Cour d'appel de Paris, 19 février 2014, n° 12/02646

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 19 févr. 2014, n° 12/02646
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 12/02646
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Créteil, 22 février 2012, N° 10/00937

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 9

ARRÊT DU 19 Février 2014

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 12/02646

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 23 Février 2012 par le conseil de prud’hommes de CRETEIL – section encadrement – RG n° 10/00937

APPELANT

Monsieur C D

XXX

XXX

comparant en personne, assisté de Me Yohanna WEIZMANN, avocate au barreau de PARIS, G0242 substituée par Me Jérôme BORZAKIAN, avocat au barreau de PARIS, G0242

INTIMÉES

XXX

XXX

XXX

XXX

représentée par Me Muriel BOUGERET, avocate au barreau d’ORLEANS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Décembre 2013, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Jacques BOUDY, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Christine ROSTAND, présidente

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Monsieur Jacques BOUDY, conseiller

GREFFIÈRE : Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Christine ROSTAND, présidente et par Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

M. C D a été embauché par la société Emballages de Rungis, à compter du 20 février 1985 en qualité de manutentionnaire.

Le 1er décembre 1996, son contrat de travail a été transféré de plein droit, par application de l’article 1224-1 du code du travail, à la société Hessemans Emballages puis le contrat de travail s’est poursuivi avec un troisième employeur, la société Taïs et enfin, a été à nouveau transféré au profit de la SA Burban Palettes, à compter du 1er octobre 2003.

Cette dernière a pour activité l’achat, la vente, la réparation et le recyclage de palettes en bois.

Depuis le 1er mai 2004, M. C D exerçait des fonctions de chef de chantier, statut cadre.

Il est admis que la moyenne de ses 12 derniers mois de salaire s’élevait à la somme de 3 340,50 €.

La convention collective applicable était celle des industries et commerce de la récupération et du recyclage.

M. C D a été licencié le 27 avril 2010.

Soutenant que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et que par ailleurs, il lui était dû le paiement d’heures supplémentaires, M. C D a saisi le conseil de prud’hommes de Créteil qui, par jugement en date du 23 février 2012, a condamné la SA Burban Palettes à lui payer les sommes de 850,60 € à titre de complément restant dû sur l’indemnité de licenciement et de 500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile, le déboutant pour le surplus de la totalité de ses demandes.

Il a interjeté appel par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception expédiée le 12 mars 2012.

Devant la cour, il sollicite la condamnation de la SA Burban Palettes à lui payer les sommes suivantes :

—  160 334 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse

—  857,25 € à titre de reliquat d’indemnité de licenciement

—  115 503,23 € à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires non payées pour la période ayant couru du 10 juin 2005 au 19 avril 2010

—  5 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire

—  5 000 € à titre de dommages et intérêts pour remise de documents de fin de contrat non conformes

—  2 500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile

Il sollicite également que soit ordonnée la remise d’un certificat de travail et de l’attestation destinée à Pôle emploi conformes, sous astreinte de 100 € par jour de retard.

Il réclame enfin le bénéfice des intérêts au taux légal à compter de la date de la saisine du conseil de prud’hommes.

De son côté, la SA Burban Palettes conclut à la confirmation du jugement frappé d’appel sauf en ce qu’il l’a condamnée à payer la somme de 850,60 € à titre de complément d’indemnité de licenciement et celle de 500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l’audience des débats.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement

Il est constant que 10 septembre 2009, la SA Burban Palettes a adressé à M. C D un avertissement pour « manquements caractérisés dans la réalisation de (ses) tâches ».

En l’espèce, il lui était reproché des « problèmes récurrents sur la qualité des chargements » et de ne pas faire respecter les consignes des sécurité auprès des intervenants circulant sur le site.

Le 25 janvier 2010, la SA Burban Palettes a adressé à M. C D une lettre recommandée avec demande d’accusé de réception dans laquelle il lui était reproché de ne pas être en mesure de remplir correctement ses fonctions depuis le départ d’un de ses collègues, M. Z.

