Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 23 mai 2019, n° 18/28410

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 2, 23 mai 2019, n° 18/28410
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/28410
Décision précédente : Tribunal de commerce de Bobigny, 10 décembre 2018, N° 2018R00473
Dispositif : Annule la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS Pôle 1 – Chambre 2
ARRET DU 23 MAI 2019
(n°277, 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/28410 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B66N5
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 11 Décembre 2018 -Tribunal de Commerce de Bobigny – RG n° 2018R00473
APPELANTE
SARL CARROSSERIE SM prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités au siège 13-15 boulevard d’Ornano 93200 SAINT-DENIS N° SIRET : 403 176 043
Représentée et assistée par Me Camille BLACHIER, avocat au barreau de PARIS, toque : J003
INTIMEE
SA NATIXIS LEASE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège […] N° SIRET : 379 155 369
Représentée par Me Stéphane BONIN de la SCP BONIN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : B0574 Assistée par Me Agathe OPOCZYNSKI de la SCP BONIN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : B0574
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 Avril 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Bernard CHEVALIER, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Bernard CHEVALIER, Président Mme Véronique DELLELIS, Présidente Mme Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère
Qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : M. X Y


ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
- signé par Bernard CHEVALIER, Président et par X Y, Greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE
Par déclaration en date du 19 décembre 2018, la Sarl Carrosserie SM a fait appel de tous les chefs du dispositif de l’ordonnance rendue le 11 décembre 2018 par le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny qui :
- lui a ordonné de restituer à la société Natixis Lease le véhicule Ford Mondeo immatriculé DR-148-GY sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance ;
- l’a condamnée à 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et débouté le demandeur du surplus de sa demande à ce titre ;
- a débouté les parties de toutes leurs prétentions incompatibles avec la motivation retenue ou le présent dispositif ;
- dit que les dépens sont à la charge de la Sarl Carrosserie SM.
Au terme de ses conclusions communiquées par voie électronique le 22 mars 2019 la société Carrosserie SM a demandé à la cour, sur le fondement des articles 455, 458 et 873 du code de procédure civile, de :
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;
- annuler ou, subsidiairement, réformer l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions faisant grief à l’appelante ;
statuant à nouveau,
- constater que la demande de la société Natixis Lease ne remplissait pas les conditions de l’article 873 du code de procédure civile ;
- constater que la société Natixis Lease est débitrice à son égard d’une créance équivalente au montant des frais de gardiennage ;
en conséquence :
- dire et juger qu’il n’y avait pas lieu à statuer en référé ;
- condamner la société Natixis Lease à lui payer la somme de 20 960 euros au titre des frais de gardiennage correspondant au tarif de 40 euros HT par jour pendant toute la durée du dépôt du véhicule de marque Ford Mondeo immatriculé DR-148-GT au sein de ses locaux, c’est-à-dire du 15 juillet 2017 au 21 décembre 2018 ;
en tout état de cause :
- condamner la société Natixis Lease à lui payer la somme de 6 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
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La société Carrosserie SM a fait valoir en substance les éléments suivants :
- à titre principal: l’ordonnance entreprise doit être annulée pour défaut de motivation ;
- à titre subsidiaire, les conditions de l’article 873 du code de procédure civile n’étaient pas réunies pour permettre la restitution du véhicule au motif que le trouble manifestement illicite n’était pas caractérisé ; le dépôt d’un véhicule chez un garagiste est présumé fait à titre onéreux ; la rétention était légitime et se fondait sur l’absence de paiement d’une créance ; le droit à rétention est opposable à tous, même au tiers propriétaire ; le 15 juillet 2017, la société Voitures Noires lui a remis le véhicule accidenté de marque Ford Mondeo immatriculé DR-148-GT en vue de la réalisation de réparations ; ce véhicule appartient à la société Natixis Lease, qui l’avait loué à la société Voitures Noires en vertu d’un contrat de crédit-bail ; un ordre de réparation a été établi par la société Voitures Noires qu’elle a validé ;
- en l’absence d’instruction de la part de la société Voitures Noires, elle a pris attache avec la société Natixis Lease pour lui demander quelles suites donner au dépôt de ce véhicule ; Natixis Lease n’a jamais répondu ;
- la mesure sollicitée par la société Natixis Lease ne constituait pas une mesure conservatoire ou de remise en état ;
- le premier juge ne pouvait trancher des questions de fond ;
- à titre infiniment subsidiaire, la restitution du véhicule était subordonnée au paiement des frais de gardiennage que la société Natixis Lease avait de manière incontestable l’obligation de payer au titre du dépôt du véhicule :
- l’obligation de payer les frais de gardiennage était pourtant non sérieusement contestable ;
- cette obligation justifie le versement d’une provision équivalant au montant des frais de gardiennage ;
- la société Natixis Lease connaissait la présence du véhicule dans les locaux de l’appelante et avait déjà reçu les factures induites par ce gardiennage.
