans au passif de la société Computech est redevable d’une seule indemnité de jouissance de 30,49€ par an à compter du 26 février 2003 jusqu’au 31.12.2012 soit la somme de 251,54€

— fixer la créance de la société Egetra venant aux droits de la société Gestrans au passif de la société Computech, sur la période du 26 février 2003 au 04.10.2004, après compensation des loyers indûment payés (21 357,07€) avec le loyer ou l’indemnité de jouissance (48,26€) à la somme de 21 309,91€

— ordonner la libération de la somme de 16 860,85€ actuellement consignée après déduction de la somme de 251,54€ au titre de l’indemnité de jouissance du matériel soit la somme de 16 609,31€ à lui restituer

— dire et juger la société Euribail irrecevable et mal fondée

— débouter Me X ès-qualités de toutes ses demandes à son encontre

— condamner solidairement Me X ès-qualités et la société Euribail à lui payer la somme de 5 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Egetra soutient que le contrat de location était prévu pour une durée de 24 mois correspondant à la valeur du matériel et que, s’il avait été mentionné une possibilité de prolongation avec un nouveau loyer, celui-ci était purement symbolique et n’avait pour but que d’éviter que le contrat soit qualifié de crédit bail, opération réservée aux établissements bancaires.

Elle estime donc que les sommes versées dans le cadre des prélèvements automatiques, auxquels elle n’avait pas mis fin constituent une créance à l’encontre de la société Computech, en demandant la fixation au passif de celle-ci et que les sommes versées entre les mains du séquestre doivent lui être restituées.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur le contrat de cession du contrat de location

Considérant que, par jugement du 27 janvier 2009, le tribunal de commerce de Créteil a débouté Me X ès-qualités et la société Gestrans de leur demande de nullité de la cession en date du 30 octobre 2003, au profit de la société Euribail, par la société Computech du contrat de location que cette dernière avait conclu avec la société Gestrans et a dit que le matériel était la propriété de la société Euribail, cessionnaire du contrat alors que, par jugement du 30 mai 2012, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la nullité de cette cession ;

Considérant que la société Euribail soutient être propriétaire du matériel, faisant valoir que celui-ci lui a été cédé par la société Computech alors que cette dernière était encore in bonis, ce que conteste Me X ès-qualités, qui conclut à la nullité du contrat de cession comme ayant été conclu en période suspecte ;

Considérant que la société Egetra venant aux droits de la société Gestrans conteste avoir signé l’acte de cession et prétend qu’il s’agit d’une manipulation de son cachet et de la signature de son dirigeant sur une photocopie ;

Considérant que la société Euribail a produit uniquement des copies pour démontrer ses droits à savoir :

. un contrat de location portant la date du 20/12/2002 pour la société Gestrans et 9/05/2003 pour la société Computech comportant des conditions générales et particulières

. un contrat intitulé « acte de cession et de transfert du contrat de location et des équipements y figurant »

. une autorisation de prélèvement par la société Gestrans au profit de la société Euribail en date du 20.12.2002.

Que le contrat de location comporte des conditions générales et particulières sur lesquelles fugurent des mentions manuscrites, d’une part « reconduction sur 24 mois », d’autre part « date de démarrage identique au contrat 222 607 L30 1/06/2003 » ;

Que l’acte de cession en date du 30 octobre 2003 dont se prévaut la société Euribail mentionne pourtant qu’il a été établi en trois originaux ; que, pour autant, elle n’a pas produit le sien et que Me X ès-qualités n’en a pas davantage été destinataire ;

Que le contrat de cession indique « Par contrat de location cité en référence en date du 9/05/2003, le loueur a donné en location à la société ci-dessus dénommée le locataire, les équipements décrits dans le contrat de location cité en référence pour une période irrévocable de 8 trimestres à compter du 1/06/2003 ( date exigible du premier loyer, les loyers suivants le seront le premier de chaque trimestre )soit huit loyers irrévocables d’un montant unitaire de 3 372,17TTC », reprenant ainsi la date portée de façon manuscrite comme étant celle du démarrage et étant commune à un autre contrat ;

Considérant que ces mentions ne sont pas paraphées par la société Gestrans alors même que ce contrat comporte la date du 20/12/2002 pour la société Gestrans et celle du 9/05/2003 pour la société Computech, de sorte que la date à laquelle les mentions précitées ont été apposées ne peut être déterminée ;

Que la société Gestrans démontre qu’elle a réglé le loyer de 3 372,17€ au titre du 2e trimestre 2001 ; que, dès lors, les indications concernant la date de versement du premier loyer comme étant le 1er juin 2003 et constituant la date de démarrage du contrat de location, qui ont été reprises dans le prétendu acte de cession, sont manifestement erronées;