Il lui était rappelé que lors d’un premier entretien, en date du 18 novembre 2009,un certain nombre d’actions correctives lui avait été prescrites, que le 11 décembre suivant, un autre entretien avait été tenu avec lui en vue de déterminer les progrès réalisés au vu de ces prescriptions.

Il lui était rappelé qu’à l’occasion de cet entretien il avait été constaté les dysfonctionnements suivants :

« -la zone de tri n’était toujours pas débarrassée le soir et vous confirmiez ne pas savoir faire mieux

— pour le nouveau client Valeo Reilly, un premier camion était livré au départ de Chevilly dont 50 % était non conforme nécessitant de retrier le lot à Burban Flins pour être livré au client. Vous reconnaissez votre erreur de ne pas avoir correctement informé les trieurs et vous nous avez indiqué faire attention aux prochaines livraisons

— vous n’adressez pas comme convenu les bons de production de l’atelier aux services administratifs provoquant des retards de saisie

— c’est le responsable logistique qui vous fait copie du planning transport (alors que c’est un outil de travail indispensable pour votre organisation de cour)

— les chargements des camions le soir ne sont pas tous systématiquement réalisés

— le site n’est toujours pas nettoyé quotidiennement ce qui peut engendrer des risques d’accidents des salariés et des détériorations des matériels (chariot/camions)

— l’application des consignes de sécurité dans la cour n’est pas effective

— vous ne gérez pas l’organisation des congés payés ».

Il lui était donc précisé que compte tenu de ces constatations, l’employeur attendait de lui une réaction positive et qu’il démontre sa capacité à exercer ses fonctions dans la mesure où ces manquements n’étaient pas acceptables.

Par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception en date du 8 février 2010, M. C D a adressé à l’employeur des explications circonstanciées sur les différents reproches qui lui étaient adressés et qu’il contestait.

Comme cela lui avait été annoncé dans la lettre qu’elle lui avait adressé le 22 janvier 2010, la SA Burban Palettes a organisé un entretien avec M. C D le 23 mars 2010 afin de faire le point sur le les dysfonctionnements qui lui étaient reprochés.

Par la suite, l’ayant convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, celui-ci s’est tenu le 19 avril 2010.

Tous ces entretiens, c’est-à-dire ceux des 18 novembre et 22 décembre 2009, du 23 mars et du 19 avril 2010, ont donné lieu à des comptes-rendus mais aucun d’entre eux n’a été signé par le salarié.

La lettre de licenciement du 27 avril 2010 est rédigée de la façon suivante :

« - l’incapacité à gérer l’activité de la cour

À cet effet, il vous a été rappelé, comme lors des différents entretiens des 19 décembre 2009 et 23 mars 2010, de veiller aux points suivants :

— débarrasser la zone de tri

votre seule réponse a été d’indiquer que l’organisation suivait son cours, alors même que pour pallier à votre carence, il a dû être mis en 'uvre une nouvelle organisation générant un coût financier supplémentaire

— faire du stock pour le nouveau client Valeo Reilly

vous avez répondu qu’il n’y avait pas assez de palettes, ce qui ne correspond pas à la réalité.

— Respecter les procédures administratives des bons de production

vous estimez ne plus être concernés par ce sujet

— optimiser les priorités d’organisation de la cour en vous tenant informé des flux camion via la copie du planning transport

vous estimez que vous n’avez pas besoin des informations des flux camions dans la cour.

— Veiller au chargement des camions le soir

vous estimez ne plus être en charge de cette tâche, évoquant au surplus ne pas avoir de Caces, alors même que vous refusez de passer votre formation à ce titre

— veiller au nettoyage quotidien du site par les opérateurs de la cour

vous ne donnez pas d’ordres de recadrage aux salariés n’effectuant pas cette tâche. Les zones sont ainsi que partiellement nettoyées

— former les opérateurs de tri

là encore, vous indiquez ne pas y arriver.

— Mettre en place le protocole sécurité et veiller au respect des consignes de sécurité dans la cour

vous prétendez que vous avez fait le nécessaire alors que le jour même de l’entretien, un chauffeur ne disposait pas des équipements de protection individuelle

— non accomplissement des tâches administratives

Il vous appartient d’effectuer les inventaires des palettes, des consommables de production, afin de définir les besoins à venir.

