Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 15 décembre 2020, n° 20/08263

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 2 - ch. 1, 15 déc. 2020, n° 20/08263
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 20/08263
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 19 février 2019, N° 18/06035
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 2 – Chambre 1

ARRET DU 15 DECEMBRE 2020

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/08263 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CB6KP

Décision déférée à la cour : jugement du 20 février 2019 – Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 18/06035

APPELANTE

SAS UAPE HOLDING USINES […]

agissant poursuites et diligences de son Président

[…]

[…]

représentée par et ayant pour avocat plaidant Me Vincent RIBAUT de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

INTIMES

Maître Z Y

[…]

[…]

ET

SA MMA IARD

prise en la personne de ses représentants légaux

[…]

[…]

ET

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

venant aux droits de COVEA RISKS, prise en la personne de ses représentants légaux

[…]

[…]

représentés par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034, et ayant pour avocat plaidant Me Jean-Pierre CHIFFAUT MOLIARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C1600

SCP CANET

en qualité de liquidateur judiciaire de la société UAPE HOLDING USINES […]

[…]

[…]

défaillante

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été appelée le 20 octobre 2020, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant la cour composée en double rapporteur de :

Mme Nicole COCHET, première présidente, chargée du rapport

Mme Estelle MOREAU, Conseillère,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

Mme Nicole COCHET, Première Présidente

Mme Marie-Françoise D’ARDAILHON MIRAMON, Présidente

Mme Estelle MOREAU, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Djamila DJAMA

ARRÊT :

— réputé contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Nicole COCHET, Première présidente de chambre, et par Djamila DJAMA, Greffier présent lors du prononcé.

*****

Vu le jugement rendu le 21 décembre 2018 par le tribunal de commerce de Pontoise ayant prononcé la liquidation judiciaire de la société Uape Holding usines applications poly expanses (ci-après, la société Uape Holding) et désigné la SCP Canet en qualité de liquidateur judiciaire de celle-ci ;

Vu le jugement rendu le 20 février 2019 par le tribunal de grande instance de Paris ayant débouté la société Uape Holding de ses demandes au titre de la responsabilité professionnelle de son avocat, M. Z Y, et de ses assureurs la société MMA Iard et la la société MMA Iard assurances mutuelles ;

Vu l’appel contre cette décision interjeté le 18 avril 2019 par la société Uape Holding 'agissant poursuites et diligences de son président' ;

Vu l’assignation en intervention forcée de la SCP Canet à la procédure d’appel délivrée à la requête de la société Uape Holding le 15 juillet 2019 ;

Vu les conclusions d’incident déposées le 8 octobre 2019 devant le conseiller de la mise en état par M. X et les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, soulevant l’irrecevabilité de l’appel comme étant formé par une personne dépourvue du droit d’agir en justice au nom de la société Uape Holding ;

Vu l’ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état le 16 juin 2020 ;

Vu la requête en déféré notifiée et déposée le 29 juin 2020 par la société MMA Iard, la société MMA Iard assurances mutuelles et M. Z X demandant à la cour, au visa des articles 117 et 914 du code de procédure civile de :

— réformer l’ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état le 16 juin 2020,

— déclarer l’appel irrecevable comme ayant été formé par une personne dépourvue du droit d’agir en justice au nom de la société Uape Holding,

— condamner la société Uape Holding aux entiers dépens et à leur payer à chacune la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions notifiées et déposées le 19 octobre 2020 par la société Uape Holding usines applications poly expanses (ci-après Uape Holding) aux fins de voir :

— déclarer M. Y et ses assureurs mal fondés en leur recours,

— confirmer l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

— condamner solidairement M. Y et ses assureurs à lui payer la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE,

Sur la recevabilité de l’appel :

Le conseiller de la mise en état a rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de droit à agir en justice au nom de la société Uape Holding soulevée par M. Y et ses assureurs en retenant que :

— l’action engagée au nom de ladite société est une action en responsabilité visant à obtenir l’indemnisation du préjudice subi par elle du fait d’une erreur de procédure commise par son avocat,

— l’ouverture de la procédure collective de la société Uape Holding a été sollicitée par l’avocat en cause et le passif de celle-ci est essentiellement constitué des honoraires de ce dernier que la société

refuse de payer en raison de la faute commise,

— une éventuelle créance en dommages et intérêts envers son avocat viendrait par l’effet de la compensation éteindre totalement ou partiellement la dette d’honoraires de la société Uape Holding et aurait ainsi une incidence sur son passif dont le non-paiement est à l’origine de la procédure collective dont elle fait l’objet.

Les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles et M. Z Y soulèvent à nouveau devant la cour l’irrecevabilité de l’appel exercé par le 'président’ de la société Uape Holding dépourvu de qualité à agir au nom de ladite société en ce que :

— les dirigeants sociaux maintenus en fonction n’ont pas qualité pour intenter une action ou exercer une voie de recours au nom de la société mise en liquidation judiciaire sauf pour exercer un droit propre ou personnel et non pas une action à caractère patrimonial,

— l’annulation par la cour d’appel pour irrégularité de procédure du jugement rendu le 13 juin 2018 par le tribunal de commerce de Pontoise n’a aucune incidence sur la procédure collective prononcée par le même tribunal le 21 décembre 2018 et toujours en cours,

— au surplus, le rapport du liquidateur met en évidence la commission plusieurs infractions par M. A B en sa qualité de dirigeant de la société Uape Holding.