Que ces mentions manuscrites sont enfin en contradiction avec les clauses du contrat qui stipulait que celui-ci était conclu pour une durée irrévocable de 24 mois, ce qui excluait un renouvellement à l’identique ;

Considérant, de plus, que la cession est intervenue le 30 octobre 2003 alors que la société Computech a fait une déclaration de cessation des paiements le 20 octobre 2003 et que la procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la société Computech a été ouverte le 3 novembre 2003 ;

Que le prétendu contrat de cession n’a stipulé aucun prix ; que, par ailleurs, il prévoit la compensation, ce qui constitue, en toute hypothèse, un mode anormal de paiement en période suspecte ;

Que l’article L621-107 ancien du code de commerce dispose «  Sont nuls lorsqu’ils auront été faits par le débiteur depuis la date de cessation des paiements, les actes suivants:

1° tous les actes à titre gratuit translatifs de propriété mobilière ou immobilière

2° tout paiement quel qu’en ait été le mode pour dettes non échues au jour du jugement » ;

Que, si la société Euribail se prétend créancière de la société Computech au titre d’une facture de fournisseur 19 559,21€ et de loyers qu’elle lui aurait avancés, elle ne justifie d’aucune pièce à l’appui de ses affirmations et n’a pas produit au passif de la société Computech pour une quelconque créance ;

Considérant, en conséquence, que les pièces produites en copie par la société Euribail et contestées par la société Gestrans sont dépourvues de valeur probante ;

Que la société Euribail ne justifie ni de la cession du contrat de location, ni de ses créances, ni d’une production à ce titre au passif de la société Computech ;

Qu’il y a lieu d’infirmer le jugement du 27 janvier 2009 du tribunal de commerce de Créteil en ce qu’il a jugé que la société Euribail était propriétaire du matériel en sa qualité de cessionnaire de celui-ci, et qu’il y a lieu de confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 30 mai 2012 en ce qu’il a prononcé la nullité de la cession par la société Computech à la société Euribail en date du 30 octobre 2003 du contrat de location conclu entre la société Computech et la société Gestrans.

Sur les créances invoquées par la société Euribail

Considérant que la société Euribail a invoqué deux créances à l’encontre de la société Computech soit 19 559,21€ au titre d’une facture fournisseur et une somme de 3 194,58€ au titre de loyers dont elle aurait fait l’avance à la société Computech ;

Considérant que la société Euribail n’a pas produit au titre de ses créances et n’apporte aucun élément pour en justifier ;

Que c’est donc à juste titre qu’elle a été déboutée de sa demande par le jugement du 30 mai 2012.

Sur la créance invoquée par la société Egetra venant aux droits de la société Gestrans

Considérant que la société Egetra soutient à titre principal que le contrat de location a pris fin, de sorte que les prélèvements effectués correspondent à des paiements indus ; qu’elle sollicite, d’une part, son admission au passif de la société Computech pour un montant de 21 308,81€ correspondant à ces prélèvements, d’autre part le remboursement de la somme somme de 16 860,85€, qu’elle a été consignée entre les mains du séquestre judiciaire ;

Considérant que Me X ès-qualités fait valoir que cette créance est éteinte dans la mesure où elle n’a pas été déclarée dans le délai d’un an, délai qui a expiré le 3 novembre 2004 alors que la société Egetra n’a déclaré celle-ci que le 27 décembre 2004, soit hors délai et que le contrat s’est poursuivi aux conditions antérieures de sorte que les sommes consignées doivent être versées entre ses mains ;

Considérant que la société Egetra fait valoir que le contrat a pris fin le 26 février 2003, date de la fin du financement du matériel ;

Que la première facture de location de la société Computech, qui correspondait à la date de livraison est du 26 février 2001, et le contrat ayant été conclu pour une durée de 24 mois, il est arrivé à son terme le 25 février 2003 ;

Que la société Gestrans a conservé le matériel et a laissé se poursuivre les prélèvements automatiques, de sorte qu’elle a acquitté la somme de 21 357,07€ pour la période du 26 février 2003 au 4 octobre 2004, puis en cours de procédure, elle a encore acquitté la somme de 16 860,64€ entre les mains du séquestre judiciaire ;

Que le contrat a prévu une possibilité de prorogation à savoir que « Au delà de la période contractuelle de location, sans modification de l’équipement ci dessus, le locataire pourra, moyennant le respect de l’ensemble du contrat, bénéficier d’une prorogation d’un an renouvelable, de ce même contrat pour 15€ HT par mois » ;

