Cour d'appel de Paris, 22 novembre 2016, n° 15/13348

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Chronologie de l’affaire

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Village Justice · 19 décembre 2019

Un licenciement prononcé dans des conditions vexatoires donne droit à une indemnisation distincte et indépendante d'un licenciement sans cause reelle et sérieuse. En cas d'abus de l'employeur dans la mise en œuvre de la procédure de licenciement, ce dernier s'expose à une sanction, même si le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse. Le fondement. En application de l'article L. 1222-1 du Code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi par les parties au contrat. Cette obligation d'exécution de bonne foi est maintenue jusqu'au terme effectif du …

 

www.avolex-avocats.com · 19 décembre 2019

Lorsqu'un licenciement est prononcé à l'encontre d'un salarié, les circonstances dans lesquelles ce licenciement est mis en œuvre, peuvent faire l'objet d'un litige, indépendamment du bien fondé de cette mesure. En cas d'abus de l'employeur dans la mise en œuvre de la procédure de licenciement, ce dernier s'expose à une sanction, même si le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse. Le fondement: En application de l'article L. 1222-1 du Code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi par les parties au contrat. Cette obligation d'exécution de bonne …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 22 nov. 2016, n° 15/13348
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 15/13348
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Créteil, 25 novembre 2015, N° 12/02501

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 3

ARRÊT DU 22 Novembre 2016

(n° , 05 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 15/13348

Décision déférée à la Cour :
jugement rendu le 26 Novembre 2015 par le Conseil de prud’hommes
-
Formation de départage de CRETEIL RG n° 12/02501

APPELANTE

SA FNAC PARIS

XXX

XXX

N° SIRET : 350 127 460 00284

représentée par Me Flore ASSELINEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : P0563

INTIME

Monsieur X Y

XXX

XXX

représenté par Me Aline CHANU, avocat au barreau de
PARIS, toque : R222

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 26 Septembre 2016, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président

Madame Z A, Conseillère

Madame B C, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme D
E, lors des débats

ARRET :

— contradictoire

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de
Procédure Civile.

— signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président et par Madame D E,
Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige :

Monsieur X Y, initialement engagé le 13 octobre 1999 par la société CODIREP, entité régionale de la société FNAC, puis le 30 novembre 2002 en qualité de vendeur confirmé par la société FNAC PARIS avec reprise de son ancienneté, et promu le 1er avril 2008 au rang de vendeur produit éditoriaux, au salaire mensuel brut moyen de 2.240,04 euros. a été licencié par lettre du 21 janvier 2011 énonçant le motif suivant :

'… Le vendredi 03 décembre 2010, vous êtes passé en caisse à deux reprises. Dans un premier temps, vous avez acheté 3 Blue-Rays à 19h48 : Pirates des
Caraïbes pour une valeur de 34.99 euros, Matrix /intégrale pour un montant de 29.99 euros et City ofLife and
Death pour un montant de 24.99 euros.
Le prix total de vos achats lors de ce premier passage en caisse s’elevait á 89.97 euros. Or, il apparait sur votre ticket de caisse que vous avez bénéficié d’une réduction de 24.99 euros, correspondant au prix du Blue-Ray le moins cher.

Dans un deuxième temps, vous avez effectué un nouveau passage en caisse à 19h54, ou vous avez acheté 2 mallettes inception Ultimate comprenant un DVD et un
Blue-ray Combo pour un montant de 49.99 euros chacune et un coffret Battlestar Galactica pour un montant de 149.99 euros, soit un achat total de 249.97 euros. Il apparait sur votre ticket de caisse, qu’en plus d’une réduction de 20 euros, dont vous étiez ayant-droit en tant d’adhérent
Fnac et bénéficiant dès lors d’une promotion sur les deux mallettes lnception Ultimate, vous avez bénéficié d’une remise supplémentaire de 30 euros. Les 2 remises cumulées sur ce ticket de caisse portent le montant total de vos réductions à 50 euros, soit le prix du produit ie moins cher de votre ticket. Or, aucune opération commerciale ne proposait de telles remises à l’exception d’une offre exclusivement réservée à nos clients One pour la soirée organisée à leur effet le même 03 décembre 2010 entre 20 heures et 22 heures.