Vous considérez que vous accomplissez parfaitement la partie administrative de votre poste alors que nous avons été contraints de la confier partiellement à M. A, compte tenu de votre incapacité à la mener seul à terme.

Nous vous avons demandé de participer à la mise à jour de l’organigramme de production, vous ne vous y êtes pas du tout intéressé.

— Défaut de communication interservices et gestion de votre rôle de manager

Si vous confirmez les informations fiables pour le suivi par le service paie en revanche, vous n’arrivez pas à organiser la planification des congés et des horaires et de plus, vous ne vous y intéressez pas du tout.

De même, votre fonction doit vous conduire à animer quotidiennement les priorités d’organisation de la cour, mais vous ne vous sentez manifestement pas concerné par cette fonction ce qui provoque des engorgements de flux sur le site.

— Perte du client historique IPP/Logipal

Alors même que vous nous vous avons indiqué avoir perdu ce client, du fait de vos carences professionnelles, vous n’avez eu aucune réaction, une telle perte vous étant manifestement indifférente.

Nous vous avons sollicité à plusieurs reprises sur vos besoins éventuels en formation, dont l’obtention du Caces 3, compte tenu des dysfonctionnements rencontrés, et vous avez confirmé n’avoir besoin d’aucune formation complémentaire.

C’est ainsi qu’aux termes de l’entretien, il vous a été demandé de décrire la journée type de votre activité, ce à quoi vous avez répondu je me balade au gré du vent dans la cour, je fais les bons, je visite les ateliers et je surveille les charges.

Ainsi, il vous a été demandé si vous envisagiez un changement de comportement, ce à quoi vous avez répondu que ça allait comme ça.

Nous avons pris bonne note de vos remarques qui mettent manifestement en évidence votre désintérêt à mener à bien les missions qui vous incombent.

Cependant, un tel comportement ne saurait perdurer et entraîne un dysfonctionnement dans l’organisation de la cour qui est préjudiciable à l’activité de l’entreprise(…). ».

Selon l’article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

M. C D fait valoir qu’alors que l’employeur tente de se placer sur le terrain du licenciement pour insuffisance professionnelle, il y a lieu de considérer qu’en réalité, celui-ci avait bien le caractère d’un licenciement disciplinaire et que dans la mesure où l’employeur a commis une erreur de qualification dans la lettre de licenciement, cela a nécessairement pour conséquence de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse.

Il fait valoir qu’en tout état de cause, les faits énoncés ayant déjà donné lieu à la délivrance d’avertissements, l’employeur a épuisé son pouvoir disciplinaire sans compter la prescription susceptible d’être acquise.

Il est certes exact que par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception en date du 23 février 2010, la SA Burban Palettes a notifié à M. C D qu’il était dans son intérêt et dans celui de l’entreprise de se présenter à une formation à laquelle il avait été inscrit et qui devait débuter le lendemain 24 février, en vue d’obtenir le renouvellement du Caces 3 et alors que celui-ci aurait exprimé son refus de s’y présenter le 17 février précédent.

C’est d’ailleurs sur ce seul fondement que le conseil de prud’hommes de Créteil a estimé que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse.

Mais il résulte de la lecture de la lettre de licenciement, dont il convient de rappeler qu’elle fixe les limites du litige, que celle-ci n’a nullement retenu ce grief en lui-même et s’est borné à évoquer cette circonstance, non pas comme une illustration d’une insubordination mais comme l’un des éléments caractérisant la carence du salarié dans son obligation de veiller au chargement des camions le soir et dans son obligation de formation.

Il résulte au contraire de la lecture de cette lettre de licenciement que celle-ci entendait caractériser une insuffisance professionnelle.

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il faut relever que le conseil de prud’hommes a retenu de façon particulièrement erronée, comme seul motif justifiant le licenciement ce grief tiré du refus par le salarié de suivre une formation permettant l’obtention du Caces alors que ce grief ne figurait pas dans la lettre de licenciement comme un grief autonome.

