Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 4 février 2021, n° 18/02314

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 5, 4 févr. 2021, n° 18/02314
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/02314
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Paris, 20 décembre 2017, N° F16/12614
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le

 : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 5

ARRÊT DU 04 FÉVRIER 2021

(n° 2021/ , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/02314 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B5B3H

Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Décembre 2017 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F16/12614

APPELANT

Monsieur Z X

[…]

[…]

Représenté par Me Drossoula PAPADOPOULOS, avocat au barreau de PARIS, toque : E2095

INTIMEE

SAS SOLUNE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège sis

[…]

[…]

Représentée par Me Marianne DUFOUR CARBONI, avocat au barreau de PARIS, toque : E1174

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Octobre 2020, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Nelly CAYOT, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre,

Madame Nelly CAYOT, Conseillère

Madame Lydie PATOUKIAN, Conseillère

Greffier : Madame Cécile IMBAR, lors des débats

ARRÊT :

— contradictoire,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, prorogé à ce jour,

— signé par Madame Catherine BRUNET, Présidente et par Madame Cécile IMBAR, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSE DU LITIGE

A compter du 2 février 2011, M. Z X a exercé la fonction de vendeur au bénéfice de la société Tsuki B C devenue SAS Solune.

Le 31 août 2016, la SAS Solune a mis fin aux relations contractuelles.

Estimant ne pas être rempli de ses droits, M. X a saisi le conseil de prud’hommes de Paris afin d’obtenir la requalification des relations contractuelles en contrat de travail et la condamnation de la SAS Solune au versement de diverses sommes au titre de la rupture de son contrat de travail.

Par jugement du 21 décembre 2017 auquel il convient de se reporter pour l’exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, le conseil de prud’hommes de Paris a :

— débouté M. X de l’ensemble de ses demandes ;

— débouté la SAS Solune de sa demande reconventionnelle ;

— condamné M. X aux dépens de l’instance.

M. X a régulièrement relevé appel du jugement le 1er février 2018.

Aux termes de ses dernières conclusions d’appelant, transmises et notifiées par le réseau privé virtuel des avocats (RPVA) le 19 mars 2018, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens conformément à l’article 455 du code procédure civile, M. X demande à la cour de :

— infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Paris du 21 décembre 2017 dans toutes ses dispositions,

en conséquence,

— requalifier la relation de travail en un contrat à durée indéterminée ;

— dire et juger la rupture imputable à l’employeur ;

en conséquence,

— condamner la société Solune à lui verser les sommes suivantes :

* 23 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 6 900 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 690 euros à titre d’indemnité de congés payés sur préavis,

* 10 489 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés,

* 3 162 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

* 2 300 euros à titre d’indemnité de requalification,

* 2 300 euros à titre de dommages et intérêts pour la perte des heures de formation,

* 13 800 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

* remise sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document d’une attestation rectificative pour la revalorisation de ses droits auprès de pôle emploi ainsi que l’ensemble des documents de fin de contrat (certificat de travail, solde de tout compte),

* remise sous astreinte de 100 euros par jour de retard de l’ensemble des bulletins de salaire sur la période allant du mois de février 2011 au mois d’août 2016,

y ajoutant,

— condamner la SAS Solune à lui payer la somme de 3 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions d’intimée, transmises et notifiées par RPVA le 8 octobre 2019, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la SAS Solune demande à la cour de :

— confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Paris le 21 décembre 2017 en ce qu’il a débouté M. X de l’ensemble de ses demandes ;

— à titre infiniment subsidiaire, ramener les demandes indemnitaires de M. X à de plus justes proportions ;

— en tout état de cause, condamner M. X à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner M. X aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 23 octobre 2019.

MOTIVATION

Sur la relation de travail

M. X soutient que, du mois de février 2011 au mois d’août 2016, il a exercé les fonctions de vendeur pour la société Solune au sein des deux boutiques B C situées respectivement dans le 3e et le 11e arrondissement de Paris dans le cadre d’un contrat de travail caractérisé par le pouvoir de direction, de contrôle et de discipline de la société Solune à son égard.

La société Solune s’oppose à l’existence d’un contrat de travail et elle fait valoir que M. X a créé sa société commerciale Dotse – dont il est le gérant – en 2007 soit plusieurs années avant qu’un contrat de prestation de service entre les deux sociétés ne soit signé en 2011 lorsque M. X a débuté ses prestations de vendeur free-lance au sein des boutiques B C. Elle fait

également état de ce que la société Dotse a continué à produire un chiffre d’affaires après la cessation de leurs relations commerciales et qu’elle a généré des charges d’exploitation immobilière sans lien avec l’activité de vendeur de M. X. Elle conteste l’existence d’un contrat de travail en raison du caractère irrégulier des prestations de M. X qui intervenait selon ses disponibilités et qui ne recevait aucune consigne individuelle et n’était pas soumis à son pouvoir disciplinaire.

L’existence d’une relation de travail salariée ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité professionnelle. Il y a contrat de travail lorsqu’une personne s’engage à travailler pour le compte et sous la direction d’une autre moyennant une rémunération ce qui implique l’existence d’une prestation de travail, d’une rémunération et d’un lien de subordination qui en constitue le critère décisif.

