Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 28 novembre 2018, n° 17/03923

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 3, 28 nov. 2018, n° 17/03923
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/03923
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 5 décembre 2016, N° 15/06146
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3

ARRÊT DU 28 NOVEMBRE 2018

(n° , 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/03923 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B2WXJ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Décembre 2016 -Tribunal de Grande Instance de Paris – RG n° 15/06146

APPELANTE

SARL DANIEL représentée par son gérant y domicilié

immatriculée au RCS de Melun sous le numéro 582 089 017

[…]

[…]

Représentée par Me Charles-hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029, avocat postulant

Assistée de Me N WOIRIN de la SCP ROUCH ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0335, avocat plaidant

INTIMES

Madame K, I, G B

44, Rue Saint D

[…]

Représentée par Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d’Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050, avocat postulant

Assistée de Me Christine BELIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0447, avocat plaidant

Monsieur L, M, G B

[…]

78320 LE MESNIL SAINT-DENIS

Représenté par Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d’Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050, avocat postulant

Assisté de Me Christine BELIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0447, avocat plaidant

Madame X, H G B

[…]

[…]

Représentée par Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d’Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050, avocat postulant

Assistée de Me Christine BELIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0447, avocat plaidant

Madame G-N, Madeleine, H B épouse Y

[…]

[…]

Représentée par Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d’Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050, avocat postulant

Assistée de Me Christine BELIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0447, avocat plaidant

Madame Z, O G B

[…]

[…]

Représentée par Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d’Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050, avocat postulant

Assistée de Me Christine BELIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0447, avocat plaidant

Monsieur A, H P B

[…]

[…]

Représenté par Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d’Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050, avocat postulant

Assisté de Me Christine BELIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0447, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 04 Septembre 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre

Madame Sandrine GIL, conseillère

Madame Françoise BARUTEL-NAULLEAU, conseillère

qui en ont délibéré,

un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame G-Gabrielle de La REYNERIE

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Madame G-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

*****

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte sous seing prive du 25 février 1957, M. I B, aux droits duquel viennent les consorts B, a donné à bail commercial à M. C, aux droits duquel vient la société DANIEL, un local commercial destiné à l’activité de ganterie, bonneterie pour dames, à droite de la porte d’entrée de l’immeuble vue de l’extérieur, un appartement au 1er étage composé d’une antichambre, un salon sur rue, une chambre sur rue, toilette, dégagement, salle à manger sur cour, deux chambres sur cour, couloir, W.C., cuisine et chambre de bonne adossée à la cuisine ainsi qu’une cave dépendant d’un immeuble situé 44 rue Saint-D, à Paris, dans le 4e arrondissement, pour une durée de neuf années.

Le bail commercial a été renouvelé régulièrement en 1964, 1974 et 1980.

Par acte sous seing privé du 7 juillet 1989, M. B a donné à bail renouvelé à la société DANIEL un local commercial à usage exclusif de ganterie, bonneterie, confection pour hommes, femmes enfants, à l’exclusion de tout autre commerce, profession ou industrie ou de toute autre utilisation des lieux, au rez-de-chaussée, une petite boutique à droite de la porte d’entrée, vue de l’extérieur, au premier étage, cinq pièces principales, deux pièces secondaires, une cuisine, des toilettes dépendant d’un immeuble situé 44 rue Saint-D, à Paris, dans le 4e arrondissement, pour une durée de trois, six ou neuf années entières et consécutives commençant à courir le 1er avril 1989, pour se terminer à pareille époque des années 1992, 1995 ou 1998, moyennant un loyer annuel de 90.000 francs hors charges et hors taxes. Ledit bail stipulant que le preneur est autorisé à installer un escalier intérieur reliant la boutique du rez-de-chaussée au 1er étage.

Le dernier bail renouvelé a été signé le 24 septembre 1998 pour une durée de trois, six, ou neuf années entières et constitutives à compter du 1er avril 1998, pour finir à pareille époque des années 2001, 2004 ou 2007, moyennant un loyer en principal de 104.494,01 francs hors charges et hors taxes.

Par acte d’huissier du 28 septembre 2006, M. B a délivré un congé à la société DANIEL avec offre de renouvellement pour le 31 mars 2007 moyennant un loyer renouvelé de 33.000 euros.

Par acte d’huissier du 9 décembre 2008, les consorts B ont délivré à la société DANIEL une rétractation de congé avec offre de renouvellement et offre d’indemnité d’éviction.

Par ordonnance du 12 février 2009, le juge des référés de Paris, saisi par voie d’assignation des consorts B a désigné en qualité d’expert M. D J, avec la mission d’estimer le montant de indemnité d’éviction et le montant de l’indemnité d’occupation.

Par acte d’huissier du 2 octobre 2009, les consorts B ont délivré une sommation visant la clause résolutoire à la société DANIEL de remettre l’appartement du 1er étage dans son état primitif dans le délai d’un mois.

Par acte d’huissier du 19 octobre 2009, la société DANIEL a délivré aux consorts B une opposition à sommation visant la clause résolutoire aux motifs que les travaux réalisés par la société DANIEL ont été autorisés par M. B, que ces travaux ont conduit à la modification du bail commercial le 7 juillet 1989 stipulant que le preneur est autorisé à réaliser à ses frais, un escalier intérieur reliant le rez-de-chaussée et le 1er étage.

