Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 8 décembre 2016, n° 15/18138

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 9, 8 déc. 2016, n° 15/18138
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 15/18138
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 9 juillet 2015, N° 2013009329
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS Pôle 5 – Chambre 9 ARRÊT DU 08 DÉCEMBRE 2016 (n° , 8 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 15/18138

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 10 Juillet 2015 – RG n°2013009329

APPELANTE

SA INSERT

immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 428 738 280

ayant son siège XXX

XXX

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Jacques MONTACIE de la SCP Société Civile Professionnelle d’avocats HUVELIN & associés, avocat au barreau de PARIS, toque : R285

INTIMÉS

1) Monsieur J X

XXX

XXX

Représenté par Me Laetitia AVIA de l’AARPI APE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E1868

2) Monsieur B Z

né le XXX à XXX

de nationalité française

XXX

XXX

Représenté par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

3) Monsieur L Y

XXX

XXX

N’ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 Octobre 2016, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Madame D E, Conseillère faisant fonction de président et Madame F G, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur François FRANCHI, Président de chambre

Madame D E, Conseillère

Madame F G, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues à l’article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Pauline ROBERT

Ministère Public : L’affaire a été communiquée au ministère public.

ARRÊT :

— par défaut

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Monsieur François FRANCHI, président et par Mme Pauline ROBERT, greffier présent lors du prononcé.

*

La société Insert intervient dans le secteur de l’affichage urbain. Elle dispose d’un réseau d’environ 25.000 devantures de commerces et points de vente presse en France.

Elle a été acquise 2008 par la société ICVAP. elle même détenue par la société Proximania, spécialisée dans la commercialisation de cartes téléphoniques prépayées.

Le 24 octobre 2008 la société Proximania empruntait 20 M A auprès de la banque Goldman Sachs, ce financement étant accompagné de nantissements assortis de pactes commissoires sur les titres des filiales de Proximania dont ICVAP.

Le 5 janvier 2009, la banque Goldman Sachs cédait l’intégralité de ses droits et obligations au titre du prêt à la société Trimast appartenant au fonds d’investissement de droit caymanais Fortelus Management LLP après examen des comptes des filiales de Proximania.

La société Proximania connaissait des difficultés et n’était pas en mesure d’honorer une échéance du prêt en avril 2009. La société Trimast a alors prononcé la déchéance du terme le 19 août 2009 et a exercé les pactes commissoires devenant actionnaire de la société ICVAP avec effet au 1er septembre 2009.

Le 11 décembre 2009 Trimast acquérait auprès d’lCVAP les actions Insert qu’elle détenait.

Surprise par la défaillance inattendue de Proximania dans le remboursement du prêt, la société Trimast faisait vérifier la situation financière de ses filiales par le cabinet Mazars.

Le 16 décembre 2010, la société Insert recevait un avis de vérification de comptabilité par la Direction Générale des Finances Publiques portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 octobre 2010, qui se soldait par une notification de rectification pour un total de 5, 9 M A.

Eu égard à ce passif la société Insert demandait l’ouverture d’une procédure de conciliation le 28 janvier 2011 puis d’une procédure de sauvegarde le 26 avril 2012.

Au mois d’avril 2012 monsieur d’Assigny et 4 autres managers reprenaient 80% du capital de la société Insert.

La société Insert saisissait le tribunal de commerce le 4 janvier 2013 afin de voir constater les fautes de gestion commisses par messieurs Y, Z, et X et de les condamner à réparer le préjudice subi suite aux majorations délivrées par l’administration fiscale lors de la vérification de comptabilité.

Par jugement du 10 juillet 2015 le tribunal de commerce de Paris a notamment dit prescrite l’action de la société Insert à l’égard de monsieur J X, sursis à statuer dans l’attente d’une décision définitive au titre de la réclamation contentieuse engagée le 29 décembre 2014 auprès des services fiscaux et débouté messieurs X, Z et Y de leurs demandes en dommages et intérêts.

Sur la prescription le tribunal a relevé que monsieur X avait exercé ses fonctions jusqu’au 27 mars 2009, que le rapport Mazars faisant état des faits litigieux a été déposé le 6 janvier 2010 et qu’il convient de retenir cette date comme point de départ du délai de prescription. Or, monsieur X a été assigné en Confédération helvétique le 10 janvier 2013, la transmission de l’acte aux autorités helvétiques ayant eu lieu le 7 janvier 2013.

Sur le sursis à statuer le tribunal a décidé d’attendre l’issue de la procédure contentieuse initiée par la société Insert à l’encontre des rectifications fiscales.

La société Insert a interjeté appel de cette décision le 4 septembre 2015.

