Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 19 décembre 2017, n° 17/07741

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

L’article 3 du règlement n° 469/2009 sur les CCP pour les médicaments et l’article 3 § 2 du règlement n° 1610/96 sur les CCP pour les produits phytopharmaceutiques prévoient respectivement qu’un CCP n’est délivré que si le produit « n’a pas déjà fait l’objet d’un certificat », et que « le titulaire de plusieurs brevets portant sur le même produit ne peut se voir octroyer plusieurs certificats pour ce produit ». La CJUE a indiqué, s’agissant de l’interprétation de ce dernier article, que « la condition particulière pour l’octroi de deux ou plusieurs CCP portant sur le même produit est que les demandes y afférentes émanent de différents titulaires de brevets de base ». En l’occurrence, la requérante, co-titulaire d’un brevet ayant fait l’objet d’un CCP ne peut solliciter, pour le même produit, un autre CCP sur le fondement d’un brevet dont elle est seule titulaire. En effet, la délivrance du CCP tend à permettre à la société qui a financé des recherches de bénéficier d’une protection d’une durée suffisante. Cet objectif est donc atteint, pour la requérante, par la délivrance du CCP délivré sur la base du brevet dont elle est co-titulaire.

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 1, 19 déc. 2017, n° 17/07741
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/07741
Publication : Propriété industrielle, 7-8, juillet-août 2018, p. 30-31, note d'Hélène Gaumont-Prat ; PIBD 2018, 1087, IIIB-76
Décision précédente : Institut national de la propriété industrielle, 12 janvier 2017, N° 14C0081
Décision(s) liée(s) :
  • Décision du directeur général de l'INPI, 13 janvier 2017
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : FR14C0081 ; EP1713823 ; EP1912999 ; FR14C0076
Titre du brevet : Inhibiteurs macrocycliques du virus de l'hépatite C ; Inhibiteurs de la NS- Serine protease du VHC
Classification internationale des brevets : C07D ; A61K ; A61P ; C07K ; C07C
Dispositif : Déclare la demande ou le recours irrecevable
Référence INPI : B20170192
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS ARRÊT DU 19 décembre 2017

Pôle 5 – Chambre 1

(n° , 5 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 17/07741 Décision déférée à la Cour : Décision du 13 janvier 2017 -Institut National de la Propriété Industrielle de – RG n° 14C0081

APPELANTE Société MEDIVIR AB, société de droit suédois ayant son siège social Blasieholmsgatan 2, 11148 STOCKHOLM – SUEDE Élisant domicile à la SELARL PELLERIN DE MARIA GUERRE Avocats à la cour – […] 75001 PARIS prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège Représentée par Me Grégoire TRIET de l’AARPI GIDE LOYRETTE NOUEL AARPI, avocat au barreau de PARIS, toque : T03 Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL PELLERIN – DE MARIA – G, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

INTIMÉ MONSIEUR L GÉNÉRAL DE L’INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE ayant ses bureaux […] CS 50001 92677 COURBEVOIE CEDEX Régulièrement représenté

COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 07 novembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur David PEYRON, Président de chambre Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère Monsieur François THOMAS, Conseiller qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Karine A

MINISTERE PUBLIC : L’affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Madame Brigitte G, Substitute Générale, qui a fait connaître son avis.

ARRET :

— contradictoire
- par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur David PEYRON, président et par Madame Cyrielle B, greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE La société Medivir AB est :

- co-titulaire avec la société Janssen Ireland UC du brevet EP1912999 déposé le 28 juillet 2006, qui porte sur des 'inhibiteurs macrocycliques du virus de l’hépatite C’ ;

- titulaire du brevet EP1713823 déposé le 28 janvier 2005 portant sur 'inhibiteurs de la NS-3 sérine protéase du VHC'.

Ces deux brevets couvrent la substance Siméprévir.

Une autorisation de mise sur le marché EU/1/14/924 a été délivrée le 14 mai 2014, pour le médicament 'OLYSIO – Simeprévir'.

Sur la base du brevet EP1912999, un Certificat Complémentaire de Protection (ci-dessous, CCP) n° 14C0076, sollicité le 7 octobre 2014 par les titulaires du brevet, a été délivré le 17 août 2015.

Sur la base du brevet EP1713823, la société Medivir AB a déposé le 14 novembre 2014 une demande de délivrance d’un CCP n°l4C0081 portant sur le produit 'Siméprévir ou l’un de ses sels pharmaceutiquement acceptables, incluant le siméprévir sodique'.

Par décision du 13 janvier 2017, le directeur général de l’INPI a rejeté la demande de CCP n° 14C0081.