Dès lors vous n’êtes pas sans savoir que les salariés Fnac sont exclus de ce programme. Par ailleurs, après vérification, il apparait que vous êtes passé en caisse avec votre carte adhérent « personnel ''. Par conséquent, en bénéficiant pour votre propre compte de remises dont vous ne pouviez vous prévaloir n’étant pas client One, vous avez volontairement privilégié votre intérêt personnel.

Ces faits sont totalement inacceptables et démontrent un manquement grave et délibéré aux règles et procédures applicables au sein de notre magasin.

En effet, compte tenu de votre fonction de Vendeur
Produits Editoriaux et de votre ancienneté Fnac, vous n’étiez pas sans ignorer le préjudice financier, dont le montant s’élève à 54.99 (cinquante quatre euros et quatre-vingt dix neuf centimes) pour le magasin, ainsi que la remise en cause des procédures magasin.

Ces faits mettent en cause la confiance que nous vous portions et les explications que vous nous avez

fournies au cours de notre entretien du 11 janvier 2011 ne sont pas de nature à nous permettre d’envisager une autre solution que votre licenciement.

En effet, ces éléments sont incompatibles avec ce que nous sommes en droit d’attendre d’un collaborateur et sont fortement préjudiciables aux intérêts de l’entreprise.

Nous vous notifions donc votre licenciement pour faute.
…'

Par jugement du 26 novembre 2015, le Conseil de prud’hommes de CRETEIL statuant en formation de départage, a condamné la société FNAC PARIS à verser à Monsieur Y 40.320,72euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 2.500 euros à titre de dommages-intérêts pour atteinte aux droits de la défense et 1.200 euros sur le fondement de l’article 700 de procédure civile. Monsieur Y a été débouté de ses demandes au titre du reliquat de l’indemnité conventionnelle de licenciement, de l’indemnité compensatrice de congés payés, et au titre du non respect des obligations en matière de couverture de santé. Le conseil de prud’hommes a par ailleurs condamné la société FNAC PARIS au remboursement à pôle emploi des indemnités de chômage versées à compter du licenciement à concurrence de six mois.

La société FNAC PARIS en a relevé appel.

Par conclusions visées au greffe le 26 septembre 2016 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, la société FNAC PARIS demande d’infirmer le jugement , de condamner Monsieur Y à lui rembourser la somme de 42.229,79 versée au titre de I’exécution provisoire, et à lui verser 2500 au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions visées au greffe le 19 septembre 2016 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Monsieur Y sollicite la confirmation du jugement sur le principe et demande de porter le montant des dommages et intérêts pour atteinte aux droits de la défense et mesures vexatoires à 9.000 euros et l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 60.000 euros, Il sollicite en outre 784,32 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés-payés (octobre 2007 à mars 2011), 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et demande à la
Cour d’ordonner la remise d’un certificat de travail et de bulletins de paie conformes à la décision sous astreinte de 150 par jour de retard et par document.

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l’audience des débats.

****

MOTIFS

Sur la rupture du contrat de travail

Principe de droit applicable :

En vertu des dispositions de l’article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, c’est-à-dire être fondé sur des éléments objectifs, vérifiables et imputables au salarié.

Selon l’article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après

toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

Application du droit à l’espèce :

Il résulte de la lettre de licenciement que la société FNAC PARIS justifie le la rupture du contrat de travail de Monsieur Y par un manquement aux règles du magasin en ce qu’il a bénéficié d’une remise réservée à un programme de fidélité 'One’ dont les salariés seraient exclus.

Monsieur Y conteste la réalité des griefs invoqués.

Les éléments versés au débat établissent que la carte 'One’ a été délivrée à Monsieur Y par une salariée du magasin sous la forme d’une mention sur sa carte d’adhérent 'personnel Fnac'. Il ressort d’autre part d’une lettre d’un délégué syndical Monsieur F, demandant l’annulation de la sanction prise à l’encontre de Monsieur Y que de nombreux salariés sont titulaires de cette carte 'One'.