Par acte d’huissier du 17 mars 2010, les consorts B ont assigné devant le tribunal de grande instance de Paris la société DANIEL aux fins de voir prononcer la résiliation du bail commercial signé le 24 septembre 1998.

Le 8 décembre 2009, la préfecture de police de Paris a adressé une demande d’exécution de travaux à la société DANIEL suite aux constats d’anomalies relevées par le technicien lors d’une visite le 27 novembre 2009, tenant principalement à l’absence de mesures de sécurité pour le public. Par acte d’huissier du 23 décembre 2010, les consorts B ont délivré une dénonciation de notification de la préfecture de police de Paris et sommation visant la clause résolutoire à la société DANIEL pour manquement aux stipulations contractuelles

Par acte d’huissier du 4 février 2011, les consorts B ont assigné en référé la société DANIEL aux fins de voir le juge constater l’acquisition de la clause résolutoire aux torts et griefs du bail de la société DANIEL et en conséquence d’ordonner l’expulsion de ladite société et celle de tous occupants de son chef du local commercial sis à Paris 4e arrondissement, 44 rue Saint-D aux motifs que la société DANIEL n’a pas respecté ses obligations contractuelles de conformité avec les prescriptions, règlements et ordonnances en matière de sécurité.

Par acte d’huissier du 30 novembre 2011, les consorts B ont assigné en référé devant le président du tribunal de grande instance de Paris, la société DANIEL aux fins de désignation d’un expert avec pour mission de chiffrer les coûts de travaux de remise en état primitif du local commercial et de l’appartement du 1er étage, situé 44 rue Saint-D, à Paris, 4e arrondissement.

Par ordonnance du 4 avril 2011, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a constaté que la clause résolutoire insérée au contrat de bail du 24 septembre 1998 n’est pas invoquée de bonne foi, et ne peut être déclarée acquise, et dit n’y avoir lieu à référé.

Par ordonnance de référé du 12 avril 2012, le juge des référés a désigné M. E avec pour mission de chiffrer le coût de remise en état dans leur état primitif des locaux loués, de prescrire tous travaux, et dire à qui incombent les travaux.M. Q-R F a été désigné en remplacement de M. E.

Par jugement du 20 novembre 2012, le tribunal de grande instance de Paris a :

— débouté les consorts B de leurs demandes';

— dit que le congé délivré le 28 septembre 2006 pour le 31 mars 2007 suivi le 9 décembre 2008, d’un

refus de renouvellement met fin au bail liant les parties à compter du 31 mars 2007 et ouvre droit au paiement d’une indemnité d’éviction au preneur et d’une indemnité d’occupation pour les bailleurs';

— condamné solidairement les consorts B à payer à la société DANIEL la somme de 315.000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnité d’éviction, sursit à statuer sur les autres demandes dans l’attente du dépôt du rapport définitif de l’expert';

— ordonné le retrait du rôle de l’affaire jusqu’au dépôt du rapport d’expertise ordonnée en référé.

Le 11 décembre 2012, les consorts B ont interjeté un appel total de la décision rendue par le tribunal de grande instance de Paris le 20 novembre 2012.

Par acte du 27 décembre 2012, les consorts B ont assigné en référé devant le Premier Président de la cour d’appel de Paris, la société DANIEL, aux visas des articles 517, 518, 519 et 524 du code de procédure civile, aux fins de suspension de l’exécution provisoire du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris, le 20 novembre 2012.

Par acte d’huissier de justice du 16 janvier 2013, la société DANIEL a délivré un commandement afin de saisie vente, aux consorts B de payer la somme de 319.230,19 euros composée en principal de la somme de 315.000 euros au titre du jugement intervenu le 20 novembre 2012, ainsi que divers frais de procédure.

L’expert judiciaire, M. D J, a déposé son rapport le 26 avril 2013 concluant à une indemnité d’éviction en cas de transfert du fonds à 304.000 euros dont 198 000 euros au titre du droit au bail, en cas de perte du fonds à 224.000 euros dont 200 000 au titre de l’indemnité principale et à une indemnité d’occupation à 32.130 euros par an, à compter du 1er avril 2007.

M. F, expert judiciaire, a déposé son rapport le 29 novembre 2013 concluant à un coût de réhabilitation des locaux, afin de retrouver leur situation primitive à la somme de 257.075 euros hors taxes.

Par ordonnance du 22 mai 2013, le délégataire premier président de la Cour d’appel de Paris a constaté que les consorts B s’engagent à consigner la somme de 300.000 euros à la CARPA de l’ordre des avocats du barreau de Paris jusqu’au prononcé de l’arrêt statuant sur le recours formé à l’encontre du jugement dans le délai d’un mois suivant le prononcé de l’ordonnance et de ce que la société DANIEL accepte cet engagement et a entériné l’accord des parties en lui donnant force exécutoire.

Par jugement du 4 novembre 2014 le tribunal de grande instance de Paris a sursis à statuer sur les demandes relatives à l’indemnité d’éviction et à l’indemnité d’occupation, débouté les consorts B de leurs demandes de paiement de travaux de remise en état des locaux sis, Paris 4e, 44 rue Saint-D et ordonné le retrait du rôle de la présente affaire jusqu’à ce que la cour d’appel de Paris ait statué sur l’appel interjeté à l’encontre du jugement du 20 novembre 2012 aux motifs que les consorts B n’apportent pas la preuve de la nécessité de réparations et remises en état qui ne relèveraient pas de la vétusté ou des grosses réparations prévues par l’article 606 du code civil.