***

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 27 juillet 2016 la société Insert demande à la cour d’appel de :

Vu les articles L 225-251 et L 225-254 du code de commerce ; Vu l’article 647-1 du code de procédure civile ;

Vu la Convention relative à la signification et à la notification à l’étranger des actes judiciaires et extra judiciaires en matière civile ou commerce, signée le 15 novembre 1965 à la Haye ;

Vu l’instruction du Ministère de la Justice relative à la désignation par la Suisse des autorités cantonales en tant qu’autorités centrales au sens de cette Convention ;

Vu la jurisprudence et la doctrine ;

Vu la demande aux fins de signification ou de notification à l’étranger d’un acte judiciaire ou extra judiciaire de la SCP Chapuis-Buzy au tribunal cantonal de Lausanne en date du 4 janvier 2013;

Vu le cachet Suisse en date du 4 janvier 2013 sur l’avis de réception de cette demande ;

Vu le jugement du tribunal de commerce de Paris du 10 juillet 2015 ;

A titre principal,

— Infirmer le jugement en ce qu’il a considéré la date du rapport Mazars comme étant le point de départ du délai de prescription de l’action introduite par Insert à l’encontre de Messieurs X, Z et Y ;

— Infirmer le jugement en ce qu’il a déclaré l’action introduite par Insert à l’encontre de Monsieur X comme étant prescrite ;

En conséquence, statuant à nouveau,

— Constater que le préjudice d’Insert n’était pas matérialisé à la date du rapport Mazars, soit le 6 janvier 2010 ;

— Constater que le délai de prescription n’a commencé à courir qu’à compter du 8 septembre 2011, date à laquelle l’Administration Fiscale a maintenu les rectifications proposées à Insert, notamment quant aux montants des majorations et pénalités ;

— Juger que l’action introduite par Insert à l’encontre de Monsieur X n’était pas prescrite ;

A titre subsidiaire,

— Infirmer le jugement en ce qu’il a constaté que la demande de transmission de l’acte introductif d’instance par la SCP Chapuis-Buzy au Tribunal Cantonal de Lausanne datait du 7 janvier 2013 ;

— Infirmer le jugement en ce qu’il a déclaré l’action introduite par Insert à l’encontre de Monsieur X comme étant prescrite ;

En conséquence, statuant à nouveau,

— Constater qu’il convient de prendre en compte la date de transmission de l’acte introductif d’instance par l’huissier de justice français à l’autorité compétente étrangère pour déterminer la prescription ou non d’une action introduite à l’encontre d’un destinataire résidant à l’étranger ;

— Constater que la demande de transmission de l’acte introductif d’instance à Monsieur X par la SCP Chapuis-Buzy au Tribunal Cantonal de Lausanne date du 4 janvier 2013 ; – Juger que l’action introduite par Insert à l’encontre de Monsieur X n’était pas prescrite ;

En tout état de cause,

— Infirmer le jugement en ce qu’il a condamné Insert à verser une somme de 3.000 A à Monsieur X sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Confirmer le jugement pris en ses autres dispositions ;

— Débouter Monsieur X de l’ensemble de ses demandes ;

— Condamner Monsieur X à verser une somme de 5.000 A à Insert sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamner Monsieur X aux entiers dépens de première instance et d’appel.

— Débouter Monsieur Z de l’ensemble de ses demandes ;

***

Monsieur B Z a notifié ses conclusions par voie électronique le 2 février 2016. Il demande à la cour d’appel de :

Vu les conclusions de l’appelante sollicitant exclusivement l’infirmation du chef de la prescription de l’action à l’encontre de Monsieur X ;

— Donner acte à M. B Z de ce qu’il s’en rapporte à justice le mérite de l’appel interjeté

par la société Insert, en l’état actuel de la procédure.

— Donner acte à M B Z qu’il se réserve la faculté de conclure en réponse si des demandes devaient être formulées à son encontre par l’une des parties.

— Condamner la société Insert au paiement d’une somme de 1000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont le recouvrement pourra être assuré par la SCP Grappotte Benetreau, avocat dans les conditions de l’article 699 du Code de procédure civile.

***

Monsieur X a notifié ses dernières conclusions par dépôt au greffe le 5 avril 2016. Il demande à la cour d’appel de :

A titre principal :

— Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce le 10 juillet 2015 en toutes ses dispositions,

A titre subsidiaire :

— Infirmer le jugement du tribunal de commerce du 10 juillet 2015 en ce qu’il a considéré que l’assignation avait été signifiée le 7 janvier 2013,

— Juger l’action prescrite en raison d’une signification tardive le 10 janvier 2013, A titre infiniment subsidiaire :

— Confirmer le jugement du tribunal de commerce du 10 juillet 2015 en ses autres dispositions et notamment en ce qu’il a sursis à statuer dans l’attente d’une décision définitive au titre de la réclamation contentieuse engagée le 29 décembre 2014 auprès des services fiscaux,

En tout état de cause :

— Condamner la société Insert à verser la somme de 8.000 A à monsieur X au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

SUR CE

Sur la prescription

La société Insert fait valoir que la date de notification de l’acte à l’étranger est celle de la remise au parquet de cet acte et non la date d’envoi de la lettre recommandée ou celle de la transmission de l’acte au destinataire. Quand l’acte n’est pas remis au parquet dans l’hypothèse d’un règlement communautaire ou d’un traité international la date de notification est celle de l’expédition de l’acte par l’huissier et non celle de sa réception contrairement à ce qu’a retenu le tribunal.

