Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 10, 24 juin 2019, n° 18/05949

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 ch. 10, 24 juin 2019, n° 18/05949
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/05949
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 20 décembre 2017, N° 16/07000
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 15 octobre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 10

ARRÊT DU 24 JUIN 2019

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 18/05949 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B5KF7

Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Décembre 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 16/07000

APPELANT

Monsieur [E] [P]

Demeurant : [Adresse 1]

[Adresse 2]

né le [Date naissance 1] 1970 à PUTEAUX (92)

Représenté par Me Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090

Ayant pour avocat plaidant : Me Catherine OTTAWAY de la SELARL HOCHE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0061

INTIMÉS

— Monsieur [M] [X]

Demeurant : [Adresse 3]

[Adresse 4]

né le [Date naissance 2] 1967 à CASABLANCA (MAROC)

— SARL A&M FINANCES

Ayant son siège social : [Adresse 3]

[Adresse 4]

N° SIRET : 520 374 075 (TOULON)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

— SAS COMPAGNIE DE CONCEPTION ET DE CONSTRUCTION ('CCC')

Ayant son siège social : [Adresse 5]

[Adresse 6]

N° SIRET : 802 292 847 (TOULON)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentés par Me Cédric SEGUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2149

Ayant pour avocate plaidante : Me Ornella FITOUSSI de la SELAS SELAS CS AVOCATS ASSOCIES, avocate au barreau de PARIS, toque : E0227, substituée par Me Angeline LABBE, avocate au barreau de PARIS toque : D2149

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 06 Mai 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère, rédacteur,

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l’audience par Madame Sylvie CASTERMANS dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame Cyrielle BURBAN

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Edouard LOOS, Conseiller et par Cyrielle BURBAN, Greffière présent lors du prononcé.

FAITS ET PROCÉDURE

La société Groupe Maisonbois, (dénommée GMB)société de construction de maisons en bois et en matériaux traditionnels, était en 2013 détenue par 36 actionnaires, parmi lesquels la sarl Pap Finances, détenue à 100 % par M [E] [P] et M [M] [X].

Selon contrat de prestation de services daté du 25 novembre 2013 et conclu pour une durée de 9 mois renouvelables, M [M] [X] a confié à [E] [P] diverses missions s’inscrivant dans son projet d’acquisition de la totalité des actions de la société Groupe Maisonbois.

La rémunération des missions de conseil et d’assistance dans les discussions et négociations avec les autres associés de la société et dans la recherche et le montage des financements nécessaires à la réalisation de l’opération de reprise, était de 850 000 euros ht en cas de succès, selon un échéancier entre le 10 décembre 2014 et le 10 février 2017.

Selon acte du 26 juin 20l4, l’intégralité des actions de la société Maisonbois Holding a été cédée par les actionnaires, représentés par M [E] [P], à la société Compagnie de conception et de construction, à laquelle M [M] [X] s’est substitué.

Par avenant au contrat de prestation de services en date du 26 juin 2014, Messieurs [X] et [P] ont acté que, suite aux conseils et à l’assistance de ce dernier dans les discussions et négociations avec les autres associés de la société Groupe Maisonbois et dans la recherche et le montage des financements nécessaire à l’opération de reprise, [M] [X] avait obtenu l’accord de la collectivité des associés sur son offre, les concours bancaires et le déblocage des fonds lui permettant d’acquérir, via sa société de reprise, 100% du capital et des droits de vote de la société Groupe Maison bois. M. [X] s’est reconnu redevable de la commission de succès de 850 000 euros ht, et s’est engagé à substituer aux garanties initiales de paiement un certain nombre de garanties supplémentaires.

Par lettres recommandées avec avis de réception des 1er et 11 décembre 2014, M [E] [P] a mis en demeure M [M] [X] de procéder au nantissement des parts sociales de la société A&M Finances à titre de garantie et de lui payer la somme de 240 000 euros TTC correspondant à la première échéance du 10 décembre 2014.

Selon acte d’huissier de justice du 31 décembre 2014, M [M] [X] et la SARL A&M Finances ont assigné M [E] [P] devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de faire annuler le contrat de prestation de services du 25 novembre 2013 et son avenant du 26 juin 2014 . La société Compagnie de conception et de construction est intervenue volontairement à l’instance.