L’examen attentif des différents éléments produits aux débats par les parties ne permet pas de considérer que l’insuffisance professionnelle reprochée à M. C D était établie et qu’au contraire, un doute subsistait à cet égard.

Il faut observer au préalable qu’ainsi que le fait justement remarquer celui-ci, alors qu’il est constant qu’il a toujours exercé les mêmes fonctions, aucun reproche ni observation ne lui ont jamais été adressés depuis la date à laquelle il a pris ses fonctions, en 1985, jusqu’au dernier trimestre 2009.

Ce n’est en effet qu’à compter du mois de septembre 2009 que l’employeur va multiplier les mises au point, les entretiens et les courriers soulignant de très nombreux griefs et de très nombreuses insuffisances qui, comme le fait également remarquer encore le salarié, semblent couvrir l’intégralité de ses attributions, pour aboutir à son licenciement quelques mois plus tard seulement, en avril 2010.

Pour l’essentiel, les reproches adressés au salarié reposent sur les différents comptes-rendus des entretiens qui se sont déroulés tout au long de cette période et sur les réponses insatisfaisantes qu’aurait alors fournies M. C D mais d’une part, aucun de ces comptes-rendus n’a été signé par l’intéressé et d’autre part, celui-ci conteste formellement l’exactitude des propos qui y sont rapportés.

Un certain nombre d’attestations sont produites aux débats mais celles-ci sont contrebattues par d’autres attestations produites par le salarié.

De surcroît, nombre de ces attestations sont pour le moins douteuses.

C’est ainsi par exemple que sont fournies par les parties trois attestations différentes de M. B et comportant toutes, trois écritures différentes!

En outre, l’examen attentif de l’attestation censée émaner de M. B qui est fournie aux débats par l’employeur ainsi que d’une autre attestation qui aurait été écrite par un autre salarié, M. X, permet de constater que l’écriture de ces deux attestations présente des similitudes extrêmement fortes, pour ne pas dire convaincantes, avec celle de Mme Y, qui était responsable grands comptes au sein de la SA Burban Palettes et qui avait été chargée, à un moment donné, de la direction de l’agence dans laquelle travaillaient ces salariés, par exemple en ce qui concerne la graphie de la lettre « p ».

Si la copie de quelques messages électroniques laisse penser qu’il se produisait des erreurs dans le chargement des palettes et dans leur contrôle, leur imputabilité à M. C D n’est pas clairement démontrée ni surtout, leur caractère habituel, tandis que par ailleurs l’employeur se prévaut d’un tableau de livraison au client Valeo Reilly, arrêté au 9 décembre 2009, dont il résulterait que ce dernier aurait refusé 50 % des palettes mais ainsi que le fait remarquer à juste titre l’appelant, ce tableau fait apparaître en réalité que sur 496 palettes, 478 étaient considérés comme bonnes.

Dans ces conditions, le licenciement ne peut qu’être considéré comme ayant été dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Aux termes de l’article L.1235-3 du code du travail, si un licenciement intervient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse et qu’il n’y a pas réintégration du salarié dans l’entreprise, il est octroyé au salarié à la charge de l’employeur une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Compte tenu notamment de l’effectif de l’entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. C D (3340,50 €), de son âge (53 ans), de son ancienneté (25 ans), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu’ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer, en application de l’article L.1235-3 du code du travail, une somme de 100 000 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En ce qui concerne le solde restant dû sur l’indemnité légale de licenciement, la SA Burban Palettes admet qu’une erreur a bien été commise à ce sujet mais indique qu’elle s’était engagée à la réparer dès l’audience devant le conseil de prud’hommes et qu’elle s’en est effectivement acquittée.

Elle démontre effectivement au moyen notamment de correspondances, de la copie d’un chèque et d’un relevé de compte sur lequel apparaît le débit correspondant, qu’elle a bien réglé la somme qui reste réclamée aujourd’hui encore, de sorte que cette demande sera rejetée.

Au soutien de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement intervenu dans des conditions vexatoires, M. C D se borne à affirmer que depuis plusieurs mois, l’employeur exerçait sur lui une pression constante en vue de le pousser au départ mais cette affirmation n’est confortée par aucun des éléments figurant dans le dossier de sorte que cette demande sera rejetée.