Le 4 novembre 2014, les consorts B ont interjeté appel de la décision rendue par le tribunal de grande instance de Paris le même jour.

Par arrêt du 11 mars 2015, la cour d’appel de Paris a statué sur l’appel interjeté à l’encontre du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris du 20 novembre 2012 en confirmant ladite décision en toutes ses dispositions et déboutant la société DANIEL de sa demande de dommages et intérêts.

Par arrêt en date du 1er juillet 2016 la cour d’appel de Paris a confirmé le jugement rendu le 4 novembre 2014 par le tribunal de grande instance de Paris.

Par jugement en date du 6 décembre 2016 le tribunal de grande instance de Paris’a :

— Dit que par l’effet du congé comportant refus de renouvellement signifié le 1er avril

2007, le bail a pris fin le 31 mars 2011,

— Fixe à la somme de 247.980 euros (deux cent vingt-quatre mille euros) le montant de

l’indemnité d’éviction toutes causes confondues due par les consorts B à la

société DANIEL,

— Dit que la société DANIEL est redevable à l’égard des consorts B d’une indemnité d’occupation à compter du 1er avril 2007,

— Fixé le montant de cette indemnité d’occupation à la somme annuelle de 32.130 euros

(trente-deux mille cent trente euros), outre les taxes et charges,

— Dit que la compensation entre le montant de l’indemnité d’éviction et de l’indemnité

d’occupation s’opérera de plein droit,

— Condamné les consorts B à payer à la société DANIEL la somme de 4000 euros (quatre mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamné les consorts B aux entiers dépens, en ce compris les frais d’expertise et dit qu’ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

— Dit y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire.

La société DANIEL a interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 21 février 2017.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 3 septembre 2018, la société DANIEL, SARL, demande à la cour de':

Vu le rapport d’expertise,

Vu le jugement déféré,

Vu les pièces versées aux débats,

— Dire et juger la société DANIEL recevable et bien fondée en son appel,

Y faisant droit,

— Confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne le montant retenu pour l’indemnité d’éviction due à la société DANIEL,

En conséquence,

— Constater que la société DANIEL a quitté les lieux précédemment loués le 31 mars 2011,

— Dire et juger que la société DANIEL a donc perdu purement et simplement son fonds de commerce précédemment exploité dans les locaux litigieux,

— Débouter les consorts B de toutes leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,

En conséquence,

* A titre principal,

— Fixer le montant de l’indemnité d’éviction due à la société DANIEL par les consorts B à la somme de 599.025 euros,

— Condamner in solidum les consorts B à payer à la société DANIEL

ladite somme de 599.025 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2014, date de signification des conclusions récapitulatives n°2 de la société DANIEL, et donc de sa demande à hauteur de cette somme,

* A titre subsidiaire,

— Fixer le montant de l’indemnité d’éviction due à la société DANIEL par les consorts B à la somme de 576.123 euros,

— Condamner in solidum les consorts B à payer à la société DANIEL ladite somme de 571.123 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2014, date de signification des conclusions récapitulatives n°2 de la société DANIEL, et donc de sa demande à hauteur de cette somme,

* En tout état de cause,

— Fixer le montant de l’indemnité d’occupation à compter du 1er avril 2007 à la somme en principal de 32.130 euros par an,

— Débouter les consorts B de toutes leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,

— Confirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné in solidum les consorts B à payer à la société DANIEL la somme de 4.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens comprenant les frais d’expertise,

— Y ajoutant, condamner in solidum les consorts B à payer à la société

DANIEL la somme de 4.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

— Condamner solidairement les consorts B aux entiers dépens, comprenant les frais d’expertise, dont distraction au profit de Maître Henri ROUCH, SCP ROUCH & ASSOCIES, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 4 septembre 2018, Mme K B, Mme X B, Mme G-N B épouse

Y, Mme Z B, MM. L B et A B demandent à la cour de':

Vu le jugement entrepris,

Vu le pré-rapport d’expertise

Vu le rapport d’expertise

Vu les pièces communiquées

— Confirmer le jugement entrepris dans ses dispositions qui ont dit que la société DANIEL était redevable à l’égard des consorts B d’une indemnité d’occupation à compter du 1er avril 2007 et fixé le montant de cette indemnité d’occupation à la somme annuelle de 32.130 € hors taxes et hors charges,

— Dire et juger les consorts B recevables et bien fondés en leur appel incident,

— En conséquence infirmer les dispositions du jugement entrepris qui ont fixé à la somme de 247.980 € le montant de l’indemnité d’éviction toutes causes confondues due à la société DANIEL,

— Statuant à nouveau, à titre principal, si la cour devait considérer que la société DANIEL a transféré son fonds de commerce du 44, rue Saint-D dire et juger que le montant de ladite indemnité d’éviction doit être évalué à la somme de 6.950 €,

— Statuant à nouveau, à titre subsidiaire, si la cour devait considérer que la société DANIEL a perdu son fonds de commerce du 44, rue Saint-D dire et juger que le montant de ladite indemnité d’éviction doit être évalué à la somme de 32.072 €,

— Confirmer les dispositions du jugement entrepris qui ont dit que la compensation entre le montant de l’indemnité d’éviction et le montant de l’indemnité d’occupation s’opérera de plein droit,

— Infirmer les dispositions du jugement entrepris qui ont condamné les consorts B à payer à la société DANIEL la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— Débouter la société DANIEL de sa demande tendant à voir les consorts B condamnés en cause d’appel à lui payer une somme de 4.000 € sur le fondement des dispositions du code de procédure civile.

