Cour d'appel de Paris, 19 mars 2013, n° 12/14951

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 19 mars 2013, n° 12/14951
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 12/14951
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 4 juillet 2012

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRET DU 19 MARS 2013

(n° 232 , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/14951

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 05 Juillet 2012 -Tribunal de Grande Instance de Paris – RG n°

APPELANT

Monsieur C X

XXX

XXX

Rep/assistant : Me Benoît DE PEYRAMONT (avocat au barreau de PARIS, toque : C1681)

INTIMEE

COMMUNE DE MONTREUIL prise en la personne de son maire en exercice

XXX

XXX

XXX

Rep/ : Me Nadia BOUZIDI-FABRE (avocat au barreau de PARIS, toque : B0515)

assistée de Me Jérémie BOULAY, avocat au barreau de PARIS, toque D 748

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 18 Février 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Joëlle BOURQUARD, Présidente de chambre

Madame Martine TAILLANDIER-THOMAS, Conseillère

Madame A B, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mlle Véronique COUVET

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Joëlle BOURQUARD, président et par Mlle Véronique COUVET, greffier.

M. I J X est décédé le XXX et sa veuve, Mme Y Z H, est décédée à son tour le 8 avril 1994. Ils ont laissé pour leur succéder leur fils, M. C X.

Il dépend de leurs successions un bien immobilier sis à Montreuil-sou-Bois (93), XXX, parcelle cadastrée XXX

La Commune de Montreuil-sous-Bois arguant des problèmes de sécurité posés par ce bien immobilier a fait assigner, le 13 juin 2012, M. C X devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris, lequel, par ordonnance du 5 juillet 2012, a nommé le directeur régional de la direction nationale d’interventions domaniales en qualité d’administrateur provisoire des successions non réclamées de M. I J X et de Mme Y Z H avec mission de faire procéder à la levée des scellés, dresser l’état descriptif et estimatif des meubles, effets et valeurs, dresser l’état des forces actives et passives de la succession, rechercher les héritiers et si ceux-ci ne peuvent être retrouvés ou s’ils s’abstiennent de prendre partie, gérer et administrer la succession et en particulier faire vendre aux enchères publiques les meubles et objets mobiliers.

Appelant de cette décision, M. C X, par conclusions transmises le 28 janvier 2013, demande à la cour de l’annuler en toutes ses dispositions et de condamner l’intimée à lui régler la somme de 3 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Par conclusions transmises le 8 février 2013, la Commune de Montreuil-sous-Bois demande à la cour de confirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, de débouter M. C X de son appel et de toutes ses demandes, de le condamner à une amende civile de 1 000 € pour appel abusif, de prononcer la suppression des propos outrageants et injurieux suivants : « l’ironie étant que lorsque cela l’arrange, la Mairie de Montreuil n’hésite à employer des méthodes musclées pour déloger les squatteurs » (conclusions p. 7) et « la Mairie de Montreuil détourne les procédures existantes à des fins spéculatives » (conclusions p. 9) et de condamner l’appelant à lui verser la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

SUR CE, LA COUR

Considérant que M. C X fait valoir que la Commune de Montreuil-sous-Bois n’a aucun intérêt à agir en nomination d’un administrateur provisoire, la requête devant émaner des personnes désignées par la loi du 20 novembre 1940 et l’arrêté du 2 novembre 1971 d’autant plus que le pavillon n’est la source d’aucun danger et qui si tel avait été le cas, il lui appartenait de prendre un arrêté de péril, qu’en l’absence d’urgence, le tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, était incompétent, qu’à supposer que l’ordonnance ait été rendue sur le fondement de l’article 809, aucun dommage imminent n’est démontré, le pavillon étant sécurisé, qu’il a encore renforcé les protections existantes en janvier 2013, qu’aucun trouble manifestement illicite n’est caractérisé, que la Commune de Montreuil-sous-Bois n’a d’ailleurs rien fait depuis l’ordonnance entreprise pour remédier au caractère dangereux allégué du pavillon, que la mesure ordonnée se heurte à une contestation sérieuse, qu’en préjugeant du principal, le juge des référés a excédé les pouvoirs qui lui étaient impartis, qu’il y a détournement de procédure par la mairie de Montreuil, que l’ordonnance attaquée souffre d’un défaut de motivation, qu’elle ne permet pas de déterminer son fondement juridique, que par ses démarches, il a fait part de sa ferme intention d’accepter la succession en cause et qu’il a chargé un notaire de régler définitivement la succession ;