De plus, la société FNAC PARIS n’apporte aucun élément objectif et précis permettant d’établir la réalité de l’interdiction pour les salariés de bénéficier de ce programme de fidélité 'One'.
En effet, la seule attestation de Madame G en qualité de responsable service client du magasin établissant que des réunions d’informations non datées auprès des salariés les informaient de l’impossibilité de bénéficier des avantages réservés aux clients 'One', ne suffit pas à démontrer que Monsieur Y a eu connaissance de cette interdiction.

Au vu des éléments versés au débat, les seules conditions pour bénéficier de ce programme 'One’ résultent de la fréquence des achats et du montant des dépenses des clients.

Il ressort de ces éléments que la qualité de salarié de la société FNAC PARIS de Monsieur Y ne permet pas d’établir que celui-ci n’avait pas le droit de posséder une carte 'One’ en tant que client de l’enseigne et de bénéficier des remises que cette carte réserve.

Le manquement grave aux règles et procédures applicables au magasin n’étant pas établi, le licenciement de Monsieur Y est par conséquent sans cause réelle et sérieuse.

La décision du conseil de prud’hommes est donc confirmée en ce qu’elle a jugé que Monsieur Y a fait l’objet d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Montant de la condamnation :

Au vu de l’ensemble des éléments versés au débats compte tenu du fait que Monsieur Y a onze ans d’ancienneté et que la société FNAC PARIS occupait habituellement au moins onze salariés au moment du licenciement, les premiers juges ont fait une juste appréciation du préjudice subi en application de l’article L.1235-3 du code du travail sans qu’il y ait lieu d’élever le montant de la condamnation.

Sur l’atteinte aux droits de la défense et les mesures vexatoires

En l’espèce, Monsieur Y a fait l’objet d’une dispense d’activité alors que la société FNAC
PARIS ne justifiait pas d’ une faute grave ou lourde empêchant le maintien du salarié dans l’entreprise. En outre, la société FNAC PARIS ne démontrant pas un prétendu trouble au fonctionnement de l’entreprise causé par la présence de Monsieur Y, la dispense d’activité

était injustifiée. Outre que cette mesure était vexatoire, il apparaît en l’espèce que Monsieur Y n’a pu accéder à son poste de travail et n’avait pas les moyens de préparer pleinement sa défense. De plus, le refus de la société FNAC PARIS de communiquer à Monsieur Y son dossier personnel, obligeant le salarié à saisir la CNIL, a aussi occasionné une atteinte aux droits de la défense du salarié. Il s’ensuit que Monsieur Y est fondé à demander des dommages et intérêts pour atteintes à ses droits de la défense.

Au vu de des éléments versés au débats, le Conseil de prud’hommes a fait une juste appréciation du préjudice subi et il n’y a pas lieu d’élever le montant de la condamnation. Le jugement est confirmé sur ce point.

Sur le rappel d’indemnités compensatrice de congés payés

Au vu des éléments versés, aucun éléments ne permet d’établir que M. Y n’a pas perçu l’intégralité des sommes qui lui étaient dues au titre des congés payés. La décision du Conseil de prud’hommes est confirmée sur ce point.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par un arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

— Dit que les condamnations au paiement de créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes et que les condamnations au paiement de créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition du présent arrêt;

— Autorise la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil;

— Ordonne la remise par la société FNAC PARIS à Monsieur Y de bulletins de paye, d’un certificat de travail rectifiés conformes au présent arrêt;

— Dit n’y avoir lieu à prononcer une astreinte;

Vu l’article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE la société FNAC PARIS à payer à Monsieur Y en cause d’appel la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

DEBOUTE les parties du surplus des demandes;

LAISSE les dépens à la charge de la société FNAC PARIS.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Cour d'appel de Paris, 22 novembre 2016, n° 15/13348