— Condamner la société DANIEL aux entiers dépens qui comprendront le coût du rapport d’expertise.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières conclusions précitées des parties pour ce qui concerne l’exposé détaillé de leurs moyens et prétentions.

La clôture est intervenue le 4 septembre 2018.

MOTIFS

Sur l’indemnité d’éviction

Il ressort du rapport d’expertise judiciaire et du jugement entrepris, non critiqués sur ces points, que les locaux sont situés 44 rue Saint-D, à Paris, dans le 4e arrondissement laquelle est une large voie qui s’étend de la place de la Bastille à la rue de Fourcy et se prolonge par la […].

L’immeuble se situe dans la partie de la rue comprise entre la rue de Birague et la rue de Turenne. Il s’agit d’une bonne voire très bonne situation dans une partie de la rue dans laquelle sont implantés tous types de commerce, l’essentiel des pieds d’immeubles étant occupés par des boutiques dont quelques enseignes nationales et des commerces de proximité. Ce quartier bénéficie d’une clientèle locale à fort pouvoir d’achat et d’un flux touristique important en raison de la proximité de la place des Vosges et de l’Hôtel de Sully.

Les locaux donnés à bail à la société DANIEL sont situés au rez-de-chaussée et au premier étage d’un ensemble immobilier ancien, élevé sur sous-sol d’un rez-de-chaussée, de quatre étages droits et d’un 5e étage mansardé -façade en enduit à ravaler. L’immeuble est de bonne qualité de construction, mais manque un peu d’entretien.

Les locaux loués sont constitués au rez-de-chaussée d’une boutique de 17,60 m² avec une aire de vente ouverte en très large communication avec la boutique contigüe au 42 rue Saint D dépendant d’un autre bail et un escalier permettant l’accès au premier étage, d’une surface de 137 m² composée d’une aire de vente et de réserves, éclairée par quatre fenêtres sur rue et deux fenêtres sur cour occultées, un bureau sans jour dont une fenêtre sur cour a été occultée et de toilettes et débarras au sol cimenté très dégradé.

Les surfaces accessibles à la clientèle sont en bon état général, le bureau et les réserves sont en état médiocre. La distribution du local est particulière avec une faible surface au rez-de-chaussée.

La société DANIEL exploitait dans les locaux qu’elle a restitués le 31 mars 2011 une activité de prêt à porter.

Le jugement entrepris a retenu une surface pondérée des locaux à 67,96 m²P telle que relevée par l’expert judiciaire ce qui est critiqué par la société DANIEL se prévalant d’un coefficient de pondération de 0,50 au lieu de 0,40 pour le 1er étage au motif que la surface de vente du 1er étage est plus importante que celle du rez-de-chaussée et est visible de l’extérieur par de grandes baies vitrées avec effet bandeau.

La cour considère cependant, à l’instar du jugement entrepris, qu’il ressort des photographies de la façade de l’immeuble que les locaux du 1er étage ne sont pas visibles depuis la rue dans la mesure ou les fenêtres sont pour certaines occultées par des stores et que l’aspect du premier étage côté rue ne permet pas de distinguer la surface de vente d’une surface d’habitation. Le coefficient de 0,50 applicable à un premier étage ne pourrait être retenu que dans la mesure où il existerait une réelle vitrine, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Le coefficient de pondération retenu pour la surface située au 1er étage du local situé au 44 rue Saint-D 0,40 est justifié de sorte que c’est à juste titre que le jugement entrepris a retenu la surface pondérée des locaux à 67,96 m²P.

Les locaux du 44 rue Saint D ont été vendus par les consorts B le 11 avril 2013.

1. Sur l’indemnité principale

Aux termes de l’article L 145-14 du code de commerce, l’indemnité d’éviction est destinée à permettre au locataire évincé de voir réparer l’entier préjudice résultant du défaut de renouvellement.

Il est usuel de mesurer les conséquences de l’éviction sur l’activité exercée afin de déterminer si cette dernière peut être déplacée sans perte importante de clientèle auquel cas l’indemnité d’éviction prend le caractère d’une indemnité de transfert ou si l’éviction entraînera la perte du fonds, ce qui confère alors à l’indemnité d’éviction une valeur de remplacement.

Cette distinction peut, toutefois, se révéler d’un moindre intérêt si le fonds est déficitaire ou s’il ne dégage qu’une faible rentabilité, puisqu’il est de principe que sa valeur marchande est au moins égale

à la valeur du droit au bail qui est également retenue pour déterminer la valeur de l’indemnité d’éviction lorsqu’elle prend le caractère d’une indemnité de transfert.