Par jugement du 15 avril 2016, le tribunal de commerce de Paris a pris acte de l’accord des parties pour porter le litige devant le tribunal de grande instance de Paris

Par acte d’huissier de justice du 8 janvier 2015, M [E] [P] a saisi le président du tribunal de grande instance de Toulon statuant en référé,et a obtenu la condamnation de M [M] [X] à lui payer la somme de 240 000 euros à titre provisionnel au titre de la première échéance prévue au contrat litigieux, outre un intérêt de 5 % à compter du 10 décembre 2014, et à exécuter les engagements pris à l’article 3 de l’avenant du 26 juin 2014.

Par arrêt du 21 janvier 2016, la cour d’appe1 d’Aix-en-Provence a infirmé l’ordonnance rendue le 3 mars 2015 au regard de la contestation sérieuse existant sur la demande de provision formée par ce dernier.

Le 24 avril 2015, M [E] [P] a de nouveau saisi le président du tribunal de grande instance de Toulon statuant en référé aux fins de voir condamner M [M] [X] à lui verser la somme de 300 000 euros à titre provisionnel au titre de la deuxième échéance prévue au contrat litigieux, outre un intérêt de 5% à compter du 10 février 2015.Par ordonnance en date du 21 juillet 2015, le juge des référés a fait droit aux demandes de M [E] [P].

Par jugement en date du 21 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Paris a :

— prononcé la nullité du contrat de prestation de services daté du 25 novembre 2013 et de son avenant du 26 juin 2014, conclus entre Monsieur [M] [X] et Monsieur [E] [P], pour absence de cause ;

— condamné M [E] [P] à payer à Monsieur [M] [X], à la SARL A&M Finances et à la SAS CCC la somme de 8 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné Monsieur [E] [P] aux dépens ;

— débouté Monsieur [E] [P] de l’intégralité de ses demandes;

— ordonné l’exécution provisoire de la présente décision.

M [E] [P] a interjeté appel du jugement.

Par conclusions signifiées le 11 avril 2019, M [E] [P] demande à la cour de :

— infirmer entièrement le jugement rendu le 21 décembre 2017 par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu’il a annulé le contrat de prestation de services signe entre Monsieur [E] [P] et Monsieur [M] [X] sur la base de motifs erronés en fait et en droit et par comparaison avec des actes qui n’étaient plus en vigueur et dont le champ d’application était sans rapport avec le contrat dont l’exécution est demandée ;

— débouter la société A&M Finances, la société Compagnie de conception et de construction et Monsieur [M] [X] de toutes leurs demandes,

Statuant à nouveau,

— dire que le contrat de prestation de services signé entre Monsieur [E] [P] et M [M] [X] est valable et doit être exécuté,

— condamner solidairement la société A&M Finances, la société Compagnie de conception et de construction et M [M] [X] à payer à M [E] [P] la somme de 850 000 euros HT en principal,

— condamner solidairement la société A&M Finances, la société Compagnie de conception et de construction et M [M] [X] à payer à M [E] [P] :

* les intérêts au taux contractuel depuis la première mise en demeure du 1er décembre 2014 avec capitalisation des intérêts par application des dispositions de l’ancien article 1154 du code civil,

* la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts,

* la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

— condamner solidairement la société A&M Finances, la société Compagnie de conception et de construction et M [M] [X] aux entiers dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés par Maître Pascale Flauraud, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées le 5 avril 2019, M [M] [X], la Société A&M Finances, et la société Compagnie de conception et de construction demandent à la cour de :

A titre principal :

— prononcer la nullité du contrat litigieux pour absence de cause.

A titre subsidiaire :

— prononcer la nullité du contrat litigieux pour contrainte morale.

A titre plus subsidiaire

— prononcer la nullité du contrat litigieux pour cause illicite et simulée.

A titre extra subsidiaire,

— dire et juger qu’il existe une disproportion significative entre les obligations des parties au contrat et,

— prononcer, en conséquence, la réduction du prix des prestations à 1 euro et dire injustifiée la mise en 'uvre de garanties.

En tout état de cause :

— condamner M [E] [P] au paiement de la somme de 30 000 euros euros à M [M] [X], à la société A&M Finances et à la société CCC au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

SUR CE

Sur la nullité pour absence de cause du contrat de prestation du 25 novembre 2013

M [P] soutient que le pacte d’actionnaires du 9 juillet 2008 n’était plus en vigueur depuis le 4 juillet 2013, que la convention du 4 juillet 2013 était distincte. Il précise que la convention du 9 juillet 2008 a été conclue entre la société PAP Finances et la société Groupe Maisonbois, que M [P] n’était pas partie à cette convention, à la différence du contrat de prestation de services daté du 25 novembre 2013, où il était directement partie.