Considérant que la Commune de Montreuil-sous-Bois répond que le pavillon est inhabité et complètement à l’abandon depuis une vingtaine d’années, qu’elle a mis en demeure M. C X de se prononcer sur la succession, que la désignation d’un administrateur est la seule option s’offrant à elle pour remédier au plus vite aux dangers que fait courir le pavillon, que l’article 2 de l’arrêté du 2 novembre 1971 permet à toute personne intéressée de saisir le président du tribunal pour confier la gestion d’une succession non réclamée, que l’imminence du dommage ne fait aucun doute ainsi qu’il résulte du rapport de l’inspecteur de salubrité, qu’aucun arrêté de péril ne peut être pris sans connaître le propriétaire du bien, qu’en l’espèce, il n’y a pas de propriétaire, que la compétence du président du tribunal de grande instance est prévue par les dispositions susvisées, qu’elle est exclusive de toute urgence, que le juge des référés avait pouvoir de désigner un administrateur provisoire en raison de l’inaction de M. C X, qu’il n’a pas pris partie sur le droit de ce dernier de réclamer la succession, que l’appelant n’a jamais démontré sa ferme intention d’accepter la succession et que compte tenu du caractère outrageant et injurieux des propos contenus dans ses conclusions, elle en sollicite la suppression en application de l’article 4 de la loi du 29 juillet 1881 ;

Considérant que les successions de I J X et Y Z H ayant été ouvertes avant le 1er janvier 2007, date d’entrée en vigueur de la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités, les dispositions des articles 809 et suivants issues de cette loi relatives aux successions vacantes ne leur sont pas applicables en vertu des dispositions transitoires prévues par l’article 47 de ladite loi ; qu’elles relèvent, en conséquence, de la loi du 20 novembre 1940 et de l’arrêté du 2 novembre 1971 invoqués par les parties ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 20 novembre 1940, la gestion des successions non réclamées et la curatelle des successions vacantes sont exclusivement confiées à l’administration de l’enregistrement, des domaines et du timbre, qui exerce, par l’intermédiaire de ses préposés, les fonctions d’administrateur provisoire ou de curateur dans les conditions prévues par la législation en vigueur ;

Considérant que l’article 1er de l’arrêté du 2 novembre 1971 concernant l’administration provisoire et la curatelle des successions prévoit que lorsque, avant l’expiration des délais impartis pour faire inventaire et pour délibérer, il ne se présente personne pour réclamer une succession, qu’il n’existe pas d’héritiers connus ou que les héritiers connus y ont renoncé ou restent dans l’inaction, cette succession est réputée non réclamée au sens de l’article 1 de la loi du 20 novembre 1940 ; qu’il ajoute qu’une succession est également considérée comme non réclamée après expiration des délais précités s’il ne se présente personne pour l’appréhender, alors même qu’il existe des héritiers si ceux-ci restent dans l’inaction ;

Considérant que l’article 2 du même arrêté précise que la gestion des successions non réclamées et confiée, par ordonnance du président au tribunal de grande instance du lieu d’ouverture de la succession, au service des domaines, l’ordonnance de nomination étant rendue soit à la requête des personnes intéressées et spécialement du service des domaines, soit sur réquisition du ministère public ;

Considérant qu’il en résulte que toute personne intéressée peut demander au président du tribunal de grande instance la désignation de l’administrateur des domaines comme administrateur provisoire d’une succession non réclamée ;

Considérant, en l’espèce, que la Commune de Montreuil-sous-Bois est une personne intéressée au sens de ces dispositions dès lors qu’elle fait valoir que l’immeuble dépendant des successions X- H menace la sécurité publique ; que sa qualité et son intérêt à agir ne peuvent lui être déniés ;

Considérant qu’il existe un héritier connu selon acte de notoriété dressé par Maître Robert LE NENAN, notaire à Paris 15e, le 30 avril 2009 : M. C X ; qu’il est constant que celui-ci n’a pas renoncé aux successions de ses parents ; qu’il appartient dès lors à la Commune de Montreuil-sous-Bois de démontrer son inaction ;

Considérant qu’elle verse aux débats, outre deux lettres de réclamation d’une voisine du pavillon dépendant desdites successions, Mme E F, reçues les 20 mars et 30 octobre 2012, un rapport de visite en date du 21 avril 2011 de son inspecteur de salubrité faisant état d’une vitre cassée au 2e étage du pavillon menaçant de tomber et indiquant que celui-ci constitue un danger pour le voisinage car les enfants s’y introduisent pour jouer à l’intérieur, alors que la solidité du plancher de la terrasse – entre autres – n’est pas assurée ; qu’elle produit un second rapport avec photographies du même inspecteur en date du 12 décembre 2012 indiquant que depuis sa dernière visite, trois ouvertures ont été fermées par des tôles légères fixées au mur mais que la porte du garage est fermée par une petite poutre, ce qui n’offre pas ' selon lui – de garantie suffisante contre l’intrusion ; qu’il ajoute que plusieurs fenêtres étant ouvertes, il est aisé de pénétrer dans le pavillon notamment en escaladant le mur situé à gauche de celui-ci (2 m de hauteur environ) et que leurs carreaux cassés menacent de tomber sur les passants ;