La société Uape Holding réplique que :

— le défaut de 'qualité’ du président de la société Uape Holding pour représenter celle-ci ne constitue pas la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité d’une partie à agir visée à l’article 122 du code de procédure civile, mais un défaut de pouvoir constitutif d’une nullité au fond en application de l’article 117 du même code,

— le jugement de liquidation judiciaire d’une société n’entraîne plus sa dissolution de plein droit, de sorte que le dirigeant de cette société conserve le pouvoir de la représenter en dépit du jugement d’ouverture,

— une partie en liquidation peut contester seule une décision qui a une incidence sur son passif, la mise en cause du liquidateur représentant la personne morale étant cependant nécessaire,

— l’appel de la décision rendue par le tribunal de grande instance de Paris le 20 février 2019 aura une incidence sur le passif de la société Uape Holding, dès lors qu’il est sollicité la condamnation de son avocat, M. X, et de ses assureurs au paiement de dommages et intérêts en raison des fautes professionnelles commises par lui, lesquels se compenseront avec la créance d’honoraires de ce dernier fixée par le bâtonnier et composant exclusivement le passif de la société Uape Holding,

— le liquidateur a régulièrement été appelé en la cause.

Aux termes des dispositions de l’article 117 du code de procédure civile, 'Constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l’acte :

Le défaut de capacité d’ester en justice ;

Le défaut de pouvoir d’une partie ou d’une personne figurant au procès comme représentant soit d’une personne morale, soit d’une personne atteinte d’une incapacité d’exercice;

Le défaut de capacité ou de pouvoir d’une personne assurant la représentation d’une partie en justice'.

Le défaut de pouvoir du président figurant au procès comme représentant une société constitue une irrégularité au fond affectant la validité de l’acte.

Selon l’article L.641-9 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 12 mars 2014,

I.-Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur.Toutefois, le débiteur peut se constituer partie civile dans le but d’établir la culpabilité de l’auteur d’un crime ou d’un délit dont il serait victime.

Le débiteur accomplit également les actes et exerce les droits et actions qui ne sont pas compris dans la mission du liquidateur ou de l’administrateur lorsqu’il en a été désigné.

II. – Lorsque le débiteur est une personne morale, un mandataire peut être désigné, en cas de nécessité, au lieu et place des dirigeants sociaux par ordonnance du président du tribunal sur requête de tout intéressé, du liquidateur ou du ministère public.

Il résulte de ces dispositions que le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur, à moins qu’il ne s’agisse de droits attachés à la personne du débiteur ou de droits propres.

Nonobstant son dessaisissement de l’administration et de la disposition de ses biens , le débiteur peut exercer seul une voie de recours contre une décision qui a une incidence sur son passif, mais la régularisation de la procédure par la mise en cause du liquidateur est nécessaire.

La déclaration d’appel a été interjetée le 18 avril 2019 par la société Uape Holding 'ayant son siège social […], agissant poursuites et diligences de son président domicilié en cette qualité audit siège'.

Elle porte sur le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 20 février 2019, ayant débouté la société Uape Holding, la société société SCP Canet, en sa qualité de mandataire judiciaire de la société Uape Holding et la Selarl V&V, prise en la personne de M. C D en sa qualité d’administrateur de celle-ci, de leurs demandes fondées sur la responsabilité professionnelle de M. Y, avocat de la société Uape Holding, et ses assureurs, au titre d’une erreur manifeste de procédure quant au choix de la juridiction ayant privé la société Uape Holding d’une chance certaine d’obtenir l’indemnisation de la rupture brutale de leurs relations commerciales établies par la société Alstom.

L’action en responsabilité professionnelle exercée par la société Uape Holding à l’égard de son avocat et son assureur tend à obtenir réparation d’un préjudice résultant d’une faute commise à l’endroit de la société Uape Holding. La décision dont appel a une incidence sur le passif de la société Uape Holding, constitué pour l’essentiel des honoraires de son avocat que celle-ci refuse de payer et qui pourraient venir se compenser avec les éventuels dommages et intérêts pouvant être prononcés au titre de la faute de l’avocat, de sorte que celle-ci a un droit propre à interjeter appel du jugement susvisé à titre de mesure conservatoire. Il est justifié d’une régularisation de la procédure par l’assignation en intervention forcée du liquidateur à la procédure.

L’appel est donc recevable.

L’ordonnance est confirmée.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

M. Y et ses assureurs échouant en leurs prétentions seront condamnés aux dépens.

Aucune considération d’équité ne justifie la condamnation de ceux-ci sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME l’ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Paris le 16 juin 2020,

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE la société Uape Holding usines applications poly expanses de sa demande à ce titre,

CONDAMNE M. Z X et les société MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles aux dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

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