Il souligne que la convention de 2008 a été conclue dans l’intérêt de la société Groupe Maisonbois contrairement à la convention du 25 novembre 2013 conclue au profit de M [X].

Il soutient que le contrat de prestation de services daté du 25 novembre 2013 n’est pas dépourvu de cause, qu’il contient des contreparties distinctes du pacte d’actionnaires de 2008. Il soutient avoir exécuté les prestations prévues au contrat de prestation de services daté du 25 novembre 2013, avoir rempli sa mission d’assistance et de conseil afin que l’offre d’acquisition de M [X] de la totalité des actions de la société Groupe Maisonbois soit acceptée.

M [X], la société A&M Finances et la société Compagnie de conception répliquent que le contrat est nul pour absence de cause, que M [P] devait négocier avec les associés de la société Groupe Maisonbois afin que l’offre d’acquisition de M [X] de la totalité des actions de la société Groupe Maisonbois soit acceptée ; que ce contrat avait aussi pour objet la recherche et l’obtention de financements nécessaires à l’opération de reprise par M [X] ; que la mission de négociation avec les associés était déjà confiée à M [P] au titre du pacte d’actionnaires et de la convention d’assistance en date du 9 juillet 2008, renouvelés le 4 juillet 2013, par l’intermédiaire de la société PAP Finances détenue à 100% par M [E] [P], qui prévoyaitt une rémunération de 100 000 euros pour les prestations effectuées .

Ceci exposé,

La cause de l’obligation réside dans l’objectif poursuivi par les parties.

Il ressort des pièces au dossier que la convention de 2008 entre associés de la société Maisons boisholding, a été conclue entre la société PAP Finances, représentée par M. [P] et la société Maisonbois Holding. L’objet du pacte visait en substance les modalités de détention des actions et autres valeurs mobilières de la société, les modalités d’information des partenaires financiers et les modalités de participation des associés.

Le but poursuivi était le développement du groupe et de consolider par croissance interne ou externe sa position sur le marché de la construction des maisons à ossature bois. La convention y afférente consistait en une assistance et conseils sur le développement du groupe.

En 2009, la société Maisonsbois Holding faisait l’acquisition d’une société [Adresse 7] (MDM) et en 2010, M. [X] était désigné président de cette société.

En 2012, le cabinet Deloitte Conseil Finance recevait mission de contacter des investisseurs potentiels pour céder le groupe Maisonsbois en totalité .

En 2013, seule était réalisée la cession du pôle nord -est. En juillet 2013, le groupe Maisonbois (GMB) était alors détenu par une trentaine d’actionnaires dont M. [X] à hauteur de 4, 89 %.

Le 4 juillet 2013, un nouveau pacte était conclu entre GMB avec PAP Finances, partenaire financier meneur, représenté par M. [P], et envisageait de réaliser à court terme une opération de cession du groupe.

Le pacte du 4 juillet 2013 désignait M [X], en qualité d’associé opérationnel. L’objet du pacte précisait qu’il annulait tous actes ou accords antérieurs intervenus entre les parties ou certaines d’entre elles. Au titre 1-3, il était indiqué que la société concluait une convention d’assistance signée avec le partenaire meneur d’une durée d’ un an, moyennant le versement d’un honoraire annuel de 100 000 euros ht. Cette convention du 4 juillet 2013, contractée par la société Maisonsbois (GMB), rémunérait la société PAP Finances pour des démarches et assistance administratives.

La convention du 25 novembre 2013, intitulée 'contrat de prestation de services’ signée entre M. [X] 'le client’ et M [P], 'le prestataire', précisait qu’ils étaient associés de la société Groupe Maisonsbois qui détient 100 % du capital de la société Maisonsbois Holding et 100% des droits de vote de la société Groupe MDM.

Aux termes de cette convention, M. [X] souhaitait racheter les titres de la société GMB. L’offre de M.[X] portait sur 95, 11 % du capital. Il fallait l’approbation de tous les associés. Il était sollicité le concours de M [P] afin de le conseiller et de convaincre les actionnaires représentant 95, 11 % du capital qu’ils donnent leur accord.

Le contrat signé entre M. [P] et M. [X] le 25 novembre 2013, confiait à M. [P] une prestation d’assistance personnelle au profit de M. [X] en sa qualité de potentiel acquéreur des titres de la société GMB. Le contrat était conclu sur une durée de 9 mois d’octobre 2013 à juin 2014 .