—  nature de l’indemnité

La société DANIEL expose qu’au bout de 10 années de procédure les intimés remettent en cause son droit à indemnité d’éviction qui a autorité de chose jugée ; que la cession du fonds de commerce exploité dans les locaux du 42 rue Saint D est intervenue postérieurement à la restitution des locaux du 44 rue Saint D. Elle soutient avoir perdu son fonds de commerce qui n’était pas transférable au 42 rue Saint D dont les locaux étaient de taille insuffisante ; qu’elle a cessé son exploitation du fonds de commerce du 44 au 31 mars 2011.

Les consorts B soutiennent que l’intimée a exploité pendant plusieurs années son activité au 44 et au 42 rue Saint D de manière indivisible ; qu’elle a transféré son activité au 42 rue Saint D et qu’elle a ensuite vendu son fonds de commerce le 20 décembre 2011 ; que l’intimée n’a pas perdu son fonds de commerce du 44 rue Saint D qu’elle a cédé avec celui du 42 rue Saint D et qu’elle n’a donc subi aucun préjudice. Les intimés insistent sur le fait que le fonds était transférable au 42 rue Saint D.

La cour rappelle que l’indemnité d’éviction s’apprécie au 31 mars 2011, date de la restitution des locaux aux bailleurs.

Il incombe aux bailleurs de rapporter la preuve qu’un transfert du fonds est possible sans perte importante de clientèle.

Il n’est pas discuté que l’intimée exploitait un fonds de commerce au 44 rue Saint D dans des locaux donnés à bail par les consorts B et qu’elle exploitait également un fonds de commerce au 42 rue Saint D faisant l’objet d’un bail distinct, les locaux ayant été réunis pour les besoins de son activité.

L’expert judiciaire a relevé que les locaux du 44 rue Saint D étaient de 17m²60 au rez de chaussée et de 137 m² au 1re étage lequel est constitué d’une aire de vente de 96m², d’un bureau, d’un local technique et de deux réserves. Les locaux du 42 rue Saint D, situés en rez-de-chaussé, sont d’une superficie de 42,50m² et, au vu des photographies visées dans le rapport d’expertise, comprennent une aire de vente contigue avec le rez-de-chaussée du 44 rue Saint D.

La société DANIEL a continué à exploiter le fonds du 42 rue Saint D après avoir restitué les locaux du 44 rue Saint D.

Toutefois eu égard à la différence de superficie entre les locaux du 44 et du 42, les bailleurs ne démontrent pas que l’activité n’était pas transférable sans perte importante de clientèle en raison de la surface de vente importante du 1er étage et du fait que les réserves étaient situés au 44.

D’ailleurs la société DANIEL qui bénéficiait d’un bail renouvelé au 42 rue Saint D a vendu son fonds de commerce quelques mois après la restitution des locaux du 44 rue Saint D aux consorts B.

Or contrairement à ce que prétendent les consorts B, la cession de ce fonds de commerce le 20 décembre 2011 ne porte, au vu des mentions de l’acte, que sur le fonds de commerce du 42 rue Saint D et l’acte précise bien que le chiffre d’affaires de la société DANIEL qui y est mentionné provient de l’activité qui était exercée tant au 42 qu’au 44 rue Saint D jusqu’au mois de mars 2011 date à laquelle le local du 44 a été restitué ; qu’il ne peut donc y avoir de confusion quant au fonds de commerce cédé, à savoir le seul fonds exploité au 42 rue Saint D et dont le prix de cession de 275 000 euros ne peut pas concerner le prix des deux fonds de commerce étant

relevé que la vente du fonds comprend le droit au bail qui est annexé à l’acte et qui est le seul bail du 42 rue Saint D.

Au regard de ces éléments, il sera considéré que le congé portant refus de renouvellement ouvrant droit à une indemnité d’éviction a entraîné la perte du fonds de commerce de la société DANIEL exploité au 44 rue Saint D.

L’éviction entraîne donc la perte du fonds dont la valeur est au moins égale à la valeur du droit au bail.

—  valeur du droit au bail

La cour rappelle que la valeur du droit au bail se calcule par la différence entre le montant de la valeur locative et le loyer qui aurait été perçu si le bail avait été renouvelé, cette différence étant elle même affectée d’un coefficient multiplicateur au regard de l’intérêt des locaux pour l’activité exercée.

L’appelante expose que les travaux qu’elle a effectués en 1991 ont transformé le 1er étage à usage d’habitation en espace de vente, ce qui constitue une modification notable des caractéristiques des locaux donnant lieu à un déplafonnement acquis au premier renouvellement dont les bailleurs ne se sont pas prévalus ; que cette modification ne peut donc constituer un motif de déplafonnement lors du second renouvellement ; que les travaux qui ont augmenté la surface de vente ne peuvent être qualifiés d’amélioration de sorte que le loyer de renouvellement aurait été plafonné à la somme de 21.127,18 euros.

Les consorts B se rapportent à l’avis de l’expert judiciaire qui a considéré que les travaux du 1er étage effectués par la locataire en 1991 sont des travaux d’amélioration qui auraient donné lieu à déplafonnement si le bail avait été renouvelé, les travaux ayant amélioré les conditions d’exploitation, ce qui a également été retenu par le jugement entrepris de sorte que selon eux le loyer de renouvellement aurait été fixé à la valeur locative.