La société Natixis Lease, par conclusions transmises par voie électronique le 20 mars 2019, a demandé à la cour, sur le fondement des articles 1917 et 2286 du code civil et 873 du code de procédure civile, de :
- à titre principal, confirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
à titre subsidiaire :
- dire et juger que les demandes formulées par la société Carrosserie SM relèvent de la compétence du juge du fond ;
en toute hypothèse :
- débouter la société Carrosserie SM de l’intégralité de ses demandes ;
- condamner la société Carrosserie SM au paiement d’une somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
La société Natixis Lease a exposé en résumé ce qui suit :
- la demande d’annulation de l’ordonnance du 11 décembre 2018 doit être rejetée au motif que cette demande intervient au mépris de l’effet dévolutif de l’appel et que l’annulation de la décision n’interdirait pas à la cour d’appel de poursuivre la procédure et, le cas échéant, de statuer sur les demandes respectives des parties ;
- la demande de réformation de l’ordonnance du 11 décembre 2018 doit être rejetée au
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motif que la société Carrosserie SM a conservé de manière illégitime le véhicule en cause ; l’atteinte à son droit de propriété est constitutive d’un trouble manifestement illicite justifiant l’application de l’article 873 du code de procédure civile, cela d’autant plus que sa restitution avait été ordonnée par le juge commissaire aux opérations de redressement judiciaire ; la rétention selon l’article 2286 du code civil supposait remplies des conditions qui ne l’étaient pas tenant au caractère certain de la créance ;
- les documents transmis ne démontrent aucun accord entre les parties sur la nature et le montant des réparations ; le montant de la facture avoisine le prix du véhicule lui-même ; les frais de gardiennage découlent d’un tarif fixé unilatéralement pas le garage et ne résultent d’aucun accord ni d’information préalable ; les sommes réclamées sont manifestement excessives.
SUR CE LA COUR
Sur la demande de nullité de l’ordonnance attaquée
En vertu de l’article 455 du code de procédure civile, une décision de justice doit être motivée. Selon l’article 458 du même code, cette exigence est prévue à peine de nullité.
L’exigence de motivation implique que le juge analyse, au moins sommairement, les éléments de preuve produits et ne statue pas par des considérations générales. Elle oblige également le juge à expliquer clairement les raisons qui le conduisent à se déterminer comme il le fait.
Dans l’affaire examinée, le premier juge a motivé sa décision sur la demande de restitution du véhicule litigieux de la manière suivante :
“Attendu qu’il résulte de l’acte introductif d’instance, que la demande a été régulièrement engagée et qu’elle doit être déclarée recevable. Attendu par ailleurs que les pièces produites et examinées aux débats soutiennent les moyens articulés en l’assignation et que la demande doit en conséquence être déclarée bien fondée, sur la restitution du véhicule et ce, sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter de la signification de 1'ordonnance a intervenir”.
Force est de constater que cette motivation n’est qu’une clause de style qui n’indique pas sur quels éléments de preuve le juge s’est fondé ni les raisons pour lesquelles les pièces produites l’ont conduit à estimer que la demande de la société Natixis Lease était fondée.
L’ordonnance attaquée doit, par conséquent, être annulée.
Sur la demande de restitution du véhicule Ford Mondeo immatriculé DR-148-GT
La société Natixis Lease fonde sa demande sur les dispositions de l’article 873 du code de procédure civile en vertu desquelles le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence de ce tribunal, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
La société Natixis Lease justifie avec l’évidence requise en référé et il n’est pas contesté par la société Carrosserie SM qu’elle est bien propriétaire du véhicule automobile en cause.
