Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 3, 14 juin 2019, n° 17/05836

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 - ch. 3, 14 juin 2019, n° 17/05836
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/05836
Décision précédente : Tribunal d'instance de Longjumeau, 7 décembre 2016, N° 11-15-000695
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 3

ARRÊT DU 14 JUIN 2019

(n° , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/05836 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B24L4

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Décembre 2016 -Tribunal d’Instance de LONGJUMEAU – RG n° 11-15-000695

APPELANTE

SA VILOGIA SOCIETE ANONYME D’HLM

SIRET : […]

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège :

[…]

[…]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Ayant pour avocat plaidant Me Anne-Isabelle TORTI avocat au barreau de PARIS, toque P 429, substituée par Me LEE Danbi avocat au barreau de PARIS, toque P 429

INTIME

Monsieur Z X

Né le […] à […]

[…]

porte 215

[…]

Représenté par Me Harald INGOLD, avocat au barreau de PARIS, toque : D1668

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/017982 du 12/07/2017 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PARIS)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Avril 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Philippe JAVELAS, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Daniel FARINA, Président

M. Philippe JAVELAS, Conseiller

Mme Pascale WOIRHAYE, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Viviane REA

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Philippe JAVELAS, Conseiller, le Président étant empêché, et par Viviane REA, Greffière présente lors de la mise à disposition.

***

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par acte sous seing privé du 3 février 2006, la société Ogif a donné à bail à M. et Mme X un logement dépendant d’un immeuble sis […].

Les locataires ont constaté des infiltrations d’eau et l’apparition de moisissures sur les murs de l’appartement.

En janvier 2012, la société Villogia a acquis l’immeuble et succédé à la société Ogif.

Le service « hygiène et sécurité » de la mairie de Brétigny sur Orge, suite à une visite des lieux effectuée le 7 mars 2013, a préconisé des travaux, qui ont été réalisés par la société Vilogia dans le courant du mois d’octobre 2013.

Estimant que les désordres persistaient, les époux X ont fait assigner leur bailleresse devant le tribunal d’instance de Longjumeau, qui, par jugement avant dire droit du 9 juillet 2015, a désigné M. Y en qualité d’expert judiciaire.

L’expert a déposé son rapport en l’état le 25 janvier 2016.

Par jugement du 8 décembre 2016, le tribunal d’instance :

— s’est déclaré compétent pour statuer sur le litige,

— a condamné la bailleresse à payer à M.et Mme X une somme de 34 515 euros en réparation de leur préjudice de jouissance et une indemnité de 1 000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

La société Vilogia a relevé appel de cette décision le 17 mars 2017.

La société Vilogia, appelante, dans le dispositif de ses conclusions notifiées par la voie électronique le 20 mars 2019, demande à la Cour de :

— infirmer le jugement entrepris,

à titre principal

— juger prescrite l’action de M. X pour la période du 2006 au 25 mars 2010,

— dire que la responsabilité de la société Vilogia n’est pas démontrée non plus que le préjudice des consorts X,

— débouter la société Vilogia de ses demandes,

à titre subsidiaire

— constater que la société Vilogia n’est le bailleur des consorts X qu’à compter du 12 janvier 2012,

— dire et juger que les APL perçues par les époux X doivent être déduites du montant du loyer retenu pour chiffrer le préjudice de M. X,

— dire et juger que le préjudice de M. X ne peut dépasser la somme de 1 728, 4 euros,

— condamner les époux X à payer à la société Vilogia la somme de 17 969, 67 euros au titre des loyers impayés,

à défaut

— prononcer la compensation des dettes entre l’indemnité allouée et l’impayé de loyer,

— condamner les consorts X à payer à la société Vilogia une indemnité de 2 000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile,

— condamner les époux X aux dépens.