La cause du contrat pour M. [X] était de pouvoir racheter les titres de la société GMB et celle de M. [P] était d’être rémunéré.

Il suit de ces éléments que la convention d’assistance de 2008, concernait la société PAP Finances représentée par M. [P], et non M. [P] à titre personnel et Maisonsbois Holding et que les prestations, décrites dans la convention de 2008, étaient différentes de celles prévues en 2013 ; que la convention de prestation de services datée du 25 novembre 2013, finalisée au mois de mai 2014, se rattachait directement à l’offre de reprise de M. [X] proposée le 25 octobre 2013.

Aux termes de la clause de substitution, il était précisé que le client, M [X], pouvait-se substituer une société nouvelle à constituer à l’effet de réaliser l’opération de reprise directement ou indirectement dont il sera associé ou représentant légal.

Par conséquent, contrairement à ce qui est allégué par M [X], la société A&M Finances et la société Compagnie de conception le contrat de prestation de services daté du 25 novembre 2013, n’est pas dépourvu de cause. Le jugement sera réformé sur ce point.

Sur nullité du contrat de prestation de services daté du 25 novembre 2013 pour contrainte morale

M [X], la société A&M Finances, et la société Compagnie de conception prétendent que le consentement de M [X] au contrat de prestation de services daté du 25 novembre 2013 a été vicié par une contrainte morale assimilable à la violence au sens de l’ancien article 1109 du code civil. Il soutiennent que le pacte d’actionnaires renouvelé le 4 juillet 2013 prévoit que les actionnaires de la société Groupe Maisonbois ne peuvent céder leurs actions sans l’autorisation de M [P], mandataire des actionnaires, que M [P] aurait refusé de signer le contrat de cession des actions de la société Groupe Maisonbois sans négociation d’un 'prix de sortie'. Ce prix de sortie étant la rémunération de 850 000 euros prévue au contrat de prestation de service du 25 novembre 2013 ; que M [P] a abusé de sa position en exerçant des menaces, constituant une violence en matière de transaction du fait de l’état de nécessité et de dépendance de M [X] à l’égard de M [P].

M [P] objecte ne pas avoir reçu de mandat pour représenter les associés de la société Groupe Maisonbois si l’offre ne portait pas sur 100 % des titres de la société ; que chacun des associés disposait d’un droit de veto dès lors que la cession ne concernait pas 100 % du capital et que l’offre de M [X] ne portait que sur 94, 11 % du capital.

Qu’en outre, le consentement de M [X] n’a pas été vicié, qu’en tant que professionnel expérimenté, il possédait toutes les compétences pour comprendre la portée de son engagement.

Ceci exposé,

Le contrat conclu du 25 novembre 2013, ayant été signé entre M. [P] et M. [X], assisté de son conseil, la cour considère que dans ces circonstances et en sa qualité de professionnel expérimenté, M. [X] disposait des compétences nécessaires pour comprendre la portée de son engagement.

En outre, il ressort des éléments du dossier que chacun des associés disposait d’un droit de veto, dès lors que la cession ne concernait pas 100 % du capital. Or l’offre de M [X] portait sur 94,11 % du capital, dans ces conditions, l’abus de pouvoir de M. [P] n’est pas établi. Le moyen sera rejeté

Sur la nullité du contrat de prestation de services daté du 25 novembre 2013 pour cause illicite et simulée

M [X], la société A&M Finances, et la société Compagnie de conception soutiennent que la cause du contrat de prestation de service du 25 novembre 2013 est une cause dissimulée et illicite prohibée par l’ancien article 1131 du code civil. Ils font valoir que la rémunération prévue par ce contrat a en réalité vocation à compenser les pertes subies par M [P] liées à la cession des actions de la société Groupe Maisonbois. Cette cause dissimulée aboutit à détourner l’usage d’un contrat de prestation de services, en vue d’organiser un paiement occulte ne correspondant à aucune contrepartie, extorqué par l’abus d’une position dominante résultant du mandat dont M [P] bénéficiait.

M [P] réplique que la cause du contrat est l’obtention d’une rémunération, ce qui ne constitue pas une cause dissimulée et illicite.

Ceci exposé,

Les parties ont conclu un contrat aux termes duquel le client a confié la réalisation de diverses missions au prestataire afin de permettre la reprise de la société.