Les dispositions de l’article L. 8221-6 du code du travail selon lesquelles les personnes physiques, dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation sur les registres ou répertoires que ce texte énumère, sont présumées ne pas être liées avec le donneur d’ordre par un contrat de travail, n’établissent qu’une présomption simple qui peut être renversée lorsque ces personnes fournissent des prestations dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard du donneur d’ordre.

Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; le travail au sein d’un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque l’employeur détermine unilatéralement les conditions d’exécution du travail.

En l’espèce, au soutien de ses demandes M. X produit les factures mensuelles émises par la société Dotse à l’enseigne 'au bonheur des hommes’ à destination de la société Solune du mois de décembre 2011 au mois d’août 2016, des plannings mensuels de janvier à décembre 2015 ainsi que des tableaux 2015 et 2016 intitulés situation flash TTC avec des statistiques par vendeur dont celles de M. Z X.

Il produit l’attestation de la gérante de la compagnie européenne de conseil aux entreprises datée du 3 novembre 2016 témoignant de ce que du 2 février 2011 au 31 août 2016 la société Dotse n’a facturé qu’un seul client la société Solune '(…) pour laquelle elle assurait une mission mensuelle réalisée par le gérant de la société Dotse, Monsieur Z X. (…)' et les documents financiers concernant les revenus de M X et ceux de la société Dotse qui démontrent que l’activité de cette dernière était uniquement constituée des prestations de M X.

Ces éléments démontrent la réalité, au sein des boutiques exploitées par la société Solune, de la présence régulière de M. X qui donnait lieu à facturation par la société dont il était le gérant.

Monsieur X produit encore :

— les courriers du 2 novembre 2009, du 28 novembre 2011, du 9 janvier 2012, du 2 juillet 2012 et du 7 août 2012 de la société Solune proposant à M. X sur plusieurs jours une mission portant sur la vente, le rangement, les relations avec le client et de manière générale l’optimisation et le développement des ventes du magasin avec comme horaires ceux du point de vente ;

— les attestations de Mme Y et de Mme D E, directrices de boutique, qui signent une attestation dactylographiée puis manuscrite aux termes de laquelle elles témoignent de ce que les horaires et les tâches qu’elles demandaient à M. X étaient similaires en tous points à ceux requis des employés sous contrat ainsi que les attestations rédigées dans le même sens par des employés soit Mme F G, Mme H I, Mme J K, Mme L M ;

— des échanges de mails portant sur l’envoi des plannings ou la prise d’une pause avec fermeture du magasin acceptée par la représentante de B C ou la date des soldes mentionnant M. X comme membre du personnel ;

— un courriel du 15 avril 2013 demandant à M. X de confirmer sa disponibilité pour des dates du mois de mai correspondant aux soldes ;

— des échanges de mails au sujet des conditions faites au personnel dont bénéficiait M X soit les réductions offertes sur les commandes, les primes exceptionnelles, la prise en charge des tickets restaurants, ainsi qu’un mail du 9 février 2015 au sujet de l’obligation de porter un costume avec chemise blanche et la prise en charge de l’achat de ces vêtements par la société.

Il ressort de ces documents que de façon très épisodique à compter de 2011 puis très régulièrement à compter de 2013, M. X a rempli des fonctions de vendeur en boutique identiques à celles occupées par les salariés de la société Solune et qu’il bénéficiait de certains de leurs avantages. Cependant, il ne démontre pas que des jours de travail lui étaient imposés alors qu’il est établi que ses jours de présence faisaient l’objet de propositions de la part de la société Solune. En outre, il ne rapporte pas la preuve de ce que la société Solune disposait d’un pouvoir de sanction à son encontre en ce que notamment, il ne démontre pas avoir été sanctionné pour avoir refusé ces propositions de travail.

En conséquence, si M. X démontre que ses conditions de travail relevaient d’un service organisé et qu’il était intégré administrativement au personnel salarié, il ne démontre pas avoir été contraint d’accepter des plannings de travail sous peine d’être sanctionné et dès lors qu’il ne justifie pas d’avoir perdu sa liberté de choisir son rythme de travail, il ne rapporte pas la preuve qui lui incombe du lien de subordination direct et permanent avec la société Solune qui lui permettrait de renverser la présomption de non salariat issue de l’application de l’article L. 8221-6 du code du travail. Il sera débouté de sa demande de reconnaissance d’un contrat de travail et la décision des premiers juges sera confirmée de ce chef.

Sur les demandes de condamnation

Sur le fondement du contrat de travail qu’il revendique, M. X soutient que la société Solune doit être condamnée au paiement d’indemnités de requalification et liées à la rupture du contrat de travail ainsi qu’à des dommages intérêts pour la perte de ses heures de formation et pour travail dissimulé.

A défaut de contrat de travail, la société Solune s’oppose à ces demandes.

L’existence d’un contrat de travail n’étant pas retenue, il convient de débouter M. X de ses demandes d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité compensatrice de préavis, d’indemnité de congés payés sur préavis, d’indemnité compensatrice de congés payés, d’indemnité légale de licenciement, d’indemnité de requalification, de dommages et intérêts pour la perte des heures de formation et de dommages et intérêts pour travail dissimulé.

La demande de remise de documents liés à la reconnaissance d’un contrat de travail est également sans fondement et M. X en sera débouté. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Partie perdante, M. X sera condamné au paiement des dépens exposés en cause d’appel. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a mis les dépens à sa charge. Il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel et la décision des premiers juges sera confirmée à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leur demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. Z X aux dépens d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
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