M. X, intimé, dans le dispositif de ses conclusions, notifiées par la voie électronique le 13 décembre 2018, demande à la Cour de :

à titre liminaire

— déclarer irrecevable le moyen soulevé par la société Vilogia tenant à la prescription d’une partie du préjudice subi par les consorts X,

à titre principal

— débouter l’appelante de ses demandes,

— confirmer la décision déférée en ce qu’elle a retenu la responsabilité de la société Vilogia et fixé le montant des dommages et intérêts à la somme de 34 515 euros,

— condamner la société Vilogia à payer à M. X une somme de 6 637, 50 euros en réparation du préjudice de jouissance subi depuis le 8 décembre 2016, date du jugement attaqué,

— juger que les époux X sont en droit d’opposer l’exception d’inexécution à la société Vilogia dans la mesure où elle ne satisfait pas à son obligation de délivrer un logement décent,

— constater la litispendance et débouter la société Vilogia de sa demande visant à voir compenser les sommes auxquelles elle serait condamnée avec les loyers éventuellement dus par les consorts X au motif qu’une procédure tendant à la résiliation pour absence de règlement des loyers est actuellement pendante devant le tribunal d’instance de Longjumeau,

— condamner la société Vilogia aux dépens et à payer à M. X une indemnité de 2 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du 21 mars 2019.

MOTIFS DE LA DECISION

I) Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la société Vilogia

La société bailleresse soulève la prescription de l’action de M. X sur la période

Elle expose que :

— dès l’année 2008, M. X avait connaissance des faits lui permettant d’exercer une action en responsabilité contractuelle contre la société Ogif,

— l’assignation ayant été délivrée le 26 mars 2015, l’action est prescrite pour les dommages subis antérieurement au 25 mars 2010,

— le premier juge ayant calculé le préjudice de jouissance sur la base de 11 années, soit de 2006 à 2016 inclus, le préjudice représente sur la période prescrite, une somme de 12 551, 10 euros,

— M. X ne peut se prévaloir de la notion de préjudice continu dans la mesure où il s’agit d’une notion propre à la jurisprudence administrative, qui n’est nullement transposable au cas d’espèce,

— il n’y a pas lieu de tenir compte de la date à laquelle la maladie de ses enfants s’est officiellement révélée, dès lors que M. X ne sollicite pas l’indemnisation du préjudice subi par ses enfants,

— dès lors, l’action de M. X est irrecevable pour cause de prescription sur la période allant de 2006 au 25 mars 2010.

M. X réplique que la prescription n’est pas acquise du fait que :

— le préjudice subi est continu et évolutif depuis 2006,

— la maladie développée par les enfants de M. X n’a été révélée officiellement que le 1er octobre 2012,

— la prescription a été interrompue par la reconnaissance de la bailleresse du droit de jouir d’un logement décent de son locataire.

Sur ce

La prescription de l’action contre le bailleur visant la réparation du préjudice de jouissance du locataire se prescrit par cinq ans, en application des dispositions de l’article 2224 du Code civil. Le point de départ de la prescription se situe au jour où le locataire pouvait valablement agir en

indemnisation de son préjudice. Il résulte des dispositions du Code civil que les causes d’interruption de la prescription sont la reconnaissance de dette par le débiteur, la mise en 'uvre d’une mesure conservatoire ou d’une voie d’exécution et la demande en justice ; la délivrance d’une assignation par le locataire au bailleur interrompt donc le délai de la prescription quinquennale.

En l’espèce, le courrier adressé par M. X à la société Ogif le 4 décembre 2010 pour se plaindre de l’état de son appartement en indiquant que la bailleresse était informée depuis plus de deux ans par courriers et par téléphone de l’état d’insalubrité du logement, permet de constater que M. X était informé, à tout le moins depuis l’année 2008 des désordres affectant son appartement et donc, en droit d’agir en responsabilité à l’encontre de la société Ogif.

M. X n’ayant fait délivrer assignation à sa bailleresse que le 26 mars 2015, il s’ensuit que l’action en indemnisation du préjudice de jouissance subi antérieurement au 26 mars 2010 est irrecevable, motif pris de sa prescription.

Même si l’obligation de délivrance d’un logement décent et l’obligation d’entretien des lieux loués en bon état d’usage sont des obligations continues, en l’absence d’acte interrompant la prescription dans les cinq années antérieures, la demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance est irrecevable comme prescrite pour la période antérieure au délai de 5 ans.

Par suite, le fait que le dommage subi du fait des manquements de la bailleresse soit lui aussi continu, n’a aucun effet interruptif de prescription.

Pareillement, M. X est mal fondé à faire valoir que le point de départ de la prescription quinquennale serait la date à laquelle la pathologie asthmatique de ses enfants a été constatée médicalement, dès lors qu’il était en droit d’agir en responsabilité contre sa bailleresse depuis 2008, et que l’intimé sollicite l’indemnisation de son propre préjudice de jouissance et non de celui de ses enfants.