Sur les heures supplémentaires

Aux termes de l’article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié mais il appartient au préalable au salarié d’étayer sa demande par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l’employeur d’y répondre en fournissant ses propres éléments.

En l’espèce, il apparaît que M. C D produit aux débats des éléments suffisants pour étayer sa demande et pour permettre à l’employeur de justifier de la réalité des horaires exécutés.

En effet, il produit aux débats des tableaux faisant apparaître que de l’année 2003 au 26 février 2009, ses horaires étaient de 6 heures à 12 heures le matin et de 13 heures à 18 heures et qu’à compter du 27 février 2009, les horaires du matin avaient été modifiés puisque la journée ne débutait plus qu’à 8h30.

L’attestation établie par Mme Y et versée aux débats par l’employeur confirme bien que l’amplitude horaire de l’agence s’étalait de 6 heures le matin à 18 heures même si celle-ci affirme que M. C D et un autre cadre, prénommé « Serge », s’organisaient pour alterner leur temps de travail mais sans fournir aucune précision à cet égard.

Pour la période ayant débuté le 27 février 2009, M. C D produit aussi aux débats un document, non contesté, sur lequel son supérieur hiérarchique avait mentionné, au crayon, que ses horaires étaient bien de 8h30 à 18 heures.

Même en s’en tenant à cette seule hypothèse, soutenue par l’employeur, il en résultait déjà une amplitude de travail de 9h30 chaque jour, soit, déduction faite d’une heure pour le déjeuner, 8h30 de travail effectif, et par conséquent, l’existence d’heures supplémentaires.

Force est de constater que face à ces éléments, l’employeur se trouve dans l’incapacité de justifier de la réalité des horaires réalisés par le salarié, se bornant simplement à soutenir que M. C D bénéficiait d’une grande souplesse dans l’organisation de son travail, qu’il lui arrivait régulièrement de prendre ses repas à l’extérieur pendant deux heures d’affilée et qu’il existait d’autres pauses dans la journée.

Dans ces conditions, il ne peut qu’être fait droit à la demande dont le calcul ne fait, quant à lui, l’objet d’aucune contestation.

Sur les dommages et intérêts pour remise d’un certificat de travail et d’une attestation destinée à Pôle emploi non conformes

M. C D sollicite la condamnation de la SA Burban Palettes à lui payer la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice subi du fait de ce que l’employeur lui a remis une attestation destinée à Pôle emploi et un certificat de travail ne mentionnant une ancienneté ayant pris naissance qu’au 1er octobre 2003 alors qu’en réalité, celle-ci avait débuté le 20 février 1985.

Mais cette demande sera rejetée dans la mesure où l’appelant non seulement ne justifie pas mais encore n’indique pas quels seraient la nature et le quantum de son préjudice.

En revanche, il sera fait droit à la demande tendant à voir condamner l’employeur à lui délivrer les mêmes documents comportant les mentions rectifiées.

Il n’apparaît pas inéquitable d’accorder à M. C D, qui a dû agir en justice pour faire valoir ses droits, une indemnité d’un montant de 2 500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

INFIRME partiellement le jugement du conseil de prud’hommes de Créteil en date du 23 février 2012 ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la SA Burban Palettes à payer à M. C D les sommes suivantes :

—  100 000 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse

—  115 503,23 € à titre de paiement des heures supplémentaires, cette somme avec intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2010, date de convocation devant le bureau de conciliation

DÉBOUTE M. C D de sa demande de paiement de la somme de 857,25 € représentant le reliquat de l’indemnité légale de licenciement ;

ORDONNE à la SA Burban Palettes de remettre à M. C D une attestation destinée à Pôle emploi et un certificat de travail mentionnant une date d’ancienneté fixée au 20 février 1985, sous astreinte de 10 € par jour de retard, à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la notification du présent arrêt et ce, pendant une durée de trois mois ;

CONFIRME le jugement du conseil de prud’hommes pour le surplus ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la SA Burban Palettes à payer à M. C D la somme de 2 500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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