L’INPI a notamment considéré que la société MEDIVIR AB a déposé deux demandes de CCP sur le même produit Siméprévir, l’une n° l 4C0076 délivrée le 21 août 2015 sur la base du brevet EP1912999 dont elle est co-titulaire, et celle qui a fait l’objet de la décision du 13 janvier 2017 ; or, les règlements n° 469/2009 et n° 1610/96 empêchent que plusieurs CCP soient reconnus sur le même produit au même titulaire, et en l’espèce la société MEDIVIR AB avait fait le choix du brevet au vu duquel elle entendait bénéficier d’une protection complémentaire.

L’INPI a retenu que la société Medivir AB ne justifiait pas en quoi le fait qu’elle soit co-titulaire du CCP n° l4C0076 justifierait la délivrance d’une protection complémentaire.

La société Medivir AB a introduit le 12 avril 2017 un recours contre cette décision, et déposé un mémoire au greffe le 13 octobre 2017 demandant à la cour de :

vu le règlement n°469/200 relatif aux CCP de médicaments et notamment ses articles 3 (c), 5 et 6,

vu le considérant 17 et l’article 3 § 2 du règlement n° 1610/96 relatifs aux CCP de produits phytopharmaceutiques,

vu les articles L411-4 et L613-29 à L613-32 du code de la propriété intellectuelle,
- annuler la décision du l3 janvier 2017 par laquelle le directeur général de l’INPI a rejeté sa demande de CCP n°l4C0081 déposée le 14 novembre 2014,
- condamner l’INPI à lui verser la somme de 15000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle fait notamment valoir que le titulaire d’un CCP en pleine propriété est une entité différente d’une copropriété, dans laquelle l’exercice des droits de copropriétaire est soumis au contrôle des autres titulaires, peu important que ce titulaire soit aussi membre de ladite copropriété.

Elle conteste l’idée selon laquelle une quote-part de CCP suffirait à couvrir les investissements qu’elle a engagés pour le brevet EP1713823 dont elle est seule propriétaire.

Elle soutient qu’il est possible d’accorder plus d’un CCP lorsque les demandes sont basées sur des brevets différents et émanent de titulaires différents. Elle ajoute qu’à suivre la position de l’INPI, si c’est la demande de CCP n° 14C008l qui avait été déposée en premier, les droits de la société Janssen Ireland UC en auraient pâti car une seconde demande de CCP présentée sur le brevet EP1912999 aurait dû être rejetée, ce qui parviendrait à une situation contraire à la jurisprudence de la CJUE.

Dans ses observations écrites déposées au greffe le 21 septembre 2017, l’INPI soutient qu’un CCP n’est délivré que dans des cas précis et qu’un titulaire de plusieurs brevets portant sur le même produit ne peut se voir octroyer plusieurs certificats pour le même produit.

Elle affirme que selon la jurisprudence de la CJUE, plusieurs CCP peuvent être délivrés pour un même produit sur la base de plusieurs brevets, à la condition que leurs titulaires soient distincts.

Selon elle, le dépôt du brevet invoqué et de celui en copropriété entre les sociétés Medivir et JANSSEN Ireland UC révèlent que les efforts d’investissements et de recherche de la société Medivir ont été partagés ; la délivrance d’un CCP au vu de ce dernier brevet remplit les objectifs du règlement, soit permettre à chacun de compenser le coût de ses recherches et investissements.

La délivrance du premier CCP a récompensé la société Medivir, et il ne peut lui en être délivré un second.

L’INPI relève que la société Medivir a déposé les deux demandes de CCP et qu’il lui a été permis de choisir entre les deux, au vu de l’impossibilité de délivrer deux CCP sur le même produit.

Le conseil de la société Medivir AB et le représentant de l’INPI entendus en leurs observations, le

Ministère Public en ses réquisitions.

MOTIVATION Afin d’accorder aux médicaments une protection suffisante pour encourager la recherche et de tenir compte de l’écoulement du temps entre le dépôt d’une demande de brevet et l’autorisation de mise sur le marché, le règlement n° 469/2009 du Parlement européen et du Conseil du 6 mai 2009 institue un CCP pour les médicaments ayant donné lieu à une autorisation de mise sur le marché, en leur accordant une protection effective d’une durée supplémentaire.

L’article 3 de ce règlement n° 469/2009 du 6 mai 2009 concernant le CCP pour les médicaments, portant sur les conditions d’obtention du certificat, prévoit que

Le certificat est délivré, si, dans l’État membre où est présentée la demande visée à l’article 7 et à la date de cette demande: a) le produit est protégé par un brevet de base en vigueur; b) le produit, en tant que médicament, a obtenu une autorisation de mise sur le marché en cours de validité conformément à la directive 2001/83/CE ou à la directive 2001/82/CE suivant les cas ; c) le produit n’a pas déjà fait l’objet d’un certificat ; d) l’autorisation mentionnée au point b) est la première autorisation de mise sur le marché du produit, en tant que médicament.