Enfin, les courriers adressés par la société Vilogia aux époux X les 26 décembre 2012 et 11 avril 2013 pour leur faire savoir que les désordres dont ils se plaignaient avaient été constatés, que leurs doléances seraient prises en considération et des travaux réalisés dans leur logement, ne sauraient valoir reconnaissance de responsabilité et, partant, d’un droit à indemnisation des locataires, au sens de l’article 2240 du Code civil. Ces courriers n’ont donc, contrairement à ce que soutient l’intimé, aucun effet interruptif de prescription.

Par suite, l’action en indemnisation de M. X sera jugée irrecevable, motif pris de sa prescription, pour la période allant de 2006, date d’entrée dans les lieux, jusqu’au 25 mars 2010.

II) Sur la responsabilité de la société Vilogia et les demandes indemnitaires de M. X en réparation de son préjudice de jouissance

La société Vilogia fait grief à la décision déférée de l’avoir jugée responsable du préjudice de jouissance causé à M. X et condamnée à payer à son locataire une indemnité de 34 515 euros en réparation de son préjudice de jouissance.

Elle fait valoir, au soutien de sa demande d’infirmation du jugement attaqué de ce chef, que:

— elle a respecté l’ensemble des obligations pesant sur elle en sa qualité de bailleresse, dans la mesure où elle n’a acquis l’immeuble dans lequel les époux X résident qu’en janvier 2012, que seule le précédent propriétaire, la société Ogif, devait répondre des désordres jusqu’à cette date, et qu’en outre, elle a entrepris tous les travaux nécessaires et propres à remédier aux désordres constatés, sans qu’il soit démontré par l’intimé que ces travaux n’ont pas été effectués dans les règles de l’art et que les moisissures sont réapparues depuis les travaux réalisés par la société Vilogia,

— l’expert judiciaire s’est trompé en considérant que l’absence de ventilation et le manque de chauffage responsables des désordres pouvaient être imputés à faute à la société Vilogia. En effet, la société Vilogia a toujours assuré le bon fonctionnement du chauffage, les consorts X ayant même demandé par courrier du 25 janvier 2013 à ce que le chauffage soit réduit du fait la trop grande chaleur qui régnait dans leur appartement. De plus, les reproches de l’expert à propos du manque d’efficacité du système à injection d’air Navair, destiné à éviter les phénomènes de condensation, ne sont pas fondés,

— à titre subsidiaire, il est sollicité une diminution des sommes allouées à M. X, pour tenir compte du fait que la société Vilogia n’était pas bailleresse avant le 1er janvier 2012, qu’il convient de déduire les APL du montant du loyer retenu pour calculer le préjudice, que le préjudice ne peut être estimé à 75 % du montant du loyer, dès lors que l’appartement est habitable bien au-delà de 75 % de sa surface, et doit être ramené à 30 %, de sorte que le préjudice de M. X ne saurait excéder la somme de 1 728, 40 euros.

M. X, intimé concluant à la confirmation du jugement querellé en ce qu’il a retenu la responsabilité de la société Vilogia, réplique que :

— la société Vilogia est mal fondée à soutenir qu’elle n’est pas responsable des désordres survenus antérieurement à son rachat de l’immeuble. En effet, la reprise du bail initial par la société Vilogia implique la transmission à sa charge des obligations dont le bailleur initial était tenu, ce transfert de responsabilité ayant été inséré dans l’acte de vente passé entre les société Ogif et Vilogia,

— le fait, pour la bailleresse, d’avoir commandé la réalisation de travaux ne permet pas de considérer qu’elle a satisfait à son obligation de délivrer un logement décent, les travaux effectués dans le courant du mois d’octobre 2013 n’ayant pas permis de remédier aux troubles constatés, et la carence de la société Vilogia au cours de l’expertise ayant fait obstacle à ce que l’expert judiciaire puisse préconiser les travaux adaptés,

— la réduction du montant de la condamnation sollicitée par la société Vilogia à titre subsidiaire n’est pas fondée, et la réduction de loyer proposée par l’expert équivalente à 75 % du montant du loyer est justifiée au regard du préjudice subi.

Sur ce

L’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 précise que le bailleur est tenu d’assurer une jouissance paisible des lieux à son locataire, de remettre à ce dernier un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation et d’entretenir les locaux en état de servir à l’usage prévu par le contrat et d’y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l’entretien normal des locaux loués.