Le contrat de prestation mentionne l’étendue des missions consistant d’une part, à présenter, expliquer, négocier et obtenir l’accord de tous les associés sur l’offre proposée par M [X], d’autre part, à préparer la rédaction du dossier, superviser le business plan, la 'management présentation', suivre la phase exécution auprès des banques, négocier et assurer la phase de 'closing'.

Le contrat précise que la mission confiée n’est pas celle dévolue à un avocat, à un commissaire aux comptes ou à un commissaire aux apports, mais que le prestataire s’engage à travailler avec ces interlocuteurs pour l’opération de reprise.

Au regard de la lettre du contrat , des pièces versées aux débats, et notamment des emails échangés entre les parties, des justificatifs produits, M. [P] justifie de l’accomplissement de ses différentes prestations tandis que les allégations de M. [X], de la société A&M Finances et de la société Compagnie de conception selon lesquelles la cause du contrat de prestation de service du 25 novembre 2013 est une cause dissimulée ne sont étayées par aucun élément probant.

De plus, l’absence de prestations reprochée à M. [P], notamment sur le plan du financement, est démentie par la preuve que M. [P] a entrepris de nombreuses démarches et négociations pour atteindre l’objectif du closing fixé au 31 mars 2014, que cette date de cession n’a pu être concrétisée par le fait de M. [X], qui perdait le support financier de deux investisseurs à cette date, mais avec l’aide et l’assistance de M. [P], qui a trouvé une solution de financement de remplacement pour permettre la cession.

Sur la réduction de la rémunération prévue par le contrat de prestation de service du 25 novembre 2013

A titre extra subsidiaire, M [X], la société A&M Finances, et la société Compagnie de conception prétendent que dans la mesure ou M [P] n’a réalisé aucune prestation au titre du contrat de prestation de service du 25 novembre 2013, il existe un déséquilibre entre les obligations des parties, car M [X] est dans l’obligation de payer 850 000 euros à M [P] alors qu’il n’a bénéficié d’aucune prestation.

Ils sollicitent la réduction du prix de la commission de succès à la somme de 1 euro.

M [P] objecte que le montant de la commission de succès n’a pas à être réduit puisque la totalité des prestations a été effectuée, comme en témoigne la signature de l’avenant au contrat de prestation de service le 26 juin 2014.

Ceci exposé,

La convention signée le 25 novembre 2013 comporte un article 6 aux termes duquel il est prévu qu’en cas réalisation de l’opération de reprise le prestataire percevra une commission de succès de 850 000 euros ht.

Un avenant au contrat du 25 novembre 2013 a été signé entre le mêmes parties, le 26 juin 2014. Aux termes de cet avenant, il est précisé que le prestataire a conseillé et assisté le client dans les discussion et négociations avec les associés, que ces derniers ont accepté l’offre et le montage des financements nécessaires à la reprise et qu’en date de ce jour, la société de reprise a obtenu les concours bancaires nécessaires.

Il s’en déduit que la commission de succès a été reconnue comme étant réalisée.

Par conséquent, la cour infirme le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau déboute M [X], la société A&M Finances, et la société Compagnie de conception de toutes leurs prétentions, juge que le contrat de prestation de services signé entre M [E] [P] et M [M] [X] est valable et doit être exécuté.

la société A&M Finances, la société Compagnie de conception et de construction et M [M] [X] seront solidairement condamnés à payer à M [E] [P] la somme de 850 000 euros HT en principal, majorés des intérêts au taux légal depuis la première mise en demeure du 1er décembre 2014 avec capitalisation des intérêts par application des dispositions de l’ article 1343-2 du code civil.

M [E] [P] qui ne justifie pas d’un préjudice distinct de celui qui sera réparé par l’octroi des intérêts moratoires, sera débouté de sa demande de dommages et intérêts.

La société A&M Finances, la société Compagnie de conception et de construction et M [M] [X], parties perdantes, au sens de l’article 696 du code de procédure civile, seront solidairement tenus de supporter la charge des dépens.

Il paraît équitable d’allouer à M [E] [P] la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles qu’il a dû exposer en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

CONDAMNE solidairement la société A&M Finances, la société Compagnie de conception et de construction et M [M] [X] à payer à M [E] [P] la somme de 850 000 euros HT en principal, avec intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2014 ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;

CONDAMNE solidairement la société A&M Finances, la société Compagnie de conception et de construction et M [M] [X] à payer à M [E] [P] la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toutes les autres demandes ;

CONDAMNE solidairement la société A&M Finances, la société Compagnie de conception et de construction et M [M] [X] aux entiers dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

C. BURBAN E. LOOS

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