La Convention de La Haye ne prévoit pas une remise de l’acte au parquet mais aux autorités cantonales désignées comme autorité centrale au sens de la Convention. Il faut donc prendre en compte la date de remise de l’acte par l’huissier de justice à l’autorité désignée, en l’espèce le tribunal cantonal de Lausanne, soit le 4 janvier 2013.

La société Insert ajoute que pour ce qui concerne la prescription la date de découverte des faits litigieux n’est pas en l’espèce la date de dépôt du rapport Mazars mais celle de la matérialisation du préjudice, soit la date de vérification de la comptabilité par l’administration fiscale qui s’est déroulée du 10 janvier au 28avril 2011.

La prescription à l’égard de monsieur X n’est donc pas acquise dans tous les cas.

Monsieur X fait valoir qu’aux termes de l’article 2 de la convention de La Haye chaque Etat désigne une Autorité centrale qui a la charge de recevoir les demandes de signification ou de notification provenant d’un autre Etat. La Suisse a désigné comme Autorité centrale les autorités cantonales. De lus la Suisse s’est opposé à l’autorisation de signification de l’acte par voie postale au destinataire. Ainsi seule la signification auprès des autorités cantonales est admise. Or l’assignation de la société Insert a été signifiée au tribunal cantonal de Lausanne le 7 janvier 2013. La signification par voie postale effectuée directement auprès de monsieur X le 4 janvier 2013 ne peut donc être retenue puisque seule la date de transmission au tribunal cantonal peut interrompre la prescription.

La cour rappelle qu’aux termes de l’article 647-1 du Code de procédure civile :

« La date de notification d’un acte judiciaire ou extrajudiciaire dans une collectivité d’outre-mer ou en Nouvelle-Calédonie ainsi qu’à l’étranger est, à l’égard de celui qui y procède, la date d’expédition de l’acte par l’huissier de justice ou le greffe, ou, à défaut, la date de réception par le parquet compétent »

Aux termes de l’article 2 de la convention de La Haye :

'Chaque Etat contractant désigne une Autorité centrale qui assume, conformément aux articles 3 à 6, la charge de recevoir les demandes de signification ou de notification en provenance d’un autre Etat contractant et d’y donner suite.' Il résulte de la Déclaration n° 2 à la convention de La Haye que la Suisse a désigné les autorités cantonales comme autorité centrale chargé de recevoir les significations et notifications.

Enfin il résulte de la Déclaration n° 5 à la convention de La Haye que la Suisse 'déclare s’opposer à l’usage, sur son territoire, des voies de transmission prévues aux articles 8 et 10" , soit notamment la vie postale.

Monsieur X a été directeur général de la société Insert jusqu’au 27 mars 2009.

L’action en responsabilité des dirigeants sociaux se prescrit par trois ans à compter du fait dommageable ou s’il a été dissimulé de sa révélation.

Le rapport Mazars a été déposé le 6 janvier 2010.

Ainsi si l’on considère que la date du dépôt du rapport Mazars constitue la date de départ de la prescription celle ci est acquise à compter du 7 janvier 2013.

En l’espèce, il ressort de l’attestation d’accomplissement des formalités de signification d’acte étranger hors communauté européenne que la Scp Chapuis &Buzy a transmis l’assignation devant le tribunal de commerce de Paris le 4 janvier 2013 au tribunal cantonal de Lausanne, autorité cantonale suisse agissant en qualité d’autorité centrale au sens de la convention de La Haye précitée.

Cette date est confortée par l’attestation délivrée à monsieur X par le tribunal cantonal de Lausanne qui précise avoir remis l’assignation à monsieur X le 10 janvier 2013 et avoir reçu l’acte à notifier le 7 janvier 2013.

La date d’interruption de la prescription est le 4 janvier 2013 et il n’est donc pas nécessaire d’examiner si le point de départ du délai de prescription se situe le jour du dépôt du rapport Mazars ou celui du redressement fiscal, bien postérieur.

Monsieur X fait encore valoir que la seule date à prendre en compte est celle de la remise de l’acte au destinataire.

La cour rappelle que l’article 647-1 précité ne concerne que 'celui qui y procède', ignorant la date à laquelle le destinataire reçoit l’acte.

Ainsi la société Insert a bien interrompu la prescription le 4 janvier 2013.

Il convient en conséquence d’infirmer le jugement attaqué et dire que la prescription n’est pas acquise à l’égard de monsieur X.

La société Insert sollicite le paiement de la somme de 5.000 A sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais qu’elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens. Il convient en conséquence de faire droit à la demande.

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 10 juillet 2015 en ce qu’il a déclaré prescrite l’action intentée par la société Insert à l’encontre de monsieur J X et en ce qu’il a condamné la société Insert à lui verser la somme de 3.000 A au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, Statuant à nouveau,

Dit que cette action n’est pas prescrite,

Condamne monsieur J X à payer à la société Insert la somme de 5.000 A sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamne monsieur J X aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Pauline ROBERT François FRANCHI

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