L’obligation de jouissance paisible est une obligation de résultat qui ne cesse qu’en cas de force majeure (Cass. 3e civ., 29 avril 2009, n°08-12.261, Cervello c/Gerardin) ou de faute de la victime mais présentant les caractéristiques de la force majeure (Cass. 3e civ., 5 janvier 2010, n°08-21.140, Mokhtari c/ Doux).

En l’espèce, il résulte tant du rapport du service hygiène et sécurité de la mairie de Brétigny sur Orge, qui a visité les lieux le 7 mars 2013, que du rapport d’expertise de M. Y, expert judiciaire, que l’appartement occupé par les époux X était affecté de désordres liés à des infiltrations d’eau et à la présence de moisissures.

L’expert souligne dans son rapport que les travaux effectués dans le courant du mois d’octobre 2013 n’ont pas permis de remédier à ces désordres que " la pose de fibre de verre sur les murs n’a fait que camoufler".

Le fait que l’expert judiciaire ait proposé de ne pas retenir de préjudice de jouissance pour les mois d’été et de printemps durant lesquels l’ouverture des fenêtres permet d’assurer une ventilation suffisante, ne suffit pas à caractériser l’exception de fait du locataire, et l’existence d’une faute de ce dernier, présentant les caractéristiques de la force majeure, seule de nature à exonérer la bailleresse de toute responsabilité.

Ces désordres imputés par l’expert judiciaire à une insuffisance de chauffage et de ventilation, qui caractérisent un manquement de la bailleresse à son obligation d’assurer à son locataire une jouissance paisible des lieux, ont affecté la jouissance des lieux loués par M. X.

Par suite, l’intimé est bien fondé à solliciter la réparation du préjudice qu’il a subi.

Toutefois, s’agissant du montant des réparations allouées, il y a lieu de relever, en premier lieu, qu’aucune indemnisation n’est possible pour les dommages causés avant le 26 mars 2010, motif pris de la prescription de la demande du locataire, comme il a été exposé au paragraphe précédent.

Pareillement, la période du 26 mars 2010 au 31 décembre 2011, ne peut donner lieu à indemnisation par la société Vilogia, du fait qu’elle n’était pas propriétaire de l’immeuble pendant cette période. A cet égard, M. X est mal fondé à soutenir que la reprise du bail par la société Vilogia impliquerait la transmission à la charge de cette dernière des obligations dont la société Ogif, précédent propriétaire du bien, était tenue, l’article 23-11, paragraphe 2 de l’acte de vente entre les sociétés Ogif et Vilogia stipulant que " les parties conviennent que le vendeur fera son affaire personnelle sans recours contre l’acquéreur des condamnations financières de toute procédure éventuelle, ayant une cause antérieure à la date d’entrée en jouissance".

En revanche, M. X est bien fondé à solliciter une indemnisation de son préjudice pour la période postérieure au jugement déféré, dans la mesure où, alors que l’expert judiciaire avait relevé que le défaut de ventilation des lieux était imputable à une absence de détalonnage des portes intérieures de l’appartement et à l’insuffisance du système de ventilation « Navair », la bailleresse ne justifie que de la réalisation, postérieurement au jugement attaqué, des travaux de détalonnage des portes au 25 octobre 2018, par la production d’un procès-verbal de travaux.

C’est à bon droit, toutefois, que la bailleresse fait valoir que le loyer à prendre à considération pour indemniser le préjudice de jouissance du locataire est le loyer résiduel, c’est-à-dire, déduction faite du montant des aides personnalisées au logement.

L’expert judiciaire estime que le préjudice est inexistant hors des périodes de chauffe et propose un taux de réfaction du loyer de 75 % durant les périodes de chauffe en faisant valoir une insuffisance de chauffage. Cette insuffisance n’est toutefois pas démontrée au vu du courrier adressé par les époux X à leur bailleresse le 25 janvier 2013 dans lequel il est demandé " une vérification du chauffage« nécessitée par » l’extrême chaleur" relevée dans l’appartement. C’est pourquoi le taux de 75 % retenue pour les périodes durant lesquelles le logement doit être chauffé est excessif.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, le préjudice de jouissance de M. X sera intégralement réparé par la condamnation de la société Vilogia à lui payer une indemnité de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Le jugement déféré sera, par suite, infirmé en ce qu’il a condamné la société Vilogia à payer la somme de 34 515 euros à M. et Mme X, alors même que cette dernière n’est pas dans la cause, et la société Vilogia sera condamnée à payer à M. X une indemnité de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts.