La cour rappelle que par application des articles R145-3, R145-4 et R145-8 du code de commerce :

— lorsque les travaux réalisés par le locataire ont modifié de manière notable les caractéristiques des locaux, le déplafonnement est possible au premier renouvellement suivant leur réalisation, sous peine de déchéance du bailleur du droit de s’en prévaloir pour les renouvellements ultérieurs,

— en revanche, les travaux d’amélioration réalisés en cours de bail par le locataire qui en a assumé la charge financière n’ouvriront droit à déplafonnement que lors du second renouvellement suivant leur accomplissement.

Quand des travaux modifient notablement les caractéristiques des lieux loués mais améliorent aussi notablement ces mêmes locaux, la qualification qui doit primer est celle de travaux d’amélioration.

Il n’est pas discuté qu’en 1991 la société DANIEL a réalisé à ses frais des travaux dans les locaux donnés à bail en aménageant le 1er étage se composant de cinq pièces principales, deux pièces secondaires, une cuisine, des toilettes en aire de vente de 96 m² et réserves, étant relevé que le bail du 7 juin 1989 mentionne qu’il est donné à bail un local commercial et ne fait plus référence à un 'appartement’ pour le 1er étage contrairement aux baux précédents. Ces travaux portant sur l’ouverture d’une trémie et pose d’un escalier pour relier le rez-de-chaussée, l’ouverture d’une baie et la démolition de cloisonnements, ont augmenté de façon considérable l’aire de vente, sans toutefois modifier l’assiette du bail et ils ont amélioré de manière substantielle les conditions d’exploitation du fonds, la faible surface du rez-de chaussée étant peu attractive pour la clientèle.

Ces travaux constituant à la fois une modification des caractéristiques des locaux et une amélioration

au sens de l’article R 145-8 code de commerce, le régime des travaux d’amélioration doit prévaloir.

Il s’ensuit que les bailleurs auraient pu se prévaloir de ces travaux lors du second renouvellement en 2007 pour obtenir le déplafonnement du loyer.

Par conséquent il y a lieu pour apprécier la valeur de droit au bail d’estimer la valeur locative si le bail avait été renouvelé.

L’expert judiciaire a recherché des termes de comparaison tant en locations nouvelles qu’en renouvellements amiables et judiciaires dans le quartier environnant et il a estimé la valeur locative de marché en mars 2011 à 900 euros/m². L’appelante soutient que la valeur locative de marché est de 1 000 euros.

La cour écartera les valeurs des années 2003 et 2004 qui sont, comme le relève l’appelante, trop anciennes.

Il ressort du rapport d’expertise des termes de comparaison variant de 583 euros le m²P (28 rue Saint-D au 1er trimestre 2006, agence de voyages) à 1 655 euros le m²P ([…], maroquinerie) pour des locations nouvelles entre 2005 et 2008,

— de 450 euros le m²p à 561 euros le m²P pour des fixations judiciaires pour des renouvellements en 2005 et 2006,

—  420 euros le m²[…], prêt-à-porter en décembre 2005) et 1791 euros le m²P (107 rue Saint-D, musique en mai 2009) pour des renouvellements amiables.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, le prix unitaire de 900 euros le m²P retenu tant par l’expert judiciaire que par le jugement entrepris pour la valeur locative de marché est justifié, étant rappelé que la distribution des locaux est particulière avec une toute petite surface en rez-de-chaussée ce qui vient minorer la valeur locative. L’expert judiciaire a proposé une majoration pour communication avec la boutique contiguë de 1,05 qui est appropriée.

La valeur locative de marché est donc la suivante : 61 164 euros (Soit 67,96 m² x 900 euros) x 1,05 = 64 222 euros arrondis à 64 200 euros.

L’expert judiciaire a évalué le loyer du bail, s’il avait été renouvelé au 1er avril 2007, à 500 euros/m²P.

Eu égard aux termes de comparaison susvisés, compte tenu de la distribution particulière des locaux, du bon état de la surface de vente, de la très bonne situation sur une voie de forte commercialité et de la destination du bail, le loyer unitaire de 500 euros/m² est justifié.

La valeur locative de renouvellement au 1er avril 2007 s’établit ainsi : 67,96m²P x 500 euros = 33 980 euros auquel s’applique la majoration pour communication avec la boutique contiguë, soit 33 980 euros x 1,05 = 35 679 euros arrondis à 35 700 euros.

La cour rappelle que l’indemnité d’éviction doit correspondre à la valeur d’acquisition d’un droit au bail pour des locaux à l’identique, situés dans le secteur concerné. Dans ces conditions, il convient de prendre en compte la valeur locative de marché à la date la plus proche possible du départ du locataire et de la comparer avec le montant du loyer effectivement payé par celui-ci. En conséquence, il n’y a pas lieu de tenir compte de la révision triennale au 1er avril 2010, celle-ci n’étant pas intervenue.

Les parties n’ont pas discuté l’application d’un coefficient multiplicateur de 7,5 pour déterminer le

montant de la valeur du droit au bail qui a été retenue par le jugement de première instance.

Il s’ensuit que la valeur du droit au bail est la suivante : (64 200 euros – 35 700 euros) x 7,5 = 213 750 euros.