Considérant, toutefois, que l’appelant verse de son côté aux débats un devis en date du 20 janvier 2013 établi par l’entreprise « AUX ATELIERS DES COMPAGNONS FERREIRA » concernant le montage de parpaings sur l’ensemble des ouvrants côté rue comprenant une porte de garage, une porte d’entrée et trois fenêtres et la photocopie du chèque de paiement en date du 23 janvier 2013 adressé à cette dernière ;

Considérant qu’il en résulte que l’appelant ne reste pas inactif ; qu’après avoir une première fois fermé trois ouvertures avec des tôles légères, il a désormais procédé à la condamnation par parpaings de celles-ci ainsi que des fenêtres dont les carreaux étaient cassés ; que, certes, la commune de Montreuil-sous-Bois conteste la conformité de ces travaux aux règles de l’urbanisme et les estime insuffisants pour assurer la sécurité du pavillon ; qu’elle ne justifie pas, cependant, alors que l’intrusion à l’intérieur de l’immeuble n’est plus possible, d’un péril imminent, celui-ci supposant 'imminence d’un dommage dont la survenance et la réalité sont certaines et non un dommage purement éventuel ;

Considérant qu’outre les interventions effectuées sur les pavillons, M. C X a fait établir par notaire l’acte de notoriété et a réglé les frais afférents à celui-ci ; que si l’attestation de propriété immobilière n’a toujours pas à ce jour été établie, il a déposé, cependant, le 29 octobre 2012, une demande de copie du titre de propriété en indiquant que celui-ci était introuvable auprès du conservateur des hypothèques ; que ce dernier lui a adressé les documents demandés le 13 novembre 2012 ; qu’il confirme, par ailleurs, expressément dans ses écritures d’appel, son intention d’accepter les successions en cause ; que l’intimée ne peut dès lors lui reprocher de ne pas prendre position ;

Considérant que les successions X-H ne peuvent être considérées dans ces conditions comme non réclamées au sens des dispositions susvisées ; que la Commune de Montreuil-sous-Bois doit dès lors être déboutée de sa demande de désignation d’un administrateur provisoire, l’ordonnance étant, en conséquence, non pas annulée mais infirmée en toutes ses dispositions ;

Considérant que partie succombante, l’intimée ne saurait réclamer la condamnation de l’appelant à une amende civile, étant au surplus observé qu’elle n’a pas qualité à se prévaloir des dispositions de l’article 559 du code de procédure civile qu’il appartient à la cour seule de mettre en oeuvre ;

Considérant qu’aux termes de l’article 41 (et non 4) de la loi du 29 juillet 1881, les discours prononcés et les écrits produits devant les tribunaux ne donnent lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage mais les juges, saisis de la cause et statuant au fond, peuvent néanmoins prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts ;

Considérant que ces dispositions n’ont pas vocation à s’appliquer en l’espèce, la présente cour statuant en référé et non au fond ;

Considérant que, de manière surabondante, il sera constaté que la Commune de Montreuil-sous-Bois, sans démonstration plus avant, qualifie d’injurieux et outrageants à son égard les phrases figurant respectivement en pages 7 et 9 des conclusions de l’appelant suivantes « L’ironie étant que lorsque cela l’arrange, la Mairie de Montreuil n’hésite à employer des méthodes musclées pour déloger les squatteurs » et « la Mairie de Montreuil détourne les procédures existantes à des fins spéculatives » ;

Considérant que l’injure étant, toutefois, définie par l’article 29 alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881 comme étant «toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait », les propos incriminés ne correspondent aucunement à cette définition, étant ici rappelé que la juridiction saisie est tenue par la qualification donnée par le plaignant et ne peut requalifier les propos en diffamation ; que la demande de suppression de ces passages sera, en conséquence, rejetée ;

Considérant que Commune de Montreuil-sous-Bois qui succombe supportera les entiers dépens ; que l’équité conduit, en revanche, à rejeter la demande de M. C X fondée sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile devant la cour ;

PAR CES MOTIFS

Infirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Déboute la Commune de Montreuil-sous-Bois de ses demandes ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la Commune de Montreuil-sous-Bois aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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