M. X sera débouté de sa demande visant à voir confirmer la décision déférée sur le montant des sommes qui lui ont été allouées en première instance, ainsi que de sa demande en paiement de sommes complémentaires à hauteur de 6 637, 50 euros.

II) Sur la demande de M. X visant à ce que la Cour dise M. X bien fondé à opposer à sa bailleresse l’exception d’inexécution du fait des manquements de cette dernière à son obligation de délivrer un logement décent

Il résulte de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989 que le locataire est tenu de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus et il appartient au locataire de justifier du paiement, en application des dispositions de l’article 1315 ancien du Code civil et 1353 nouveau de ce même code.

Le locataire peut se prévaloir de l’exception d’inexécution pour s’exonérer du paiement du loyer lorsque le bailleur manque à son obligation de délivrance, en mettant à sa disposition un logement qui ne répond pas aux normes de décence prévues par la loi.

Mais il lui faut alors démontrer que l’inexécution par le bailleur de son obligation est de nature, par la gravité de ses manquements, à affranchir le locataire de son obligation corrélative de payer le loyer. Les manquements dénoncés supposent que le locataire se soit trouvé dans l’impossibilité absolue d’utiliser les lieux loués conformément à la destination du bail.

En l’espèce, il est constant que les époux X n’ont jamais cessé d’occuper les lieux. Par suite, ils sont mal fondés à opposer à leur bailleresse l’exception d’inexécution pour se soustraire au paiement de leurs loyers.

III) Sur la demande en paiement de loyers et en compensation formées par la société Vilogia

La société Vilogia expose qu’au mois de septembre 2018, la dette locative des époux X s’élève à la somme de 17 969, 67 euros et qu’elle a engagé une procédure de résiliation du bail, qui est toujours pendante et actuellement en délibéré devant le tribunal d’instance de Longjumeau. Elle sollicite la condamnation des époux X au paiement de cette somme et demande à la Cour de prononcer la compensation entre l’indemnité allouée en réparation du préjudice de jouissance et la dette locative.

M. X conclut au débouté de sa bailleresse en soulevant l’exception de litispendance.

Sur ce

L’exception de litispendance doit être soulevée in limine litis, avant toute défense au fond et ne peut l’être en cause d’appel.

L’exception de procédure soulevée par M. X sera, en conséquence, rejetée.

Pour autant, la demande en paiement de la société Vilogia doit être rejetée, dès lors que le tribunal d’instance de Longjumeau en est saisi et que la décision de cette juridiction, compétente pour en connaître, en premier ressort, est actuellement en délibéré.

Les conditions de la compensation prévues par l’article 1347-1 du Code civil ne sont pas réunies, la créance de loyers de la société Vilogia demeurant litigieuse.

Par suite, la société appelante sera déboutée de ses demandes reconventionnelles en paiement et en compensation.

IV) Sur les demandes accessoires

Chacune des parties succombant partiellement, il sera fait masse des dépens de la procédure d’appel qui seront partagés par moitié entre les parties.

Les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens de première instance, qui comprennent les frais d’expertise, et aux frais irrépétibles non compris dans ces mêmes dépens seront, par ailleurs, confirmées.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement,

Déclare irrecevable, motif pris de sa prescripion, la demande d’indemnisation de M. B X sur la période antérieure au 26 mars 2010;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l’exception de celle ayant condamné la société Vilogia à payer à M. Z X et à Mme B X une somme de 34 515 euros, à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance ;

Statuant à nouveau du chef infirmé

Condamne la société Vilogia à payer à M. Z X une indemnité de 6 000 euros en réparation de son préjudice de jouissance ;

Déboute M. Z X du surplus de ses demandes en paiement en réparation de son préjudice de jouissance et de ses autres demandes, à l’exception de celle visant à voir confirmer le jugement déféré en ce qu’il a retenu la responsabilité contractuelle de la société Vilogia ;

Ajoutant au jugement querellé

Rejette l’exception de litispendance soulevée par M. Z X ;

Déboute la société Vilogia de ses demandes reconventionnelles en paiement de loyers et en compensation ;

Vu l’article 700 du Code de procédure civile, déboute la société Vilogia de sa demande en paiement ;

Vu l’article 700 du Code de procédure civile, déboute M. Z X de sa demande en paiement ;

Fait masse des dépens de la procédure d’appel, qui seront partagés par moitié entre les parties.

LA GREFFIÈRE P/ LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ

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