La valeur du droit au bail est donc de 213 750 euros.

Il n’y a pas lieu de déduire de la valeur du droit au bail le prix de cession du bail à hauteur de 275 000 euros comme le prétendent les consorts B, ladite cession du 20 décembre 2011 ne concernant que le fonds de commerce du 42 rue Saint D.

—  valeur du fonds de commerce

La valeur du fonds de commerce peut être déterminée selon deux approches : l’une en fonction des résultats d’exploitation, l’autre en fonction du chiffre d’affaires.

L’expert judiciaire a conclu à une valeur du fonds de commerce de 200 000 euros.

Il a retenu, selon l’approche par le chiffre d’affaires, un chiffre d’affaires moyen HT de 416 897 euros au regard des exercices pondérés 2008, 2009 et 2010 sur lequel il applique un coefficient de 1,196 (TVA -non contesté par les parties) et un pourcentage de 40%.

La cour considère que la méthode par le chiffre d’affaires doit être retenue compte tenu de la faiblesse de l’EBE moyen (15 920 euros) relevé par l’expert.

L’appelante soutient que le chiffre d’affaires devrait être retenu sur les 5 dernières années en raison des problèmes de santé du gérant qui ont entraîné une baisse du chiffre d’affaires ; que la pondération appliquée n’est pas explicitée et que le pourcentage de 40% est trop faible s’agissant d’une activité de prêt à porter. Elle propose donc de retenir un chiffre d’affaires de 688 368 euros x 1,196 x 60% = 493 972 euros.

Toutefois, la cour relève que l’appelante ne rapporte pas la preuve que la baisse de son chiffre d’affaires à compter de 2008 ait eu pour origine les problèmes de santé de son gérant d’autant que l’année 2008 marque, comme l’a relevé l’expert judiciaire, le début d’un ralentissement général de l’activité économique.

Il sera donc retenu conformément aux usages les trois derniers exercices de l’activité de la société DANIEL.

Comme le relève l’expert judiciaire, le chiffre d’affaires de la société DANIEL est global sans ventilation entre l’exploitation du fonds de commerce du 44 et de celle du 42 rue Saint D de sorte qu’il ne peut être retenu pour le calcul de la valeur du seul fonds de commerce du 44 rue Saint D le chiffre d’affaires global.

L’expert judiciaire a proposé d’utiliser un ratio calculé au prorata de la surface pondérée des locaux donnés à bail au 44 rue Saint D par rapport à la surface pondérée totale, soit 67,96m²P (surface pondérée du 44) /104,64m²P (surface pondérée totale) = 64,95%. Ce ratio sera retenu.

Il s’ensuit que le chiffre d’affaires HT moyen sur les années 2008,2009 et 2010 est de 664 470 euros. Il n’y a pas lieu de procéder à une pondération du chiffre d’affaires HT tel que proposé par l’expert judiciaire qui a appliqué un coefficient 3 à l’exercice 2010, 2 pour 2009 et 1 pour 2008, ladite pondération n’étant pas justifiée par les usages relatifs à l’évaluation des fonds de commerce.

Il s’ensuit que le chiffre d’affaire moyen du fonds de commerce du 44 rue Saint D s’établit ainsi

: 664 470 euros x 64,95% = 431 573,26 euros arrondis à 431 570 euros.

L’expert judiciaire a rappelé que les fonds de prêt à porter se vendent, selon les traités, entre 40 à 100% du chiffres d’affaires TTC (F. LEVEBVRE), 30 à 70% du chiffre d’affaires TTC (DELMAS) et pour les chaussures entre 35 % à 80% du chiffre d’affaires TTC (F. LEVEBVRE) et entre 45% et 85% du chiffre d’affaires TTC (DELMAS) sans que les parties ne produisent d’autres références.

Le pourcentage proposé par l’expert judiciaire, qui est de 40 % du chiffre d’affaires HT, est adapté à l’espèce eu égard au fait que si le local bénéficie d’une très bonne situation eu égard à l’activité exercée, l’EBE moyen ne représente qu’un faible pourcentage du chiffre d’affaires moyen malgré l’avantage d’un loyer contractuel très inférieur au loyer de marché ; que la rentabilité du fonds repose principalement sur la faiblesse du loyer.

La valeur du fonds est donc de 431 570 euros x 1,196 (TVA) x 40% = 206 463 euros euros.

Celle-ci étant inférieure à la valeur du droit au bail, il convient de retenir la valeur du droit au bail, soit la somme de 213 750 euros.

Le jugement entrepris qui a fixé l’indemnité principale à la somme de 200 000 euros sera donc infirmé.

2. Les indemnités accessoires

—  les frais de remploi

Les intimés considèrent qu’il n’y a pas lieu à des frais de remploi en l’absence de réinstallation.

Mais ils ne rapportent pas la preuve que la société DANIEL aurait renoncé à se réinstaller, alors que des frais de remploi sont réclamés.

L’expert judiciaire a estimé les frais de remploi comprenant les droits de mutation, commission d’agence et frais juridiques à 10% de l’indemnité principale, pourcentage conforme aux usages qui sera entériné.

Les frais de remploi sont donc de 213 750 euros x 10% soit 21 375 euros.