Que la société Gestrans indique avoir demandé à bénéficier de cette disposition et prétend n’avoir reçu aucune réponse à sa demande ; qu’elle soutient que cette clause de loyer n’avait pour seul but que d’éviter une qualification du contrat en un contrat de crédit bail, ce type de contrat relevant des seuls établissements bancaires ;

Que Me X ès-qualités fait valoir que le contrat prévoyait un formalisme précis à savoir « Au delà de la durée précisée aux conditions particulières, le locataire doit informer le bailleur, avec un préavis de neuf mois, par lettre recommandée avec avis de réception, de son intention de prolonger le contrat aux mêmes conditions pour un loyer de 200€HT/an (hors assurance).Dans le cas contraire il devra restituer l’équipement au terme du contrat » ;

Qu’il résulte de ces dispositions que les parties avaient convenu soit d’une prolongation du contrat avec des conditions nouvelles, soit d’une restitution du matériel ;

Que le matériel informatique, objet du contrat, était constitué notamment de deux cartes réseau et de disques ; qu’il s’agissait donc de matériel spécifiquement adapté aux besoins de la société Gestrans qui, seule, avait intérêt à le conserver au delà du contrat de financement ; que d’ailleurs, ni la société Euribail, ni Me X, ès-qualités n’en ont demandé la restitution, ni n’en ont précisé la valeur résiduelle ; que le contrat lui-même ne précisait aucune condition de rachat ;

Qu’en toute hypothèse, la société Gestrans, qui a versé le loyer convenu pendant 24 mois soit 80 932,43€, a exécuté ses obligations au titre du paiement du loyer ; qu’elle ne justifie pas avoir manifesté de son intention de prolonger le contrat comme elle en avait la possibilité ;

Qu’il résulte de ces éléments que le contrat initial est parvenu à son terme, la société Gestrans ayant acquitté les loyers convenus ; que, quand bien même elle a conservé le matériel et que le prélèvement automatique du loyer s’est poursuivi, il ne s’ensuit pas que soit né un nouveau contrat à durée indéterminée dans la mesure où le montant du loyer constituait une valeur résiduelle et qu’il n’existait donc ni objet, ni cause à un nouveau contrat ;

Qu’en conséquence, la société Gestrans a versé indument des loyers qui ont été encaissés à hauteur de 21 308, 81 € par la société Computech ; que si elle est créancière de cette somme et si elle demande, à ce titre, son admission au passif de la société Computech, qui a fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire en date du 3 novembre 2003 puis d’un jugement de conversion en liquidation judiciaire en date du 4 octobre 2004, au terme duquel le tribunal a allongé le délai de déclaration des créances jusqu’au quinzième jour suivant la publication au Bodacc du jugement, le délai de déclaration des créances expirait le 3 novembre 2004 ; que, dès lors, la société Gestrans, qui n’a déclaré sa créance que le 27 décembre 2004, était hors délai ; qu’il y a lieu de rejeter sa demande de fixation de sa créance au passif de la société Gestrans ;

Que, s’agissant des sommes versées postérieurement à l’ouverture de la procédure collective, soit la somme de 16 860,85€, elle a été consignée entre les mains du séquestre judiciaire à titre conservatoire ; qu’en l’absence de tout contrat ayant subsisté entre les sociétés Computech et Gestrans après l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire, il y a lieu d’ordonner sa restitution à la société Gestrans.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

Considérant que la société Gestrans a dû engager des frais non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge, qu’il y a lieu de faire application des dispositions de l’article 700 dans la mesure qui sera précisée au dispositif.

PAR CES MOTIFS

Et, adoptant ceux non contraires des Premiers Juges,

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME le jugement du tribunal de commerce de Créteil du 27 janvier 2009 en toutes ses dispositions ;

CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de Paris en ce qu’il a prononcé la nullité de la cession du contrat de location par la Société Computech au profit de la Société Euribail

DIT et JUGE que le contrat de location financière a pris fin le 25 février 2003

ORDONNE la libération de la somme de 16 860,85€ actuellement consignée entre les mains de M.le Bâtonnier de l’Ordre des Avocats du barreau du Val de Marne au profit de la société Egetra venant aux droits de la société Gestrans

et statuant à nouveau

REJETTE toute autre demande, fin ou conclusion

CONDAMNE la société Euribail à payer la somme de 5 000 euros à la société Egetra venant aux droits de la société Gestrans et la somme de 3 000€ à Me Montravers ès-qualités au titre de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la société Euribail aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier La Présidente

E.DAMAREY C.PERRIN

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Textes cités dans la décision

  1. Code de commerce
  2. Code de procédure civile
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