L’article 3§2 du règlement n° 1610/96 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 1996 concernant la création d’un CCP pour les

produits phytopharmaceutiques, qui s’applique aux CCP de médicaments, prévoit que

'Le titulaire de plusieurs brevets portant sur le même produit ne peut se voir octroyer plusieurs certificats pour ce produit. Toutefois, lorsque deux ou plusieurs demandes portant sur le même produit et émanant de deux ou plusieurs titulaires de brevets différents sont pendantes, chacun des titulaires peut se voir octroyer un certificat pour ce produit'.

Les considérants de ce règlement se fondent également sur la réduction de la protection effective conférée par le brevet à une durée insuffisante pour amortir les investissements effectués dans la recherche et pour générer les ressources nécessaires au maintien d’une recherche performante.

Il ressort des éléments du dossier que le produit Siméprévir fait l’objet d’une protection par deux brevets, le brevet EP1912999 dont la société Médivir est co-titulaire, et le brevet EP1713823 dont elle est seule titulaire.

Une autorisation de mise sur le marché EU/1/14/924 a été délivrée pour le médicament Olysio -Siméprévir le 14 mai 2014, à la demande d’une société Janssen -Cilag International NV, appartenant au groupe du co-titulaire du brevet EP1912999.

La société Médivir a demandé avec son co-titulaire du brevet EP1912999 la délivrance d’un CCP n°14C0076 sur la base de ce brevet le 7 octobre 2014, puis a demandé seule la délivrance d’un CCP n°14C0081 sur la base du brevet EP1713823 le 14 novembre 2014.

A la réception de la notification d’irrégularités émise par l’INPI dans le cadre de la demande de CCP n° 14C0081, la société Medivir a demandé qu’il soit sursis à statuer sur la demande n° 14C0081 dans l’attente de la décision devant intervenir dans le cadre de la demande de CCP n° 14C0076, à laquelle l’INPI a fait droit par décision du 17 août 2015 avant de rejeter la demande de CCP n°14C0081 par la décision contestée.

Les articles 3 et 3§2 des règlements précités prévoient respectivement que le CCP n’est délivré que si le produit 'n'a pas déjà fait l’objet d’un certificat, et 'le titulaire de plusieurs brevets portant sur le même produit ne peut se voir octroyer plusieurs certificats pour ce produit.

La CJUE a indiqué, s’agissant de l’interprétation de la phrase de l’article 3§2 du règlement n° 1610/96 relative à l’existence de plusieurs demandes pendantes portant sur le même produit et émanant de deux ou plusieurs titulaires de brevets différents, que 'la condition particulière pour l’octroi de deux ou plusieurs CCP portant sur le même

produit est que les demandes y afférentes émanent de différents titulaires de brevets de base '.

En l’occurrence, la société Médivir est titulaire du brevet EP1713823, et co-titulaire du brevet EP1912999 au vu duquel la demande de CCP a été délivrée.

La délivrance du CCP tendant à permettre à la société qui a financé des recherches de bénéficier d’une protection d’une durée suffisante, cet objectif est atteint pour la société Médivir par la délivrance du CCP délivré sur la base du brevet dont elle est co-titulaire.

L’article 6 du règlement n°469/2009 prévoit que 'le droit au certificat appartient au titulaire du brevet de base… ', défini à l’article 1er comme 'un brevet qui protège un produit en tant que tel, un procédé d’obtention d’un produit ou une application d’un produit et qui est désigné par son titulaire aux fins de la procédure d’obtention d’un certificat.

La société Medivir a fait le choix de s’associer avec la société Janssen Ireland UC pour développer en commun le brevet EP1912999 et, alors qu’elle savait la difficulté posée par la présentation de deux CCP sur le même produit, de donner la priorité à la demande fondée sur le brevet EP1912 dont elle est co-titulaire plutôt qu’à celle fondée sur le brevet EP1713823.

La co-titularité du brevet EP1912999 n’empêche pas son exploitation par la société Medivir, dans les termes de l’article L613-29 du code de la propriété intellectuelle.

Aussi, au vu des choix effectués par la société Medivir, co-titulaire du brevet EP1912999 ayant fait l’objet d’un CCP, elle ne peut solliciter pour le même produit un autre CCP sur le fondement du brevet EP1712823 dont elle est seule titulaire.

Par conséquent, son recours sera rejeté.

Il ne sera pas fait droit à ses autres demandes.

PAR CES MOTIFS :

La cour, REJETTE le recours formé par la société Medivir à l’encontre de la décision rendue le 13 janvier 2017 par le directeur général de l’INPI ;

DIT que la présente décision sera notifiée, par lettre recommandée avec accusé de réception et par les soins du greffe, à la société Medivir AB ainsi qu’au directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle.

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