—  les frais de réinstallation

L’expert judiciaire a indiqué que les frais de réinstallation pouvait être évalués à 56 800 euros, somme que sollicite l’appelante.

La cour rappelle que les frais de réinstallation peuvent être dus aussi bien en cas de transfert du fonds qu’en cas de perte du fonds ; que les frais sont ceux que le preneur évincé doit supporter pour mettre en place dans de futurs locaux les aménagements semblables à ceux qu’il perd et qu’il faut tenir compte de la spécificité des aménagements nécessaires à l’exploitation de son activité actuelle.

Par conséquent il convient d’accorder la somme de 56 800 euros au titre des frais de réinstallation à la société DANIEL, les intimés ne rapportant pas la preuve que la société DANIEL aurait renoncé à se réinstaller.

—  le trouble commercial

Le trouble causé par le temps nécessaire à une nouvelle installation justifie l’attribution d’une indemnité spécifique. L’évaluation de ce trouble à la somme de 3 980 euros faite par l’expert

judiciaire sera, à l’instar du jugement entrepris, retenu dés lors que la société DANIEL qui réclame à ce titre la somme de 17 000 euros n’explicite pas ce montant.

—  les indemnités de licenciement

La société DANIEL justifie du montant des indemnités de licenciement d’un salarié en mars 2011 à savoir la somme de 4 759 euros.

Au vu de ces éléments, l’indemnité d’éviction s’établit de la manière suivante :

— indemnité principale : 213 750 euros

— frais de remploi : 21 375 euros

— frais de réinstallation : 56 800 euros

— trouble commercial : 3 980 euros

— indemnités de licenciement : 4 759 euros

soit la somme de 300 664 euros arrondis à 300 660 euros.

Il n’y a pas lieu comme le sollicitent les consorts B de déduire de cette somme celle de 275 000 euros correspondant au prix de cession du fonds de commerce du 42 rue Saint D, fonds distinct du 44 rue Saint D.

Par conséquent l’indemnité d’éviction sera fixée à la somme de 300 660 euros.

Le jugement entrepris qui a fixé l’indemnité d’éviction à la somme de 224 000 euros sera donc infirmé de ce chef.

L’appelante sollicite de voir condamner in solidum les consorts B à lui payer l’indemnité d’éviction avec intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2014, date de signification de ses conclusions récapitulatives n°2 .

Dés lors que la société DANIEL a restitué les lieux le 31 mars 2011, il convient de condamner in solidum les consorts B à lui payer l’indemnité d’éviction à hauteur de 300 660 euros avec intérêts au taux légal non pas à compter du 12 mars 2014 étant relevé que l’appelante ne produit pas les conclusions récapitulatives n°2 mais à compter du 23 juillet 2015, date de ses conclusions devant le tribunal de grande instance de Paris ayant rendu le jugement entrepris dont le dispositif est reproduit au présent arrêt.

Sur l’indemnité d’occupation

En application de l’article L145-28 du code de commerce, le locataire évincé qui se maintient dans les lieux est redevable d’une indemnité d’occupation jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction calculée d’après la valeur locative, tout en corrigeant cette dernière de tous éléments d’appréciation.

L’expert judiciaire a évalué l’indemnité d’occupation à la somme de 35 700 euros et appliqué un coefficient de précarité de 10% soit 32 130 euros.

Le jugement entrepris a fixé le montant de l’indemnité d’occupation à la somme annuelle de 32.130 euros, ce que les parties, qui demandent la confirmation du jugement sur la fixation de cette indemnité, ne discutent pas.

Par conséquent il convient de confirmer le jugement entrepris qui a fixé le montant de cette indemnité d’occupation à la somme annuelle de 32.130 euros, outre les taxes et charges, à compter du 1er avril 2007.

Le jugement entrepris qui a dit que la compensation entre le montant de l’indemnité d’éviction et de l’indemnité d’occupation s’opérera de plein droit sera confirmé.

Sur les demandes accessoires

Il n’y a pas lieu d’infirmer le jugement de première instance qui a condamné les consorts B à régler la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ni au vu de la solution du litige de l’infirmer sur la condamnation aux dépens comme ceux-ci le sollicitent.

L’équité commande de les condamner in solidum en cause d’appel à la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Les consorts B seront condamnés in solidum aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le quantum de l’indemnité d’éviction,

Statuant à nouveau et y ajoutant

Fixe à la somme de 300 660 euros le montant de l’indemnité d’éviction due par les consorts B à la société DANIEL se décomposant ainsi :

— indemnité principale : 213 750 euros

— frais de remploi : 21 375 euros

— frais de réinstallation : 56 800 euros

— trouble commercial : 3 980 euros

— indemnités de licenciement : 4 759 euros

Condamne in solidum Mme K B, Mme X B, Mme G-N B épouse Y, Mme Z B, MM. L B et A B à payer à la société DANIEL l’indemnité d’éviction d’un montant de 300 660 euros avec intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2015,

Condamne in solidum Mme K B, Mme X B, Mme G-N B épouse Y, Mme Z B, MM. L B et A B à verser la somme de 3 000 euros à la société DANIEL au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum Mme K B, Mme X B, Mme G-N B épouse Y, Mme Z B, MM. L B et A B aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 28 novembre 2018, n° 17/03923