La société Carrosserie SM produit cependant à son dossier deux ordres de réparation du
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véhicule litigieux dont le premier, en date du 15 juillet 2017, comporte le cachet de la société Voitures Noires et la signature du représentant de celle-ci. Cet élément de preuve corrobore avec l’évidence requise dans cette instance que cette société, qui détenait ce véhicule en vertu d’un contrat de crédit-bail conclu avec la société Natixis Lease, a bien remis le véhicule en cause à la société Carrosserie SM afin que cette dernière le répare.
La société Carrosserie SM communique également la copie de deux messages électroniques transmis à la société Natixis Lease en date des 14 novembre 2017 et 20 février 2018 dans lesquels elle demande à cette dernière sa position en ce qui concerne ce véhicule.
La société Natixis Lease, qui ne conteste pas avoir reçu ces messages, ne justifie pas ni même ne prétend avoir répondu.
Il est, par ailleurs, de jurisprudence établie que le dépôt d’un véhicule auprès d’un garagiste, accessoire à un contrat d’entreprise, est présumé fait à titre onéreux.
Il a également été admis qu’un garagiste disposant d’une créance au titre du gardiennage d’un véhicule est en droit d’exercer un droit de rétention sur le véhicule en cause afin d’obtenir le paiement de sa facture de gardiennage et à opposer ce droit de rétention à tous, y compris au propriétaire du véhicule.
En outre, la circonstance que la société Carrosserie SM ne produit pas de convention conclue ave la société Voitures Noires portant sur le prix du gardiennage de ce véhicule ne saurait exclure avec l’évidence requise en référé qu’elle puisse se prévaloir d’une créance à ce titre déterminée en fonction des tarifs en vigueur dans son établissement ou en usage dans la profession.
Il s’ensuit que la rétention du véhicule Ford Mondeo immatriculé DR-148-GY, en l’état des considérations qui précèdent, ne saurait être tenue pour un trouble manifestement illicite au sens de l’article 873 du code de procédure civile, cela quand bien même le juge commissaire dans sa décision du 12 décembre 2017 a autorisé la société Natixis Lease à
“appréhender à ses frais et en tous lieux ses véhicules”, cette autorisation étant délivrée sous réserve des droits des tiers.
Il sera dit, par conséquent, n’y avoir lieu à référé sur la demande de la société Natixis Lease de restitution de ce véhicule.
Sur la demande de la société Carrosserie SM en paiement d’une provision
La société Carrosserie SM réclame dans le dispositif de ses conclusions la condamnation de la société Natixis Lease au paiement de la somme de 20 960 euros au titre des frais de gardiennage.
Selon l’article 873, alinéa 2, du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce statuant en référé ne peut qu’accorder une provision au créancier lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable.
En admettant, au vu des motifs de ses conclusions dans lesquels l’appelante expose former sa demande en paiement des frais de gardiennage à titre provisionnel, que l’oubli de cette précision dans son dispositif procède d’une simple erreur matérielle, cette demande ne saurait être accueillie alors que la société SM Carrosserie n’est pas tenue à ce stade de restituer le véhicule en cause.
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Il convient de relever, à cet égard, que dans les motifs de ses écritures, elle expose que cette demande ne doit être examinée qu’à titre infiniment subsidiaire, si la restitution du véhicule était ordonnée.
Tel n’ayant pas été le cas, il sera dit n’y avoir lieu à référé sur sa demande en paiement d’une provision à valoir sur les frais de gardiennage.
Sur les dépens et les frais de procédure
La société Natixis Lease qui succombe pour l’essentiel dans cette instance, devra supporter les dépens de première instance et d’appel.
L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Annule l’ordonnance rendue le 11 décembre 2018 par le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny ;
Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de la société Natixis Lease de restitution du véhicule Ford Mondeo immatriculé DR-148-GY ;
Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande en paiement de frais de gardiennage de la société Carrosserie SM ;
Condamne la société Natixis Lease aux dépens de première instance et d’appel ;
Dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.
Le greffier, Le président,
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